Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Compétence - Résidence
 

Dossier no 071584

M. D...
Séance du 11 avril 2008

Décision lue en séance publique le 10 juin 2008

        Vu enregistrée le 12 octobre 2007 au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, la requête du préfet du Nord tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale mettre à charge du département du Nord les frais afférents aux arrérages de l’allocation compensatrice pour tierce personne versés à M. M... par les moyens que la famille D... est contrainte de se déplacer dans le département du Nord n’ayant pas de place permanente sur une aire d’accueil et qu’elle s’installe dans différents endroits jusqu’à ce que les forces de l’ordre les obligent à partir d’un endroit à un autre ; que M... a toujours vécu dans le Nord ; que lui et sa famille indiquent vivre en permanence à L... et ne souhaitaient aucunement voyager en dehors de cette ville ; qu’ils installent leur caravane sur une aire d’accueil dès qu’ils trouvent de la place, ce qui est rare ; que par attestation sur l’honneur M. D... atteste vivre dans le département du Nord « depuis sa naissance » ; qu’il considère que la circulaire du 17 avril 2007 trouve à s’appliquer selon laquelle « une personne qui réside dans une caravane habituellement stationnée dans un département réside dans ce département et est à la charge de ce département » ; que l’interprétation faite par la commission centrale d’aide sociale dans sa décision du 27 octobre 2005 préfet des Alpes-Haute-Provence de la notion de domicile de secours pour les personnes « du voyage » conduit à considérer que M. D... a son domicile de secours dans le Nord ; que sa famille est également une famille de « nomades en voie de sédentarisation » dont l’itinérance réelle n’est pas établie, seuls les déplacements autour de L... du fait de l’absence de solution de stabilisation définitive l’étant ;
        Vu enregistré le 20 février 2008 le mémoire en réponse du président du conseil général du Nord tendant au rejet de la requête par les motifs que le domicile de secours est constitué par une « résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité » que la jurisprudence exige que le résidence se justifie par une présence prolongée, stable et régulière au sein d’un département sinon les dépenses d’aide sociale relèvent de l’Etat ; qu’en l’espèce M. D... se déplace dans différentes communes et ne peut dès lors être regardé comme ayant une résidence stable et régulière au sens de la jurisprudence Maine-et-Loire du conseil d’Etat ; que cette jurisprudence est différente de l’interprétation de la circulaire du 17 avril 2007 ; que peu importe que les déplacements s’effectuent dans l’assiette du département du Nord ou à Lille même leurs existences suffisant à établir l’itinérance et une situation qui ne peut être regardée comme stable et régulière ; que l’arrêt de la commission centrale d’aide sociale invoqué n’est pas transposable à la présente affaire l’itinérance étant ici établie par les changements d’adresse successifs ; que le X... invoqué comme dernière adresse correspond à l’adresse d’un café fermé ; que la déclaration sur l’honneur ne suffit pas à conférer une résidence stable dans le Nord ; que la détention d’un numéro de circulation et de rattachement administratif à L... demeure sans incidence comme en fait foi l’article 10 de la loi du 3 janvier 1969 indiquant que ce rattachement ne produit pas d’effet à l’égard de l’aide sociale ;
        Vu enregistré le 12 mars 2008 le mémoire du préfet du Nord persistant dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;
        Vu la décision attaquée ;
        Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
        Vu le code de l’action sociale et des familles ;
        Vu le code de la famille et de l’action sociale ;
        Vu la lettre en date du 3 janvier 2008 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
        Après avoir entendu à l’audience publique du 11 avril 2008, Mlle Erdmann, rapporteure, Mme Leslie Pacoret pour le président du conseil général du Nord, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
        Considérant qu’aux termes des articles L. 122-2 et L. 122-3 du code de l’action sociale et des familles : « Le domicile de secours s’acquiert par une résidence habituelle de trois mois dans un département (...) » il « se perd par une absence ininterrompue de trois mois » ; qu’à ceux de l’article L. 111-3 : « Les personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé ont droit aux prestations d’aide sociale dans les conditions prévues pour chacune d’elles par le présent code » ; que même si le codificateur a cru devoir supprimer la mention figurant antérieurement au 5e alinéa de l’article 194 du code de la famille et de l’aide sociale selon laquelle pour ces dernières les prestations sont à charge de l’Etat cette charge résulte nécessairement de l’ensemble des dispositions du code de l’action sociale et des familles telles qu’elles sont aujourd’hui rédigées ;
        Considérant qu’il n’y a lieu de rechercher si une personne ne présente aucun domicile fixe au sens de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles que si aucun domicile de secours ne peut être établi ; que les dispositions de l’article L. 122-2 exigent pour ce faire une résidence « habituelle » de plus de trois mois dans un département et nullement une résidence « stable » en un seul endroit de ce département ; que l’invocation par le président du conseil général du Nord de la jurisprudence Maine-et-Loire intervenue dans le cadre de la législation régissant entre 1993 et 2000 l’aide médicale dans le cadre de laquelle ce n’est pas le domicile de secours mais la résidence présentant un minimum de stabilité qui déterminait la compétence d’imputation financière du département est inopérante dans la présente instance concernant le droit à une allocation compensatrice dont l’imputation financière est régie non par la résidence mais par le domicile de secours ;
        Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. D... qui déclare sur l’honneur de manière plausible et sans que le président du conseil général du Nord n’apporte aucun élément à l’encontre de cette déclaration que sa famille a toujours résidé depuis sa naissance dans le département du Nord fait partie d’une famille de nomades en cours de sédentarisation relative puisqu’il ne se déplace plus qu’à l’intérieur de ce département ; qu’il n’est même pas allégué et ne ressort d’aucune pièce du dossier que lors des déplacements qu’il a effectués M. D... aurait quitté le Nord, où incontestablement il a au vu du dossier acquis à un moment ou un autre un domicile de secours par une présence régulière de trois mois, pour séjourner dans un autre département ou en Belgique (par exemple) et n’être plus revenu durant trois mois consécutifs ultérieurement dans le département du Nord ; qu’ainsi au vu des éléments soumis à la présente juridiction il doit être considéré comme établi par l’instruction que M. D... a son domicile de secours dans le Nord ; que la circonstance que la dernière adresse qu’il a indiquée soit celle d’un café fermé quelles que puissent être les conséquences d’une telle indication sur les droits de l’assisté qui ne sont pas en cause dans le présent litige n’implique nullement que dans les conditions de précarité de la vie de la famille D... celui-ci n’ait pas au moment où il indiquait ainsi une résidence inexacte séjourné dans le département du Nord ; qu’ainsi la requête du préfet du Nord doit être accueillie ;
        Considérant par ailleurs que l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles issu de la loi du 5 mars 2007 non invoqué par les parties impose pour les personnes « sans résidence stable » une élection de domicile à compter de son entrée en application pour l’ensemble des prestations légales d’aide sociale ; qu’en tout état de cause cette condition n’a d’incidence que sur les droits de l’assisté dépourvu d’une telle résidence et non sur la détermination du domicile de secours ; que par ailleurs la collectivité débitrice de certaines prestations est en vertu de ce texte celle dans laquelle la personne sans résidence stable concernée a dû ainsi élire domicile, mais que cette disposition, en tout état de cause, ne s’applique pas à l’allocation compensatrice seule litigieuse dans la présente instance ; qu’ainsi et même pour la période d’attribution postérieure à l’entrée en vigueur de l’article 51 de la loi du 5 mars 2007 les dispositions de cet article demeurent sans incidence en l’espèce sur la suite à donner au présent litige concernant l’imputation financière des frais d’aide sociale afférents à une prestation d’allocation compensatrice ;

Décide

        Art. 1er. - Le domicile de secours de M. M... en ce qui concerne les arrérages d’allocation compensatrice pour tierce personne versés du 1er juillet 2007 au 1er juillet 2010 est dans le département du Nord.
        Art. 2. - La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville à qui il revient d’en assurer l’exécution.
        Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 11 avril 2008 où siégeaient M. Levy, président, Mme Le Meur, assesseure, et Mlle Erdmann, Rapporteure.
        Décision lue en séance publique le 10 juin 2008.
        La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer