Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : ASPH - Placement - Placement familial - Participation
 

Dossier no 061509

M. B... Johnny
Séance du 27 avril 2007

Décision lue en séance publique le 4 juin 2007

    Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 12 juin 2006, la requête présentée par l’union départementale des associations familiales de la Haute-Marne agissant par le chef du service des tutelles, le directeur et la tutrice, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Marne en date du 1er mars 2006 rejetant sa demande dirigée contre la décision de la commission d’admission à l’aide sociale du 28 janvier 2005 statuant sur sa demande de prise en charge des frais d’accueil chez un particulier agréé par l’aide sociale, par les moyens que le contrat établi dans la Marne avec l’accueillante s’avère plus favorable dans la famille d’accueil que la pratique mise en place en Haute-Marne ; que le domicile de secours de M. B... étant dans la Haute-Marne la prise en charge d’aide sociale des frais d’hébergement y a été sollicitée et que les bases de prise en charge sont inférieures dans la Haute-Marne à celles qui sont en vigueur dans la Marne ainsi que le montrent les fiches de prise en charge respectives dans ces départements ; que le différentiel est conséquent pour un majeur qui doit assurer le règlement de sa mutuelle, son assurance obsèques, des éléments UDAF, de l’assurance MRH et RC, soit 76,32 euros alors que le minimum laissé à sa disposition est de 71,94 euros et serait de 143,88 dans la Marne ; qu’il est ainsi inenvisageable que M. B... dispose d’argent de poche, de vêture, puisse acheter des médicaments etc. alors qu’il est atteint d’une myopathie très invalidante nécessitant la présente d’une tierce personne et l’usage de matériel médicalisé, et est affectivement très attaché à la tutrice demeurant dans la Marne ;
    Vu enregistré le 12 septembre 2006 le mémoire en défense du Président du conseil général de la Haute-Marne tendant au rejet de la requête, par les motifs que le Conseil général de la Haute-Marne a défini les critères de rémunération des familles d’accueil par délibération du 18 mars 2005 que dans la situation de M. B... la prise en charge de ses frais d’hébergement ne peut excéder le minima garanti et un loyer de 152,45 euros selon le règlement départemental de la Haute-Marne qui doit s’appliquer ; que M. B... dispose de 139,47 euros par mois constitués de 71,94 euros de minimum légal, plus 67,53 euros soit 10 % d’ACTP au taux de sujétions de 70 % et non seulement 71,94 euros ; qu’enfin les émoluments cités par la tutelle représentent 21 euros par mois et sont pris en charge par le conseil général de la Haute-Marne sous l’appellation « frais de gestion » ; qu’ainsi il reste mensuellement à M. B... une somme de 55,32 euros représentant les assurances et mutuelle qui pourraient être réglées par la tutelle sans grever les 72,00 euros de minimum légal d’argent de poche ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 avril 2007, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique sans qu’il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 441-1 du code de l’action sociale et des familles « l’agrément » de l’accueillant familial « vaut sauf mention contraire habilitation à recevoir les bénéficiaires de l’aide sociale au titre des articles L. 113-1 et L. 241-1 » ; qu’il résulte de ces deux derniers articles que les personnes handicapées ont droit à la prise en charge des frais d’accueil familial chez un particulier agréé dans les mêmes conditions que les personnes âgées ; qu’aux termes de l’article L. 442-1 « toute personne accueillie au domicile d’un accueillant familial... passe avec ledit accueillant un contrat écrit... conforme aux stipulations d’un contrat type établi par voie réglementaire » et faisant l’objet de l’annexe 3-8 au dit code ; que « ce contrat prévoit... notamment : 1o) une rémunération journalière des services rendus ainsi qu’une indemnité de congés... 2o) le cas échéant une indemnité en cas de sujétions particulières 3o) une indemnité représentative des frais d’entretien courant de la personne accueillie 4o) une indemnité représentative de mise à disposition de la ou des pièces réservées à la personne accueillie » ; qu’à ceux de l’article D. 442-2 « 1o) le montant minimum de la rémunération journalière des services rendus visée au 1o) de l’article L. 442-1 est égal à 2,5 fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance...  ; la rémunération journalière... donne lieu au paiement d’une indemnité de congés payés conformément aux dispositions de l’article L. 223-11 du code du travail 2o) les montants minimum et maximum de l’indemnité journalière pour sujétions particulières... sont respectivement égaux à 1 fois et 4 fois le minimum garanti... 3o) les montants minimum et maximum de l’indemnité journalière représentative des frais d’entretien courant... sont respectivement égaux à 2 et 5 fois le minimum garanti...  » ; que selon le contrat type applicable « le montant de l’indemnité représentative de mise à disposition de l’une des pièces réservées à la personne accueillie est négocié entre l’accueillant familial et (cette personne)... le président du conseil général détient un pouvoir de contrôle sur ce montant, en cas de montant manifestement abusif l’agrément de l’accueillant familial peut être retiré » ;
    Considérant par ailleurs qu’aucune disposition de la loi du 17 janvier 2002 et de ses décrets d’application n’a prévu qu’un minimum de revenu était laissé à la personne accueillie dans les mêmes conditions qu’aux personnes hébergées en établissement ; que l’article L. 132-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit la prise en compte des ressources de toute nature sous réserve qu’elles ne soient pas exonérées par des dispositions spécifiques ; qu’ainsi les départements sont libres de fixer dans leurs règlements départementaux d’aide sociale le pourcentage de revenu minimum laissé à l’assisté ; que bien que la présente juridiction n’ait pas trouvé la disposition dont il s’agit insérée au règlement départemental d’aide sociale de la Haute-Marne version 1999, dont elle dispose, il n’est pas contesté que ce minimum a été fixé à 10 % des revenus de l’assisté par ce département ;
    Considérant qu’il résulte de ces dispositions que sous réserve de dispositions du code de l’action sociale et des familles qui s’imposent aux départements, ceux-ci sont libres de déterminer le montant des dépenses prises en compte dans le cadre des « fourchettes » respectivement fixées pour chaque catégorie ; que toutefois s’agissant du montant des « loyers » (indemnités d’occupation) le montant fixé au contrat s’impose au département en charge de la dépense en fonction du domicile de secours de l’assisté, dès lors que le président du conseil général du département de résidence éventuellement seul compétent à ce faire, n’a pas retiré l’agrément dans l’exercice de son pouvoir de contrôle et n’a pas obtenu un loyer différent de celui négocié par les parties ;
    Considérant en premier lieu que les moyens de l’union départementale requérante tirés de ce que la situation de ses protégés serait plus favorable lorsqu’ils sont accueillis en placement familial chez un particulier agréé à la charge du département de la Marne, qu’à celle du département de la Haute-Marne sont inopérants ;
    Considérant en deuxième lieu que les décisions attaquées fixent :
    -  à 2,5 fois le SMIC horaire plus indemnités de congés payés le montant de la rémunération prévu au 1 de l’article D. 442-2 ;
    -  à 3 minima garantis (pour une ACTP au taux de sujétions de 70 %) l’indemnité pour sujétions particulières, soit un montant à l’intérieur de la « fourchette » du 2o de l’article D. 442-2 déterminé sans erreur d’appréciation (niveau du contrôle qu’il y a lieu d’effectuer pour le juge de plein contentieux de l’aide sociale) au regard des sujétions imposées par l’assisté ;
    -  à 5 minima garantis l’indemnité de dépenses courantes prévue au 3 de cet article, soit le maximum.
    Considérant qu’ainsi à tous égards, ce qui n’est d’ailleurs nullement contesté, les décisions attaquées n’ont pas fait une inexacte application des indemnités contractuellement fixées à prendre en compte au titre de l’aide sociale.
    Considérant, en troisième lieu, que si le montant de l’indemnité pour occupation dite « loyer » fixé par les décisions attaquées est légèrement inférieur à celui prévu au contrat passé entre l’accueillante et l’assisté, qui s’impose au président du conseil général de la Haute-Marne tant que celui de la Marne, n’a pas retiré l’agrément ou obtenu une modification, sans qu’une telle situation ne doive être regardée comme attentatoire au principe d’autonomie des collectivités locales, puisqu’elle procède d’un contrat type prévu par arrêté qui trouve sa base légale dans les dispositions législatives précitées, ce moyen n’est pas soulevé par le requérant et n’est pas d’ordre public ; qu’au surplus il appartient au juge de plein contentieux de l’aide sociale de constater que globalement les dépenses prises en compte par le département de la Haute-Marne au titre de l’ensemble de la rémunération de l’accueillant sont supérieures à celles qui l’auraient été dans la Marne selon les chiffres mêmes fournis par le requérant ;
    Considérant, en quatrième lieu, que l’union requérante soutient que l’insuffisance du montant « d’argent de poche » laissé par l’application des dispositions applicables dans la Haute-Marne ne laisse à son protégé qu’un montant insuffisant pour s’acquitter de divers frais obligatoires ou indispensables et ne lui laisse, s’il s’en acquitte, au moins partiellement, aucun minimum d’argent de poche pour les autres dépenses courantes ; que toutefois d’une part, et en tout état de cause, il résulte de ce qui précède, que le texte applicable ne prévoit dorénavant aucun argent de poche en l’espèce et que la requérante n’est pas fondée à se plaindre de celui accordé par les dispositions applicables à la Haute-Marne ; d’autre part, en tout état de cause, les précisions données par le défendeur, d’où il résulte en réalité que M. B... disposerait bien d’un minimum d’argent de poche supérieur à celui allégué par l’UDAF dans sa requête, ne sont pas démenties en l’absence de mémoire en réplique produit par celle-ci ;
    Considérant en définitive que l’union requérante n’établit pas que la participation du département de la Haute-Marne aux frais d’accueil familial de M. B... ait été fixée en contrariété de l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires suscitées qui s’imposaient à lui ; qu’il est fait observer que si pour les personnes accueillies en établissement le minimum obligatoirement laissé par tous les départements a été porté à 30 % du montant mensuel de l’allocation aux adultes handicapés, tel n’est pas le cas en ce qui concerne les personnes accueillies au titre de l’accueil familial des personnes handicapées, et qu’ainsi il demeure non établi qu’à la date de la présente décision la participation litigieuse soit devenue contraire à l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires applicables ; qu’enfin dans la mesure où l’union requérante semble invoquer le principe d’égalité devant les charges publiques, ce moyen est inopérant dans la mesure où les collectivités d’aide sociale ne sont tenues, sur le fondement des dispositions législatives applicables, que des obligations imparties par celles-ci et les dispositions réglementaires nationalement prises par l’Etat pour leur application, mais demeurent libres dans leurs règlements départementaux d’aide sociale d’aller au delà desdites obligations ; qu’il n’appartient pas au juge de se prononcer sur l’opportunité des situations respectives ainsi constatées, soit dans les divers départements, soit pour les personnes admises respectivement en établissement ou en accueil familial ; qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête susvisée ne peut être, en toute hypothèse, que rejetée,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête de l’union départementale des associations familiales de la Haute-Marne est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 avril 2007 où siégeaient M. Levy, président, M. Reveneau, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 4 juin 2007.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer