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  Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Récupération sur legs
 

Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier no 208264

Département de l’Hérault
Séance du 30 mars 2000

Décision lue en séance publique le 5 mai 2000

    Vu la requête, enregistrée le 26 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le département de l’Hérault, représenté par le président du conseil général habilité par une délibération du 14 juin 1999 de la commission permanente ; le département de l’Hérault demande au Conseil d’Etat d’annuler la décision en date du 18 septembre 1998 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a rejeté sa requête dirigée contre la décision du 18 février 1997 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Héraultrault a annulé la décision de récupérer sur les héritiers de Mme Madeleine Maubon, les sommes avancées par le département au titre de l’aide ménagère dont Mme Maubon avait bénéficié ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale, notamment son article 146 ;
    Vu le décret no 61-495 du 15 mai 1961, modifié par le décret no 83-875 du 28 septembre 1983 ;
    Vu l’ordonnance no 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret no 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
    Après avoir entendu en audience publique :
    - le rapport de M. de La Menardière, maître des requêtes,
    - les conclusions de Mme Boissard, commissaire du Gouvernement ;
    Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la commission d’admission à l’aide sociale du canton de Lunel a autorisé le 18 septembre 1996 le département de l’Hérault à récupérer la somme de 119 987,04 F correspondant aux prestations d’aide sociale à domicile versées à Mme Madeleine Maubon entre le 5 octobre 1981 et le 12 janvier 1995, date de son décès, sur les biens transmis par cette dernière à ses quatre petits-enfants ;
    Considérant que, aux termes du premier alinéa de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale relatif à la récupération des allocations d’aide sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date du décès de Mme Maubon, des recours peuvent être exercés par le département dans les hypothèses suivantes : « a) Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; b) Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande ; c) Contre le légataire » ;
    Considérant que, aux termes du deuxième alinéa du même article : « Le recouvrement contre la succession du bénéficiaire de l’aide sociale ou de la prise en charge du forfait journalier s’exerce sur la partie de l’actif net successoral défini par les règles de droit commun qui excède un seuil fixé par décret en Conseil d’Etat » ; qu’en application des dispositions de l’article 4-1 du décret no 61-495 du 15 mai 1961 modifié par le décret du 28 septembre 1983, le seuil ainsi prévu était égal, à la date du décès de Mme Maubon, à la somme de 250 000,00 F ;
    Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 1982 relative aux prestations de vieillesse, d’invalidité et de veuvage, dont l’article 29 est à l’origine de l’introduction du seuil d’exonération visant certaines catégories de prestations d’aide sociale, qu’en cas de recours en récupération contre la « succession » d’un défunt, il n’y a pas lieu de distinguer entre la situation des héritiers institués par la loi et celle des légataires universels ou à titre universels venant aux droits du défunt en vertu du testament de ce dernier dès lors que ces personnes bénéficient des mêmes droits et sont sujettes aux mêmes charges ; que, par suite, les dispositions du c de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale doivent s’entendre comme visant uniquement la situation du légataire à titre particulier qui, à la différence du légataire universel ou à titre universel, n’est pas normalement tenu des dettes de la succession ;
    Considérant que, pour juger que les dispositions précitées du deuxième alinéa de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale s’appliquaient aux biens transmis par Mme Maubon à ses quatre petits enfants, en vertu des dispositions de son testament instituant ses légataires à titre universel, la commission centrale d’aide sociale s’est fondée sur la circonstance que les intéressés avaient, en leur qualité de membres de sa famille, vocation à bénéficier de sa succession ; que cette motivation est entachée d’erreur de droit ;
    Considérant toutefois qu’il résulte de l’interprétation rappelée ci-dessus de l’article L. 146 du code de la famille et de l’aide sociale que les biens transmis aux petits enfants de Mme Maubon, en leur qualité de légataires à titre universel, entraient dans le champ d’application des dispositions précitées du deuxième alinéa de cet article ; qu’il y a lieu de substituer ce motif, qui n’implique aucune appréciation de fait, au motif, juridiquement erroné, retenu par la commission centrale d’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le département de l’Hérault n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 18 septembre 1998,

Décide

    Art. 1er. - La requête du département de l’Hérault est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera notifiée au département de l’Hérault, aux consorts Maubon et au ministre de l’emploi et de la solidarité.