Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Collectivité débitrice de l’aide sociale - Allocation personnalisée d’autonomie (APA)
 

Dossier no 032222

Mme L...
Séance du 31 janvier 2005

Décision lue en séance publique le 4 février 2005

    Vu et enregistré par le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, le 14 novembre 2003, le recours par lequel le préfet de la région Corse demande au juge de l’aide sociale d’annuler pour incompétence de l’auteur de l’acte la décision du 17 septembre 2003, du président du conseil général de la Corse-du-Sud de suspendre le versement par le département de l’allocation compensatrice pour l’aide d’une tierce personne accordée, du 1er janvier 2002 au 1er février 2005, à Mme Solange L... et d’en demander la prise en charge par l’Etat au motif que l’intéressée serait sans domicile fixe, par les moyens que le président du conseil général n’a pas rapporté la preuve de l’itinérance de Mme Solange L... et qu’il appartient en droit d’en décider à la commission d’admission à l’aide sociale dans la composition particulière prévue à l’article L. 131-5 du code de l’action sociale et des familles lorsqu’elle statue sur les prestations énumérées à l’article L. 121-7 dudit code ;
    Vu la décision du 17 septembre 2003, par laquelle le président du conseil général de la Corse-du-Sud a cessé de verser l’allocation compensatrice pour l’aide d’une tierce personne à Mme Solange L..., à compter du 31 décembre 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 21 septembre 2004, invitant les parties à l’instance à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 31 janvier 2005, M. Goussot, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il ressort du dossier que le 17 septembre 2003, le président du conseil général de la Corse-du-Sud a suspendu le versement de l’allocation compensatrice de Mme Solange L... à compter du 31 décembre 2002 ; que le même jour il a transmis au préfet de la Corse-du-Sud un « mémoire » pour « mise en paiement au motif que Mme Solange L... est SDF » ; qu’à la suite d’une demande d’explication supplémentaire du préfet il a précisé que sa transmission « a été effectuée conformément aux dispositions de l’article L. 122-4. En conséquence il vous appartenait si vous n’acceptiez pas votre compétence de saisir la commission centrale d’aide sociale » en ajoutant que « les autres conditions (ressources, effectivité de l’aide du tiers) ne doivent être examinées qu’après avoir défini quelle était la collectivité compétente en matière de domicile de secours » ; que le préfet de la Corse-du-Sud demande à la commission centrale d’aide sociale « d’annuler pour incompétence la décision prise par le président du conseil général de la Corse-du-Sud » ;
    Considérant que quelle qu’en puisse être la légalité la décision de suspension du président du conseil général de la Corse-du-Sud du 17 septembre 2003, ne relève pas de la compétence en premier et dernier ressort de la commission centrale d’aide sociale, mais bien en application de l’article L. 134-1 du code susvisé de la commission départementale d’aide sociale ; que la commission centrale d’aide sociale est incompétente pour connaître des conclusions expressément formulées contre elle par le préfet de la Corse-du-Sud ;
    Mais considérant que le juge de plein contentieux de l’aide sociale n’est pas seulement juge de la légalité des décisions administratives relatives à l’aide sociale ; qu’il lui appartient également sans excéder en l’espèce sa compétence et l’étendue de sa saisine, de statuer sur le litige de plein contentieux que suscite le refus du président du conseil général de la Corse-du-Sud de reconnaître le domicile de secours de Mme Solange L... dans son département ; qu’à cet égard en tant que de besoin il requalifiera en ce sens les conclusions du préfet ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 62 de la loi du 6 janvier 1986 aujourd’hui codifiée et abrogée « les frais d’aide sociale engagés en faveur de personnes... pour lesquelles aucun domicile de secours ne peut être déterminé sont intégralement pris en charge par l’Etat sur décision de la commission d’admission à l’aide sociale mentionnée à l’article 126 » ; que la décision dont s’agit est prise en application de l’article L. 131-5 6o alinéa par la commission d’admission à l’aide sociale statuant en formation plénière ; que l’article L. 134-2 dernier alinéa précise que « la commission d’admission décide en outre la prise en charge au titre de l’aide sociale des personnes mentionnées à l’article L. 111-3 », confirmant ainsi expressément la compétence de la commission d’admission à l’aide sociale en formation plénière pour statuer sur l’imputation financière de la charge d’aide sociale afférente à des prestations sur lesquelles il appartient au président du conseil général et non à la commission d’admission à l’aide sociale de statuer pour ce qui concerne la reconnaissance du droit de l’assisté même ; qu’enfin si le codificateur a à l’article L. 111-3 substitué à la formulation susrappelée de la loi « les frais d’aide sociale sont intégralement pris en charge par l’Etat » la formulation « les personnes » (sans domicile fixe) « ont droit aux prestations d’aide sociale », cette modification est en tout état de cause sans incidence sur la compétence de la commission d’admission à l’aide sociale statuant en formation plénière pour statuer, y compris en la matière des prestations attribuées par le président du conseil général, sur l’imputation financière des prestations litigieuses, i.e. « la » prise en charge « par une collectivité d’aide sociale, Etat ou département ;
    Considérant que pour regrettable que puisse être la décision de suspension prise par le président du conseil général de la Corse-du-Sud alors qu’il pouvait fort bien et devait saisir la commission d’admission à l’aide sociale statuant en formation plénière, aucune disposition de la loi ou des textes pris pour son application ne le lui interdisant, décision dont les effets fâcheux ont été aggravés par la persistance du préfet à ne pas davantage pour sa part saisir l’instance d’admission pour provoquer une décision susceptible de recours devant la commission centrale d’aide sociale au titre de sa compétence en premier et dernier ressort, il résulte de ce qui précède que l’imputation financière litigieuse relève bien d’une décision administrative de la commission d’admission à l’aide sociale statuant en formation plénière ; que faute que dans la procédure poursuivie par les administrations une telle décision ne soit intervenue il n’appartient pas à la commission centrale d’aide sociale fût-elle juge de plein contentieux de statuer en premier et dernier ressort sur l’imputation financière des frais en l’absence de toute décision administrative préalable en prévoyant une telle imputation, alors même qu’aucune irrecevabilité n’est opposée en défense par le président du conseil général de la Corse-du-Sud qui n’a pas cru devoir exposer sa position au juge ; qu’il y a donc lieu de retourner le dossier au Préfet pour saisine de la commission d’admission à l’aide sociale compétente statuant en formation plénière alors d’ailleurs en tout état de cause que le dossier demeure en l’état insuffisamment instruit et éclairé par les parties pour qu’une décision eut pu être prise par la commission centrale d’aide sociale sans une instruction à laquelle elle n’entend pas pourvoir, ses « moyens » lui interdisant de se substituer aux administrations compétentes pour y procéder ; qu’après décision de la commission d’admission à l’aide sociale l’Etat supportera les frais litigieux si elle conclut à l’imputation financière à sa charge et le département de la Corse-du-Sud les supportera dans le cas contraire ; que pour autant Mme Solange L... se sera trouvée privée de ses droits jusqu’au 31 janvier 2005 date de fin d’effet de la décision de la COTOREP, et, par hasard, date de la décision de la présente juridiction saisie le 14 novembre 2003, laquelle, si elle a pu ramener le délai d’examen des recours à environ un an, ne peut en l’état des « moyens » susévoqués dont elle dispose réduire encore ce délai la plupart des dossiers dont elle est saisie présentant un même caractère d’urgence ; que s’agissant d’une personne fragile et d’une situation qui aurait pu et du être clairement précisée par les services, la présente instance manifeste une fois encore les effets de l’application de la législation relative à l’imputation financière des frais d’aide sociale par la conjonction de textes complexes relatifs à la détermination sur le fond et quant à la procédure de la charge financière des prestations et de pratiques administratives souvent comme en l’espèce extralégales voir illégales selon la présente juridiction consistant à ne pas statuer sur les droits de l’assisté ou à les suspendre tant que le juge de l’aide sociale ne s’est pas prononcé sur l’imputation financière ; qu’une telle situation à laquelle seule en réalité le législateur pourrait remédier et qui n’est pas insusceptible de compromettre le caractère effectif des droits sociaux fondamentaux garantis par les stipulations de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut être à nouveau en la présente instance que relevée par la présente juridiction, mais qu’en l’état celle-ci ne pourra statuer sur la requête et renverra le dossier à l’administration pour saisine de la commission d’admission à l’aide sociale compétente statuant en formation plénière et pour décision de cette instance et décision subséquente sur les droits de l’assistée permettant ainsi enfin à Mme Solange L... de bénéficier de ses droits à l’allocation compensatrice pour tierce personne du 1er janvier 20003 au 31 janvier 2005 ;

Décide

    Art. 1er.  -  Les conclusions du préfet de la Corse-du-Sud tendant à l’annulation de la décision de suspension de l’allocation compensatrice pour tierce personne de Mme Solange L... prise le 17 septembre 2003, pour compter du 1er janvier 2003, par le président du conseil général de la Corse-du-Sud sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
    Art. 2.  -  Le dossier est renvoyé au préfet et au président du conseil général de la Corse-du-Sud aux fins de saisine de la commission d’admission à l’aide sociale territorialement compétente statuant dans la formation plénière prévue au 6o alinéa de l’article L. 134-5 du code de l’action sociale et des familles.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 31 janvier 2005, où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseur, M. Goussot, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 février 2005.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la protection sociale, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer