Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Retour à meilleure fortune
 

Dossier no 020307

M. G...
Séance du 27 novembre 2003

Décision lue en séance publique le 8 janvier 2004

    Vu le recours formé le 13 décembre 2001 par Mme Aline G... tutrice, au nom de M. Alain G... demeurant à Chalivoy-Milon, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision du 15 octobre 2001, par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Cher confirmait la décision de la commission cantonale d’admission à l’aide sociale de Dun-sur-Auron du 22 mai 2001 maintenant la décision de récupération sur retour à meilleure fortune par le moyen que conformément à l’article 39-2 de la loi du 30 juin 1975 et de l’article 10 du décret du 31 décembre 1977, l’allocation compensatrice pour tierce personne n’est conditionnée qu’à une condition de ressources ; qu’en ce qui concerne ces ressources : celles provenant du travail ne sont prises en compte que partiellement ; que le plafond de ressources est déterminé par l’article L. 821-3 qui précise que l’allocation peut se cumuler avec des ressources personnelles à hauteur d’un plafond fixé par décret ; que l’article R. 821-4 du code de la sécurité sociale dispose « Le revenu dont il est tenu compte pour l’application de la condition de ressources prévue à l’article L. 821-3 est évalué selon les modalités fixées aux articles R. 531-10 à R. 531-14 du code de la sécurité sociale ; qu’enfin l’article R. 531-10 mentionne que les ressources à prendre en considération s’entendent du total des revenus nets catégoriels retenus pour l’établissement de l’impôt sur les revenus ; que, peu importe que M. Alain G... ait fait l’objet d’un héritage puisque ce dernier n’entre pas en considération dans les ressources soumises à fiscalité ; qu’enfin la commission départementale d’aide sociale est critiquable pour défaut de motivation ;
    Vu le mémoire en défense du président du conseil général du Cher en date du 2 avril 2002, qui conclut au rejet de la requête aux motifs que même si M. Alain G... fait valoir que la condition de ressources pour le versement de l’allocation compensatrice pour tierce personne est le revenu net imposable, un recours peut être exercé par le département conformément à l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles qui s’applique à l’ensemble des aides attribuées par l’aide sociale ; qu’on peut donc considérer que l’héritage de M. Alain G... a augmenté son patrimoine ; que, même si la loi de la modernisation sociale a supprimé le recours contre bénéficiaires revenus à meilleure fortune pour l’allocation compensatrice, les décisions des commissions d’admission et départementale d’aide sociale sont antérieures à cette date ;
    Vu le mémoire en réplique de M. Alain G... en date du 10 juillet 2003, persistant dans ses conclusions par les mêmes moyens et les moyens que les dispositions régissant l’attribution de l’allocation compensatrice pour tierce personne ne conditionne son versement qu’à une condition de ressources ; que l’allocation compensatrice obéit à des textes spécifiques ; que la soumettre aux conditions de droit commun de l’aide sociale serait détourner de son objectif la volonté du législateur ; que ceci serait le cas si l’on admettait la possibilité d’une récupération pour retour à meilleure fortune ; que si le bénéficiaire avait eu cet héritage dans ses ressources au moment de la demande de l’allocation compensatrice cela n’aurait eu aucun effet sur ses droits à prestation ; que suivre le conseil général en son analyse créerait une disparité de traitement entre deux bénéficiaires de cette prestation suivant la date du recours engagé ; qu’accueillir favorablement la demande du conseil général génèrerait une situation incompréhensible pour le demandeur ; qu’il est un principe constant que la loi saisit les situations en cours ; que M. Alain G... peut donc également se prévaloir de ce principe étant donné que la loi nouvelle s’applique aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours ; qu’en effet, si la loi nouvelle doit respecter les décisions devenues irrévocables, cela n’est pas le cas lorsqu’une procédure est en cours, comme en l’espèce ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale et les textes subséquents ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code civil ;
    Vu la lettre en date du 14 mars 2002 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 novembre 2003, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’en vertu d’un principe général du droit du contentieux administratif applicable devant toute juridiction administrative, les décisions de ces juridictions doivent être motivées et répondre aux moyens des requêtes ; que tel n’est pas le cas de la décision attaquée de la commission départementale d’aide sociale du Cher ; qu’il y a lieu de l’annuler et d’évoquer la demande ;
    Considérant que la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Dun-sur-Auron du 22 mai 2001 est dépourvue de toute motivation en droit comme en fait ; qu’elle doit être considérée comme infligeant une sujétion au sens de l’article 3 de la loi 11 juillet 1979 ; qu’il y a lieu de l’annuler ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale dans sa rédaction alors en vigueur, devenu l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles qu’un recours en récupération peut être exercé notamment contre le bénéficiaire de l’aide sociale revenu à meilleure fortune ;
    Considérant que le législateur a subordonné l’octroi de l’allocation compensatrice pour tierce personne à un plafond de ressources procédant du seul revenu net fiscal de l’année de référence, mais a maintenu le recours en récupération et notamment à la date de la décision attaquée le recours en récupération pour retour à meilleure fortune ; que contrairement à ce que soutient la requérante, l’absence de prise en compte de ressources autres que les revenus personnels au stade de l’admission à l’aide sociale est sans incidence sur la possibilité maintenue par la loi pour les collectivités d’aide sociale de récupérer les prestations versées par celles ci sur des ressources qui, tel un capital provenant d’un héritage, n’auraient pas été retenues au stade de l’admission autrement que par la prise en compte des revenus procédant de la possession de celui ci ;
    Considérant que si la requérante soutient que la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, qui supprime le recours en récupération pour retour à meilleure fortune, s’applique, dès lors qu’une instance contentieuse avait été introduite antérieurement à son entrée en vigueur à l’instance en cours, la loi n’a pas prévu de dispositions transitoires et la décision administrative attaquée fixant le montant de la créance récupérée à laquelle s’applique la législation en vigueur au moment du fait générateur de la récupération intervenu en 1996, était intervenue avant son entrée en vigueur ; qu’en cet état le moyen doit être rejeté,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Cher en date du 15 octobre 2001 ensemble la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Dun-sur-Auron du 22 mai 2001 sont annulées.
    Art. 2.  -  Le surplus des conclusions de la demande de Mme Aline G... à la commission départementale d’aide sociale du Cher est rejeté.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 novembre 2003 où siégeaient M. Lévy, président, M. Reveneau, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 8 janvier 2004.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer