Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : ASPH - Placement - Famille d’accueil - Aide sociale
 

Dossier no 071577

Mlle T...
Séance du 11 avril 2008

Décision lue en séance publique le 10 juin 2008

        Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 10 septembre 2007 la requête présentée pour Mlle T... par son tuteur d’Etat tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Charente du 19 avril 2007 rejetant sa demande dirigée contre la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de La Rochefoucauld du 12 octobre 2005 en tant que ces décisions statuent sur ses droits pour la période antérieure au 1er juillet 2005 en tenant compte de l’indemnité de congés payés stipulée dans le contrat la liant à l’accueillant familial Mme L... par les moyens que le versement d’une indemnité de congés payés attaché à l’indemnité de rémunération de l’accueillant était de droit depuis l’entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2002 sans attendre la parution des décrets d’application ; que la délibération invoquée du conseil général de la Charente ne pouvait remettre en cause la loi ; qu’aucune disposition n’interdit le cumul de l’allocation compensatrice pour tierce personne et l’aide au placement familial ; que sa position a été confirmée par deux réponses à questions écrites du ministre des affaires sociales ;
        Vu la décision attaquée ;
        Vu enregistré le 10 décembre 2007 le mémoire en défense du président du conseil général de la Charente tendant au rejet de la requête par les motifs que le contrat passé avec l’accueillante familiale n’est pas opposable au département ; que l’avenant au contrat d’accueil signé le 25 mars 2005 ne pouvait prévoir la rétroactivité des congés payés à compter du 17 janvier 2002 compte tenu de la jurisprudence de la Cour de cassation ; que la date d’effet fixée par l’avenant du 25 mars 2005 au 1er janvier 2005 fixée par les parties s’impose à elles et à elles seules ; que la rétroactivité ne se présume pas mais doit avoir été décidée par les parties qui ne l’ont pas fait au 17 janvier 2002 ; que selon le règlement départemental de la Charente l’allocation de placement familial peut être accordée avec un effet rétroactif de deux mois ; que cette règle aurait pu au mieux permettre une attribution à partir du 25 mars 2005, date de signature de l’avenant, à condition que l’allocation compensatrice pour tierce personne et l’allocation de placement familial aient été cumulables mais en aucun cas au 17 janvier 2002 ;
        Vu enregistré le 4 janvier 2008 le mémoire en réplique présenté pour Mlle T... par son tuteur d’Etat persistant dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et les moyens que la rétroactivité sollicitée par l’accueillante le 29 mars 2005 ne peut être assurée par elle en raison de ses faibles ressources ; que la délibération du 19 décembre 2001 précisant l’absence de cumul entre l’APF et l’ACTP pouvait être modifiée à tout moment à compter du 17 janvier 2002 compte tenu de la modification du cadre « règlementaire » ; qu’en toute hypothèse l’effet rétroactif au mois de janvier 2005 (rétroactivité de deux mois par rapport à la date de rétroactivité de l’avenant du 25 mars 2005) doit être accordé ; que le contrat avec l’accueillante produit des effets qui ne sont pas éloignés de ceux d’un contrat de travail ; qu’il est dommageable que des mesures « tenant à présumer des avantages sociaux de base » ne puissent prendre effet qu’avec l’accord des parties ce qui procède d’une lecture discutable de l’article 1134 du code civil ; qu’il résulte de cet article que Mme L... pouvait solliciter un effet rétroactif conforme à la loi du 17 janvier 2002 ; qu’on ne pouvait refuser une modification mais que Mlle T... ne pouvait signer d’avenant au contrat sans avoir obtenu l’aide sociale ; qu’il y a contradiction entre la reconnaissance de l’applicabilité immédiate de la prise en compte de l’indemnité de congés payés prévue par la loi du 17 janvier 2002 et l’indication qu’un nouveau contrat doit être signé dès la publication des textes réglementaires ;
        Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
        Vu le code de l’action sociale et des familles ;
        Vu la lettre en date du 21 décembre 2007 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
        Après avoir entendu à l’audience publique du 11 avril 2008, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
        Considérant qu’aux termes de l’article R. 231-4 du code de l’action sociale et des familles issu de l’article 16 du décret du 2 septembre 1954 : « le placement à titre onéreux chez un particulier au titre de l’aide sociale donne lieu à une prise en charge compte tenu :
        1° D’un plafond constitué par la rémunération et les indemnités mentionnées aux 1 et 2 de l’article L. 442-1 le cas échéant selon la convention accompagnant l’habilitation à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale.
        2° Des ressources de la personne accueillie...
        Cette prise en charge doit garantir à l’intéressé la libre disposition d’une somme au moins égale au dixième de ses ressources ainsi qu’au centième du montant annuel de l’allocation de solidarité aux personnes âgées » ;
        Considérant en premier lieu que ces dispositions n’ont pas été abrogées ni explicitement ni implicitement postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2002 ; qu’ainsi c’est de manière erronée que la présente juridiction a décidé dans sa décision Haute-Marne du 27 avril 2007 (CJAS 07/4 217) que la prise en charge par l’aide sociale ne trouvait dorénavant sa limite que dans les montants maximaux des différents éléments de rémunération et d’indemnisation fixés par le contrat liant l’accueilli et l’accueillant ;
        Considérant dès lors qu’est toujours applicable la jurisprudence de la présente juridiction selon laquelle les dispositions précitées de l’article R. 231-4 à la différence de celles de l’article R. 231-6 pour les placements en établissement permettent de fixer une participation de l’aide sociale laissant à l’accueilli un montant de ressources supérieur au minimum auquel il a « au moins » droit selon le 4e alinéa du même article et de fixer la participation dans la limite du plafond déterminé par les dispositions dont s’agit, compte tenu des ressources de l’assisté et des charges non prises en compte par les frais de placement qu’il lui appartient de supporter ;
        Considérant que Mlle T... placée en accueil familial chez Mme L... s’acquittait de ses frais de placement avec l’ensemble de ses ressources et bénéficiait de l’aide sociale à ce titre ; que compte tenu de l’évolution du coût du placement induite par l’entrée en vigueur de la loi du 17 janvier 2002 après la parution en juillet 2004 des décrets d’application, elle a pour la première fois demandé l’aide sociale au placement chez un particulier agréé le 19 avril 2005 ; que sa demande tendait en réalité exclusivement à la prise en charge par l’aide sociale de l’indemnité de congés payés instituée par la loi du 17 janvier 2002 avec effet de la date d’entrée en vigueur de cette loi dont les dispositions étaient d’exécution immédiate après sa publication en ce qui concerne l’indemnité de congés payés sans qu’il soit besoin que ne soient pris pour le surplus les décrets d’application, la loi prévoyant clairement que l’indemnité était attribuée selon les règles fixées à l’article L. 223-11 du code du travail ;
        Sur le montant de la participation de l’aide sociale ;
        Considérant qu’il ne résulte pas du dossier qu’en prenant en compte la totalité de la demande de Mlle T... il serait fait une excessive appréciation de la participation maximale de l’aide sociale aux frais d’hébergement et d’entretien chez Mme L... et du minimum des revenus devant en l’espèce être laissé à l’assistée celle-ci s’étant bornée à demander la prise en compte par l’aide sociale de l’indemnité de congés payés ;
        Considérant que le président du conseil général soutient en réalité seulement que jusqu’à la délibération du 24 juin 2005 prévoyant la possibilité de cumul de l’allocation compensatrice pour tierce personne et de l’allocation de placement familial la possibilité de cumul de ces prestations n’était pas ouverte dès lors qu’elle n’était pas autorisée par le règlement départemental ;
        Considérant toutefois que le règlement départemental d’aide sociale ne saurait interdire un cumul entre deux prestations d’aide sociale qui ne l’est pas par les dispositions législatives et réglementaires insérées au code de l’action sociale et des familles ; qu’à la connaissance de la commission centrale d’aide sociale aucune disposition législative ou réglementaire n’a prévu l’impossibilité de cumul des deux aides ; qu’aucune disposition applicable à l’accueil familial de la nature de celles prévues à l’article 4 du décret 77-1547 aujourd’hui codifié en ce qui concerne la suspension de l’allocation compensatrice pour tierce personne versée aux personnes admises en établissement n’existe en ce qui concerne le cumul indemnités de placement familial/allocation compensatrice ; que les dispositions du dernier alinéa de l’article R. 231-4 s’appliquent dès lors à l’allocation compensatrice pour tierce personne comme à toute autre ressource d’une personne sollicitant l’aide au placement familial ; qu’il suit de là que Mlle T... n’a pas fait une excessive appréciation de ses droits à l’aide sociale en sollicitant qu’ils soient fixés au niveau du seul montant de l’indemnité de congés payés prévue à l’article L. 442-1-1) du code de l’action sociale et des familles ;
        Sur la date d’effet de l’aide accordée ;
        Considérant que Mlle T... sollicite l’attribution de l’aide au placement familial à compter du 18 janvier 2002 au motif que la loi était directement applicable sur le point litigieux sans qu’il soit besoin d’attendre l’intervention des décrets d’application ; qu’il est toutefois constant qu’elle n’a utilement demandé l’aide sociale que le 19 avril 2005 et qu’il n’est pas contesté que le règlement départemental d’aide sociale de la Charente fixe avec une rétroactivité de deux mois à compter de la date de la demande, celle afférente à la date d’effet des demandes d’aide sociale au placement familial des personnes handicapées, soit un régime plus favorable que le régime légal ; que les stipulations de l’avenant du 25 mars 2005 au contrat de placement familial non plus en toute hypothèse que la demande de l’accueillante tendant à la rétroactivité des nouvelles dispositions non pas à compter du 1er janvier 2005 date fixée par le contrat mais à compter du 17 janvier 2002 ne sont pas opposables à l’aide sociale au regard de laquelle les droits de l’assistée procèdent seulement quant à leur date d’effet de la date de dépôt de sa demande ; qu’il y a lieu ainsi de fixer la date d’effet de l’aide sollicitée au 19 février 2005,

Décide

        Art. 1er. - Mlle T... est admise à l’aide sociale au placement des personnes handicapées chez un particulier agréé à compter du 19 février 2005 pour un montant correspondant à celui de l’indemnité de congés payés versée à l’accueillante pour compter de cette date.
        Art. 2. - Les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Charente du 19 avril 2007 et de la commission d’admission à l’aide sociale de La Rochefoucauld du 12 octobre 2005 sont réformées en ce qu’elles sont contraires à l’article 1er.
        Art. 3. - Le surplus des conclusions de Mlle T... est rejeté.
        Art. 4. - La présente décision sera notifiée à Mlle T... et au président du conseil général de la Charente.par les soins du secrétariat de la commission centrale d’aide sociale.
        Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 11 avril 2008 où siégeaient M. Levy, président, Mme Le Meur, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
        Décision lue en séance publique le 10 juin 2008.
        La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer