Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Conditions - Dispositions transitoires
 

Dossier no 061152

Mme M...
Séance du 14 octobre 2007
Décision lue en séance publique le 23 janvier 2008
    Vu le recours en date du 7 juin 2006 présenté par le département du Var, représenté par le président du conseil général en exercice, qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o)  D’annuler la décision du 10 avril 2006 de la commission départementale d’aide sociale du Var ayant annulé, à la demande de Mme M... la décision en date du 18 novembre 2005 par laquelle le président du conseil général du Var a refusé à celle-ci l’ouverture de droits au revenu minimum d’insertion à compter du mois d’octobre 2005 ;
    2o)  De rejeter la demande de Mme M... tendant à l’annulation de la décision en date du 18 novembre 2005 ;
    Il soutient que la commission départementale d’aide sociale ne peut se substituer au président du conseil général pour accorder le revenu minimum d’insertion à titre dérogatoire, sur le fondement de l’article R. 262-16 du code de l’action sociale et des familles ; que la décision de la commission départementale d’aide sociale est insuffisamment motivée faute d’indiquer en quoi l’entreprise créée par Mme M... lui aurait permis de s’insérer professionnellement ; que celle-ci s’est fondée sur des éléments inopérants, tel que le caractère erroné des conseils du comptable de Mme M..., ou infondés, dès lors que l’activité de cette dernière, non viable, ne lui permettait pas de s’insérer professionnellement ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 4 septembre 2006 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 décembre 2007 M. Alexandre Lallet, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; que l’article L. 262-12 du même code dispose que : « Pour les personnes qui exercent une activité non salariée, les modalités particulières de détermination des ressources provenant de l’exercice de cette activité, adaptées à la spécificité des différentes professions, sont fixées par voie réglementaire. » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-15 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction alors en vigueur : « Les personnes relevant de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux peuvent prétendre à l’allocation de revenu minimum d’insertion lorsqu’au cours de l’année de la demande et depuis l’année correspondant au dernier bénéfice connu elles n’ont employé aucun salarié et ont été soumises aux régimes d’imposition prévus aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts et qu’en outre le dernier chiffre d’affaires annuel connu actualisé, le cas échéant, n’excède pas, selon la nature de l’activité exercée, les montants fixés auxdits articles » ; qu’il résulte de l’article R. 262-16 du même code alors applicable que lorsque les conditions fixées à l’article R. 262-15 ne sont pas satisfaites, le président du conseil général peut, à titre dérogatoire et pour tenir compte de situations exceptionnelles, décider que les droits de l’intéressé à l’allocation de revenu minimum d’insertion seront examinés » ;
    Considérant, d’autre part, qu’il résulte des articles L. 134-4 et L. 262-39 du code de l’action sociale et des familles alors en vigueur qu’un recours contentieux tendant à la réformation des décisions prises par le président du conseil général peut être formé par le demandeur ;
    Considérant qu’il résulte de ces dispositions combinées qu’il appartient au juge de l’aide sociale, saisi d’une demande tendant à l’annulation d’une décision refusant l’ouverture de droits au revenu minimum d’insertion fondée sur les dispositions de l’article R. 262-15 du code de l’action sociale et des familles, de vérifier, d’une part, que le président du conseil général s’est bien assuré que les conditions posées à cet article ne sont pas remplies et, d’autre part, qu’il a bien procédé à l’examen de la situation du demandeur sur le fondement de l’article R. 262-16 de ce code relatif à l’octroi de l’allocation de revenu minimum d’insertion à titre dérogatoire ; que, si tel n’est pas le cas, il lui appartient, en premier lieu, d’annuler la décision litigieuse et, en second lieu, soit de confirmer la position du président du conseil général pour des motifs de fond, soit d’accorder lui-même au demandeur le bénéfice de cette allocation, soit de le renvoyer devant le président du conseil général en l’absence d’éléments d’information suffisants ;
    Considérant que Mme M..., mère isolée élevant un enfant à charge, a débuté en avril 2004 une activité de vente de drapeaux et de pavillons, au titre de laquelle elle était imposée au régime réel ; qu’elle a bénéficié à ce titre de l’aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprises (ACCRE) à compter du 16 juin 2004 ; que, ses droits aux allocations d’assurance chômage, ouverts en janvier 2004, ayant expiré au mois d’octobre 2005, elle a formulé le 12 octobre 2005 une demande tendant au bénéfice du revenu minimum d’insertion ; que par une décision en date du 18 novembre 2005, le président du conseil général du Var a rejeté cette demande au motif que son activité était « non-conforme » à l’article R. 262-15 du code de l’action sociale et des familles ; que par la décision attaquée en date du 10 avril 2006, la commission départementale d’aide sociale du Var a annulé la décision du 18 novembre 2005 du président du conseil général du Var et a accordé à Mme M... le bénéfice du revenu minimum d’insertion à compter du mois d’octobre 2005 ;
    Considérant en premier lieu, qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu’en accordant à Mme M... le bénéfice du revenu minimum d’insertion sur le fondement de l’article R. 262-16 du code de l’action sociale et des familles, la commission départementale d’aide sociale du Var ne s’est pas, contrairement à ce qui est soutenu, irrégulièrement « substituée » au président du conseil général du Var ;
    Considérant en second lieu, qu’il ressort de l’instruction que l’entreprise gérée par Mme M... a généré un chiffre d’affaires de 11 182 euros du 25 avril au 31 décembre 2004 et de 13.237 euros du 1er janvier au 30 juin 2005 ; que le compte de résultat simplifié produit à l’appui de sa demande fait apparaître un résultat net de -  5.176 euros au titre de 2004 et de -  334 euros au titre des six premiers mois de l’année 2005 ; qu’il ne ressort en outre d’aucune pièce du dossier que celle-ci aurait délibérément fait le choix d’être imposée au régime réel simplifié pour dégrader fictivement le résultat de son entreprise ; qu’au demeurant, la circonstance que l’entreprise de Mme M... se révélerait, à l’expérience, difficilement viable est sans incidence sur les droits de l’intéressée dès lors que le défaut de viabilité allégué par le département du Var ne saurait en constituer une caractéristique permanente ; que, dès lors, et eu égard aux efforts d’insertion professionnelle et de création d’activité fournis par Mme M... et à sa situation de famille, celle-ci doit être regardée comme se trouvant dans une situation exceptionnelle au sens de l’article R. 262-16 du code de l’action sociale et des familles ; qu’elle pouvait par suite prétendre au bénéfice du droit au revenu minimum d’insertion à titre dérogatoire à compter du mois d’octobre 2005 ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que le président du conseil général du Var n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, qui est suffisamment motivée, la commission départementale d’aide sociale du Var a fait droit à la demande de Mme M... tendant au bénéfice du revenu minimum d’insertion à compter du mois d’octobre 2005 ;

Décide

    Art. 1er.  -  Le recours du président du conseil général du Var est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 décembre 2007 où siégeaient M. Belorgey, président, Mme Perez-Vieu, assesseure, M. Lallet, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 23 janvier 2008.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer