Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Retour à meilleure fortune - Conditions
 

Dossier no 040687

Mlle A...
Séance du 1er avril 2005

Décision lue en séance publique le 11 avril 2005

    Vu, enregistrée le 10 janvier 2004, la requête de M. Jean-Yves A..., tuteur de Mlle Béatrice A..., tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale d’annuler une décision de la commission départementale d’aide sociale des Yvelines du 27 mars 2003, maintenant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Versailles en sa séance du 2 octobre 2000, de récupération pour retour à meilleure fortune par les moyens qu’il défend les intérêts de sa sœur trisomique, handicapée à plus de 80 % en tant que tuteur ; que son espérance de vie s’est beaucoup améliorée grâce à une intervention du cœur ; que Béatrice après avoir été en CAT pendant plus de vingt ans ne peut plus travailler et a intégré un foyer occupationnel depuis l’automne ; que fin 1999, la DASDY lui a fait savoir qu’à la suite du « retour pour meilleure fortune » dû à l’héritage de leur mère, elle souhaitait procéder à la récupération ; que dès ses premiers courriers, il a demandé qu’on ne prélève pas cette somme du vivant de sa sœur alors qu’elle risquait d’en avoir besoin à la fin de sa vie ; que parallèlement il demandait qu’on lui donne des indications sur les diverses allocations auxquelles sa sœur pouvaient prétendre dans l’avenir : retraite, niveau de prise en charge au foyer occupationnel, puis foyer pour handicapés vieillissants, aide en fonction des différents niveaux de dépendance ; qu’il n’a jamais eu de réponse ; qu’à la notification de la décision de la commission départementale d’aide sociale il avait fait remarquer que l’on ne pouvait exiger de sa sœur qu’elle rembourse plus qu’elle n’avait réellement perçu, puisque la somme retenue correspondait à l’héritage avant impôts ; qu’il n’a pas eu de réponse et que la DASDY est restée plus d’un an (fin 2000 - début 2002) sans reprendre contact avec lui ; qu’il avait naïvement cru que sa demande était abandonnée ; qu’à réception début 2002 de l’avis du Trésor exigeant le règlement il a sollicité une réclamation gracieuse ; qu’il n’a eu que « titres exécutoires, lettre de rappel, et commandement de payer », sauf en novembre 2003, où le payeur général des Yvelines l’a accusé auprès du juge des tutelles de « détournements de fonds » ; que lorsqu’il a été menacé de poursuites par le payeur général des Yvelines c’est une mise au point très ferme de Mme la juge des tutelles qui a poussé la DASDY à souhaiter clarifier le dossier et le 2 décembre 2002, la DASDY prenait une nouvelle décision corrigeant la décision du 2 octobre 2000, sur le montant réclamé ; qu’il a formé un recours le 31 janvier 2003, devant la commission départementale d’aide sociale mais que sa décision du 27 mars n’a été porté à sa connaissance, après réclamation de sa part, que le 14 novembre 2003 ; qu’en résumé, il n’a pu obtenir tout au long de ces quatre années les renseignements qui lui permettaient de mieux préparer l’avenir de sa sœur ; qu’il n’a surtout pas eu de réponse à ses différents recours gracieux ; que les motivations de refus de la commission départementale à son recours formel ne lui paraissent pas claires ; qu’il sollicite que l’on surseoit à cette récupération jusqu’au décès de sa sœur ; que ce serait une mesure d’équité qui serait dans l’esprit de la nouvelle loi du 4 mars 2002, loi votée entre les deux décisions prises par la DASDY ;
        Vu l’avis du président du conseil général des Yvelines du 27 mai 2004, qui conclut au rejet de la requête par les moyens que compte tenu du montant des capitaux constituant le patrimoine de Mlle Béatrice A..., soit 313 220,60 euros au 31 décembre 2003, et du maintien de la prise en charge de ses frais en foyer d’hébergement au titre de l’aide sociale aux personnes handicapées le département demande le versement immédiat de la somme de 19 492,59 euros héritée par Mlle Béatrice A... ;
        Vu le nouveau courrier de M. Jean-Yves A... en date du 8 juillet 2004, qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’il souhaite être entendu par la commission centrale d’aide sociale ;
        Vu le recours formé tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale des Yvelines en date du 27 mars 2003 ;
        Vu la décision attaquée ;
        Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
        Vu le code de l’action sociale et des familles ;
        Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
        Vu la lettre en date du 4 janvier 2005, invitant les parties à l’instance à se présenter à l’audience ;
        Après avoir entendu, à l’audience publique du 1er avril 2005, Mlle Erdmann, rapporteure, M. Jean-Yves A..., en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
        Sur l’objet du litige :
        Considérant que si M. Jean-Yves A... ne paraît pas avoir contesté le titre exécutoire qui lui a été délivré pour avoir paiement de la créance litigieuse lequel titre versé au dossier ne comportait d’ailleurs pas indication du délai de recours cette circonstance n’est pas de nature à rendre sans objet la présente requête dirigée contre la décision de « révision » (sic) - qui est une décision de retrait partiel - de la commission d’admission à l’aide sociale de Versailles réduisant le montant de la récupération litigieuse en proportion des droits fiscaux à charge de Mlle Béatrice A... en qualité d’héritière de sa mère ;
        Sur les conclusions de la requête :
        Considérant que bien que cette interprétation soit particulièrement bienveillante il sera admis qu’en se bornant à faire valoir qu’il n’a jamais reçu les renseignements qu’il sollicitait et que les motifs des premiers juges ne lui paraissent pas clairs M. Jean-Yves A... a entendu critiquer la décision litigieuse pour obtenir devant le juge d’appel report de la récupération au décès de sa sœur et que sa requête est recevable ;
        Considérant que la commission d’admission à l’aide sociale de Versailles a, le 2 octobre 2000, décidé la récupération de la somme litigieuse ; que la décision du 2 décembre 2002 a « révisé » la précédente décision en ramenant la créance de 20 457,29 euros à 19 492,54 euros pour tenir compte des droits fiscaux acquittés par le tuteur ; que quelle que puisse être la légalité de cette réduction elle ne fait l’objet d’aucune contestation ; que saisie par M. Jean-Yves A... tuteur de sa sœur, l’assistée, d’un recours contre ladite décision la commission départementale d’aide sociale des Yvelines par la décision attaquée du 27 mars 2003, (notifiée sept mois plus tard !) a rejeté la demande au motif que la décision du 2 octobre 2000 n’avait donné lieu a aucun recours et qu’ainsi la décision attaquée était pour le quantum litigieux confirmative ;
        Considérant toutefois que la décision du 2 octobre 2000 n’est pas au dossier et qu’il n’y est pas justifié qu’elle fût assortie de la mention des voies et délais de recours ; qu’ultérieurement et avant la nouvelle décision du 2 décembre 2002, M. Jean-Yves A... a adressé au président du conseil général diverses correspondances au dossier dont certaines peuvent être regardées comme des recours gracieux qui devaient être transmis à la commission d’admission à l’aide sociale ; qu’aucune réponse comportant indication des voies de recours contentieux contre la décision initiale ne figure au dossier ; que le président du conseil général a en définitive soumis les recours gracieux à la commission d’admission à l’aide sociale qui a statué le 2 décembre 2002, alors que même si ces recours gracieux comportaient connaissance acquise de la décision du 2 octobre 2000, de la part de M. Jean-Yves A... aucune forclusion ne peut être opposée, dès lors que, comme il a été dit, le délai recours contre la décision initiale n’avait pu courir en l’absence de justification de l’indication dudit délai dans la notification de ladite décision et qu’il n’est pas justifié qu’une quelconque réponse à un recours gracieux formulé auprès du président du conseil général pour transmission à la commission d’admission à l’aide sociale par M. Jean-Yves A... plus de deux mois après la notification de cette décision initiale lui eut indiqué qu’il disposait d’un tel délais ;
        Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Jean-Yves A... a été destinataire d’une décision du 2 octobre 2000, dont il n’est pas justifié qu’elle mentionnât les voies et délais de recours ; qu’il n’est pas davantage justifié qu’une réponse adressée à l’un des « recours gracieux » de M. Jean-Yves A... ait mentionné ce délai ; que dès lors lorsque la commission d’admission à l’aide sociale a à nouveau statué le 2 décembre 2002, puis la commission départementale d’aide sociale par la décision attaquée du 27 mars 2003, le délai de recours contre la décision du 2 octobre 2000 n’était pas expiré ; qu’au contraire la décision du 2 décembre 2002 versée au dossier n’est pas confirmative, dès lors que le délai de recours contre la décision initiale n’avait pas couru ; qu’en toute hypothèse le premier juge ne pouvait opposer à M. Jean-Yves A... le caractère définitif faute de « recours » de la décision du 2 octobre 2000 ; qu’il y a lieu d’annuler la décision attaquée et - s’agissant du rejet par le premier juge non d’un moyen mais des conclusions de la demande dont il était saisi - d’évoquer cette demande ;
        Considérant qu’il résulte de l’instruction que les sommes récupérées au titre du retour à meilleure fortune de Mlle Béatrice A... du fait de l’héritage de sa mère (18 992,29 euros) sont sans commune mesure avec tant le patrimoine de l’assistée que le montant des prestations avancées, l’un et l’autre plus de dix fois supérieurs ; qu’il n’y a pas lieu dans ces conditions de faire droit aux conclusions seules formulées par M. Jean-Yves A... de reporter la récupération au décès de sa sœur dont il est le tuteur ; que si M. Jean-Yves A... dont la sœur paraît hébergée en foyer depuis 1982 au vu du dossier évoque que les difficultés pouvant survenir pour celle-ci en cas de dépendance justifient la préservation de l’intégralité de son patrimoine, il convient d’observer que la loi du 11 février 2005 prévoit la prise en charge par l’aide sociale après 60 ans des frais d’hébergement des personnes accueillies en foyer avant 60 ans dans les mêmes conditions qu’elles soient alors accueillies en maison de retraite ou en foyer spécialisé pour handicapés ; qu’en cet état la prise en charge de Mlle Béatrice A... sera de toute façon assurée quelle que soit son orientation ; que dans ces conditions en prélevant dès à présent la somme litigieuse il ne sera pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l’espèce ;
        Considérant enfin que si M. Jean-Yves A... évoque les vicissitudes de ses relations avec les divers agents en charge du dossier de sa sœur celles-ci sont par elles-mêmes sans incidence sur le présent litige, alors d’ailleurs que le juge des tutelles dans sa lettre du 8 juillet 2002 a fait une interprétation erronée des droits de l’administration de l’aide sociale dans le cadre du retour à meilleure fortune de l’assistée, qui ne s’imposait nullement aux services du département des Yvelines ;
        Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. Jean-Yves A... devant la commission départementale d’aide sociale des Yvelines doit être rejetée ;

Décide

        Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale des Yvelines du 27 mars 2003 est annulée.
        Art.  2.  -  La demande présentée devant la commission départementale d’aide sociale des Yvelines par M. Jean-Yves A... pour Mlle Béatrice A..., sa protégée, est rejetée.
        Art.  3.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
        Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er avril 2005 où siégeaient M. Lévy, président, Mme Kornmann, assesseure, Mlle Erdmann, rapporteure.
        Décision lue en séance publique le 11 avril 2005.
        La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer