Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Degré de dépendance
 

Dossier no 990738

Mme G...
Séance du 28 février 2000

Décision lue en séance publique le 2 mars 2000

    Vu le recours formé par Mme Alice G..., le 3 février 1999, tendant à l’annulation d’une décision du 17 décembre 1998 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Eure a rejeté son recours en annulation d’une décision du 16 avril 1998 du président du conseil général de l’Eure portant rejet de sa demande de prestation spécifique dépendance à domicile, au motif d’un classement dans le groupe iso-ressources 4 déterminé par le médecin expert qui a évalué son état de dépendance ;
    La requérante fait valoir qu’elle n’a pas reçu copie du rapport d’expertise et que les termes techniques du motif de rejet ne lui permettent pas de comprendre les raisons de la non-prise en charge de son état de dépendance ; elle soutient que, âgée de soixante-dix-huit ans et de forte corpulence (1,50 mètre pour 128 kg), elle est dans l’incapacité d’effectuer seule les gestes et actes essentiels de la vie courante, se mouvoir, se baisser, se coucher, se relever, se laver, préparer ses repas ; du fait de son impotence, elle se déplace péniblement avec des cannes anglaises du lit à la chaise de cuisine ; des soins infirmiers constants lui sont nécessaires pour des ulcères et des escarres ; elle dépense environ 3 400 F par mois pour cinquante-six heures d’aide ménagère ; sa fille, accidentée du travail le 22 décembre 1998, ne peut plus compléter cette aide au quotidien et pour les courses alimentaires à dix kilomètres, en plus de ses responsabilités familiales et professionnelles ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les observations du président du conseil général de l’Eure ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le décret no 97-60 du 24 janvier 1997 ;
    Vu les décrets nos 97-426 et 97-427 du 28 avril 1997 ;
    Vu l’arrêté du 28 avril 1997 fixant le guide de l’évaluation de la personne âgée dépendance ;
    Vu la lettre du 19 novembre 1999 invitant Mme Alice G... à présenter ses observations orales devant la juridiction ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 28 février 2000 M. Boyer, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 2, alinéa 3, de la loi susvisée du 24 janvier 1997 « La dépendance... est définie comme l’état de la personne qui, nonobstant les soins qu’elle est susceptible de recevoir, a besoin d’être aidée pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou requiert une surveillance particulière » ;
    Considérant que l’article 2 du décret no 97-426 du 28 avril 1997 prévoit : « La grille nationale à l’aide de laquelle est évalué l’état de dépendance comporte des critères permettant à l’équipe médico-sociale de classer les demandeurs en six groupes en fonction de l’importance des aides directes à la personne nécessitées par leur état »  ; que l’article 3 du même décret prévoit : « Les personnes classées dans l’un des groupes 1 à 3 bénéficient de la prestation spécifique dépendance sous réserve de remplir les autres conditions prévues... » ;
    Considérant que la décision critiquée en date du 17 décembre 1998 est irrégulière en la forme, en l’absence de mention de la composition de la commission départementale d’aide sociale qui a statué ; qu’elle fait uniquement référence au classement dans le groupe iso-ressources 4 déterminé par expertise, sans aucune analyse des incapacités de Mme Alice G... ; qu’une telle motivation est insuffisante et ne permet pas au juge d’exercer son contrôle sur les éléments du litige relatif à l’appréciation du degré de dépendance de Mme Alice G... ; que dès lors il y a lieu d’annuler la décision du 17 décembre 1998 de la commission départementale d’aide sociale de l’Eure ;
    Considérant qu’il convient d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que l’expertise médicale prévue par l’article 11 de la loi du 24 janvier 1997 a été réalisée par le docteur Gilles V... le 20 novembre 1998 ; que l’expert signale particulièrement l’impotence de Mme G... rendant « impossible d’effectuer les transferts de la position couchée à debout et inversement, sans aide » ; que le tableau des variables discriminantes de la grille nationale d’évaluation de la dépendance fait apparaître un classement informatisé en GIR. 4 établi sur la base de deux cotations en incapacité C (transferts et déplacement à l’extérieur), quatre cotations en aide partielle B (toilette, habillage, déplacements à l’intérieur et communication à distance) et quatre cotations en capacité A (cohérence, orientation, alimentation et élimination) ;
    Considérant que l’arrêté du 28 avril 1997 fixant le guide de l’évaluation de la personne âgée dépendante précise les caractéristiques de la classification logique des profils de perte d’autonomie en six groupes iso-ressources (GIR) ; que les définitions afférentes aux GIR. 3 et 4 classent les personnes âgées comme suit :
    GIR. 3 : celles « ayant conservé leurs fonctions intellectuelles, partiellement leur capacité à se déplacer mais qui nécessitent plusieurs fois par jour des aides pour leur autonomie corporelle. De plus, la majorité d’entre elles n’assurent pas seules l’hygiène de l’élimination tant anale qu’urinaire » ;
    GIR. 4 : comprenant « essentiellement deux groupes de personnes : (d’une part) celles qui n’assument pas seules leur transfert mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement. Elles doivent parfois être aidées pour la toilette et l’habillage. La grande majorité d’entre elles s’alimente seule ; (d’autre part) celles qui n’ont pas de problèmes pour se déplacer mais qu’il faut aider pour les activités corporelles ainsi que pour les repas » ;
    Considérant que nonobstant l’effet mécanique de l’application du logiciel prévu à l’article 6 du décret no 97-427 du 28 avril 1997, sur la base des formules algorithmiques décrites en annexe II de ce décret, il y a lieu de tenir compte, dans le cas de l’espèce, des données littérales du rapport de l’expert mentionnant l’incapacité totale de Mme Alice G... d’assurer ses transferts en raison de son impotence ; qu’il en résulte incontestablement une incapacité au titre de l’hygiène de l’élimination urinaire et de l’élimination anale, notamment de nuit, peu important la cotation générale de capacité totale A retenue pour cette fonction dans la grille d’évaluation conduisant au classement informatisé GIR. 4 ; qu’au demeurant, l’état de dépendance de l’intéressée présente suffisamment les caractéristiques du classement en GIR. 3 telles que décrites par l’arrêté du 28 avril 1997 susvisé ; que dans ces conditions il convient d’annuler la décision de rejet du 16 avril 1998 de M. le président du conseil général de l’Eure et de renvoyer Mme Alice G... devant ce dernier pour valorisation d’un plan d’aide au titre d’un classement dans le groupe iso-ressources 3 et pour le calcul du montant de la prestation spécifique dépendance d’après les conditions de ressources ;

Décide

    Art. 1er. - La décision du 17 décembre 1998 de la commission départementale d’aide sociale de l’Eure est annulée, ensemble la décision de rejet du 16 avril 1998 de M. le président du conseil général de l’Eure.
    Art. 2. - Mme Alice G... est renvoyée devant M. le président du conseil général de l’Eure pour valorisation d’un plan d’aide au titre d’un classement dans le groupe iso-ressources 3 et pour le calcul du montant de la prestation spécifique dépendance d’après les conditions de ressources.
    Art. 3. - La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 février 2000 où siégeaient M. président, M. Vieu, assesseur, et M. Boyer, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 2 mars 2000.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer