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Ariane Web: Conseil d'État 394766, lecture du 9 décembre 2016, ECLI:FR:Code Inconnu:2016:394766.20161209

Décision n° 394766
9 décembre 2016
Conseil d'État

N° 394766
ECLI:FR:CECHR:2016:394766.20161209
Publié au recueil Lebon
5ème - 4ème chambres réunies
M. Marc Lambron, rapporteur
M. Nicolas Polge, rapporteur public


Lecture du vendredi 9 décembre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'enjoindre sous astreinte à l'Etat de lui attribuer un logement correspondant à ses besoins et capacités, en exécution d'une décision du 9 octobre 2014 de la commission de médiation du Val-de-Marne. Par un jugement n° 1504658 du 21 septembre 2015, le magistrat délégué par le président de ce tribunal a fait droit à cette demande et a, en outre, enjoint sous astreinte au préfet du Val-de-Marne, dans l'attente de l'attribution d'un logement, d'attribuer à M. B...et sa famille un hébergement dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un foyer-logement ou une résidence à vocation sociale.

Par un pourvoi, enregistré le 23 novembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, conseiller d'Etat.

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.


1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation : " I. - Dans chaque département, une ou plusieurs commissions de médiation sont créées auprès du représentant de l'Etat dans le département. Chaque commission est présidée par une personnalité qualifiée désignée par le représentant de l'Etat dans le département. (...)/ II. - La commission de médiation peut être saisie par toute personne qui, satisfaisant aux conditions règlementaires d'accès à un logement locatif social, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande de logement dans le délai fixé en application de l'article L. 441-1-4./ Elle peut être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur, de bonne foi, est dépourvu de logement, menacé d'expulsion sans relogement, hébergé ou logé temporairement dans un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, logé dans des locaux impropres à l'habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux. Elle peut également être saisie, sans condition de délai, lorsque le demandeur est logé dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent, s'il a au moins un enfant mineur, s'il présente un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles ou s'il a au moins une personne à charge présentant un tel handicap. (...)/ III. - La commission de médiation peut également être saisie, sans condition de délai, par toute personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande. La commission de médiation transmet au représentant de l'Etat dans le département la liste des demandeurs pour lesquels doit être prévu un tel accueil et précise, le cas échéant, les mesures de diagnostic ou d'accompagnement social nécessaires. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 441-2-3-1 du même code : " I. - Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence et qui n'a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement./ (...)/ Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d'urgence et que n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l'Etat et peut assortir son injonction d'une astreinte (...)./ II. - Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être accueilli dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale et qui n'a pas été accueilli, dans un délai fixé par décret, dans l'une de ces structures peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale./ (...)/ Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et que n'a pas été proposée au demandeur une place dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale ordonne l'accueil dans l'une de ces structures et peut assortir son injonction d'une astreinte. (...) " ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du IV de l'article L. 441-2-3 du même code : " Lorsque la commission de médiation est saisie d'une demande de logement dans les conditions prévues au II et qu'elle estime que le demandeur est prioritaire mais qu'une offre de logement n'est pas adaptée, elle transmet au représentant de l'Etat dans le département cette demande pour laquelle doit être proposé un accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale./ (...) " ; qu'aux termes du III de l'article L. 441-2-3-1 : " Lorsque la juridiction administrative est saisie d'un recours dans les conditions prévues au I, elle peut ordonner l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale " ;

3. Considérant que les dispositions citées au point 2 permettent à la commission de médiation et au juge administratif, saisis d'une demande de logement, de prévoir une mesure d'hébergement s'ils estiment qu'elle est mieux adaptée à la situation de l'intéressé ; qu'indépendamment de cette possibilité, il est loisible au juge, lorsqu'il ordonne que le demandeur soit logé ou relogé, d'ordonner également que, dans l'attente de l'attribution d'un logement, il soit pourvu à son accueil temporaire dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale ; qu'une telle mesure temporaire peut être décidée en raison de la situation particulièrement précaire du demandeur de logement, notamment lorsque celui-ci n'est pas hébergé ou réside dans un logement dont les caractéristiques justifient la saisine de la commission de médiation sans délai, en application du deuxième alinéa du II de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation cité ci-dessus ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir constaté que M.B..., dont la demande de logement reconnue comme prioritaire par la commission de médiation devait être satisfaite d'urgence, ne s'était pas vu offrir un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui attribuer un tel logement avant le 31 octobre 2015 sous astreinte de 500 euros par mois de retard à compter de cette date ; que ce magistrat a également, par le même jugement, enjoint au préfet d'accueillir M. B... et sa famille, dans l'attente de l'attribution du logement, dans une des structures d'hébergement mentionnées au III de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation cité ci-dessus, au motif, non contesté par le ministre en cassation, que l'intéressé, son épouse et leur enfant en bas âge étaient dans une situation particulièrement précaire ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en statuant ainsi, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit au regard des dispositions précitées de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité et à M. A...B....



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