Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Placement - Cotorep
 

Dossier no 022424

M. E...
Séance du 27 février 2004

Décision lue en séance publique le 30 mars 2004

    Vu la requête présentée le 11 février 2002, par Mme Agnès E..., tutrice de M. Fabrice E..., tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale d’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Isère du 22 janvier 2002, maintenant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Meylan refusant l’admission de M. Fabrice E... à l’aide sociale aux personnes handicapées pour un placement au Hameau de Sésame, à Crolles du 18 janvier 2000 au 30 octobre 2000, en application de l’article 18 du décret no 54-64 du 11 juin 1954 ;
    Vu enregistré le 2 septembre 2002, le mémoire en défense du président du conseil général de l’Isère, tendant au rejet de la requête par les motifs que l’association gestionnaire de la structure d’accueil et la tutrice auraient dû s’assurer la prise en charge financière des frais de séjour au moment de l’admission à compter du 18 janvier 2000, et non près d’un an plus tard ; que vu les décisions de la Cotorep ne s’imposent dans une instance d’une admission que sous réserve que soient remplies les conditions administratives des droits aux prestations fixées par les lois et décret régissant l’aide sociale ; que la décision Cotorep qui n’empêchait nullement la constitution du dossier d’aide sociale est ainsi sans effet sur le dépôt de la demande d’aide sociale ;
    Vu enregistré le 17 novembre 2003, le mémoire en réplique de Mme E... pour M. Fabrice E... persistant dans les conclusions de la requête par les mêmes moyens et les moyens que le directeur et l’association gestionnaire ont dans la période considérée été absorbés par la création et l’installation d’un nouvel établissement ; que le dossier a été transmis à la Cotorep dès le 19 avril 1999, bien en amont du 20e anniversaire ; que début 2000, une demande de maintien au titre de l’amendement Creton a été faite pour l’année 2000 ; que pour la famille comme pour l’établissement les maintiens légaux en institut médico-éducatif au titre de l’amendement Creton ne pouvait laisser imaginer que les frais d’hébergement jusqu’à lors payés par la sécurité sociale relèveraient de l’aide sociale dans l’hypothèse ou la Cotorep préconiserait une orientation en foyer de vie pour M. Fabrice E... ; qu’ainsi logiquement aucune demande d’admission à l’aide sociale n’a été demandée en janvier 2000 ; que si le placement préconisé avait été une masse les frais d’hébergement auraient continué à être pris en charge sans la moindre difficulté par la sécurité sociale ; qu’il convient de prendre en compte les réelles difficultés déjà rencontrées par les familles d’enfants handicapés pour assumer le quotidien et d’être indulgent quant à la complexité administrative qu’il faut gérer en outre lors du passage de l’enfant à l’âge adulte soit alléger le compréhensif retard déclaratif ; que quelques détails hors administratifs mineurs sont plus que largement compensés par la création de trois établissements ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le décret du 11 juin 1954 ;
    Vu le décret du 17 décembre 1990 ;
    Vu la lettre du 23 octobre 2003, invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 février 2004, Mme Giletat, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant d’une part, qu’il ressort des dispositions des articles L. 131-4 du code de l’action sociale et des familles et 18 du décret du 11 juin 1954, que la demande d’aide sociale ne peut prendre effet de la date d’admission dans l’établissement d’hébergement pour adultes handicapés que si elle a été déposée dans les deux mois de celle ci, susceptibles de prorogation d’une durée identique par le président du conseil général sous le contrôle du juge de l’aide sociale ;
    Considérant d’autre part, qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 242-4 et L. 243-1 - reproduisant l’article L. 323-11 du code du travail - du même code que la décision de maintien en établissement d’éducation spéciale au titre du premier de ces deux articles dit « amendement Creton » n’a lieu d’être prise qu’après que la Cotorep a orienté l’adulte handicapé vers une structure d’accueil de ces adultes et que l’orientation ne peut être mise en œuvre faute de place ; que ces dispositions ne font aucune exception à la règle ci-dessus rappelée selon laquelle la demande d’admission à l’aide sociale doit être déposée au plus tard dans les deux ou quatre mois de l’entrée dans un établissement lorsque l’intéressé ne bénéficiait pas auparavant de la même forme d’aide sociale ; qu’il en résulte qu’une personne handicapée ayant atteint l’âge de vingt ans et qui continue à être accueillie par l’établissement d’éducation spéciale ou elle se trouvait auparavant à charge de l’assurance maladie doit déposer une demande d’aide sociale au plus tard dans les quatre mois suivant son maintien en établissement sans intervention, (en droit), de prise en charge par l’assurance maladie pour que la prise en charge à intervenir puisse rétroagir à la date à laquelle elle a ainsi atteint l’âge de vingt ans ; qu’à supposer même que la réglementation applicable à la prise en charge par l’assurance maladie - et donc aux placements en maison d’accueil spécialisée - n’impose pas une telle procédure, cet état de droit est sans incidence sur l’application de la législation d’aide sociale ;
    Considérant que M. Fabrice E..., alors pris en charge à l’institut médico-éducatif le Hameau de Sésame, à Crolles, a eu vingt ans le 18 janvier 2000 ; qu’à cette date la prise en charge en institut médico-éducatif par l’assurance maladie n’était plus de droit ; que M. Fabrice E... avait en mai 1999, transmis son dossier à la Cotorep pour son orientation vers une structure pour adultes ; que celle-ci, dans le cadre général des dysfonctionnements des structures d’orientation dans le département de l’Isère que traduisent juridiquement les nombreux dossiers en cette matière soumis à la présente juridiction du fait de la position du président du conseil général de l’Isère tendant à une application stricte de l’article 18 du décret du 11 juin 1954, ont permis de constater, n’avait pas statué en janvier 2000 comme elle aurait dû normalement le faire ; que dans l’intervalle M. Fabrice E... continuait à être en fait accueilli à l’institut médico-éducatif ; que le 24 avril 2000, (et non 2001, le requérant indiquant alternativement l’une et l’autre année) la Cotorep a orienté M. Fabrice E... vers des foyers pour adultes handicapés et a désigné l’établissement Ferme de Belle Chambre à Sainte-Marie-du-Mont (Isère) ; que toutefois, faute de décision de la Cotorep « début 2000 » une demande de maintien au titre de l’amendement Creton avait été formulée « début 2000 » auprès de la Cotorep ou de la CDES (le dossier ne l’établit pas) mais en tout état de cause pas de l’aide sociale du département de l’Isère « pour l’année 2000 » que néanmoins compte tenu des dysfonctionnements susévoqués persistants la décision conjointe de maintien Cotorep CDES qui ne pouvait intervenir avant la décision d’orientation susrappelée de la Cotorep du 24 avril 2000, et le constat de l’impossibilité de la mettre en œuvre, n’est intervenue que le 11 décembre 2000 ; que la demande d’aide sociale a alors été déposée le 31 décembre 2000 ; que par la décision attaquée la commission départementale d’aide sociale de l’Isère réformant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Meylan-Saint-Ismier n’a admis M. Fabrice E... à l’aide sociale aux adultes handicapés pour la prise en charge des frais de maintien à l’institut médico-éducatif Hameau de Sésame que pour compter du 1er novembre 2000 ;
    Considérant qu’en l’absence de toute disposition en disposant autrement le maintien en institut médico-éducatif au titre de l’amendement Creton procédant de l’impossibilité de mise en œuvre immédiate de la décision d’orientation vers un foyer pour adultes pris en charge au titre de l’aide sociale aux adultes handicapés est soumis aux règles régissant le dépôt des demandes de la sorte ; que même si jusqu’au vingtième anniversaire le jeune adulte à été pris en charge par l’assurance maladie au titre de l’éducation spéciale des handicapés le maintien de fait postérieurement au vingtième anniversaire sans prise en charge de droit et sans demande d’aide sociale est une situation de fait qui n’emporte par elle même aucune conséquence juridique ; que la décision conjointe de maintien de la CDES et de la Cotorep est selon l’article L. 323-11 susrappelé du code du travail prise sous réserve que soient remplies les conditions administratives de prise en charge et ne s’impose donc pas, en tant qu’elle rétroagit à la date du maintien dans l’établissement après vingt ans, au président du conseil général ;
    Considérant qu’il appartenait aux intéressés - et en fait sinon en droit aux services sociaux des établissements où ils sont accueillis ou à ceux qui les suivent - de pourvoir non seulement à la saisine de la Cotorep mais également dans le délai maximum de quatre mois courant de la date de maintien à celle de la collectivité d’aide sociale sans préjudice s’il était décidé une orientation en maison d’accueil spécialisée et non en foyer, des modalités de continuité des prises en charge prévues par la législation applicable à l’assurance maladie ; qu’à tout le moins il y avait lieu de déposer une demande d’aide sociale dans les quatre mois de la décision d’orientation en foyer non aboutie prise par la Cotorep, alors même qu’antérieurement comme il a été dit une demande de maintien au titre de l’amendement Creton avait déjà été formulée auprès des instances d’orientation ;
    Considérant que si M. Fabrice E... soutient qu’une telle condition ne serait pas opposable si la Cotorep l’avait orienté vers une maison d’accueil spécialisée il suffit de constater, sans qu’il soit besoin de statuer sur le fond sur ce moyen ; que la Cotorep a statué par une décision non contestée d’orientation vers un foyer le 24 avril 2000, et que le requérant, qui n’a pas contesté cette décision, n’a néanmoins déposé une demande d’aide sociale aux adultes handicapés que le 31 décembre 2000, pour la prise en charge procédant de l’impossibilité de mise en œuvre de cette décision, laquelle comme il a été rappelé, est au même titre que la prise en charge non aboutie en structure pour adultes dont elle procède une prise en charge au titre de l’aide sociale à l’hébergement des personnes adultes handicapées ; qu’à supposer même que la demande d’admission n’ait pu être déposée en l’espèce qu’après la décision d’orientation de la Cotorep, elle aurait comme il a également été rappelé en tout état de cause dû l’être dans les deux mois de la notification de celle ci éventuellement prolongeable d’une même période ; qu’ainsi le moyen n’est en tout état de cause en l’espèce pas susceptible d’être accueilli ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Fabrice E... n’est juridiquement pas fondé à se plaindre de ce que la date d’effet de sa prise en charge par l’aide sociale ait été fixée au 1er novembre 2000 (et non au 1er janvier 2001) ;
    Considérant il est vrai que M. Fabrice E... fait valoir d’une part, l’extrême complexité des règles administratives de prise en charge d’autre part, le fonctionnement défectueux des instances d’orientations qui n’ont pas statué à temps et ne l’ont jamais invité à déposer une demande d’aide sociale ; que d’une part, dans l’attente de la création d’un « guichet unique » pour les demandeurs de prestations spécialisées aux handicapés envisagée par le projet de loi réformant la loi du 30 juin 1975, soumis au parlement et sous réserve des conditions réglementaires concrètes de matérialisation d’une telle intention le premier moyen alors que le conseil d’Etat a jugé que les dispositions de l’article 6-I de la loi du 30 juin 1975, issu de l’amendement Creton ne nécessitaient aucun texte d’application, est sans incidence sur le droit du président du conseil général de l’Isère à se prévaloir comme il croit devoir le faire de la réglementation en vigueur ; que d’autre part, il ne peut qu’appartenir à M. Fabrice E... dans l’hypothèse où lui serait réclamé le remboursement des frais litigieux (d’ailleurs peu vraisemblable selon les indications fournies à l’audience par le représentant du conseil général de l’Isère...) soit de mettre en œuvre s’il s’y croit fondé la responsabilité de l’association gestionnaire ou de l’Etat au titre du fonctionnement des instances d’orientation devant l’autorité judiciaire compétente dans les deux hypothèses, soit de saisir le médiateur de la République afin que soit examiné dans le cadre des compétences de celui ci l’opportunité et la possibilité d’une solution le déchargeant de toute participation, mais que le juge de l’aide sociale qui n’est pas compétent pour apprécier les responsabilités encourues dans la survenance de la présente situation, ne peut qu’appliquer les textes en vigueur ;

Décide

    Art. 1er. - La requête de M. Fabrice E... par Mme Agnès E... est rejetée.
    Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 février 2004 où siégeaient M. Levy, président, Mme Kornmann, assesseur, Mme Giletat, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 30 mars 2004.
    La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer