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  Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Récupération sur legs
 

Dossier no 187142

Département de la Haute-Garonne
Séance du 21 janvier 2000

Lecture du 4 février 2000

    Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 avril et 9 juillet 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par le département de la Haute-Garonne, représenté par le président du conseil général en exercice, autorisé par délibération du 4 juin 1997 ; le département de la Haute-Garonne demande au Conseil d’Etat d’annuler la décision du 12 septembre 1996 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a, d’une part, annulé la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Garonne du 29 novembre 1994 et la décision de la commission d’aide sociale de Castanet-Tolosan du 14 février 1994 autorisant le département à récupérer la somme de 81 558,35 F sur le montant du legs consenti le 27 octobre 1978 par Mme Sanchez à son frère, aux droits de qui se trouve son fils, Gabriel Sanchez et, d’autre part, rejeté l’action en récupération du département ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le décret no 54-611 du 11 juin 1954 ;
    Vu le décret no 61-495 du 15 mai 1961 modifié par le décret no 83-875 du 28 septembre 1983 ;
    Vu l’ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
    Après avoir entendu en audience publique :
    -  le rapport de M. Lafouge, conseiller d’Etat ;
    -  les observations de la SCP Vincent, Ohl, avocat du conseil général de la Haute-Garonne,
    -  les conclusions de Mme Boissard, commissaire du Gouvernement ;
    Sur la régularité de la décision de la commission centrale d’aide sociale :
    Considérant qu’aux termes de l’article 129 du code de la famille et de l’aide sociale, dans sa rédaction issue de l’article 53 de la loi du 6 janvier 1986 : « Des commissaires du Gouvernement, chargés de prononcer leurs conclusions sur les affaires que le président de la commission centrale, d’une section ou d’une sous-section, leur confie, sont nommés... » ; qu’il résulte de ces dispositions que le président, les présidents de section ou de sous-section de la commission centrale d’aide sociale peuvent décider de ne pas confier une affaire au commissaire du Gouvernement ; qu’ainsi, la circonstance qu’un commissaire du Gouvernement n’a pas conclu sur l’affaire soumise par M. Sanchez à la commission centrale d’aide sociale n’a pas entaché d’irrégularité la procédure suivie par cette commission ;
    Sur le bien-fondé de la décision :
    Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la commission d’admission à l’aide sociale de Castanet-Tolosan a autorisé le 14 février 1994 le département de la Haute-Garonne à récupérer la somme de 81 558,35 F, correspondant aux prestations d’aide sociale à domicile versées à Mme Rosa Carmona entre le 1er avril 1979 et le 31 mars 1985 sur les biens transmis, à la suite du décès de cette dernière le 11 décembre 1989, à son frère, M. Sébastien Sanchez ;
    Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale relatif à la récupération des allocations d’aide sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date du décès de Mme Carmona, des recours peuvent être exercés par le département dans les hypothèses suivantes : « a) Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; b) Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande ; c) Contre le légataire » ;
    Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa du même article « le recouvrement sur la succession du bénéficiaire de l’aide sociale à domicile ou de la prise en charge du forfait journalier s’exerce sur la partie de l’actif net successoral défini par les règles de droit commun, qui excède un seuil fixé par décret en Conseil d’Etat » ; qu’en application des dispositions de l’article 4-1 du décret no 61-495 du 15 mai 1961 modifié par le décret du 28 septembre 1983, le seuil ainsi prévu était égal, à la date du décès de Mme Carmona, à la somme de 250 000,00 F ;
    Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires qui ont précédé l’intervention de la loi du 13 juillet 1982 relative aux prestations de vieillesse, d’invalidité et de veuvage, dont l’article 29 est à l’origine de l’introduction du seuil d’exonération visant certaines catégories de prestations d’aide sociale, qu’en cas de recours en récupération contre la « succession » d’un défunt, il n’y a pas lieu de distinguer entre la situation des héritiers institués par la loi et celle des légataires universels ou à titre universel venant aux droits du défunt en vertu du testament de ce dernier dès lors que ces personnes bénéficient des mêmes droits et sont sujettes aux mêmes charges ; que, par suite, les dispositions du c) de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale doivent s’entendre comme visant uniquement la situation du légataire à titre particulier qui, à la différence du légataire universel ou à titre universel, n’est pas normalement tenu des dettes de la succession ;
    Considérant que, par suite, qu’en estimant que les dispositions précitées du deuxième alinéa de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale s’appliquaient aux biens transmis par Mme Carmona à son frère M. Sanchez en vertu d’un testament de la première instituant le second son légataire universel, la commission centrale d’aide sociale, qui a implicitement écarté l’application des dispositions du c) de l’article 146, n’a pas commis d’erreur de droit ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le département de la Haute-Garonne n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 12 septembre 1996 ;

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du département de la Haute-Garonne est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera notifiée au département de la Haute-Garonne, à M. Sébastien Sanchez et au ministre de l’emploi et de la solidarité.