Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3510
 
  COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE (CMU)  
 

Mots clés : Couverture maladie universelle (CMU). -  Personnes âgées. -  Placement en établissement. -  Ressources
 

Dossier no 002034

M. F...
Séance du
Décision lue en séance publique le 20 septembre 2001
    Conclusions du commissaire du gouvernement dossier no 002034
    Le requérant fait appel devant votre commission de la décision de la commission départementale d’aide sociale rejetant son recours contre le refus de la caisse d’assurance maladie de lui accorder la protection complémentaire en matière de santé. Le motif de ce rejet est que le montant des ressources du requérant dépasse le plafond déterminé par décret.
    Le requérant est hébergé en établissement pour personnes âgées au titre de l’aide sociale. Aux termes de l’article L. 132-3 du Code de l’action sociale et des familles, ancien article 142 du Code de la famille et de l’aide sociale, les ressources de quelque nature qu’elles soient, à l’exception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de l’aide sociale aux personnes âgées ou de l’aide sociale aux personnes handicapées sont affectées au remboursement de leurs frais d’hébergement et d’entretien dans la limite de 90 %. Les mêmes règles s’appliquent en matière de placement familial au titre de l’aide sociale.
    La question se pose de savoir si, pour la détermination des ressources des personnes hébergées ou accueillies comme il vient d’être dit, demandant le bénéfice de la protection complémentaire en matière de santé, il y a lieu de prendre en compte l’ensemble des ressources dont ces personnes sont titulaires ou la seule partie de ces ressources non affectées à leurs frais d’hébergement et d’entretien.
    Pris pour l’application de l’article L. 132-3, l’article 2 du décret no 54-883 du 2 septembre 1954 précise que les personnes admises dans des établissements hospitaliers au titre de l’aide aux personnes âgées et de l’aide aux personnes handicapées sont tenues de déposer, préalablement à leur entrée, leurs titres de pension et de rente entre les mains du comptable de l’établissement et de donner à celui-ci tous pouvoirs nécessaires à l’encaissement, en leur lieu et place, des dits revenus sous réserve de la restitution par ledit comptable de la portion non affectée au remboursement des frais d’hospitalisation.
    Parallèlement à cette procédure de l’article 2 du décret de 1954 qui concerne principalement les établissements publics de santé comportant des unités de soins de longue durée, une autre procédure a été mise en place par la loi no 86-17 du 6 janvier 1986. S’appliquant dans les établissements publics non sanitaires d’hébergement et dans ceux de statut privé, cette procédure est décrite par l’article L. 132-4 (ancien article 142-1). Elle confère au président du conseil général le pouvoir d’autoriser ou de refuser la perception des revenus de la personne hébergée au titre de l’aide sociale, par le comptable ou le responsable de l’établissement. La demande intervient soit à la demande de la personne concernée, soit de l’établissement lorsque la personne concernée ne s’est pas acquittée de sa contribution pendant trois mois au moins.
    Les articles 2-1 à 2-6 du décret du 2 septembre 1954 mettent en application les dispositions de l’article L. 132-4. Les modalités de mise en œuvre de la perception des ressources par le comptable ou le responsable de l’établissement sont globalement les mêmes que celles de l’article 2 du même décret. Le comptable restitue à la personne concernée la part de ses ressources non affectée à ses frais d’hébergement et d’entretien.
    Que les ressources de la personne âgée soient soumises au dispositif de l’article 2 du décret de 1954, qu’elle verse elle-même sa participation ou qu’elle relève de la procédure des articles 2-1 à 2-6 du décret de 1954, cette part disponible, en général de 10 %, doit être au moins égale à un minimum de ressources, appelé jadis « argent de poche ». Fixé par l’article 5 du décret no 54-1128 du 15 novembre 1954, ce minimum de ressources varie selon que le placement comporte ou non, en plus de l’hébergement, l’entretien de la personne considérée. Si l’entretien est assuré, ce qui est en général le cas dans les maisons de retraite, ce minimum de ressources est fixé mensuellement à 1 % du montant annuel des prestations de vieillesse, soit de l’ordre de 430,00 F. Si l’entretien n’est pas assuré, ce qui est souvent le cas des logements foyers, le minimum de ressources est fixé par le président du conseil général, lors de la tarification annuelle des prestations fournies par l’établissement, sans pouvoir être inférieur au montant des prestations minimales de vieillesse.
    Pour les personnes dont l’entretien n’est pas assuré par l’établissement et qui, de ce fait, disposent d’un minimum de ressources égal au moins au montant des prestations minimales de vieillesse, la question de la combinaison de ces dispositions avec celles applicables à la détermination des ressources prises en compte pour l’admission à la protection complémentaire ne se pose pas, sauf cas particulier. Elle se pose, en revanche, pour les autres personnes concernées, celles qui disposent, soit de 10 % de leurs ressources, soit au moins de la somme minimale définie ci-dessus. Pour ces personnes, la notion de « ressources effectivement perçues » dégagées par l’article R. 861-8 du Code de la sécurité sociale ne correspond pas au montant théorique de leurs pensions ou autres ressources, mais à une somme de l’ordre de 430,00 F par mois.
    Il en va de même, au demeurant, de la plupart des personnes handicapées placées au titre de l’aide sociale aux personnes handicapées ainsi que des personnes âgées ou des personnes handicapées hébergées, en qualité de pensionnaire payant, en établissement social. Ces dernières personnes perçoivent des revenus supérieures le plus souvent au plafond de ressources fixé pour l’admission à la protection complémentaire de santé. Mais, en pratique, une fois qu’elles se sont acquittées de leurs frais de séjour, il ne leur reste qu’une somme largement inférieure à ce plafond et plus souvent voisine de 5 000,00 F que de 42 000,00 F.
    Avant la disparition de l’aide médicale départementale, consécutive à la création d’une couverture maladie universelle, lorsque les personnes concernées avaient besoin de soins, elles étaient admises, eu égard à l’insuffisance de leurs ressources disponibles, à l’aide médicale. Dès lors, à un titre ou à un autre, cette situation est aujourd’hui celle de plusieurs centaines de milliers de personnes. Il n’apparaît pas possible, pour éviter de créer des discriminations entre des personnes se trouvant finalement dans la même situation, de rechercher des solutions spécifiques à la détermination de leurs ressources en vue de l’attribution de la protection complémentaire de santé, selon les dispositifs applicables à l’affectation des ressources de ces personnes à leurs frais d’hébergement.
    Certes, pour les personnes hébergées au titre de l’aide sociale, il est possible de trouver aujourd’hui un palliatif à ces difficultés d’accès à la protection complémentaires au titre de la couverture maladie universelle. Les commissions d’admission à l’aide sociale peuvent en effet ne faire porter l’affectation des ressources des intéressés à leurs frais d’hébergement et d’entretien, qu’au delà d’une somme permettant à ceux-ci de souscrire une assurance complémentaire. Mais le litige porté devant votre commission centrale ne porte pas sur la compétence des commissions d’aide sociale mais sur le droit à la protection complémentaire de santé instauré par la couverture maladie universelle des personnes âgées hébergées en établissement ou accueillies en placement familial.
    En ce domaine, il faut admettre que le requérant n’a effectivement perçu, selon les termes mêmes de l’article R. 861-8 du code de la sécurité sociale, que de l’ordre de 6 000,00 F de ressources au cours de la période des douze mois précédant sa demande de protection complémentaire. Sa demande ne peut donc être rejetée au motif que le montant de ses ressources dépasse le plafond déterminé par décret.
    Je conclu en conséquence à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale et à l’admission du requérant à la protection complémentaire en matière de santé.

L. Dessaint