Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI)
 

Conseil d’Etat statuant au contentieux
Dossier n° 285689

Mme B...
Séance du 11 décembre 2008

Décision lue en séance publique le 19 décembre 2008

    Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre 2005 et 3 février 2006 au secrétariat du contentieux du conseil d’Etat, présentés pour Mme B..., demeurant X... ; Mme B... demande au conseil d’Etat :
    1o D’annuler la décision du 27 septembre 2004 par laquelle la commission centrale d’aide sociale, après avoir annulé la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Loire-Atlantique qui avait partiellement fait droit à sa demande tendant à être déchargée de la répétition d’une somme de 51 732 francs (17 297,17 euros) perçue au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion, a rejeté cette demande ;
    2o Réglant l’affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
    Vu les autres pièces du dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi no 2003-1200 du 18 décembre 2003, notamment son article 52 ;
    Vu le décret no 88-1111 du 12 décembre 1988 ;
    Vu le code de justice administrative ;
    Après avoir entendu en séance publique :
        - le rapport de M. Gilles de la Ménardière, conseiller d’Etat,
        - les observations de la SCP T..., avocat de Mme A...,
        - les conclusions de Mlle Anne courrèges, commissaire du gouvernement ;
    Considérant qu’aux termes des deux premiers alinéas de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, dans leur rédaction applicable à l’espèce : « Tout paiement indu d’allocations est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir (...)/ Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 » ; qu’aux termes du dernier alinéa du même article : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sur décision prise selon des modalités fixées par voie réglementaire » ;
    Considérant que, pour annuler la décision du 17 décembre 2001 de la commission départementale d’aide sociale de la Loire-Atlantique statuant sur la demande de Mme B..., la commission centrale d’aide sociale a regardé cette demande comme étant dirigée contre une décision du 10 juillet 2001 du préfet de la Loire-Atlantique qui aurait refusé à l’intéressée la remise gracieuse de créances nées du paiement indu d’allocations de revenu minimum d’insertion ; qu’il résulte toutefois de l’instruction que cette décision ne portait pas sur une demande de remise gracieuse introduite sur le fondement du dernier alinéa de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles, mais intervenait, en application du premier alinéa de cet article, pour constater un indu et prononcer sa récupération ; qu’ainsi, la commission centrale d’aide sociale s’est méprise sur la portée de la décision en cause et a dénaturé les termes de la demande de Mme B... ; que celle-ci est par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, fondée à demander l’annulation de la décision attaquée ;
    Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 12 décembre 1988, alors en vigueur : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire (...) est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer, à condition que ces personnes soient le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin de l’intéressé, ou soient à sa charge » ; que l’article 3 du même décret dispose que « les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article 1er (...) » ; que pour l’application de ces dispositions, le concubin est la personne qui mène avec le demandeur une vie de couple stable et continue ;
    Considérant que si Mme B... habitait une maison appartenant à M. B..., dans lequel lui-même venait ponctuellement résider, qu’elle assurait l’entretien de ce logement et qu’elle admet avoir eu avec M. B... des loisirs communs, il ne résulte pas de l’instruction que l’intéressée aurait mené avec lui une vie de couple stable et continue, de nature à caractériser un concubinage au sens des dispositions précitées du décret du 12 décembre 1988 ; qu’en particulier, c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale de la Loire-Atlantique s’est fondée sur la seule existence d’une communauté d’intérêts se manifestant par l’existence d’un compte bancaire joint ouvert aux noms de M. B... et de Mme B... pour en déduire qu’ils composaient un foyer de deux personnes au sens du même décret ;
    Considérant, toutefois, que, selon le premier alinéa de l’article L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles : « L’ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; que par suite, nonobstant l’absence de vie maritale entre M. B... et Mme B..., le préfet de la Loire-Atlantique était tenu, pour déterminer le montant de l’ensemble des ressources dont disposait Mme B..., de prendre en compte l’ensemble des versements effectués par M. B, au cours de la période en litige, sur le compte bancaire joint ouvert à leurs noms et dont elle avait la libre disposition, dès lors que les sommes en cause n’étaient pas au nombre des prestations non prises en compte dans les ressources en vertu de l’article 8 du décret du 12 décembre 1988 ; qu’il résulte de l’instruction que ces versements se sont élevés à la somme, non contestée, de 12 000 francs (1 829,39 euros) ;
    Considérant cependant que l’état de l’instruction ne permet pas de déterminer le montant des ressources de l’intéressée à prendre en compte pour chacun des trimestres correspondant à la période en litige ni, par suite, de fixer le montant que l’administration est fondée à réclamer à Mme B... au titre du reversement des sommes indûment perçues ; qu’il appartient au département de la Loire-Atlantique, désormais compétent en vertu de l’article 52 de loi du 18 décembre 2003, de déterminer les droits de Mme B... à l’allocation de revenu minimum d’insertion au titre de cette période en cause et de fixer en conséquence, compte tenu des motifs de la présente décision, le montant de l’indu devant être mis à la charge de Mme B..., dans la limite de la prescription biennale définie à l’article L. 262-40 du code de l’action sociale et des familles ; qu’il y a donc lieu de la renvoyer à cette fin devant le président du conseil général de ce département,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 27 septembre 2004 de la commission centrale d’aide sociale est annulée.
    Art. 2.  -  Mme B... est renvoyée devant le président du conseil général de la Loire-Atlantique, en vue de la fixation, compte tenu des motifs de la présente décision, du montant de l’indu devant être mis à sa charge au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion.
    Art. 3.  -  La décision de la commission départementale de la Loire-Atlantique du 17 décembre 2001 et la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 10 juillet 2001 sont réformées en ce qu’elles ont de contraire à la présente décision.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée à Mme B..., au département de la Loire-Atlantique et à la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.