Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Personnes handicapées - Hébergement - Ressources
 

Dossier no 061655

M. C... Boris
Séance du 27 avril 2007

Décision lue en séance publique le 4 juin 2007

    Vu enregistrée à la direction des affaires sanitaires et sociales de la Gironde le 20 février 2006, la requête du président du conseil général de la Gironde tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision du 18 novembre 2005 de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde réformant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Gradignan du 17 juin 2005, rejetant la demande d’aide sociale à l’hébergement de M. Boris C... par les moyens que M. C... n’a pas contesté la décision du 16 décembre 2004 statuant sur sa demande de prise en charge, au motif que la demande ne correspondait pas à un accueil temporaire ; que son recours contre la décision du 17 juin 2005 a été déposé le 8 octobre 2005, soit plus de deux mois après la notification intervenue le 29 juin 2005 ; que l’avocat de M. C... a reconnu être parfaitement informé du sens du second dossier en contestant l’analyse du département concernant la problématique posée par la nature de l’établissement d’orientation de la COTOREP et de celle de l’établissement ayant accueilli M. C... ; qu’ainsi en n’examinant pas la recevabilité du recours quant au respect des délais, la commission départementale a entaché son jugement d’irrégularité ; que la COTOREP a préconisé le type d’accueil répondant aux besoins de l’intéressé ; que sa décision n’a pas été contestée et s’impose à l’établissement ; que l’article 2 de la convention entre le foyer et le département de la Seine-Saint-Denis prévoit que les admissions peuvent avoir pour préalable une décision d’orientation dans un foyer de vie prononcée par la COTOREP ; que celle-ci a orienté vers un foyer d’hébergement et que le foyer de vie le Logis n’était donc pas habilité à accueillir M. C... ; que la commission d’admission du 17 juin 2005 a pris une décision conforme à la décision de la COTOREP à cet égard et qu’en n’en tirant pas la conséquence la commission départementale a entaché son jugement d’illégalité ; qu’est également entaché d’erreur de droit en ce que la décision de la commission d’admission est régulière et qu’en n’examinant pas les conséquences du non-respect de la décision de la COTOREP et en faisant droit à la demande à titre exceptionnel et en pure opportunité, la commission départementale a commis une erreur de droit ; que la décision du 17 juin 2005 est intervenue suite au dépôt par M. C... d’une demande le 9 décembre 2004, soit plus de deux mois après la sortie de M. C... du foyer de vie Le logis ; qu’une telle demande tardive n’a pu créer de droit à l’aide sociale pour M. C... ni d’obligation pour le département ;
    Vu les pièces transmises par le Président du conseil général de la Gironde enregistrées le 16 avril 2007 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 avril 2007, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que le dossier soumis à la commission départementale d’aide sociale ne comportait la justification de notification d’aucune des deux décisions de la commission d’admission à l’aide sociale de Talence, successivement intervenues les 16 décembre 2004 et 17 juin 2005 ; que le président du conseil général appelant n’en justifie toujours pas ; que la connaissance acquise par l’avocat de l’intimé d’une position de l’administration sur la demande de celui-ci n’était pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux contre la décision de la commission d’admission ; qu’ainsi la commission départementale d’aide sociale devant laquelle l’administration, qui n’avait pas produit en défense, au vu du dossier soumis à la commission centrale, n’avait soulevé aucune fin de non-recevoir pouvait d’une part ne pas soulever une telle forclusion, d’autre part se dispenser d’y statuer expressément ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutient le président du conseil général appelant, la décision du premier juge est à cet égard régulière et fondée ;
    Considérant que la COTOREP, qui, d’ailleurs, ne pouvait pas ignorer en décidant rétroactivement la période de prise en charge « d’hébergement », dont ses services avaient dès l’origine du placement admis l’opportunité, le 19 octobre 2004, par une « décision valable cinq mois et vingt-six jours à compter du 5 avril 2004 » (date d’admission au foyer de Noisy-le-Grand qui est un foyer « de vie »), qu’elle orientait en réalité non vers un foyer « d’hébergement » réservé aux seuls travailleurs de centre d’aide par le travail mais vers un foyer « de vie » recevant également des non-travailleurs et, par exemple, des handicapés en formation, comme c’était le cas en l’espèce, a néanmoins orienté vers un foyer « d’hébergement » ; que ni l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale devenu article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles qui concerne les « foyers et foyers logements » ni aucune autre disposition normative, dont ne tient pas encore lieu la catégorisation opérée par la circulaire rappelée par le dictionnaire permanent d’action sociale, seul invoqué par l’appelant, ne distingue entre « foyer de vie » et « foyer d’hébergement » ; qu’il n’existe juridiquement que des « foyers » (établissements génériques) quelles que puissent être la pratique et la motivation des décisions d’orientation ; que si le président du conseil général appelant fait en outre valoir que « l’agrément » (s’agit-il de l’autorisation ou de l’habilitation ?) du foyer de Noisy-le-Grand ne permettait l’accueil que de handicapés travailleurs, cette décision n’est pas au dossier et la convention qui y figure, se borne à prévoir l’accueil d’« adultes lourdement handicapés physiques présentant éventuellement des troubles associés », situation qui était à l’évidence celle de M. C... ; qu’ainsi le président du conseil général appelant n’est fondé à soutenir, comme il le fait, faisant flèche de tous moyens juridiques, ni que la commission départementale d’aide sociale aurait méconnu la décision de la COTOREP, ni, en toute hypothèse, que celle-ci aurait méconnu « l’agrément » de l’établissement ; qu’il peut d’ailleurs être relevé qu’en fait le foyer de Noisy-le-Grand reçoit, selon les indications données par ses responsables, indifféremment des handicapés travailleurs ou non travailleurs justifiant des conditions d’admission à l’aide sociale à l’hébergement des adultes handicapés ;
    Considérant que la COTOREP, dont les services étaient, comme il a été dit, d’ailleurs, dès l’origine, favorables à l’admission au foyer de Noisy-le-Grand, a régularisé par une décision dont la rétroactivité n’est pas contestée, l’admission dont il s’agit ; qu’en toute hypothèse la convention passée entre le département de Seine-Saint-Denis et l’association gestionnaire du foyer de Noisy-le-Grand prévoyant l’admission uniquement après une décision préalable de la COTOREP n’est pas opposable à M. C... dans les circonstances de l’espèce ;
    Considérant par contre que le président du conseil général appelant est fondé à soutenir que la commission départementale d’aide sociale ne pouvait, après avoir énuméré les motifs de droit pour lesquels elle considérait que la prise en charge n’était pas légalement possible, faire droit à la demande « à titre exceptionnel... considérant la situation sociale du requérant » ; que fût-il en effet juge de plein contentieux, le juge de l’aide sociale est, sous réserve d’un pouvoir de remise ou de modération qu’il détient en matière de récupération, juge du plein contentieux de la légalité objective, des décisions administratives ; qu’il ne saurait au motif qu’il examine non seulement la légalité mais encore le « bien-fondé » de la décision, formule d’ailleurs ambiguë et prêtant à l’erreur, prononcer une admission à l’aide sociale, dont il constate lui-même qu’elle n’est pas légalement possible même si elle est humainement justifiée ; une telle démarche quelle que puisse être « la sensibilité » qui l’inspire conduisant le juge à empiéter clairement sur les pouvoirs gracieux du Conseil général de la collectivité d’aide sociale en l’absence de toute saisine préalable de celui-ci dans ce cadre ; que d’ailleurs de tels pouvoirs n’appartiennent pas non plus au Médiateur de la République mais relèvent de la seule compétence gracieuse du conseil général de la Gironde, auquel il appartient à M. C... de s’adresser, le cas échéant, si la décision attaquée se trouve en définitive juridiquement confirmée ; qu’il y a lieu par suite pour la commission centrale d’aide sociale d’examiner, comme elle a déjà plus haut commencé à le faire pour suivre l’argumentation de l’appelant, dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel, les autres moyens formulés en appel par le président du conseil général de la Gironde, et ceux formulés en première instance par M. C... ;
    Considérant que le président du conseil général appelant croit devoir formuler en appel en ultime moyen, jamais invoqué auparavant, tiré de ce que l’article R. 131-1 du code de l’action sociale et des familles interdisait l’admission a posteriori à l’aide sociale de M. C... ; qu’il est rappelé que celui-ci est entré au foyer le 5 avril 2004, y est resté jusqu’au 30 septembre, que la COTOREP a été saisie seulement oralement le 18 mars et par écrit le 29 juillet, qu’elle a statué le 19 octobre dans les conditions de rétroactivité susrappelées ;
    Considérant que l’administration (même si c’est le président du conseil général et non la commission d’admission par construction...) est juridiquement fondée à substituer pour la première fois en appel au motif retenu par la commission d’admission à l’aide sociale un motif (davantage qu’une base légale dans la présente espèce selon la présente juridiction...) tiré du retard de présentation de la demande au regard des dispositions de l’article R. 131-1, dès lors que l’instance d’admission a compétence liée pour rejeter une demande présentée plus de quatre mois après l’accueil dans l’établissement ; qu’ainsi les motifs, dorénavant avancés par le président du conseil général pour justifier la décision attaquée, peuvent l’être utilement ;
    Mais considérant qu’il résulte du supplément d’instruction auquel a dû procéder le juge d’appel que M. C... a dès le 7 juin 2004, soit deux mois à peine après l’admission dans l’établissement, et en toute hypothèse moins de quatre mois après celle-ci, période qu’il y a lieu de prendre en compte en l’espèce, présenté une demande d’aide sociale au titre de « l’accueil temporaire » ;
    Considérant, il est vrai, qu’en réponse au supplément d’instruction ainsi diligenté le président du conseil général de la Gironde soutient qu’il s’agit d’une « demande extralégale » ;
    Considérant en toute hypothèse qu’alors même qu’à cette date du 7 juin 2004 n’aurait pas été publié l’ensemble des textes d’application de la loi du 2 janvier 2002 régissant l’accueil temporaire expressément mentionné par cette loi, aucune disposition législative ou réglementaire n’interdisait sur le fondement de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale devenu L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles, une prise en charge au titre de l’aide sociale légale, d’un hébergement en foyer qui soit de caractère temporaire ;
    Considérant que la distinction entre « accueil en établissement » et « accueil temporaire » faite par le formulaire produit par l’appelant est dépourvue de tout fondement et de toute base légaux ; que, dans ces conditions, dans l’ensemble des circonstances de l’espèce, l’ultime motif soulevé en appel par l’administration ne peut davantage que ceux qui ont fondé antérieurement sa position, être retenu ;
    Considérant dans ces conditions que la requête sera rejetée,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du président du conseil général de la Gironde est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 avril 2007 où siégeaient M. Levy, président, M. Reveneau, assesseur, Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 4 juin 2007.
    La République mande et ordonne au ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, au ministre de la santé et des solidarités, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M.  Defer