texte23


  Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3213
 
  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Calcul des ressources
 

Dossier no 991015

Mme E...
Séance du 5 mai 2000

Décision lue en séance publique le 20 septembre 2000

    Vu le recours formé par Mme Claudine E..., le 13 mars 1999, tendant :
    1o  A l’annulation d’une décision du 11 février 1999 de la commission départementale d’aide sociale des Yvelines, qui a rejeté sa demande tendant à l’annulation d’une décision du 18 juin 1998 par laquelle le sous-préfet de Rambouillet a refusé de lui accorder le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion ;
    2o  A ce que le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion lui soit accordé à compter de septembre 1997 ;
    3o  A ce que l’Etat soit condamné à lui verser une somme de 100 000,00 F à titre de dommages-intérêts ;
    La requérante soutient que la commission départementale d’aide sociale s’est abstenue de se prononcer sur le caractère infondé des motifs invoqués dans la notification de la caisse d’allocations familiales l’informant du rejet de sa demande de revenu minimum d’insertion ; que le motif retenu par le sous-préfet pour refuser l’octroi de l’allocation, tiré de ce que l’intéressée refuse sa retraite sans avoir jamais déposé de requête devant le tribunal administratif, est entâché d’inexactitude matérielle puisqu’une procédure a été engagée devant le tribunal administratif de Versailles pour obtenir l’annulation de sa mise à la retraite anticipée ; que les préjudices moraux, financiers et physiques qu’elle a subis justifient l’octroi de la somme demandée à titre de dommages-intérêts ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 27 mars 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ; elle demande en outre que l’Etat soit condamné à lui verser une somme de 50 000,00 F à titre de dommages-intérêts pour le préjudice causé par son placement sous sauvegarde de justice ;
    Elle soutient qu’elle a refusé sa pension d’invalidité parce que sa mise à la retraite lui causait un préjudice moral, en l’absence d’invalidité psychiatrique, et financier, correspondant à la perte de treize années d’ancienneté ; que ce préjudice moral est accru par son placement sous sauvegarde juridique à la demande de l’assistante sociale et par l’ordonnance, assortie de l’exécution provisoire, rendue le 27 mai 1999 par le juge des tutelles du tribunal d’instance de Rambouillet, qui mandate Mme L... H... pour percevoir la pension dont l’intéressée se trouve titulaire ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 2 octobre 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ; elle demande en outre l’annulation de la décision du 21 août 1997 par laquelle le préfet lui demande de rembourser une somme de 29 559,00 F au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion perçue entre juillet 1996 et août 1997 ;
    Elle soutient qu’elle n’a jamais perçu une pension invalidité sur la période concernée ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 15 octobre 1999 par Mme  E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 27 octobre 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Vu le mémoire en défense, présenté le 8 novembre 1999 par le sous-préfet de Rambouillet, qui conclut au rejet du recours ;
    Il soutient que la présente instance concerne uniquement le refus opposé par lui à la demande de revenu minimum d’insertion présentée par Mme E... le 20 mai 1998 ; que Mme E... a été radiée des cadres et admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 8 février 1996 ; qu’elle est titulaire d’un titre de pension invalidité enregistré depuis le 8 février 1996 au grand livre de la dette publique, sous le no B 960384562, qui rémunère 27 ans 3 mois et un jour de services ; que cette pension, calculée à raison de 55 % des émoluments afférents à l’indice brut 611, s’élève à 7 600,00 F par mois, mais n’a jamais été mise en paiement car Mme E... n’a pas répondu aux différents rappels de demande de pièces nécessaires émanant de la trésorerie générale de la Seine-Maritime ; que, si Mme E... affirme contester sa mise à la retraite anticipée, elle n’a jamais engagé d’action en ce sens devant le tribunal administratif ; qu’ainsi sa pension est un droit auquel elle peut prétendre, qu’elle refuse alors que son montant est nettement supérieur à l’allocation de revenu minimum d’insertion ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 15 novembre 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Elle soutient en outre que le tribunal administratif de Versailles, par un jugement du 4 novembre 1999, a annulé la décision du 14 mars 1996 du directeur de la poste des Yvelines prononçant sa mise à la retraite d’office pour invalidité ;
    Vu le mémoire en réplique, présenté le 29 décembre 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Elle soutient en outre que le sous-préfet de Rambouillet était informé depuis le 25 juillet 1996 de ce qu’elle contestait sa mise à la retraite anticipée ; que le tribunal de grande instance de Versailles a, par un jugement du 16 décembre 1999, annulé l’ordonnance du 27 mai 1999 désignant Mme L... H... en qualité de mandataire spécial ;
    Vu le nouveau mémoire, présenté le 29 décembre 1999 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, présenté le 13 janvier 2000 par le sous-préfet de Rambouillet, qui conclut au rejet du recours ;
    Il soutient que, lorsqu’il a refusé d’ouvrir à Mme E... le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion, le 20 mai 1998, la décision du 14 mars 1996 du directeur de la poste des Yvelines prononçant l’admission à la retraite de l’intéressée pour invalidité n’avait pas encore fait l’objet d’une annulation par le tribunal administratif de Versailles ; que le refus de lui accorder le revenu minimum d’insertion, alors qu’elle était titulaire d’une pension, était par conséquent justifié ; qu’il n’a été informé que le 20 décembre 1999 du recours formé par Mme E... devant le tribunal administratif contre sa mise à la retraite d’office ; que le jugement du 20 décembre 1999 place Mme  E... en situation d’activité par rapport à l’administration de La Poste, qui doit la rémunérer ou l’indemniser ; que, dès lors, le refus d’attribuer le revenu minimum d’insertion à l’intéressée est toujours fondé ;
    Vu le nouveau mémoire en réplique, présenté le 22 février 2000 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Elle soutient en outre que l’annulation de sa mise à la retraite d’office n’a eu aucune incidence sur l’absence totale de revenus dont elle a été victime sur la période litigieuse ; que le sous-préfet connaissait l’existence d’un recours devant le tribunal administratif avant de prendre sa décision du 18 juin 1998 refusant l’octroi de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que le jugement du 4 novembre 1999 du tribunal administratif de Versailles n’a toujours pas été exécuté ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, présenté le 8 mars 2000 par le sous-préfet de Rambouillet, qui conclut au rejet du recours ;
    Il soutient avoir été informé de la contestation par Mme E... de sa mise à la retraite d’office, mais relève que cette décision n’avait été ni rapportée par son auteur, ni annulée par le tribunal administratif de Versailles à la date à laquelle il a refusé à l’intéressée le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que la différence entre le motif retenu dans sa décision du 18 juin 1998 et celui qui apparaît dans la notification qui en a été faite par la caisse d’allocations familiales tient au caractère limitatif des motifs portés sur le formulaire type de notification ;
    Vu le nouveau mémoire en réplique, présenté le 14 mars 2000 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Elle soutient en outre qu’elle était tenue de refuser sa pension dès lors qu’elle contestait sa mise à la retraite d’office ;
    Vu le nouveau mémoire en réplique, présenté le 17 avril 2000 par Mme E..., qui reprend ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 et les décrets subséquents ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 5 mai 2000 M. Olleon, rapporteur, les observations développées oralement par Mme E... et après en avoir délibéré hors présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme E..., inspecteur de la Poste, a été mise à la retraite d’office à compter du 8 février 1996 par une décision du 14 mars 1996 du directeur de La Poste des Yvelines ; qu’elle s’est vu reconnaître, suite à cette décision, un droit à pension invalidité enregistré au grand livre de la dette publique, calculé à raison de 55 % des émoluments afférents à l’indice brut 611 ; que cette pension, qui s’élève à 7 600,00 F par mois, n’a jamais été versée, car Mme E..., qui avait contesté sa mise à la retraite d’office devant le tribunal administratif de Versailles, n’a pas répondu aux différents rappels de demande de pièces nécessaires à la mise en paiement émanant de la trésorerie générale de la Seine-Maritime ; que Mme E... a sollicité et obtenu le versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion à compter du 1er juillet 1996 ; que, par une décision du 21 août 1997, le sous-préfet de Rambouillet a interrompu le versement de l’allocation et demandé le remboursement des sommes perçues depuis juillet 1996 au motif que Mme E... est titulaire depuis février 1996 d’une pension invalidité d’un montant supérieur à celui de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que l’intéressée a à nouveau sollicité le bénéfice de l’allocation le 20 mai 1998 ; que cette demande a été rejetée par une décision du 18 juin 1998 par le sous-préfet de Rambouillet, pour les mêmes motifs que ceux invoqués dans la décision susmentionnée du 21 août 1997 ;
    Sur la régularité de la décision attaquée :
    Considérant que, par sa décision du 11 février 1999, la commission départementale d’aide sociale des Yvelines a omis de statuer sur les conclusions de Mme E... tendant à l’annulation de la décision du 21 août 1997 par laquelle le sous-préfet de Rambouillet a interrompu le versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion et demandé à l’intéressée de rembourser les sommes, d’un montant total de 29 559,00 F, perçues au titre de cette allocation entre juillet 1996 et août 1997 ; que cette décision doit, par suite, être annulée ;
    Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’évoquer l’affaire et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par Madame E... devant la commission départementale d’aide sociale des Yvelines ;
    Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions des 21 août 1997 et 18 juin 1998 du sous-préfet de Rambouillet :
    Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 susvisée : « Toute personne résidant en France dont les ressources n’atteignent pas le montant du revenu minimum (...), qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités, définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle a droit, dans les conditions prévues par la présente loi, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article 3 du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article 1er » ;
    Considérant que Mme E..., qui contestait, comme il a été dit ci-dessus, sa mise à la retraite d’office, a refusé à cette fin de percevoir la pension invalidité enregistrée à son bénéfice dans le grand livre de la dette publique ; que, par un jugement du 4 novembre 1999, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 14 mars 1996 du directeur de La Poste des Yvelines prononçant la mise à la retraite d’office de Mme E... à compter du 8 février 1996 ; que ce jugement a privé de base légale la pension invalidité enregistrée dans le grand livre de la dette publique au bénéfice de Mme E..., qui doit donc désormais être regardée comme un agent statuairement en position d’activité n’ayant perçu aucun traitement depuis le 8 février 1996 ; que, compte tenu de son absence de ressources, Mme E... avait droit au versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion à compter du premier jour du mois de dépôt de sa demande, en juillet 1996 ; que, dès lors, Mme E... est fondée à soutenir que c’est à tort que, par sa décision du 21 août 1997, le sous-préfet de Rambouillet a interrompu le versement de l’allocation de revenu miminimum d’insertion et lui a demandé de rembourser les sommes, d’un montant total de 29 559,00 F, perçues à ce titre entre juillet 1996 et août 1997 ; que la requérante est également fondée à soutenir, par voie de conséquence, que c’est à tort que, par sa décision du 18 juin 1998, le sous-préfet a refusé de reconnaître ses droits au versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion ;
    Sur les conclusions tendant à la condamnation de l’Etat au versement à Mme E... de diverses sommes à titre de dommages-intérêts :
    Considérant qu’il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale de se prononcer sur des conclusions tendant à la condamnation de l’Etat au paiement de dommages-intérêts ; que ces conclusions ne peuvent, dès lors, qu’être rejetées ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 11 février 1999 de la commission départementale d’aide sociale des Yvelines est annulée.
    Art. 2.  -  Les décisions du 21 août 1997 et du 18 juin 1998 du sous-préfet de Rambouillet sont annulées.
    Art. 3.  -  Les conclusions présentées par Mme E... tant devant la commission centrale d’aide sociale que devant la commission départementale d’aide sociale des Yvelines, tendant à la condamnation de l’Etat au versement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts, sont rejetées.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique à l’issue de la séance publique du 5 mai 2000, où siégeaient Mme Hackett, président, M. Vieu, assesseur, et M. Olleon, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 20 septembre 2000.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer