Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance-vie - Qualification
 

Dossier no 031698

Mme R...
Séance du 30 juin 2005

Décision lue en séance publique le 21 septembre 2005

    Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 2002 à la direction départementale d’aide sociale du conseil général de l’Hérault, présentée par M. et Mme Bernard R... représentés par Me Vincent V..., dirigée contre la décision du 19 septembre 2002 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Hérault a confirmé la décision de récupération partielle à leur encontre de la créance départementale d’aide sociale pour un montant de 18 293,88 euros en tant que donataires de Mme Jacqueline R... ;
    Ils soutiennent que le département de l’Hérault ne se trouve dans aucun des cas visés à l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles dès lors qu’ils ne peuvent être regardés ni comme légataires ni comme donataires de Mme Jacqueline R... ;
    Vu le mémoire en défense en date du 18 juillet 2003, présenté par le département de l’Hérault, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les époux R... n’ont pas assuré la clause de soins et d’entretien prévu selon les termes de l’acte de vente et que ceux-ci n’ont pas pris en charge les frais de placement de Mme Jacqueline R... ;
    Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 16 février 2004, présenté par M. et Mme Bernard R... qui reprennent les conclusions de leur requête et les mêmes moyens ; ils soutiennent en outre que la commission départementale d’aide sociale de l’Hérault a commis une erreur de droit en requalifiant un contrat de vente en donation ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les lettres en date du 29 janvier 2004 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 30 juin 2005, Mme Marion, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme Jacqueline R..., née le 13 septembre 1912, a bénéficié de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de services ménagers du 1er mai 1983 au 1er décembre 1992 pour un montant total de 25 044,65 euros et pour la prise en charge de ses frais d’hébergement de placement en maison de retraite du 5 décembre 1997 au 1er janvier 2002 pour un montant total de 18 123,66 euros ; que par un acte en date du 22 février 1990, Mme Jacqueline R... a vendu à M. et Mme Bernard R... sa maison d’habitation pour un montant de 120 000 F (18 293,88 euros) entièrement converti en clause de soins et d’entretien ;
    Considérant que l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, devenu L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, dispose qu’une action en récupération est ouverte au département : « a)  contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; b)  contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ; c)  contre le légataire » ; que cette énumération revêt un caractère limitatif ;
    Considérant qu’une donation entre vifs qui consiste essentiellement dans l’aliénation gratuite que le disposant fait de tout ou partie de ses biens ou droits au profit d’une autre personne se distingue d’une vente ou d’un bail à nourriture, contrats conclu à titre onéreux ; que toutefois, la qualification donnée par les parties à un contrat ne saurait faire obstacle au droit pour l’administration de l’aide sociale de rétablir, s’il y a lieu et sous le contrôle du juge de l’aide sociale et sous réserve d’une question préjudicielle posée au juge judiciaire en cas de difficulté sérieuse, sa nature exacte ; qu’il lui incombe ainsi de constater, le cas échéant, qu’une vente constitue en réalité, en raison des conditions très favorables consenties à l’acquéreur, une donation déguisée ; qu’une conclusion identique peut être tirée notamment de la circonstance qu’un bail à nourriture comporte une disparité flagrante entre l’ampleur des avantages consentis par le bailleur et les charges assumées par le preneur ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à la date à laquelle a été vendue aux époux R... la maison d’habitation de Mme Jacqueline R..., l’intéressée était âgée de 78 ans et bénéficiait de la prise en charge de ses frais d’aide ménagère par l’aide sociale aux personnes âgées depuis de nombreuses années ; que par suite, M. et Mme Bernard R... ne sont pas fondés à soutenir que la commission départementale d’aide sociale de l’Hérault aurait commis une erreur de droit en estimant que l’acte litigieux devait être regardé comme une donation déguisée ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le recours de M. et Mme Bernard R... doit être rejeté,

Décide

    Art.  1er.  -  La requête de M. et Mme Bernard R... est rejetée.
    Art.  2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 30 juin 2005 où siégeaient M. Marette, président, M. Brossat, assesseur, et Mme Marion, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 21 septembre 2005.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer