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Ariane Web: Conseil d'État 380433, lecture du 21 octobre 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:380433.20161021

Décision n° 380433
21 octobre 2016
Conseil d'État

N° 380433
ECLI:FR:CECHR:2016:380433.20161021
Publié au recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
M. François Monteagle, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats


Lecture du vendredi 21 octobre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La région Auvergne a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 22 novembre 2011 par laquelle le recteur de l'académie de Clermont-Ferrand a refusé de mettre fin au détachement sans limitation de durée de M.B..., de condamner l'Etat à lui rembourser les rémunérations perçues par ce dernier et à ce qu'il soit enjoint au recteur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de prononcer la fin du détachement de M.B....

Par un jugement n° 1200189 du 20 décembre 2012, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 13LY00481 du 18 mars 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la région Auvergne.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 mai et 19 août 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la région Auvergne demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'éducation ;
- la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 2005-1785 du 30 décembre 2005 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Monteagle, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la Région Auvergne ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...B..., agent de l'Etat, a été placé en position de détachement sans limitation de durée auprès de la région Auvergne, en application des articles109 et suivants de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, par un arrêté du 15 février 2008, pour occuper les fonctions d'ouvrier d'entretien et d'accueil au lycée Apollinaire de Clermont-Ferrand. M. B... ayant par la suite présenté une inaptitude physique aux fonctions de maintenance technique qui lui étaient confiées, lui-même et la région Auvergne ont demandé au recteur de l'académie de Clermont-Ferrand de mettre fin à son détachement, de le réintégrer et de le reclasser dans les services du rectorat. Par une décision du 22 novembre 2011, le recteur de l'académie de Clermont-Ferrand a refusé de mettre fin à ce détachement. La région Auvergne a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à l'annulation de ce refus et à ce que l'Etat lui verse une indemnité en remboursement des rémunérations versées à M. B...à la suite de ce refus. Cette demande a été rejetée par un jugement du 20 décembre 2012. L'appel de la région contre ce jugement a été rejeté par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 18 mars 2014, contre lequel la région se pourvoit en cassation.

2. En vertu des dispositions de l'article 3 du décret du 30 décembre 2005 relatif au détachement sans limitation de durée de fonctionnaires de l'Etat en application de l'article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, il peut être mis fin au détachement de fonctionnaires de l'Etat, détachés en application de l'article 109 de la loi du 13 août 2004, dans les conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article 24 du décret du 16 septembre 1985 pour les détachements de courte ou de longue durée, aux termes duquel : " Il peut être mis fin au détachement avant le terme fixé par l'arrêté le prononçant soit à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, soit de l'administration d'origine. / Lorsqu'il est mis fin au détachement à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, le fonctionnaire continue, si son administration d'origine ne peut le réintégrer immédiatement, à être rémunéré par l'administration ou l'organisme d'accueil jusqu'à ce qu'il soit réintégré, à la première vacance, dans son administration d'origine. / Le fonctionnaire peut également demander qu'il soit mis fin à son détachement avant le terme fixé par l'arrêté le prononçant. Il cesse d'être rémunéré si son administration ne peut le réintégrer immédiatement : il est alors placé en position de disponibilité jusqu'à ce qu'intervienne sa réintégration à l'une des trois premières vacances dans son grade ". Il résulte de ces dispositions que l'administration d'origine, en tant qu'autorité investie du pouvoir de nomination, est seule compétente pour mettre fin au détachement avant le terme fixé. Saisie d'une demande en ce sens du fonctionnaire intéressé ou de l'administration ou de l'organisme d'accueil, elle est tenue d'y faire droit. Si elle ne peut le réintégrer immédiatement, le fonctionnaire continue à être rémunéré par l'administration ou l'organisme d'accueil jusqu'à ce qu'il soit réintégré, à la première vacance, si la demande de fin de détachement émanait de cet administration ou organisme d'accueil ; il cesse d'être rémunéré et est placé en position de disponibilité jusqu'à ce qu'intervienne sa réintégration à l'une des trois premières vacances dans son grade, si la demande émanait de lui.

3. Pour rejeter la requête de la région Auvergne dont elle était saisie, la cour a jugé qu'elle n'était pas recevable, dès lors que la région avait le pouvoir de décider elle-même de mettre fin au détachement de M.B.... Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en retenant un tel motif, la cour a commis une erreur de droit. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé.

4. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à la région Auvergne Rhône Alpes de la somme de 3 000 euros.


D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 18 mars 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : L'Etat versera à la région Auvergne-Rhône Alpes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la région Auvergne-Rhône Alpes, à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à M. A... B....


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