Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RÉPÉTITION DE L’INDU  
 

Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Répétition de l’indu - Délai de récupération
 

Dossier no 982606

Mme P...
Séance du 20 janvier 2001

Décision lue en séance publique le 5 février 2001

    Vu la requête en date du 8 septembre 1998 de Mme Henriette P... tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde du 19 juin 1998 rejetant sa demande d’annulation d’une décision du 5 novembre 1993 du payeur départemental de la Gironde rejetant sa demande tendant à être déchargée de l’obligation de payer la somme de 74 718,45 F mise à sa charge en vertu d’un titre exécutoire émis le 19 mars 1993 à son encontre par le président du conseil général de la Gironde, par les moyens qu’une prescription ayant joué en sa faveur, il n’est plus possible de lui demander une restitution quelconque ; qu’elle n’a pas été informée de la date de la réunion de la commission départementale d’aide sociale afin de pouvoir en personne ou par avocat y formuler ses observations ;
    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 12 octobre 1998 le mémoire du président du conseil général de la Gironde tendant au rejet de la requête par les moyens qu’il y a cumul d’avantages analogues ; que l’action en remboursement intentée par le président du conseil général est conditionnelle et ne peut exister que si le paiement par le département est indu ; que l’indu est né de l’attribution, par arrêt de la cour d’appel de Bordeaux, de la majoration tierce personne avec effet rétroactif ; que le département n’avait aucun moyen d’avoir connaissance de l’action de Mme Henriette P... devant la cour ; qu’en tout état de cause, le fait générateur de la créance départementale a été constitué par la décision de la cour d’appel de Bordeaux du 20 janvier 1993 ; que la rétroactivité du droit à la majoration pour tierce personne a engendré le caractère indu du versement de l’allocation compensatrice ; que le montant litigieux n’est pas contesté ; que l’aide sociale a un caractère subsidiaire ; que le délai de prescription pour une action en recouvrement ne peut courir qu’à compter du jour où la condition entraînant l’indu est connue ;
    Vu le mémoire en réplique en date du 27 octobre 2000 présenté pour Mme Henriette P... par maître Franceline P..., avocat, persistant dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et les moyens qu’elle ne s’est pas rendue coupable de fraude et encore moins de fausse déclaration ; qu’elle a toujours informé les instances concernées, dès lors qu’elle bénéficiait de droits acquis ; que vouloir déplacer le point de départ de la prescription au 2 février 1993, date à laquelle la cour d’appel de Bordeaux a statué, n’est pas juridiquement justifié ; que le département disposait des moyens pour connaître la procédure pendante devant la cour d’appel ;
    Vu les décisions attaquées ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code civil ;
    Vu l’article 39 de la loi no 75-534 du 30 juin 1975 ;
    Vu le décret no 77-1549 du 31 décembre 1977 et notamment son article 16 ;
    Vu le décret no 90-1124 du 17 décembre 1990 ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 25 janvier 2001 Mlle Erdmann, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il ne ressort d’aucune pièce du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale que la commission départementale d’aide sociale de la Gironde ait convoqué la requérante à l’audience du 19 juin 1998 ou l’ait mise à même de demander à y être convoquée ; qu’ainsi les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 134-9 du code de l’action sociale et des familles ont été méconnues ; qu’il y a lieu d’annuler les décisions attaquées et d’évoquer la demande ;
    Considérant qu’aux termes du I de l’article 39 de la loi du 30 juin 1975 « une allocation compensatrice est accordée à tout handicapé (...) qui ne bénéficie pas d’un avantage analogue au titre d’un régime de sécurité sociale » ; qu’à ceux du III du même article, « l’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable à l’action intentée par le président du conseil général sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration » ; que ces dernières dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce que le point de départ de l’action en répétition de la collectivité d’aide sociale soit non la date du fait générateur de l’allocation ou du versement de ses arrérages, mais celle à laquelle elle a connu les faits justifiant qu’elle l’exerce, si elle était dans l’impossibilité d’en avoir connaissance antérieurement ;
    Considérant que Mme Henriette P... perçoit depuis le 1er mars 1981 l’allocation compensatrice ; que par décision du 30 juin 1989, la caisse régionale d’assurance maladie d’Aquitaine a révisé la pension de vieillesse de la requérante en attribuant à compter du 1er mai 1989 la majoration de tierce personne, avantage analogue à l’allocation compensatrice ; qu’informé déjà non par Mme Henriette P... mais par la caisse, au vu du dossier, le président du conseil général a révisé l’allocation compensatrice et répété l’indu à compter du 1er mai 1989 ; que toutefois, Mme Henriette P... avait contesté la décision de la caisse en faisant valoir que l’octroi de la majoration devait prendre effet au 1er février 1986 et subsidiairement au 6 octobre 1986 ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale a rejeté sa demande mais que la cour d’appel de Bordeaux y a fait droit, par arrêt du 20 janvier 1993 devenu définitif, à compter du 6 octobre 1986 ; que la caisse régionale d’assurance maladie l’ayant informé à nouveau et non Mme Henriette P..., le président du conseil général de la Gironde a émis le 19 mars 1993 un titre exécutoire dont le payeur a poursuivi le recouvrement en dernier lieu par la décision du 1er novembre 1993 attaquée devant la tribunal administratif de Bordeaux, puis sur renvoi par ordonnances du président du tribunal et du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat devant la commission départementale d’aide sociale de la Gironde ;
    Considérant que la décision de la caisse régionale d’assurance maladie d’Aquitaine du 30 juin 1989 puis l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 20 janvier 1993 ont décidé rétroactivement du paiement d’arrérages de la majoration de la pension de vieillesse à compter du 1er mai 1989 puis du 6 octobre 1986 ; que le président du conseil général de la Gironde était alors dans l’impossibilité de réclamer le paiement d’indus perçus par Mme Henriette P... à compter du 1er octobre 1986 avant d’avoir connaissance de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux et qu’il a dressé, dans le délai de répétition partant de la connaissance ainsi acquise qui constituait dans les circonstances susprécisées le point de départ de l’action en répétition, le titre exécutoire dont procède la décision attaquée du payeur également intervenue dans ledit délai ; que par suite, Mme Henriette P... n’est pas fondée à soutenir que l’action du département était prescrite à la date où le président du conseil général de la Gironde a dressé un titre exécutoire pour le paiement des arrérages indus et d’ailleurs à celle où le payeur a poursuivi le recouvrement, et à demander pour ces motifs l’annulation de la décision attaquée du payeur départemental de la Gironde ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde du 19 juin 1998 est annulée.
    Art. 2.  -  La demande de Mme Henriette P... devant le tribunal administratif de Bordeaux transmise à la commission départementale d’aide sociale de la Gironde est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 25 janvier 2001 où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, et Mlle Erdmann, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 février 2001.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer