Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier no 207754

M. Z.
Séance du 6 juin 2001
Lecture du 27 juin 2001
    Vu la requête, enregistrée le 9 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. W. Z., demeurant ... Sault-lès-Réthel (08300) ; M. Z. demande au Conseil d’Etat d’annuler la décision en date du 23 novembre 1998 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a rejeté sa demande d’annulation de la décision du 21 janvier 1997 de la commission départementale d’aide sociale des Ardennes rejetant sa demande dirigée contre de la décision du préfet du 17 mai 1995 supprimant son droit à l’allocation de revenu minimum d’insertion et lui notifiant l’obligation de rembourser un indu de 38 556,00 F ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 ;
    Vu la loi no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
    Vu le code de la justice administrative ;
    Après avoir entendu en audience publique :
    -  le rapport de M. Lafouge, conseiller d’Etat,
    -  les conclusions de Mlle Fombeur, commissaire du Gouvernement ;
    Sur les conclusions de M. Z. tendant à l’annulation de la décision du 23 novembre 1998 de la commission centrale d’aide sociale :
    Considérant que M. Z. se pourvoit en cassation contre la décision du 23 novembre 1998 par laquelle la commission centrale d’aide sociale a rejeté sa demande d’annulation de la décision du 21 janvier 1997 de la commission départementale d’aide sociale des Ardennes rejetant sa demande dirigée contre une décision du préfet des Ardennes du 17 mai 1995 supprimant son droit au bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion et lui demandant le remboursement d’un indu de 38 556,00 F au titre de la période allant du 1er juillet 1994 au 31 mai 1995 ;
    Considérant que la commission centrale d’aide sociale a statué sur le bien-fondé de la décision préfectorale du 17 mai 1995 sans avoir répondu au moyen de M. Z. tiré de ce que la commission départementale d’aide sociale s’était illégalement abstenue de le convoquer et l’avait ainsi privé de la possibilité d’être entendu ; que M. Z. est, dès lors, fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d’omission de statuer et en demander pour ce motif l’annulation ;
    Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l’affaire au fond ;
    Considérant qu’aux termes du dernier alinéa de l’article 128 du code de la famille et de l’aide sociale alors en vigueur : « Le demandeur, accompagné de la personne ou de l’organisme de son choix, est entendu lorsqu’il le souhaite » ; que cette disposition impose aux commissions départementales d’aide sociale l’obligation de mettre les intéressés à même d’exercer la faculté qui leur est ainsi reconnue ; qu’à cet effet, les commissions doivent soit avertir le requérant de la date de la séance à laquelle son recours sera examiné, soit l’inviter à l’avance à leur faire connaître s’il a l’intention de présenter des explications verbales pour qu’en cas de réponse affirmative de sa part, elles l’avertissent ultérieurement de la date de la séance ;
    Considérant que si la commission départementale d’aide sociale des Ardennes a invité M. Z. à lui faire connaître s’il avait l’intention de présenter des observations verbales, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’elle l’ait averti du jour de la séance alors pourtant que M. Z. avait fait connaître son intention d’être entendu par la commission ; que M. Z. est, dès lors, fondé à soutenir que la commission départementale d’aide sociale des Ardennes a statué à la suite d’une procédure irrégulière et à demander, pour ce motif, l’annulation de sa décision en date du 21 janvier 1997 ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Z. devant la commission départementale d’aide sociale des Ardennes ;
    Considérant que l’article 12 du décret du 12 décembre 1988 relatif à la détermination du revenu minimum d’insertion et à l’allocation de revenu minimum d’insertion et modifiant le code de la sécurité sociale prévoit que le préfet prend en compte, pour déterminer le droit d’une personne au bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion, les ressources qui ont été effectivement perçues au cours des trois derniers mois civils précédant la demande ; que, toutefois, l’article 21-1 du même décret dispose que : « Lorsqu’il est constaté qu’un allocataire ou un membre de son foyer exerce une activité non ou partiellement rémunérée, le préfet peut, après avis de la commission locale d’insertion, tenir compte des rémunérations, revenus ou avantages auxquels l’intéressé serait en mesure de prétendre du fait de cette activité » ; que la saisine de la commission locale d’insertion a pour but d’éclairer le préfet sur l’intérêt, au regard de l’objectif d’insertion, que revêt pour la personne qui demande le bénéfice de l’allocaion la poursuite de l’activité non ou partiellement rémunée qu’elle déclare à l’occasion de sa demande ; que le préfet n’est cependant pas tenu de saisir la commission locale d’insertion lorsqu’il doit reconstituer a posteriori les ressources auxquelles aurait pu prétendre un allocataire qui a sciemment omis, dans sa demande d’allocation, de déclarer qu’il exerçait une activité non ou partiellement rémunérée ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que, dans sa demande d’attribution de l’allocation, M. Z. a déclaré à la caisse d’allocations familiales que son épouse était mère au foyer alors qu’elle était gérante minoritaire d’un magasin de location de vidéo-cassettes et l’est restée tout au long de la période allant de mars 1994 mai 1995 pendant laquelle le couple a perçu l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que les conditions d’exploitation de ce magasin auraient permis à Mme Z. de prétendre à une rémunération au mois égale à l’allocation de revenu minimum d’insertion pour un couple, ainsi d’ailleurs que le prouve le fait que son époux a finalement été embauché par la SARL en mai 1995 à un salaire de 3 698,00 F par mois ; que, par suite, le préfet a pu légalement prendre en compte, sur le fondement de l’article 21-1 précité du décret du 12 décembre 1988, les ressources auxquelles Mme Z. aurait pu prétendre du fait de son activité dans la SARL et, par voie de conséquence, décider de supprimer le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion à M. et Mme Z. à compter du 1er juillet 1994 et leur réclamer le remboursement d’un indu de 38 556,00 F ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Z. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision du préfet des Ardennes du 17 mai 1995 ;
    Sur les conclusions de M. Z. tendant à ce que l’Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 60 000,00 F au titre du préjudice subi :
    Considérant que ces conclusions, nouvelles en cassation, sont, en tout état de cause, irrecevables ;
    Sur les conclusions à fin d’injonction et d’astreinte :
    Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. Z. dirigées contre la décision du préfet des Ardennes du 17 mai 1995, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées doivent être rejetées ;
    Sur les conclusions relatives au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
    Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. Z. la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 23 novembre 1998 de la commission centrale d’aide sociale et la décision du 21 janvier 1997 de la commission départementale d’aide sociale des Ardennes sont annulées.
    Art. 2.  -  La demande de M. Z. devant la commission départementale d’aide sociale des Ardennes ainsi que le surplus de ses conclusions devant le Conseil d’Etat sont rejetées.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée à M. W. Z. et au ministre de l’emploi et de la solidarité.