Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Conditions - Etrangers
 

Dossier no 050055

Mme M... Monica
Séance du 6 mars 2007

Décision lue en séance publique le 13 mars 2007

    Vu la requête du 8 décembre 2004, présentée par M. le président du conseil général du Morbihan, tendant à l’annulation de la décision du 17 septembre 2004 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du même département a, d’une part, annulé sa décision de rejet de la demande d’ouverture d’un droit au revenu minimum d’insertion déposé par Mme Monica M... le 15 juin 2004 et décidé qu’il y avait lieu d’autoriser le versement à titre dérogatoire de l’allocation de revenu minimum d’insertion et a, d’autre part, déclaré infondé un indu de 367,73 euros ;
    Le requérant soutient que Mme Monica M... ne remplit pas les conditions fixées par l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles, notamment celles relatives aux conditions de séjour en France et d’engagement d’insertion dans la communauté nationale ; que sa situation méconnaît les règles posées par l’article L. 262-9 du même code, n’étant ni titulaire d’une carte de résident, ni titulaire d’un titre de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire », ni d’un titre lui conférant des droits équivalents à un titre de séjour temporaire ; que le titre de séjour provisoire dont elle dispose a été octroyé en application de l’article 12 bis 11o de l’ordonnance du 2 novembre 1945, qui n’entre pas au nombre des catégories énumérées à l’article L. 262-9 précité ; que l’intéressée ne justifie pas d’une résidence ininterrompue de cinq années en France ; que la continuité des soins, raison pour laquelle Mme Monica M... a demandé l’octroi du revenu minimum d’insertion, n’entre pas dans les conditions d’ouverture du droit au revenu minimum d’insertion énumérées à l’article L. 262-1 précité ; que l’obligation de poursuivre des soins ne démontre pas la vocation de l’intéressée à s’insérer dans la communauté nationale ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 et les décrets subséquents ;
    Vu les lettres du 15 décembre 2006 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 mars 2007 M. Botteghi, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que Mme Monica M..., née en Roumanie et de nationalité congolaise, qui est arrivée en France en juin 2003 munie d’un visa de court séjour, a obtenu, à la suite de l’identification d’une pathologie lourde et évolutive nécessitant une prise en charge médicale suivie, une autorisation provisoire de séjour valable de juin 2003 février 2004, puis un titre de séjour délivré sur le fondement du 11o de l’article 12 bis précité de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ; que l’intéressée ne disposant pas de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses enfants légalement installés sur le territoire français, elle a formulé le 15 juin 2004 une demande de revenu minimum d’insertion que le président du conseil général a rejetée ;
    Considérant, d’une part, que l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles dispose : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-9 du même code : « Les étrangers titulaires de la carte de résident ou du titre de séjour prévu au cinquième alinéa de l’article 12 de l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France, ou encore d’un titre de même durée que ce dernier et conférant des droits équivalents, sous réserve d’avoir satisfait sous ce régime aux conditions prévues au premier alinéa de l’article 14 de ladite ordonnance, ainsi que les étrangers titulaires d’un titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident, peuvent prétendre au revenu minimum d’insertion. [...] Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux ressortissants des Etats membres de l’Union européenne et des autres Etats parties à l’accord sur l’Espace économique européen. » ;
    Considérant, d’autre part, que l’article 12 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, alors en vigueur, prévoit l’octroi d’une « carte de séjour temporaire délivrée à l’étranger qui, désirant exercer en France une activité professionnelle soumise à autorisation, justifie l’avoir obtenue porte la mention de cette activité, conformément aux lois et règlements en vigueur » ; qu’en vertu de l’article 12 bis, alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit [...] 11o  à l’étranger résidant habituellement en France dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par le préfet ou, à Paris, le préfet de police, après avis du médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l’intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d’Etat. » ;
    Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions, que seuls les étrangers satisfaisant aux conditions posées par l’article L. 262-9 précité du code de l’action sociale et des familles peuvent légalement prétendre à l’allocation du revenu minimum d’insertion prévue à l’article L. 262-1 du même code ; qu’il est constant que Mme Monica M... ne dispose ni d’une carte de résident, ni d’un titre de séjour octroyé sur le fondement du cinquième alinéa de l’article 12 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, ni aucun des titres équivalents prévus par l’article L. 262-9 précité du code de l’action sociale et des familles ; que, dans ces conditions - et quelles que soient, d’une part, les possibilités d’installation définitive de Mme Monica M... sur le territoire français et, d’autre part, les difficultés financières qu’elle pouvait rencontrer -, cette dernière ne pouvait légalement bénéficier du revenu minimum d’insertion lors du dépôt de sa demande ; que c’est ainsi à bon droit que le président du conseil général a refusé l’ouverture d’un droit au revenu minimum d’insertion ; qu’il est par suite fondé à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale du Morbihan a annulé sa décision du 19 juillet 2004 refusant à la requérante l’allocation de revenu minimum d’insertion,
    Considérant qu’il appartient à la présente juridiction, saisie par l’effet dévolutif de l’appel, de statuer sur les autres moyens présentés par Mme Monica M... devant la commission départementale d’aide sociale ;
    Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, le président du conseil général était légalement tenu de rejeter la demande de versement du revenu minimum d’insertion de Mme Monica M..., quels qu’aient pu être les mérites de cette demande, dès lors que la situation de l’intéressée n’était pas de celles permettant à un étranger de bénéficier du revenu minimum d’insertion ; qu’ainsi, Mme Monica M... n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision du 19 juillet 2004 rejetant sa demande d’allocation du revenu minimum d’insertion ; qu’il n’appartient pas aux juridictions de l’aide sociale de déroger aux dispositions susvisées en autorisant l’ouverture « à titre dérogatoire et humanitaire » d’un droit à l’allocation de revenu minimum d’insertion, contrairement à ce qui est demandé ;
    Considérant, en second lieu, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’opérer une remise gracieuse de la somme de 367,73 euros mise à la charge de Mme Monica M... au titre d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Morbihan du 17 septembre 2004 est annulée.
    Art. 2.  -  Les conclusions présentées par Mme Monica M... devant la commission départementale d’aide sociale du Morbihan tendant à l’annulation de la décision du président du conseil général rejetant sa demande en date du 15 juin 2004 d’ouverture de droits au revenu minimum d’insertion sont rejetées.
    Art. 3.  -  Il est fait remise gracieuse de l’indu de 367,73 euros mis à la charge de Mme Monica M...
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 mars 2007 où siégeaient Mme Hackett, présidente, M. Vieu, assesseur, M. Botteghi, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 13 mars 2007.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer