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Ariane Web: Conseil d'État 463612, lecture du 15 septembre 2022, ECLI:FR:CECHR:2022:463612.20220915

Décision n° 463612
15 septembre 2022
Conseil d'État

N° 463612
ECLI:FR:CECHR:2022:463612.20220915
Mentionné aux tables du recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
Mme Juliette MONGIN, rapporteur
M. Nicolas Agnoux, rapporteur public


Lecture du jeudi 15 septembre 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par un jugement n° 2000461 du 28 avril 2022, enregistré le 29 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, avant de statuer sur la demande de M. G... F..., Mme V... F..., M. C... N..., Mme G... S... épouse N..., M. L... D..., M. A... I..., la SARL L.B.E. et la SARL Johanito Laurent transports tendant à l'annulation de la décision du 28 septembre 2018 par laquelle le préfet de l'Aube a délivré à la SARL Launoy ETA la preuve du dépôt de sa déclaration en vue de l'exploitation d'une unité de méthanisation et d'une installation de combustion sur le territoire de la commune de Lusigny-sur-Barse a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante :

La preuve de dépôt d'une déclaration d'une installation classée pour la protection de l'environnement, prévue à l'article R. 512-48 du code de l'environnement, est-elle une décision susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge administratif, au sens des articles L. 514-6 et L. 512-8 du même code '


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2015-1614 du 9 décembre 2015 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Juliette Mongin, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

REND L'AVIS SUIVANT :

1. Aux termes de l'article L. 512-8 du code de l'environnement : " Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet en vue d'assurer dans le département la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1. / La déclaration inclut les installations, ouvrages, travaux et activités relevant du II de l'article L. 214-3 projetés par le pétitionnaire que leur connexité rend nécessaires à l'installation classée ou dont la proximité est de nature à en modifier notablement les dangers ou inconvénients. La déclaration vaut application des dispositions des articles L. 214-3 à L. 214-6. ". L'article L. 514-6 du même code, prévoit pour sa part que les décisions prises, notamment, en application de l'article L. 512-8 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction et qu'un décret en Conseil d'Etat précise les délais dans lesquels les décisions mentionnées au premier alinéa de cet article peuvent être déférées à la juridiction administrative.

2. Dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2015 modifiant et simplifiant le régime des installations classées pour la protection de l'environnement et relatif à la prévention des risques, le I. de l'article R. 512-47 du code de l'environnement disposait que : " La déclaration relative à une installation doit être adressée, avant la mise en service de l'installation, au préfet du département dans lequel celle-ci doit être implantée. ", et l'article R. 512-48 du même code disposait que : " Si le préfet estime que l'installation projetée n'est pas comprise dans la nomenclature des installations classées ou relève du régime de l'autorisation ou de l'enregistrement, il en avise l'intéressé. / Lorsqu'il estime que la déclaration est en la forme irrégulière ou incomplète, le préfet invite le déclarant à régulariser ou à compléter sa déclaration " et l'article R. 512-49 du même code disposait que : " Le préfet donne récépissé de la déclaration et communique au déclarant une copie des prescriptions générales applicables à l'installation. / Le maire de la commune où l'installation doit être exploitée et, à Paris, le commissaire de police reçoit une copie de cette déclaration et le texte des prescriptions générales. Une copie du récépissé est affichée pendant une durée minimum d'un mois à la mairie et à Paris, au commissariat de police, avec mention de la possibilité pour les tiers de consulter sur place le texte des prescriptions générales. Procès-verbal de l'accomplissement de cette formalité est dressé par les soins du maire et, à Paris, par ceux du commissaire de police. / A la demande de l'exploitant, certaines dispositions peuvent être exclues de cette publicité lorsqu'il pourrait en résulter la divulgation de secrets de fabrication. " Il résultait de ces dispositions, d'une part, que la déclaration ne pouvait être regardée comme effective qu'après l'accomplissement de ces formalités et, d'autre part, qu'il appartenait au préfet de délivrer le récépissé de la déclaration faite auprès de lui, dès lors que le dossier de déclaration était régulier et complet et que l'installation pour laquelle était déposée la déclaration relevait bien de ce régime.

3. Le décret du 9 décembre 2015 précité a, par son article 1er, modifié le I. de l'article R.512-47 du code de l'environnement qui dispose désormais que : " La déclaration relative à une installation est adressée, avant la mise en service de l'installation, au préfet du département dans lequel celle-ci doit être implantée. ", et, par son article 2, modifié l'article R. 512-48 du même code qui disposait, dans sa rédaction applicable au litige soumis au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et dont les termes sont repris au premier alinéa de l'actuel article R. 512-48, que : " Il est délivré immédiatement par voie électronique une preuve de dépôt de la déclaration ". Le même décret du 9 décembre 2015 a, par son article 3, modifié l'article R. 512-49 du même code qui dispose désormais que : " Le site internet mis à disposition du déclarant donne accès aux prescriptions générales applicables à l'installation, prises en application de l'article L. 512-10 et, le cas échéant, en application de l'article L. 512-9. Le déclarant reconnaît, avant de solliciter la délivrance de la preuve de dépôt, avoir pris connaissance de l'ensemble des prescriptions générales applicables à son installation. / La preuve de dépôt est mise à disposition sur le site internet de la ou des préfectures où est projetée l'installation, pour une durée minimale de trois ans. Le maire de la commune où l'installation doit être exploitée et, à Paris, le commissaire de police en reçoit une copie. "

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions, en premier lieu, que la délivrance par voie électronique de la preuve de dépôt de la déclaration relative à une installation, se substitue à la délivrance du récépissé de déclaration prévue par la réglementation antérieure, en deuxième lieu, que cette déclaration conditionne toujours la mise en service par le déclarant de l'installation classée projetée et, en troisième lieu, que le préfet est tenu de délivrer la preuve de dépôt dès lors que le dossier de déclaration est régulier et complet et que l'installation pour laquelle est déposée la déclaration relève bien de ce régime. Il suit de là que les nouvelles dispositions, issues du décret du 9 décembre 2015 qui accompagnent la dématérialisation de la procédure de déclaration des installations classées pour la protection de l'environnement, ne modifient ni la nature ni la portée de la déclaration d'une installation classée soumise à ce régime, de sorte que la preuve de dépôt d'une déclaration d'une installation classée pour la protection de l'environnement prévue à l'article R. 512-48 du code de l'environnement est constitutive d'une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours de pleine juridiction devant les juridictions administratives par application des articles L. 512-8 et L. 514-6 du code de l'environnement.

Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, à M. G... F..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à la SARL Launoy ETA et au ministre de la transition écologique.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.

Délibéré à l'issue de la séance du 5 septembre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, conseillers d'Etat, Mme Airelle Niepce, maître des requêtes et Mme Juliette Mongin, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 15 septembre 2022


Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz


La maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure :
Signé : Mme Juliette Mongin


La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain




Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :





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