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Ariane Web: Conseil d'État 420298, lecture du 24 juillet 2019, ECLI:FR:CECHS:2019:420298.20190724

Décision n° 420298
24 juillet 2019
Conseil d'État

N° 420298
ECLI:FR:CECHS:2019:420298.20190724
Inédit au recueil Lebon
10ème chambre
Mme Christelle Thomas, rapporteur
Mme Anne Iljic, rapporteur public
SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats


Lecture du mercredi 24 juillet 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 24 août 2017 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile, et a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugiée ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une ordonnance n° 17049606 du 29 décembre 2017, la présidente de la cour nationale du droit d'asile a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mai et 31 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Anne Iljic, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B...A...;



Considérant ce qui suit :

1. Mme A...se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 29 décembre 2017 par laquelle la présidente de la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 24 août 2017 par laquelle l'OFPRA a rejeté sa demande d'asile au motif qu'elle présentait un caractère tardif.

2. Aux termes de l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La Cour nationale du droit d'asile statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (...). A peine d'irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office (...) ".

3. Il ressort des pièces de la procédure que le pli recommandé contenant la décision de l'OFPRA, dont, contrairement à ce que soutient la requérante, une copie figurait au dossier versé au débat contradictoire, a été présenté au foyer d'accueil tenu par l'association pour l'Accompagnement, le Mieux-être et le Logement des Isolés (AMLI), sis au 12 rue des écoles à Florange (Moselle), dernière adresse indiquée par l'intéressée, avant d'être retourné à l'OFPRA avec la mention " présenté/avisé " à la date du 9 septembre 2017 et la case " avisé et non réclamé ", correspondant au motif de non distribution, cochée. Alors que la requérante faisait valoir devant la cour qu'elle n'avait jamais reçu la notification de ce pli en alléguant que l'avis de passage de La Poste avait été remis à une personne homonyme, l'auteur de l'ordonnance attaquée a jugé qu'une telle circonstance n'était pas de nature à proroger le délai de recours pour en déduire, sans rechercher s'il résultait de l'instruction que tel était le cas, que son recours était tardif. En statuant de la sorte alors que la remise de l'avis de passage à un tiers n'ayant pas qualité pour ce faire fait obstacle au déclenchement du délai de recours, l'auteur de l'ordonnance attaquée a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, Mme A...est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

5. Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il s'ensuit que son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen et Thiriez renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros à verser à cette SCP à ce titre.



D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 29 décembre 2017 de la présidente de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : L'OFPRA versera à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de MmeA..., une somme de 3 000 euros au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.