Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2200
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Famille d’accueil
 

Dossier no 070906

M. C...
Séance du 23 octobre 2008

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2008

    Vu la requête en date du 15 mai 2007 du préfet des Hauts-de-Seine tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale déterminer la collectivité débitrice pour la prise en charge par l’aide sociale à l’hébergement en famille d’accueil de M. C... domicilié chez Mme L... par les moyens que le dossier d’aide sociale à l’hébergement a été constitué le 3 novembre 2005 par l’UDAF de Clermont-Ferrand, tuteur de M. C... et envoyé le 7 avril 2006 au conseil général des Hauts-de-Seine qui l’a transmis le 22 mars 2007 à la DDASS des Hauts-de-Seine au motif que M. C... avait bénéficié du 1er avril 1985 au 1er avril 1990 de l’allocation compensatrice pour tierce personne servie par la DDASS des Hauts-de-Seine et que son placement en famille d’accueil chez Mme L... n’est pas acquisitif de domicile de secours ; que le 23 avril 2007 la DDASS des Hauts-de-Seine après instruction du dossier a délivré une prise en charge d’aide sociale au compte de l’Etat et a procédé au transfert de ce dossier à la DDASS du Puy-de-Dôme, conformément aux dispositions de la circulaire no 106 du 7 septembre 1987 qui impose la compétence financière à la DDASS du département où réside M. C... ; que le 3 mai 2007, la DDASS du Puy-de-Dôme n’admettant pas sa compétence financière a retourné le dossier en cause à la DDASS des Hauts-de-Seine ;
    Vu le mémoire en défense de préfet du Puy-de-Dôme en date du 13 juillet 2007 qui conclut au rejet de la requête par les moyens que M. C... a été bénéficiaire, en tant que SDF N..., de l’allocation compensatrice pour tierce personne du 1er avril 1985 au 1er avril 1990 accordée par la DDASS des Hauts-de-Seine ; qu’en date du 22 mars 2007 les services du conseil général des Hauts-de-Seine ont transmis ledit dossier à la DDASS des Hauts-de-Seine à l’attention de Mme R... en signifiant que M. C... était SDF N... et qu’il avait bénéficié de l’allocation compensatrice pour tierce personne compte Etat ; que le 3 mai dernier, le dossier a été retourné à la DDASS des Hauts-de-Seine en l’invitant à prendre contact avec les services du conseil général du Puy-de-Dôme ; que M. C... est né sans filiation ; qu’il est pupille de l’aide sociale à l’enfance des Hauts-de-Seine où il a été admis en 1964 ; qu’à l’âge de deux ans il a été confié à Mme P... ; qu’il a ensuite été accueilli le 9 septembre 1974 chez Mme V... puis à partir du 24 janvier 1999 jusqu’à ce jour chez Mme L... (fille de Mme V...) ; qu’en 1974 il est entré au Centre de rééducation pour enfants inadaptés à S... et qu’il travaille à ce jour au Centre d’aide par le travail de S... ; qu’il semblerait, sauf erreur, que les frais de placement en famille d’accueil auraient été réglés pendant une certaine période par les services du conseil général des Hauts-de-Seine ;
    Vu le nouveau mémoire du préfet des Hauts-de-Seine en date du 17 septembre 2007 qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’il résulte que M. C... est né à N... de parents inconnus et qu’il est reconnu pupille de l’Etat par le département de la Seine (Paris) ; qu’il a été placé en famille d’accueil depuis son plus jeune âge ; que le conseil général des Hauts-de-Seine a confirmé n’avoir supporté aucune dépense au titre de l’aide sociale pour ce monsieur qui a quitté le département des Hauts-de-Seine à l’âge de dix ans pour vivre en famille d’accueil dans le Puy-de-Dôme jusqu’à ce jour ; que seule la notification de décision de l’allocation compensatrice pour tierce personne du 30 janvier 1986 a permis de constater que M. C... avait bénéficié d’une telle prestation par la DDASS des Hauts-de-Seine du 1er avril 1985 au 1er avril 1990 et qu’il était déjà hébergé chez Mme V... à la même adresse et ceci sans interruption ; que depuis cette date du 2 avril 1990 l’intéressé n’a bénéficié d’aucune aide sociale de la DDASS des Hauts-de-Seine ; que le conseil général de Clermont-Ferrand a fait savoir à la DDASS des Hauts-de-Seine que M. C... est inconnu de son service d’aide sociale ; que cependant ce département a fourni à la famille d’accueil une nouvelle attestation d’agrément pour l’accueil familial, agrément reconduit du 1er mai 2006 au 1er mai 2011 ; que par deux télécopies de l’UDAF du Puy-de-Dôme, M. N..., mandataire judiciaire délégué, a répondu aux enquêtes de la DDASS des Hauts-de-Seine en précisant que M. C... conserve son domicile de secours dans les Hauts-de-Seine depuis son placement en famille d’accueil ; que ses ressources provenant du CAT de S... et ses allocations d’adulte handicapé et de logement servies par la CAF du Puy-de-Dôme permettaient le règlement de ses frais à la famille d’accueil jusqu’à la réforme sur la revalorisation des salaires des familles d’accueil ; que M. C... ne pouvait plus supporter lesdits frais ; qu’aucun renseignement demandé par la DDASS des Hauts-de-Seine lui a été communiqué par la DDASS du Puy-de-Dôme ;
    Vu le mémoire en réplique du préfet du Puy-de-Dôme en date du 3 octobre 2007 qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens et les moyens que suite à sa demande du 11 juillet 2007 le directeur de l’action sociale de l’enfance et de la santé (bureau des affaires juridiques de Paris) lui a transmis un extrait du registre des enfants recueillis temporairement sur lequel figure des renseignements concernant M. C... et le bon de transmission du dossier de M. C... qui serait né le 4 janvier 1964 et non le 20 janvier 1964 à P... ; que ces informations démontrent que M. C... a bien été recueilli et que son dossier est dans les services du président du conseil général des Hauts-de-Seine et que M. C... avait, enfant, son domicile de secours à P... (lieu de naissance) avant d’être placé en famille d’accueil ; que conformément à l’article L. 122-2 du code de l’action sociale et des familles la prise en charge des frais de placement en famille d’accueil ne relève pas de la compétence de ses services ;
    Vu le nouveau courrier du préfet du Puy-de-Dôme en date du 17 juillet 2008 qui transmet un courrier de l’UDAF du Puy-de-Dôme en date du 4 juin 2008 relatif à la situation de M. C... qui explique qu’ils interviennent dans le cadre de la mesure de tutelle d’état en vertu d’une ordonnance du 5 novembre 1987 du juge des tutelles de Riom ; que M. C... vit en famille d’accueil depuis de nombreuses années ; que la situation financière de M. C... se dégrade ; que celui-ci ne disposera bientôt plus des fonds nécessaires pour régler son hébergement en famille d’accueil ; que si la situation ne se débloque pas avant le 1er octobre 2008 M. C... se trouvera en cessation de paiement ; qu’il n’est pas envisageable de lui faire supporter plus longtemps cette situation ; qu’il faut ordonner le versement des sommes dues par l’Etat à M. C... au titre de son hébergement en famille d’accueil ; qu’il appartiendra par la suite, de faire rembourser les sommes avancées à tort auprès de la collectivité qui sera reconnue compétente ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 4 juillet 2008 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 23 octobre 2008, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que, comme trop souvent dans cette affaire, les services, au lieu de mettre en œuvre la procédure légale d’imputation des dépenses soit entre les départements, soit entre l’Etat et un département, rejettent successivement la demande d’aide sociale comme n’entrant pas dans le champ de la compétence financière de leur collectivité contraignant le demandeur à multiplier les demandes contre les termes de la loi, mettant en péril soit le maintien des prestations, soit le fonctionnement des établissements, plaçant enfin le juge dans une situation procédurale telle que les instances dont il est saisi deviennent quelque peu inextricables ;
    Considérant que M. C... - pupille de l’Etat - (ou selon certains documents recueilli temporaire mais le dossier paraît davantage établir qu’il était bien dans sa minorité pupille de l’Etat) a après sa majorité en 1982 été accueilli pendant plusieurs années au domicile d’un particulier accueillant déjà des personnes handicapées mais qui ne pouvait alors bénéficier de l’autorisation ultérieurement ménagée par les lois de 1989 et 1991 ; qu’ainsi durant un tel séjour il a acquis un domicile de secours dans le département du Puy-de-Dôme chez cet accueillant chez lequel il a à tout le moins résidé entre 1985 et 1989 avec les conséquences dites ; que le domicile de secours ainsi acquis n’a pas été perdu lorsqu’ultérieurement ce particulier puis sa fille ont été autorisés au titre de l’accueil des personnes handicapées et qu’à compter de la date d’effet de cette autorisation le séjour ne pouvait valoir perte du domicile de secours antérieurement acquis au même lieu ; que dans ces conditions le domicile de secours est dans le département du Puy-de-Dôme ; qu’en l’état la question est que ce département n’a pas été mis en cause au cours de l’instruction et que la saisine a été matérialisée dans des conditions extra-légales par le préfet des Hauts-de-Seine qui entend que le préfet (DDASS) du Puy-de-Dôme supporte les frais dont il ne conteste en aucune façon l’imputation à l’Etat dans sa requête ; qu’il confond comme sans doute la plupart des DDASS de France au vu de l’expérience constante sur ce point de la présente commission « direction départementale des affaires sanitaires et sociales » et « collectivité débitrice pour la prise en charge des frais d’hébergement » alors que l’Etat est un et qu’aucune disposition ne confère compétence à la commission centrale d’aide sociale qui ne saurait se reconnaître une compétence d’arbitrage, laquelle ne peut qu’appartenir au ministre dans le cadre du respect des procédures budgétaires régissant l’imputation des crédits de l’Etat en la matière, pour connaître du recours d’un préfet dirigé contre un autre préfet aux fins que les crédits du département de ce dernier supportent une dépense dont l’imputation à l’Etat n’est pas contestée ; qu’il y a lieu d’observer néanmoins pour s’en féliciter qu’au cours de la procédure le préfet du Puy-de-Dôme a suggéré mais en vain au préfet des Hauts-de-Seine de solliciter puis de mettre en cause le département du Puy-de-Dôme quels que puissent être les motifs de cette suggestion ; qu’il y a lieu d’ajouter que l’UDAF du Puy-de-Dôme qui a sollicité successivement dans les conditions extra-légales ci-dessus évoquées les diverses instances (le département des Hauts-de-Seine, la DDASS des Hauts-de-Seine et la DDASS du Puy-de-Dôme, ne parait pas avoir sollicité le département du Puy-de-Dôme même si au vu du dossier ce dernier n’ignore pas le litige puisque des correspondances le concernant y figurent) cf. télécopie du 17 avril 2007 du service aide sociale prestations indiquant « aucune demande n’est parvenue au conseil général du Puy-de-Dôme » ;
    Considérant qu’en cet état et par exception aux règles générales du plein contentieux selon lesquelles il n’appartient pas au juge de désigner d’office une collectivité responsable non intimée la commission centrale d’aide sociale admet dans des situations particulières qui peuvent le justifier de mettre en cause la « bonne collectivité » pour statuer définitivement sur la charge des frais et éviter les litiges récurrents particularité qui se justifie aisément dans le cadre très particulier des compétences du juge de l’aide sociale en matière de détermination d’imputation financière des dépenses d’aide sociale ; qu’il pourrait donc être envisagé de mettre les frais à charge du département du Puy-de-Dôme à charge pour celui-ci s’il devait contester cette solution de former tierce opposition devant la présente juridiction ;
    Mais considérant que la situation de l’espèce est très particulière ; qu’en effet le préfet saisissant des Hauts-de-Seine n’a jamais contesté la compétence de l’Etat qui a été reconnue par une décision qui elle-même n’a pas été contestée de la commission d’admission à l’aide sociale statant en formation plénière en date du 23 avril 2007 ainsi motivée « admission au compte de l’Etat [...] la dépense sera supportée par la DDASS dans le ressort de laquelle se trouve la famille d’accueil » ; que c’est en fonction de cette décision que « la DDASS » des Hauts-de-Seine a transmis le dossier pour reconnaissance de l’imputation financière de « sa collectivité » !... à la « DDASS du Puy-de-Dôme » ! laquelle décline sa compétence ; que compte tenu de l’existence d’une telle décision non contestée sans doute définitive et en l’état actuel en toute hypothèse exécutoire la question se pose de savoir s’il est possible au juge de l’aide sociale statuant en premier et dernier ressort et qui n’est pas saisi d’un recours contre ladite décision de la commission d’admission à l’aide sociale statuant en formation plénière, antérieurement semble-t-il, encore qu’on n’en soit pas certain, la date de la décision n’apparaissant pas et celle-ci ayant été notifiée à l’assisté le 23 avril 2007, à l’entrée en vigueur du décret 11 févier 2005, de revenir sur une telle décision ; qu’en toute hypothèse cette décision en tant qu’elle reconnaît à l’Etat la compétence d’imputation financière qui n’est pas contestée devant la commission centrale d’aide sociale par le préfet saisissant apparaît faire obstacle à ce que dans la présente instance la commission centrale d’aide sociale désigne d’office le département du Puy-de-Dôme comme débiteur des frais litigieux ; qu’à la vérité elle serait tentée en la matière de faire fi délibérément de toute approche juridique dans un domaine où les acteurs ignorent les textes applicables et les procédures qui s’en déduisent mais qu’il lui semble néanmoins qu’il ne lui appartient pas même dans le présent litige de se résoudre à cette extrémité ; que dans ces conditions il y a lieu de rejeter la requête du préfet des Hauts-de-Seine dirigée contre le préfet du Puy-de-Dôme comme irrecevable les frais étant en l’état à la charge de l’Etat dans le département des Hauts-de-Seine, la décision de la commission d’admission à l’aide sociale du 23 avril 2007 ne pouvant utilement statuer comme elle l’a fait sur le département d’imputation à l’intérieur de l’Etat ; qu’il appartient à la suite de la notification de la présente décision au préfet des Hauts-de-Seine d’user s’il s’y croit fondé des voies de droit actuellement en vigueur pour saisine du département du Puy-de-Dôme aux fins de reconnaissance par celui-ci de sa compétence d’imputation financière à compter d’une date qui sera à déterminer, mais qu’en l’état la commission centrale d’aide sociale se bornera à rejeter la requête du préfet des Hauts-de-Seine observation étant faite que si en cet état l’Etat par l’intermédiaire du préfet des Hauts-de-Seine continue de refuser d’honorer les frais de placement de M. C..., qui n’est plus solvable depuis le 1er octobre dernier selon les indications fournies par l’UDAF du Puy-de-Dôme et ne peut plus rémunérer la famille modeste et méritante qui l’accueille depuis de nombreuses années, sa responsabilité serait encore plus engagée qu’elle ne l’est d’ores et déjà dans la situation incontestablement génératrice d’un préjudice pour l’assisté, la seule question étant, comme à l’accoutumée, de savoir à qui elle incombe (services tutélaires qui n’ont pas saisi en la personne du département des Hauts-de-Seine à l’origine « la bonne collectivité » ? Etat, qui méconnaît « la bonne collectivité » et s’épuise en conflits inopérants entre ses services ? voire, département du Puy-de-Dôme qui ne pouvait ignorer en réalité la situation dont il était informé et qui ne s’est pas manifesté ?) ; qu’il n’appartient sans doute pas à la commission centrale d’aide sociale statuant en premier et dernier ressort dans le cadre de l’instance dont elle est saisie de se prononcer sur de telles questions mais qu’il serait contraire à l’office du juge dans un contentieux « social » de ne pas appeler l’attention des différents services concernés sur le caractère à tout le moins sérieux des dysfonctionnements du système administratif d’aide sociale révélés par la présente instance conduisant, si toutefois la commission centrale d’aide sociale n’a pas erré dans les analyses qui précèdent, les administrations concernées et le juge à s’épuiser dans des procédures dépourvues d’efficacité alors que la détermination de la collectivité compétente aurait dû être aisément effectuée par l’ensemble des parties concernées dès l’origine de ce trop long contentieux,

Décide

    Art.  1er.  -  Les conclusions de la requête du préfet des Hauts-de-Seine dirigée contre le préfet du Puy-de-Dôme sont rejetées.
    Art.  2.  -  En l’état les frais d’aide sociale afférents à l’accueil de M. C... chez un particulier agréé au titre des personnes handicapées adultes à compter de la date d’effet de la décision de la commission d’admission à l’aide sociale notifiée le 23 avril 2007 à M. C... sont à la charge de l’Etat dans le département des Hauts-de-Seine.
    Art.  3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 23 octobre 2008 où siégeaient M. LEVY, président, Mme Le MEUR, assesseure, et Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 27 novembre 2008.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer