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  Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Recours en récupération - Succession
 

Dossier no 032183

Mme C...
Séance du 25 octobre 2004

Décision lue en séance publique le 5 novembre 2004

    Vu enregistrée le 11 juillet 2002, la requête de M. Pierre Emile P..., tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler une décision de la commission départementale d’aide sociale du Rhône du 23 avril 2002, confirmant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Limonest du 5 juillet 2000, de récupération à l’encontre du légataire aux motifs qu’il tient à remercier la commission départementale d’aide sociale qui a reporté l’application de la décision de récupération au décès de sa mère ; que cependant il n’a pas été tenu compte de la précarité de la situation sociale ; que cette décision considère qu’il n’est pas héritier direct alors qu’il est le petit-fils unique et que sa grand-mère l’a élevé ; qu’il s’est toujours occupé d’elle et qu’il a pu la conserver à domicile grâce à sa présence régulière et son intervention permanente ; que cette décision le choque surtout affectivement, comme elle aurait touché sa grand-mère ; qu’il ajoute que la prestation spécifique dépendance n’est plus récupérable ce qui marque une évolution dans l’appréciation de ce type de situation ;
    Vu le mémoire en défense en date du 29 janvier 2003, du président du conseil général du Rhône tendant au rejet de la requête par les moyens que l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles dispose que des recours sont exercés par le département contre le légataire ; qu’en l’espèce Mme Marie C... a légué la moitié des biens de sa succession pour un montant de 118 385,73 , à sa fille et à son petit-fils ; que la situation financière de M. Pierre Emile P... a bien été portée à la connaissance de la commission départementale d’aide sociale du Rhône ; que cette juridiction a pris acte, outre la situation financière de M. Pierre Emile P..., que cette succession ne comportait aucune liquidité et en a différé la récupération après le décès de Mme Marie Alexis Emilienne C..., légataire de la moitié des biens de la succession de Mme Marie C... ;
    Vu le mémoire en réplique de M. Pierre Emile P... qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et les moyens que la commission départementale d’aide sociale n’avait pas explicité les raisons de sa décision même si heureusement elle a accordé un délai pour la récupération jusqu’au décès de sa mère ; qu’il aimerait faire quelques remarques pour éclaircir le débat ; qu’il n’est pas le fils de Mme Marie C... ; qu’il est l’unique petit-fils qu’elle a élevé et qu’il l’a assistée de manière effective pour assumer la charge de sa vieillesse ; qu’il s’est substitué dans ce devoir à sa mère qui bien avant sa mise sous curatelle n’était plus un secours mais une charge supplémentaire pour sa grand-mère ; qu’il joint une attestation du docteur Saint Paul en date du 12 septembre 2000, indiquant que c’est dès 1995, que sans son intervention, il aurait fallu placer sa mère et sa grand-mère en établissement ; que cette organisation n’a fonctionné que grâce à son implication allant à Lyon un jour par semaine, s’assurant de son confort, passant du temps avec elle, faisant les courses alimentaires, vestimentaires et pharmaceutiques ; que cela n’a été possible que grâce au dévouement et à la disponibilité qu’il s’est imposé ; que sa mère en dépit de deux hospitalisations est toujours chez elle ; que sa grand-mère se maintenant à domicile jusqu’au décès a épargné des dépenses à la communauté ; qu’il croit qu’elle serait scandalisée de voir qu’on ne considère pas leurs liens affectifs et la qualité de son assistance ; qu’il demande simplement que l’on prenne en compte une partie du temps qu’il lui a consacré (1 jour par semaine et une partie de ses vacances) ; qu’il ne regrette rien et continue d’ailleurs à le faire pour sa mère ; qu’il considère cependant que des années d’une telle assistance à sa grand-mère avec le bonheur de l’avoir conservé heureuse chez elle, ne sont pas une mauvaise illustration d’une prise en charge effective et constante ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
    Vu le code civil ;
    Vu la lettre en date du 13 mai 2004, invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la Commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 25 octobre 2004, Mlle Erdmann, rapporteur, M. P..., en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que Mme Marie Alexis Jeanne C... dont la succession est en litige est la grand-mère du requérant M. Pierre P... ; qu’à son décès l’actif successoral composé essentiellement de biens immobiliers d’une valeur de 1 553 118,92 F (236 771,45 ), est revenu pour moitié à titre d’héritière à sa fille Mme Marie Alexis Emilienne C... et pour moitié à ses légataires bénéficiant d’une transmission de caractère universel ; que pour ce qui concerne la moitié léguée, la nue propriété était attribuée à M. Pierre P... et l’usufruit à sa mère susnommée ; que M. Pierre P... pour lui-même, et non Mme Marie Alexis Emilienne C..., a contesté devant la commission départementale d’aide sociale du Rhône la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Limonest décidant de la récupération sur les légataires de la moitié (75 936,10 F), des prestations versées par l’aide sociale à Mme Marie Alexis Jeanne C... (157 872,00 F) ; que la commission départementale d’aide sociale a reporté la récupération de l’ensemble de la somme ainsi à charge des légataires au décès de Mme Marie Alexis Emilienne C... qui continue à vivre dans la résidence de ses parents, et sous curatelle de M. Pierre P... lequel a continué de lui apporter son assistance, comme il s’était occupé d’elle et de sa grand-mère du vivant de cette dernière ; qu’en ce qui concerne la part de la créance recherchée de Mme Marie Alexis Emilienne C..., colégataire, la décision de la commission d’admission à l’aide sociale est définitive mais que le montant (valeur de l’usufruit) ne pourra être récupéré comme l’a jugé la commission départementale d’aide sociale qu’à compter de son décès ;
    Considérant que comme il a été dit M. Pierre P... a bénéficié d’un legs de caractère universel ; que sa situation relève ainsi dans son ensemble pour sa part d’héritier et pour sa part de légataire du a et non du c de l’article 146 du Code de la famille et de l’aide sociale devenus 1 et 3 de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ; qu’en ce qui concerne sa part léguée, d’une part, il ne peut être recherché sur la succession, la situation des petits enfants étant assimilée à celle des enfants y compris en cas de legs de caractère universel ; d’autre part, et en tout état de cause, il peut être déchargé à titre de légataire s’il a pris soin de l’assistée de manière effective et constante ;
    Considérant à cet égard, qu’il ressort très clairement des pièces versées au dossier que depuis de nombreuses années M. Pierre P... qui réside à Paris et est célibataire avait pris un soin constant de sa grand mère, décédée à 104 ans, et dont sa mère qui vivait avec elle était incapable de s’occuper ; qu’il lui a apporté à tous égards une aide affective, gestionnaire et morale de la nature de celle dont l’article 39 de la loi du 30 juin 1975, aujourd’hui codifié, prévoit la prise en compte pour exonérer de récupération l’héritier qui l’a assumée et, ainsi, le légataire universel ou à titre universel dont la situation lui est en tout point assimilée,

Décide

    Art.  1er.  -  A hauteur de sa part comme légataire dans la succession de Mme Marie Alexis Jeanne C... il n’y a lieu à récupération à l’encontre de M. Pierre P... de la somme globale de 75 936,10 F, mise à charge de M. Pierre P... et de Mme Marie Alexis Emilienne C... par la décision du 5 décembre 2000, de la commission d’admission à l’aide sociale de Limonest.
    Art. 2.  -  En tant que ladite créance concerne les droits comme légataire de Mme Marie Alexis Emilienne C... la décision de la commission départementale d’aide sociale du Rhône du 23 avril 2002, est maintenue et la récupération de la part correspondante est reportée au décès de Mme Alexis Emilienne C...
    Art. 3.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale du Rhône et de la commission d’admission à l’aide sociale de Limonest du 23 avril 2002 et du 5 juillet 2000, sont réformées en ce qu’elles ont de contraire à l’article premier.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre de la santé et de la protection sociale à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la Commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 25 octobre 2004 où siégeaient M. Lévy, président, M. Nouvel, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 novembre 2004.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre de la santé et de la protection sociale, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer