Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) - Recours en récupération - Donation - Modération
 

Dossier no 990938

Mme R...
Séance du 30 juin 2003

Décision lue en séance publique le 13 août 2003

    Vu, enregistrés le 30 septembre 1998 par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l’Hérault les recours introduits par Mmes Marie-Thérèse et Jeanine R... épouse G..., demeurant respectivement à Salelles-du-Bosc (34700), 3 place des Sophoras, et à Saint-Jean-de-Védos (34430), 2, place des Bouscorles, contestant la décision du 30 juin 1998 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Hérault a confirmé celle de la commission d’admission à l’aide sociale de Lodève du 22 janvier 1997 d’exercer un recours sur les intéressées en leur qualité de donataires de Mme Jeanne R..., leur mère, bénéficiaire de l’aide ménagère du 1er avril 1980 au 30 avril 1994 puis de l’allocation compensatrice pour l’assistance d’une tierce personne du 1er octobre 1995 à son décès, intervenu le 16 avril 1998 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré comme ci-dessus le 7 août 2000, le mémoire complémentaire établi par Me P..., avocat à la cour ayant son siège à Montpellier (34000), conseil de Mme Jeanine R... épouse G..., tendant à l’annulation de la décision susvisée et à la condamnation au paiement de la somme de 914,59 Euro (6 000 F) au titre des frais irrépétibles de l’article R. 761-1 du code des juridictions administratives par les moyens que :
    1o  La décision de la commission d’admission à l’aide sociale n’a pas été motivée ;
    2o  Mme Jeanine R... n’a pas été informée de la procédure d’admission à l’aide sociale ;
    3o  Elle n’a pas été appelée en sa qualité d’obligée alimentaire ;
    4o  Elle a subi un grief de cette absence d’information ;
    5o  Elle s’est acquittée de la clause d’entretien prévue pour l’acte par lequel Mme Jeanne R... a fait donation de ses biens à ses filles.
    Vu, le mémoire du 30 novembre 1998 établi par le président du conseil général du département de l’Hérault tendant au rejet des conclusions des recours susvisés par les motifs que ces derniers ne sont pas étayés par des moyens et qu’en tout état de cause la collectivité débitrice de l’aide sociale a fait une exacte application de l’article 146 de l’ancien code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 30 juin 2003, M. Goussot, rapporteur, les observations de Me Michel P..., avocat de Mme G... et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    En ce qui concerne la requête de Mme Marie-Thérèse R... :
    Considérant qu’alors que Mme Marie-Thérèse R... et Mme Jeanne G... avaient formulé une seule demande en première instance, elles ont formulé deux requêtes séparées, non motivées dans le délai d’appel ; que seule, Mme Jeanine G... présentait ultérieurement un mémoire motivé dont il ne peut être inféré qu’il l’ait été également pour sa sœur ; que d’ailleurs, l’avocat représentant Mme Jeanine G... a confirmé à l’audience à la commission et nonobstant les termes d’une lettre en date du 27 juin 2003 qu’il ne représentait bien que Mme Janine G... que si Mme Marie-Thérèse R... pouvait revenir motiver sa requête jusqu’à la clôture de l’instruction, elle ne l’a pas fait, nonobstant la lettre du 20 mars 2003 lui rappelant la nécessité d’une motivation ; que Mme Marie-Thérèse R... ne saurait ignorer qu’un juge ne peut examiner que des requêtes motivées ; que sa requête est irrecevable et sera rejetée ;
    En ce qui concerne la requête de Mme Jeanine G... sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens :
    Considérant qu’en tout état de cause, le montant des prestations d’aide ménagère récupérable est à lui seul supérieur au montant recherché de la récupération sur Mme G... ;
    Considérant, d’une part, que la circonstance que lors du dépôt d’une demande d’aide sociale, ou postérieurement, s’agissant d’ailleurs en l’espèce d’une attribution de services ménagers au titre desquels les créances des obligés alimentaires ne sont pas prises en compte, lesdits obligés ne soient pas informés du dépôt de la demande est sans incidence sur le droit de la collectivité d’aide sociale à rechercher la récupération des prestations dispensées :
    Considérant que si la requête fait valoir que la donation est intervenue « deux ans après que l’aide sociale ait été accordée » cette circonstance est bien de la nature de celles que l’article 146 b du code de la famille et de l’aide sociale alors applicable prend en compte pour permettre l’exercice du recours en récupération notamment « lorsque la donation est intervenue, postérieurement à la demande d’aide sociale » ;
    Considérant que si l’insertion d’une clause de soins et d’entretien à charge du donataire dans un acte de donation peut être le cas échéant de nature à priver l’acte de sa nature de libéralité, la seule circonstance pour les commissions d’aide sociale d’analyser cet acte et d’en tirer les conséquences juridiques n’est pas à elle seule de nature à entacher la motivation de leur décision ; qu’ainsi le moyen tiré de ce que « la commission départementale d’aide sociale se prévaut d’une disposition contractuelle entre personnes privées à laquelle elle est étrangère pour motiver sa décision » ne peut qu’être écarté ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que dans l’acte du 14 avril 1988 d’une part, Mme R... donnait à ses filles Mme G... 32 827 F et Mme R... 65 654 F ; que par ailleurs, l’acte procédait au partage des biens procédant de la succession de M. R..., qui n’est pas en cause dans le litige, pour 271 518,25 F ; que toutefois, les attributions se faisaient à hauteur de 270 000 F pour Mme R... et 201 103,54 F pour Mme G... ; que celle-là devait ainsi à sa sœur une soulte de 68 586,46 F dont environ 13 000 F au titre de la donation ; que cependant, était, par ailleurs, stipulée à la charge des deux sœurs, une obligation de soins et entretien de leur mère ; mais que, moyennant renonciation à paiement de la soulte due par Mme R... à Mme G..., celle-ci était dispensée de la participation à la nourriture et à l’entretien ; qu’ainsi la valeur des biens, effectivement reçue en donation par Mme G... s’élève à 19 827 arrondi à 20 000 F ; que c’est cette somme que l’administration est en principe fondée à rechercher ;
    Considérant qu’à hauteur de cette somme de 20 000 F, l’acte du 14 avril 1988 s’analyse bien à l’égard de Mme G... comme une donation non assortie d’une clause de nourriture et d’entretien ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que Mme G... se serait acquittée d’une obligation de nourriture et d’entretien qui aurait été à sa charge est inopérant ;
    Considérant par ailleurs que si Mme G... entend invoquer le soutien moral et psychologique qu’elle a apporté à sa mère pour demander à être déchargée de cette créance, un tel soutien demeure sans incidence sur une récupération à l’encontre du donataire, à la différence de ce qu’il en est de cette incidence à l’encontre de l’héritier, enfant de la personne handicapée ou ayant assumé sa charge effective et constante ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède d’une part, que la récupération ne peut être recherchée à hauteur de 13 000 F, d’autre part, que Mme G... ayant reçue une libéralité de 20 000 F ne justifie pas qu’il n’y ait pas lieu à récupération à cette hauteur ; que la requérante est par suite seulement fondée à demander la réformation de la décision attaquée en tant qu’elle a entendu recouvrer 13 000 F, mais n’est pas fondée à se plaindre qu’elle ait décidé la récupération de 20 000 F, les pièces du dossier ne justifient pas d’une remise ou d’une modération de la créance ;

Décide

    Art. 1er.  -  La requête de Mme Marie-Thérèse R... est rejetée.
    Art. 2.  -  Il y a lieu à récupération à l’encontre de Mme Jeanine G... de la somme de 3 048,98 Euro (20 000 F).
    Art. 3.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Hérault du 30 juin 1998 est réformée en ce qu’elle a de contraire à l’article deux.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de la requête de Mme Jeanine G... est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 juin 2003 où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 13 août 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer