Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Aide ménagère - Recours en récupération
 

Dossier no 000272

Mme C...
Séance du 25 janvier 2002

Décision lue en séance publique le 21 février 2002

    Vu enregistré le 14 avril 1997 par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Val-d’Oise, le recours introduit par Me G..., conseil de Mme Emilie Françoise S... et dirigé contre la décision rendue le 24 octobre 1996 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Val-d’Oise a confirmé celle prise, le 6 février 1996, par la commission d’admission à l’aide sociale d’Ecouen d’exercer un recours sur la donation d’une somme de 225 000,00 F que lui a consentie, le 24 avril 1989, Mme Marguerite C..., sa mère, bénéficiaire d’une prise en charge par l’aide sociale de frais d’aide ménagère et de l’allocation compensatrice, respectivement du 1er octobre 1985 au 30 septembre 1989 et du 1er septembre 1989 au 16 septembre 1992, date de son décès, pour un montant total de 157 007,08 F, et ce par les moyens que :
    1o Le délai d’exercice de l’action en récupération de l’aide prévue à l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale serait de trois ans et non de trente ans ;
    2o « L’âge et les revenus de Mme Jean S... née Françoise Emile C... ne permett[raient] nullement de faire face à une telle demande » ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense produit par le président du conseil général du département du Val-d’Oise tendant au rejet des conclusions du recours susvisé au motif que « la récupération sur le fondement de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale est une action qui en vertu de l’article 2262 du code civil, se prescrit par trente ans » ;
    Vu et enregistré le 21 janvier 2002, le mémoire présenté pour Mme S... par Me J..., avocat, persistant dans les conclusions de la requête et tendant en outre subsidiairement à dire que Mme S... a subi un préjudice anormal au titre de l’article 1276 du code civil, plus subsidiairement modérer la créance, par les mêmes moyens et les moyens que la demande d’aide sociale n’était pas signée par Mme C... et par Mme C... qui pourvoyait à ses soins et à son entretien moyennant la mise à disposition de la maison, la perception de la pension de Mme C... et un complément financier apporté par la requérante ; que Mme S... a assuré de façon effective et constante la charge de sa mère en renonçant à vendre la maison au prix du marché ; que le conseil général a attendu sept ans pour intenter un recours et que sa bonne foi prête à interrogation, alors que les aides ont été accordées, à la suite d’erreurs grossières d’organismes allocataires qui doivent en subir les conséquences ; que son revenu imposable pour 2000 se monte à 70 207,00 F soit 10 072,00 Euro ; qu’il appartient à Mme Sable de solliciter des délais de paiement auprès du payeur départemental ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu la lettre en date du 14 mars 2000 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 25 janvier 2002, M. Goussot, rapporteur, les observations de Me J..., représentant Mme S... et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur les conclusions principales ;
    Sur le délai de prescription ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale : « Des recours sont exercés par le département (...) : b) Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande » ; que l’action dont s’agit peut intervenir dès le lendemain de la date de cessation du versement de l’aide consentie par la collectivité débitrice de l’aide sociale ; que pour apprécier le délai pendant lequel elle peut s’exercer, il y a lieu de la distinguer de l’action tendant à la poursuite du recouvrement de la créance impayée par le comptable du département ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 2262 du code civil : « Toutes les actions, tant réelles que personnelles sont prescrites par trente ans (...) » ; que les recours mentionnés à l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale sont au nombre de celles-ci, à défaut de mentions contraires dans les articles 2265 et suivants du code civil relatifs aux prescriptions plus courtes ; qu’ainsi, le président du conseil général, en sa qualité d’ordonnateur du département dispose d’un délai de trente ans pour établir l’état exécutoire sur le fondement duquel intervient la mise en recouvrement de sa créance sur le donataire d’un bénéficiaire de l’aide sociale ;
    Considérant que seule l’action du comptable du département tendant à la poursuite du recouvrement des sommes mises à la charge du donataire par le président du conseil général se prescrit par quatre ans à compter du premier jour de l’exercice suivant celui au cours duquel le titre de recettes a été émis, conformément aux dispositions combinées du deuxième alinéa de l’article R. 3342-23 du code général des collectivités territoriales et de l’article L. 274 du livre de procédures fiscales ;
    Considérant qu’en l’espèce Mme C... a fait donation à sa fille, Mme Emilie Françoise S..., d’une somme de 225 000,00 F postérieurement à son admission à l’aide sociale ; qu’en application de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, Mme S... a été débitrice du département du Val-d’Oise, en sa qualité de donataire, d’une somme de 157,007,08 F représentative des prestations d’aide ménagère prise en charge par la collectivité publique et de l’allocation compensatrice allouée à sa mère du 1er octobre 1986 au 16 septembre 1992, date du décès de la bénéficiaire ;
    Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, que la commission d’admission à l’aide sociale d’Ecouen s’est prononcée le 6 février 1996 et que le président du conseil général du Val-d’Oise a mis en recouvrement la créance du département le 11 avril 1996 ; que le délai prévu à l’article 2262 du code civil n’était donc pas expiré ; que la prétendue absence de « bonne foi » du département n’est en tout état de cause pas établie ;
    Considérant que ce moyen ne pouvait donc être que rejeté ;
    Sur les moyens du mémoire en réplique ;
    Considérant que la circonstance d’ailleurs non établie que les prestations avancées auraient été versées sans accord de l’assistée sur l’intervention de « l’auxiliaire de vie » qui aurait contrefait sa signature est inopérante dans la présente instance dès lors que les prestations ont bien été versées et que, d’ailleurs, il n’est pas contesté que l’assistée ne bénéficiait de services ménagers et requérait l’aide d’une tierce personne, dont faisait office « l’auxiliaire de vie » ; qu’il appartient à Mme S..., si elle s’y croit fondé, de se retourner contre la personne à laquelle elle impute sur le mode d’ailleurs de la simple allégation une fausse demande ;
    Considérant que s’agissant d’une récupération sur donation le moyen tiré de ce que la requérante aurait assumé la charge effective et constante de sa mère est également inopérant ;
    Considérant qu’il est également inopérant et en tous cas non fondé que le moyen tiré de la prétendue erreur dans la perception des prestations ; qu’en tout état de cause, il n’appartient pas au juge de l’aide sociale de statuer sur les responsabilités de l’administration, sa situation étant à cet égard différente de celle du juge de la sécurité sociale statuant en cas de répétition de l’indu, qui n’est au demeurant en rien celui de l’espèce ; qu’en effet, pour faire reste des droits, la vente de la maison par Mme S... n’autorisait nullement et à fortiori, n’imposait à la collectivité d’aide sociale d’interrompre le versement des prestations ; qu’ainsi, non seulement, l’administration n’a pas, en ce qui concerne le versement poursuivi des prestations commis une « erreur grossière », mais n’a commis aucune erreur, étant fondée, par la suite, à exercer l’action en récupération sur donataire dans le cadre de la prescription trentenaire ;
    Sur les conclusions plus subsidiaires aux fins de remise ou de modération ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que la requérante a un revenu brut fiscal, avant toute déduction d’environ 94 600,00 F ; qu’elle perçoit des revenus, certes modiques, des capitaux mobiliers ; qu’elle ne fournit aucun élément sur sa situation patrimoniale ; qu’elle n’a pas de personne à charge ; que compte tenu même du montant de la donation et de celui des prestations avancées, il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce à remise ou modération de la créance d’aide sociale ;

Décide

    Art.  1er.  -  La requête de Mme S... est rejetée.
    Art.  2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi et de la solidarité à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 25 janvier 2002 où siégeaient M. Levy, président, Mme Jegu, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 21 février 2002.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer