Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2100
 
  CONDITIONS D’ADMISSION À L’AIDE SOCIALE  
 

Mots clés : Admission à l’aide sociale  -  Personnes âgées  -  Placement
 

Dossier no 991792

Monsieur B...
Séance du 11 juin 2003

Décision lue en séance publique le 20 juin 2003

    Vu le recours formé 1) le 8 juin 1999 par le président du conseil général de l’Oise tendant à l’annulation de la décision en date du 22 février 1999 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Oise a admis M. René B... à l’aide sociale pour son placement à la maison de retraite de Luzarches (Val-d’Oise) ;
    2)  le 7 juin 1999 par le directeur de la maison de retraite de Luzarches contre la même décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Oise ; suivi d’un mémoire en réplique présenté le 28 mai 2003 par Maître Christian B..., avocat au Barreau du Val d’Oise ;
    Le président du conseil général soutient que la décision attaquée encourt l’annulation pour des irrégularités de forme aussi bien que sur le fond, elle ne contient aucune indication sur la composition de la commission départementale ni sur le respect de la règle du quorum ; elle n’indique pas qu’il y a eu une audition du rapporteur et du commissaire du Gouvernement ; que les parties ont été convoquées et ont pu présenter des observations, que l’audience a eu un caractère public ; que la décision ne comporte pas de visas analysant les moyens de la requête, mais à titre principal que la décision de la commission départementale n’est pas motivée ; sur le fond que c’est à tort que la commission départementale, écartant une délibération du conseil général de l’Oise et trahissant l’esprit de l’article 165 alinéa 2 du code de la famille et de l’aide sociale, a retenu comme base de calcul le prix de journée fixé par le département d’accueil et non le prix de journée moyen en maison de retraite médicalisée de l’Oise ;
    Le directeur de la maison de retraite de Luzarches expose que la date d’admission à l’aide sociale de M. B... doit être le 21 janvier 1998 et non le 30 mai 1998 comme l’a décidé par erreur la Commission départementale ; dans son mémoire en réplique il soutient que les différentes irrégularités de forme ne sont pas établies ; que sur le fond la décision de la commission départementale d’aide sociale respecte les principes généraux du droit ainsi que les dispositions législatives et réglementaires applicables en l’espèce à l’exception de celles concernant la date de prise en charge de l’intéressé par l’aide sociale ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la loi no 90-600 du 6 juillet 1990 modifiant le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 4 octobre 1999 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 11 juin 2003, M. Zwingelstein, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de légalité externe soulevés par le président du conseil général de l’Oise, considérant que la commission départementale d’aide sociale n’a pas motivé sa décision ; que dès lors sa décision du 22 février 1999 doit être annulée ;
    Considérant que saisi par l’effet dévolutif de l’appel, il y a lieu de statuer au fond ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. René B... a demandé à bénéficier de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge des frais de son hébergement à la maison de retraite de Luzarches (Val-d’Oise) à compter du 21 janvier 1998 ; que par une décision du 24 septembre 1998 la commission cantonale d’admission à l’aide sociale de Méru l’a admis au bénéfice de cette aide sous la réserve du prélèvement légal de toute nature, sur la base du prix de journée moyen en maison de retraite publique, soit 231,00 F (35,22 Euro) par jour ; que la maison de retraite de Luzarches, a demandé la réformation de cette décision en tant qu’elle retenait un prix de journée inférieur à celui en vigueur dans l’établissement d’accueil ; que l’admission à l’aide sociale devait intervenir à compter du 21 janvier 1998 ; que le président du conseil général de l’Oise interjette appel de la décision du 22 février 1999 par laquelle la commission départementale d’aide sociale a fait droit à cette demande ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 157 du code de la famille et de l’aide sociale : « Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier, soit d’une aide à domicile soit d’un placement chez des particuliers ou dans un établissement (...) ; » qu’aux termes du premier alinéa de l’article 164 du même code : « Toute personne âgée qui ne peut être utilement aidée à domicile peut être placée, si elle y consent (...), soit chez des particuliers, soit dans un établissement hospitalier ou une maison de retraite publics ou, à défaut, dans un établissement privé » ; qu’en vertu du deuxième alinéa de ce même article, le prix de journée pratiqué dans les établissements publics ou privés habilités par convention à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale est fixé selon la réglementation en vigueur dans les établissements hospitaliers ; qu’enfin l’article 165 dudit code, issu de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1990 susvisée et repris à l’article L. 231-5 du code de l’action sociale et des familles, dispose : « Le service d’aide sociale aux personnes âgées peut participer aux frais de séjour d’une personne âgée dans un établissement d’hébergement avec lequel il n’a pas été passé de convention lorsque l’intéressé y a séjourné à titre payant pendant une durée de cinq ans et lorsque ses ressources ne lui permettent plus d’assurer son entretien. Le service d’aide sociale ne peut pas, dans cette hypothèse, assumer une charge supérieure à celle qu’aurait occasionnée le placement de la personne âgée dans un établissement public délivrant des prestations analogues, selon les modalités définies par le règlement départemental d’aide sociale » ;
    Considérant qu’il résulte de la combinaison des dispositions précitées que toute personne âgée a droit à la prise en charge par l’aide sociale des frais de son hébergement dans un établissement hospitalier ou une maison de retraite publics, dès lors qu’elle est privée de ressources suffisantes ; que si, lorsque cette personne est hébergée dans un établissement privé, sa prise en charge par l’aide sociale est subordonnée à l’existence d’une convention habilitant ledit établissement à recevoir des bénéficiaires de cette aide, les dispositions de l’article 165 précité ont pour objet de permettre, sous certaines conditions, l’extension de cette prise en charge à l’hébergement de la personne âgée dans un établissement privé avec lequel aucune convention d’habilitation n’a été conclue ; que, contrairement à ce que soutient le président du conseil général de l’Oise, ces dispositions n’ont ni pour objet, ni pour effet de fixer les conditions de prise en charge des frais d’hébergement par une collectivité débitrice de l’aide sociale différente de celle sur le territoire de laquelle est implanté l’établissement d’accueil ; que dans cette dernière hypothèse, les conditions de prise en charge au titre de l’aide sociale par quelque département que ce soit sont réunies, dès lors que la convention visée à l’article 164 précité a été passée avec le département d’implantation de l’établissement ;
    Considérant qu’il est constant que la maison de retraite de Luzarches, située dans le département du Val d’Oise, est un établissement public habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, pour demander l’annulation de la décision qu’il attaque, le président du conseil général de l’Oise ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article 165 du code de la famille et de l’aide sociale ; que la circonstance que les prix de journée des établissements situés en dehors du département de l’Oise sont supérieurs à ceux pratiqués dans l’Oise offrant des prestations comparables, n’est pas de nature à autoriser le département de l’Oise à se soustraire à l’application des dispositions régissant l’attribution de l’aide sociale aux personnes âgées ; qu’il suit de là que la requête du président du conseil général de l’Oise ne peut qu’être rejetée ;
    Considérant qu’il n’est pas contesté que M. B... n’a pour ressources qu’une allocation aux adultes handicapés d’un montant de 3.470,91 F (529,14 Euro) par mois dont il faut déduire 417,00F (63,57 Euro) d’argent de poche ; que le coût de l’hébergement à la maison de retraite de Luzarches est de 11.943,00 F (1.820,70 Euro) par mois, et qu’il reste donc à couvrir 8.889,09 F (1.355,13 Euro) qu’il n’est pas fait mention d’obligés alimentaires ; qu’ainsi l’état de besoin de M. B... est établi et qu’il a droit à l’aide sociale pour son hébergement à la maison de retraite de Luzarches conformément au prix de journée fixé pour cet établissement sous réserve du reversement de 90 % de ses revenus ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 18 du décret no 54-611 du 11 juin 1954 : « Les demandes tendant à obtenir le bénéfice de l’aide sociale prévue aux chapitres V et VI du code de la famille et de l’aide sociale prennent effet au premier jour de la quinzaine suivant la date à laquelle elles ont été présentées ; toutefois, pour la prise en charge des frais d’hébergement des personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ou dans un centre de long séjour, la décision d’attribution de l’aide sociale peut prendre effet à compter du jour d’entrée dans l’établissement si la demande a été déposée dans les deux mois qui suivent ce jour (...) ; qu’il résulte de l’instruction que la demande d’aide sociale de M. B..., qui a été admis dans l’établissement le 21 janvier 1998, a été faite le 26 janvier 1998 ; que dans ces conditions son admission au bénéfice de l’aide sociale doit être faite à compter du 21 janvier 1998,

Décide

    Art. 1er  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Oise en date du 22 février 1999 est annulée.
    Art. 2  -  La requête du président du conseil général de l’Oise est rejetée.
    Art. 3  -  M. René B... est admis à l’aide sociale à compter du 21 janvier 1998 pour son hébergement à la maison de retraite de Luzarches sur la base du prix de journée fixé pour cet établissement avec reversement de 90 % de ses ressources et de son allocation logement.
    Art. 4  -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 11 juin 2003 où siégeaient M. Seltensperger, président, M. Guionnet, assesseur, M. Zwingelstein, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 20 juin 2003
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer