Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Répétition de l’indu - Ressources
 

Dossier no 051351

M. M... Ahmed
Séance du 2 mars 2007

Décision lue en séance publique le 9 mars 2007

        Vu, enregistrés le 1er septembre 2004 par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Val-de-Marne et le 28 novembre 2005 par le secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, la requête formée et le mémoire complémentaire présenté par M. Ahmed M..., tendant à l’annulation de la décision du 12 mai 2004 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne a confirmé les décisions du président du conseil général du 4 février 2004 et du 1er mars 2004 lui refusant tout remise concernant ses deux dettes à hauteur de 3 290,93 euros et de 8 243,84 euros nées de trop-perçus d’allocation de revenu minimum d’insertion pour les périodes du mois de novembre 2000 au mois d’octobre 2001 et du mois de novembre 2001 au mois de septembre 2003 ;
    Le requérant fait valoir qu’il n’a jamais tenté de tromper sciemment la caisse d’allocations familiales du Val-de-Marne, seules des erreurs dans ses déclarations trimestrielles de ressources pouvant lui être reprochées ; qu’il est aujourd’hui sans emploi et ne dispose d’aucun revenu, à l’exception des aides qui lui sont procurées en vue de sa subsistance par des tiers ; qu’il est endetté auprès de sa banque ; qu’il subvient aux besoins de son frère, placé sous sa curatelle ; que la précarité de sa situation ne lui permet pas de rembourser les dettes mises à sa charge ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les observations présentées par le président du conseil général du Val-de-Marne, qui conclut au rejet de la requête compte tenu du caractère frauduleux des déclarations du requérant dans la période litigieuse, lequel n’a indiqué avoir perçu de revenus qu’au mois de septembre 2002 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 ;
    Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 2 mars 2007, M. Morosoli, rapporteur, et les observations de M. Ahmed M..., et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique,
    Considérant qu’aux termes de l’article R. 262-3 du code de l’action sociale et des familles, substitué à l’article 3 du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44, alinéa 1, du code de l’action sociale et des familles, substitué à l’article 28, alinéa 1, du décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41, alinéa 1, du code de l’action sociale et des familles, substitué à l’article 29, alinéa 1, de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 : « Tout paiement indu d’allocations est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou s’il n’est plus éligible au revenu minimum d’insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41, alinéa 4, du code de l’action sociale et des familles, substitué à l’article 29, alinéa 5, de la loi no 88-1088 du 1er décembre 1988 : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sur décision prise selon des modalités fixées par voie réglementaire » ;
    Considérant que M. Ahmed M... a été admis au bénéfice du revenu minimum d’insertion pour une personne seule à compter du mois de janvier 2000 ; qu’à la suite d’un contrôle diligenté par la caisse d’allocations familiales du Val-de-Marne au mois de septembre 2003, il est apparu que l’intéressé n’avait pas déclaré certains revenus d’activité ni certaines indemnités journalières d’assurance chômage et d’assurance maladie depuis l’ouverture de ses droits à l’allocation ; que, pour ce motif, M. Ahmed M... s’est vu réclamer le remboursement de deux indus à hauteur de 3 290,93 euros et de 8 243,84 euros nés de trop-perçus d’allocation de revenu minimum d’insertion pour les périodes du mois de novembre 2000 au mois d’octobre 2001 et du mois de novembre 2001 au mois de septembre 2003 ; que ses demandes de remise de dette ont été rejetées par deux décisions du président du conseil général du Val-de-Marne en date du 4 février 2004 et du 1er mars 2004 ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions des articles L. 134-1 et suivants et de l’article L. 262-39 du code de l’action sociale et des familles que les commissions départementales d’aide sociale sont des juridictions administratives lorsqu’elles statuent sur les décisions relatives à l’allocation de revenu minimum d’insertion ; qu’il suit de là que ces juridictions doivent observer les règles générales de procédure qui n’ont pas été écartées par une disposition législative expresse ou qui ne sont pas incompatibles avec leur organisation ; qu’au nombre de ces règles figurent notamment celles suivant lesquelles ces décisions doivent être motivées et répondre à l’ensemble des moyens soulevés par les parties lorsqu’ils ne sont pas inopérants ; qu’en tout état de cause, et pour l’application des dispositions précitées relatives à la procédure de remise gracieuse des dettes résultant de trop-perçus d’allocations de revenu minimum d’insertion, il appartient aux juridictions de l’aide sociale, eu égard à leur qualité de juges de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité de la décision prise par le président du conseil général pour accorder ou refuser la remise gracieuse d’une dette, mais encore de se prononcer elles-mêmes sur le bien-fondé de la demande de l’intéressé au vu de l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié, et notamment de la situation de précarité invoquée ;
    Considérant qu’en se bornant à confirmer les décisions du président du conseil général du Val-de-Marne attaquées devant elle sans répondre aux arguments soulevés par le requérant, tirés notamment de la précarité de sa situation et de l’erreur de droit justificative de certaines omissions dans ses déclarations trimestrielles de ressources, la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne a insuffisamment motivé sa décision ; que l’insuffisance de motifs équivaut, en matière de justice administrative, à l’absence de motivation ; que, par suite, la décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne en date du 12 mai 2004 doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant qu’aucune pièce du dossier ne permet de déterminer sur quel fondement précis ont été déterminés ni le montant, ni la réalité des deux indus réclamés à l’intéressé ; qu’alors que M. Ahmed M... reconnaît avoir pu commettre certaines erreurs en remplissant ses déclarations trimestrielles de ressources entre les mois de novembre 2000 et de septembre 2003, il n’est pas établi que lesdites déclarations fussent frauduleuses et dénuées dans leur ensemble d’indications quant à ses revenus effectifs, quelle que fût leur nature ; qu’en tout état de cause, il ressort de ces déclarations trimestrielles, contrairement aux allégations de la caisse d’allocations familiales du Val-de-Marne, que M. Ahmed M... a signalé avoir perçu certains revenus d’activité intérimaire au mois de juin 2002, au mois de septembre 2002, au mois d’avril 2003, au mois de mai 2003, au mois de juin 2003 et au mois de juillet 2003 ; que le rapport de l’agent de contrôle de la caisse d’allocations familiales, qui s’autorise à faire état de redressements fiscaux imposés chaque année au requérant, entre 1995 et 1999, est sans aucune incidence à cet égard ; que ce même rapport, qui se borne par ailleurs à relever que l’intéressé aurait déclaré différents domiciles à différentes personnes ou organismes avec lesquels il aurait été en rapport dans la période litigieuse, n’a pas davantage de valeur probante quant au caractère frauduleux des déclarations de ressources adressées par M. Ahmed M... à la caisse d’allocations familiales ; qu’ainsi, à supposer même que la réalité d’un indu fût constituée et que le président du conseil général eût été en droit de réclamer au requérant l’ensemble des sommes perçues au titre du revenu minimum d’insertion depuis son admission au bénéfice de l’allocation, il y a lieu d’accorder à ce dernier, dans les circonstances particulières de l’espèce, eu égard à la précarité de la situation de M. Ahmed M..., qui est célibataire, se trouve sans emploi, doit subvenir aux besoins de son frère placé sous sa curatelle et ne peut faire face à ses obligations bancaires, une remise de 80 % de chacune de ses deux dettes à hauteur de 3 290,93 euros et de 8 243,84 euros nées de trop-perçus d’allocation de revenu minimum d’insertion,

    Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Val-de-Marne en date du 12 mai 2004, ensemble les deux décisions du président du conseil général du Val-de-Marne en date du 4 février 2004 et du 1er mars 2004, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est consenti à M. Ahmed M... une remise de 80 % de chacune de ses deux dettes à hauteur 3 290,93 euros et de 8 243,84 euros nées de trop-perçus d’allocation de revenu minimum d’insertion.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 2 mars 2007 où siégeaient Mme Hackett, présidente, M. Vieu, assesseur, M. Morosoli, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 9 mars 2007.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer