Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3420
 
  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Placement - Prise en charge
 

Dossier no 020473

Mlle P...
Séance du 27 novembre 2003

Décision lue en séance publique le 24 décembre 2003

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 25 février 2002, la requête de Mlle P... chez Mme P..., 91620 Nauzet, par son tuteur l’UDAF de l’Essonne, dont le siège est 315, square des Champs-Elysées, BP 107 Courcouronnes 91004 Evry Cedex, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis en date du 22 octobre 2001 rejetant sa demande dirigée contre la décision en date du 19 avril 2001 par laquelle la commission d’admission à l’aide sociale de Montreuil a fixé la prise en charge par l’aide sociale de l’accueil de la requérante chez Mme P... au titre de la loi du 10 juillet 1989 par les moyens qu’elle reprend intégralement l’ensemble de ses moyens de première instance ; qu’elle n’a pas été invitée à se présenter à la commission ; qu’elle est fondée à se demander si le rapporteur pouvait présenter dès lors des éléments objectifs ; qu’il n’est pas fait mention du règlement départemental ; qu’elle ne le connaît pas et ne l’a pas obtenu ; qu’elle est dès lors fondée à se demander sur quelle base réglementaire les décisions ont été prises ; qu’elle ne peut être exonérée des cotisations patronales de retraite complémentaire ; que l’allocation compensatrice pour tierce personne a été réduite à 10 %, sans que par ailleurs aucune participation aux frais de placement ne soit attribuée ; que Mme P... n’a jamais formulé par écrit un refus de transport par l’établissement d’accueil ; que des médecins des directions départementales concernées sont convenus d’un besoin de transport particulier ; que pendant les congés des accueillants familiaux les salaires et le loyer des remplaçants sont rémunérés ; qu’elle n’a pas pu passer de contrat depuis décembre 1992 faute de connaître le montant de la participation accordée par le département de la Seine-Saint-Denis et a accepté de présenter un contrat type en décembre 2000, qui n’a pas été retenu par le département de la Seine-Saint-Denis et qui ne peut être appliqué ; qu’il convient de reconnaître à la famille d’accueil une rémunération équitable proportionnée à ses difficultés et que, à défaut d’une antériorité complète, cette récupération doit être reconnue au moins à compter de la date de la première demande écrite auprès du département de la Seine-Saint-Denis, soit le 2 juillet 1998 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistrée le 22 octobre 2002, la transmission par Mlle P... d’une lettre d’une demande d’aide sociale en date du 28 février 1992 (non agrafée) ;
    Vu, enregistré le 8 juillet 2002, le mémoire en défense du président du conseil général de la Seine-Saint-Denis tendant au rejet de la requête par les motifs que l’UDAF n’avait pas passé de contrat avec Mme P... et que le département n’est entré en possession d’un contrat du 1er avril 2000 qu’en décembre 2000 ; que ce contrat ne tient pas compte que Mlle P... fréquente un foyer de jour dans lequel elle se rend en taxi, le coût des deux services étant assumé par le département de la Seine-Saint-Denis ; que Mlle P... devrait être exonérée de charges sociales si l’UDAF faisait la demande, en tant que bénéficiaire de l’allocation compensatrice pour tierce personne ; que, pour les frais de repas de midi, il est alloué 10 % de l’allocation aux adultes handicapés ; que les transports sont pris en charge par le département ; que lors des congés, la rémunération de la famille doit être assurée par la famille d’accueil ; que le loyer appliqué est celui fixé par le département de la Seine-Saint-Denis ; que la commission d’aide sociale pouvait limiter la participation du département à des taux inférieurs de rémunération et laisser à la charge de Mlle P... le surplus éventuel d’autant qu’elle n’est pas dépourvue de ressources et dispose d’un capital placé de 19 513,47 Euro ; que les taux proposés tiennent compte de la situation de dépendance ; que Mlle P... ne saurait revendiquer l’application des dispositions prévues par le règlement départemental d’aide sociale de l’Essonne ;
    Vu, enregistré le 11 juillet 2003, le mémoire en réplique présenté par Mlle P... persistant dans les conclusions de la requête par les mêmes moyens et les moyens qu’aucune des demandes d’aide sociale introduites dont la première datée du 28 février 1992 n’avait donné lieu à une réponse écrite expliquant la nécessité d’un contrat pour pouvoir statuer en commission ; que, compte tenu des appels déposés, elle n’a pu adresser une demande de renouvellement de prise en charge de la rémunération de la famille d’accueil dès lors qu’elle contestait la décision du 18 avril 2001 ; qu’elle a été obligée d’établir un contrat type sur la base des références de l’Essonne, n’ayant pu obtenir le règlement départemental de la Seine-Saint-Denis et que dès lors, selon la loi du 10 juillet 1989, il est possible de prendre en compte les tarifs du lieu d’implantation de la famille d’accueil ; que l’application du règlement de l’Essonne ne pose aucun problème aux autres départements ; qu’elle a entièrement reversé les indus de l’allocation compensatrice pour tierce personne ; que les taux proposés par le médecin du département de la Seine-Saint-Denis, qui ne l’a jamais vu, ne semblent pas avoir été correctement évalués en fonction de ses handicaps réels ; qu’elle maintient donc sa demande de rémunération sur la base du règlement départemental d’aide sociale de l’Essonne, de prise en compte de sa dépendance réelle, de prise en charge du salaire de la famille de remplacement pendant les congés, et de prise en charge des cotisations patronales URSSAF ;
    Vu, enregistré le 24 septembre 2003, le mémoire du président du conseil général de la Seine-Saint-Denis tendant au rejet de la requête pour les motifs qu’il appartenait à l’UDAF 91 le tuteur de conclure avec Mlle P... le contrat prévu par l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles ; que le département de l’Essonne n’a pas cru devoir retourner, ce, nonobstant l’agrément, sur le fondement de l’article L. 441-2 du même code ; que le contrat en définitive signé le 1er avril 2000 n’a pas été renouvelé à ce jour ; qu’il ne semble pas en adéquation avec la situation effective de l’intéressée ; que les droits à congé annuel doivent être partie intégrante du contrat selon l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles et non d’un règlement départemental des affaires sociales ; qu’un règlement départemental des affaires sociales d’un département donné ne s’applique pas en effet à un autre département ; qu’en ce qui concerne les instructions patronales, l’UDAF 91 n’a à aucun moment justifié d’une demande d’exonération auprès des organismes concernés, alors qu’elle est de droit ; que seule la COTOREP peut réviser le taux de sujétions de l’assistée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles, et notamment ses articles L. 441-1 et suivants ;
    Vu le décret du 22 juin 1990 ;
    Vu le décret du 17 décembre 1990 ;
    Vu, enregistré le 24 novembre 2003, le nouveau mémoire présenté pour Mlle P... formalisant ses précédentes conclusions et sollicitant, d’une part, que la rémunération de l’accueillante prise en compte par le tarif soit au minimum de 7 minima garantis pour service rendu, de 4 minima garantis pour frais d’entretien et de 6,10 Euro par jour pour le loyer, étant ajouté que si le département de la Seine-Saint-Denis acceptait d’appliquer comme d’autres départements les barèmes du département de l’Essonne, cette rémunération serait supérieure, et sollicitant en outre le paiement de l’allocation compensatrice pour tierce personne qu’elle n’a pas perçue depuis décembre 2002 au 27 novembre 2003 à hauteur de 11 849 Euro par les mêmes moyens et les moyens qu’elle n’a pas été convoquée à l’audience de la commission départementale d’aide sociale ; que celle-ci ne fait aucune mention du fondement juridique des rémunérations fixées par la commission d’admission alors que le département de la Seine-Saint-Denis n’a produit aucun règlement départemental et n’apporte ainsi aucun fondement aux barèmes qu’il propose alors qu’il était tenu d’établir un règlement départemental précisant la matière litigieuse ; qu’il a été en effet indiqué téléphoniquement que le règlement départemental d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis ne comportait aucune disposition concernant l’accueil familial des adultes handicapés ; que les départements de Paris et des Hauts-de-Seine acceptent pour les personnes accueillies en placement familial dans l’Essonne les barèmes essonniens ; qu’en aucun cas il ne peut être fait reproche au demandeur de n’avoir pas établi le contrat en l’absence de toute proposition d’un contrat type établi par le département de la Seine-Saint-Denis pendant huit ans ; qu’il sera toujours tenu de payer les cotisations à une caisse de retraite qui doivent être prises en charge par le département de la Seine-Saint-Denis ; que l’allocation compensatrice pour tierce personne ne pouvait être suspendue à hauteur de 90 % alors qu’aucun autre droit ouvert du même type, soit en l’espèce la rémunération d’une famille d’accueil, n’a encore été ouvert ; qu’ainsi il y a lieu de verser à Mlle P... la différence entre les 10 % du montant de l’allocation compensatrice qui lui ont été maintenus jusqu’en 2000 au 27 novembre 2003 et le montant de l’allocation au taux plein soit 11 849,40 Euro ; qu’elle est dans l’incapacité physique totale de prendre les transports proposés par le foyer d’accueil ; qu’en tout état de cause la décision à prendre devra être rétroactive dans la mesure ou si aucun contrat n’avait été établi il ne peut en être fait reproche à l’UDAF ; qu’il lui reste en tout et pour tout actuellement, une fois les différentes contributions payées, 449,30 Euro et que l’accueillante a bien souvent participé de sa poche pour les dépenses quotidiennes ; que celle-ci n’a aucun statut depuis 1992 et n’a pas pu cotiser à une caisse de retraite ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 novembre 2003, le rapport de Mlle Erdmann, maître Cécile Jousselin, avocat pour Mlle P... représentée par l’UDAF de l’Essonne et après en avoir délibéré à l’issue de la séance publique hors la présence des parties ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens relatifs à la régularité de la procédure devant la commission départementale d’aide sociale et les autres moyens de la requête :
    Considérant qu’aux termes des articles 125 et 126 du code de la famille et de l’aide sociale devenus L. 131-1 et L. 131-5 du code de l’action sociale et des familles « Les demandes d’admission au bénéfice de l’aide sociale (...) sont déposées au centre communal ou intercommunal d’action sociale ou à défaut à la mairie de la résidence de l’intéressée (...). Les demandes sont ensuite transmises au président du conseil général qui les instruit et les soumet à la commission d’admission à l’aide sociale (...). La commission d’admission à l’aide sociale comprend (...) lorsqu’elle statue sur les demandes de prestations ressortant du département (...) le conseiller général du canton comportant la commune où la demande a été déposée ou du canton du demandeur dans le cas où le dossier est transmis dans les conditions prévues à l’article 194 (...) du code de la famille et de l’aide sociale » ; qu’il résulte de ces dispositions que la commission d’admission à l’aide sociale compétente est dans tous les cas celle du canton du domicile de secours et que s’appliquent aux décisions prises sur les demandes les dispositions du règlement départemental d’aide sociale applicables à ce canton ; qu’en l’espèce, pour les prestations et la période litigieuses aucun règlement départemental d’aide sociale n’étant intervenu dans le département de la Seine-Saint-Denis, s’y appliquent seulement les dispositions pertinentes de la loi du 10 juillet 1989 aujourd’hui codifiées au code de l’action sociale et des familles et des décrets pris pour son application ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mlle P... née en 1971 relevait de l’aide sociale à l’enfance de la Seine-Saint-Denis durant sa minorité et a résidé chez les époux P... dans l’Essonne, dès l’âge de trois ans comme prise en charge au titre de l’aide sociale à l’enfance ; qu’après sa majorité l’aide sociale à l’enfance de la Seine-Saint-Denis a continué à prendre en charge les frais de placement ; qu’en toute hypothèse les époux P... n’ont été agréés au titre de l’accueil d’adultes handicapés qu’en 1992 (le 26 juin ou le 5 novembre selon les pièces variables du dossier) et qu’ainsi Mlle P... est demeurée plus de trois mois dans le département de l’Essonne au domicile des époux P... sans être accueillie dans un établissement fonctionnant en internat, les pièces du dossier indiquant qu’elle était alors accueillie dans un établissement fonctionnant en externat durant les jours autres que les fins de semaine ; que, dès lors, c’est la résidence des époux P... qui devait être prise en compte pour la détermination du domicile de secours en l’absence de la fréquentation d’un établissement d’hébergement en internat ; qu’il suit de là que Mlle P... a dans ces conditions acquis un domicile de secours dans le département de l’Essonne qu’elle n’a plus ultérieurement perdu ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la commission d’admission à l’aide sociale de Montreuil, dès lors qu’ainsi qu’il vient d’être dit, Mlle P... avait acquis un domicile de secours dans l’Essonne à la date de sa décision, n’était pas compétente pour connaître de la demande d’aide sociale de l’intéressée ; que celle-ci devait être examinée par la commission d’admission à l’aide sociale de sa résidence qui correspondait également à celle de son domicile de secours dans l’Essonne et devait l’être selon les dispositions du règlement départemental de l’aide sociale de l’Essonne ; que la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis n’a pas soulevé ce moyen d’ordre public ; que sa décision doit dès lors être annulée et qu’il y a lieu pour la commission centrale d’aide sociale statuant dans le cadre de l’évocation de constater l’incompétence de la commission d’admission à l’aide sociale de Montreuil et de renvoyer le dossier au président du conseil général de l’Essonne afin qu’il le soumette à la commission d’admission à l’aide sociale compétente dans son département, compte tenu de ce qui vient d’être dit,
    Considérant, en ce qui concerne la rétroactivité de la demande d’aide sociale sur laquelle la commission centrale d’aide sociale peut se prononcer dès à présent, sa décision s’imposant sur ce point aux instances administratives du département de l’Essonne, que la circonstance, que le contrat passé entre Mlle P... et les époux P... qui prend effet au 1er avril 2000 n’ait été signé que postérieurement, n’est pas, dans les circonstances de l’espèce, de nature à justifier qu’à la date où elles statuent les instances d’admission et les juridictions d’aide sociale ne le prennent pas en compte pour compter de sa date d’effet ; que, par contre, aucun contrat de la nature de ceux prévus à l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles n’ayant pris effet antérieurement à cette date, Mlle P... n’est en tout état de cause pas fondée à demander la prise en charge rétroactive dans la limite de deux ans, la demande du 28 mars 2000 prenant effet, conformément à l’article 18 du décret du 11 juin 1954, le 1er avril 2000, étant en outre observé que cette demande est présentée sur un formulaire d’aide sociale daté du 28 mars 2000 et doit être regardée comme ayant été déposée à cette date alors même que, postée le 31 mars, elle n’est parvenue dans les services du président du conseil général de la Seine-Saint-Denis que le 5 avril suivant ;

Décide

    Art.  1er.    -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Seine-Saint-Denis et la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Montreuil en date du 22 octobre 2001 et du 19 avril 2001 sont annulées.
    Art.  2.    -  Mlle P... est renvoyée devant le président du conseil général de l’Essonne afin qu’il soit statué, par la commission d’admission à l’aide sociale du département de l’Essonne compétente en vertu des motifs du présent jugement, sur les droits de Mlle P... à l’aide sociale aux adultes handicapés, au titre de son accueil chez des particuliers agréés à compter du 1er avril 2000.
    Art.  3.    -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art.  4.    -  La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 novembre 2003 où siégeaient M. Levy, président, Mlle Bauer, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 24 décembre 2003.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer