Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu
 

Dossier n° 070247

M. F...
Séance du 29 octobre 2008

Décision lue en séance publique le 9 décembre 2008

    Vu le requête du 8 janvier 2007 et le mémoire complémentaire du 31 juillet 2008, présentés pour M. F... par son avocat Me R..., tendant à l’annulation de la décision du 20 novembre 2006 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Gironde a rejeté la demande tendant à l’annulation des décisions du 23 mars 2005 et du 23 novembre 2005 par lesquelles le président de la commission de recours amiables de la caisse d’allocations familiales de la Gironde, agissant pour le compte du président du conseil général, a d’une part refusé de le décharger de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 2 260,27 euros au titre de la période commençant le 1er décembre 2002, et ne lui a accordé d’autre part qu’une remise de 486,37 euros sur un second indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant initial de 4 863,66 euros dont il a été déclaré redevable au titre des mois d’août 2003 novembre 2004 ;
    Le requérant fait valoir que l’origine de l’indu n’est en aucun cas attribuable à M. F... puisqu’il s’agit en réalité d’une erreur informatique totalement imputable à la caisse d’allocations familiales de la Gironde et à la caisse d’assurance vieillesse locale ; que de plus, M. F..., qui est de nationalité algérienne, ne maîtrise pas bien la langue française, encore moins les subtilités législatives et réglementaires applicables ; qu’il peut être fait grâce à l’intéressé de l’ignorance qu’il avait de son obligation d’informer les organismes de sa situation, ce d’autant plus que les organismes eux-mêmes, face à l’ignorance récurrente de ce types d’obligation des allocataires, ont mis en place un système de subrogation automatique ; que par ailleurs, M. F... n’a aucunement la possibilité financière de rembourser les indus réclamés, ne percevant en tout et pour tout que les allocations familiales (180 euros), l’aide personnalisée au logement (456 euros), le revenu minimum d’insertion à hauteur de 66 euros et une pension de retraite de 526 euros, soit un total mensuel de 1 200 euros pour faire vivre une famille de cinq personnes et contribuer à l’entretien de sa fille majeure handicapée, laquelle ne perçoit quel’AAH ; que pour l’ensemble de ces raisons, la décision de la commission départementale d’aide sociale du 20 novembre 2006 doit être annulée et M. F... doit être déchargé des indus mis à sa charge ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les mémoires en défense du 13 avril 2007 et du 25 juin 2008, présentés par le président du conseil général de la Gironde, qui tendent au rejet de la requête ; il soutient qu’afin d’éviter les indus d’allocations de revenu minimum d’insertion, un système de subrogation a été mis en place entre la caisse d’allocations familiales et les caisses de retraite ; que dans le cas d’espèce, ce système n’a pas fonctionné, entraînant le versement directe de la pension de retraite à M. F... par la caisse de retraite à compter de juillet 2003 ; que la caisse d’allocations familiales n’en a été informée que le 30 novembre 2004 ; que M. F... a manqué à ses obligations en ne signalant pas le changement de sa situation, lequel manquement est directement à l’origine de l’indu de d’allocations de revenu minimum d ’insertion ; que c’est à bon droit qu’il lui est réclamé de rembourser les sommes indûment perçues ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 16 mars 2007, invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu aux audiences publiques des 15 avril 2008 et 29 octobre 2008, Mlle Ngo Moussi, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article R. 262-44 du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes les informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du code de l’action sociale et des familles : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’alinéa 1er de l’article L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles : « L’ensemble des ressources retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; que selon l’alinéa 1er de l’article L. 262-39 du même code : « Un recours contentieux contre les décisions relatives à l’allocation de revenu minimum d’insertion peut être formé par toute personne qui y a intérêt devant la commission départementale d’aide sociale (...) dans le ressort de laquelle a été prise la décision » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sur décision prise selon les modalités fixées par voie réglementaire » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction que M. F... a bénéficié du revenu minimum d’insertion pour un couple avec trois ou quatre enfants à charge à compter d’août 1999 ; que comme suite à une enquête sur la situation de l’intéressé, la caisse d’allocations familiales de la Gironde a été informée le 30 novembre 2004 par la caisse d’assurance vieillesse locale de ce que M. F... percevait une pension de retraite depuis août 2003 ; que ce changement de données a généré un premier indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 2 260,27 euros au titre de la période commençant le 1er décembre 2002 ; que cet indu a fait l’objet d’un refus de remise gracieuse du président de la commission de recours amiables le 23 mars 2005 ; qu’un second indu d’un montant initial de 4 863,66 euros au titre de la période d’août 2003 novembre 2004 a ultérieurement été réclamé à l’intéressé ; qu’une remise partielle de 486,37 euros a été accordée à M. F... le 23 novembre 2005 par le président de la commission de recours amiables ; que la commission départementale d’aide sociale de la Gironde a, le 20 novembre 2006, rejeté la requête de l’intéressé tendant à une remise intégrale ou partielle de l’indu au motif que « les indus réclamés proviennent du fait que M. F... n’a pas déclaré à la CAF sa pension vieillesse (...) ; que c’est à bon droit qu’il lui est réclamé la restitution des sommes indûment perçues au titre du RMI » ; que le bien-fondé de l’indu a été établi, mais que la commission départementale d’aide sociale n’a pas statué sur la précarité alors même que le moyen était soulevé ; que par suite sa décision doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que lors de sa séance du 15 avril 2008, la commission centrale d’aide sociale a demandé au président du conseil général de la Gironde de produire, outre la décision de notification du second indu d’un montant de 4 863,66 euros, les éléments permettant d’en apprécier l’origine ; qu’il résulte des pièces fournies que l’origine du trop-perçu est liée à un problème de liaison informatique entre la caisse d’allocations familiales de la Gironde et la caisse nationale d’assurance vieillesse ; qu’en effet, selon le président du conseil général, « afin d’éviter les indus de RMI, un système de subrogation a été mis en place entre l’organisme prestataire de RMI et les caisses de retraite, ce système n’ayant pas fonctionné en l’espèce, la caisse de retraite a versé directement la pension de vieillesse à M. F... à compter de juillet 2003, mais la CAF n’en a été informé par la caisse de retraite que le 30 novembre 2004 » ;
    Considérant que bien que l’erreur informatique ayant contribué à une double perception de l’intégralité de la pension de retraite et de l’allocation de revenu minimum d’insertion soit totalement imputable à l’administration, il incombait à M. F... de faire connaître à l’organisme payeur l’ensemble des revenus du foyer ainsi que l’y invitent les dispositions des articles R. 262-44 et L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles sus-rappelés ; que l’indu est fondé en droit ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction, que M. F... ne perçoit, outre une pension de retraite de 526 euros, les allocations familiales (180 euros) et l’allocation de revenu minimum d’insertion différentiel à hauteur de 66 euros pour faire vivre sa famille et contribuer à l’entretien de sa fille majeure handicapée, laquelle ne perçoit que l’allocation adulte handicapé ; que le remboursement de la totalité du solde laissé à sa charge menacerait gravement l’équilibre du budget du foyer et la satisfactions de ses besoins élémentaires ; que par suite, la récupération des indus à lui assignés est limitée à la somme de 1 000 euros ;
    Considérant que, conformément aux dispositions de l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles, le dépôt d’une demande de remise ou de réduction de dette, ainsi que la contestation de la décision prise sur cette demande devant la commission départementale d’aide sociale ou la commission centrale d’aide sociale ont un caractère suspensif ; que par conséquent, toute somme prélevée par l’administration sur les allocations ou compte courant de M. F... au-delà du montant laissé à sa charge par la présente juridiction doit lui être restituée ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 20 novembre 2006, ensemble la décision du président du conseil général de la Gironde du 23 mars 2005, sont annulées.
    Art. 2.  -  Les indus d’allocations de revenu minimum d’insertion assignés à M. F... sont limités à la somme de 1 000 euros.
    Art. 3.  -  La décision du président du conseil général de la Gironde en date du 23 novembre 2005 est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.
    Art. 4.  -  Les sommes prélevées au-delà du montant laissé à la charge du requérant par la présente juridiction lui seront restituées.
    Art. 5.  -  Le surplus de conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 6.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 29 octobre 2008 où siégeaient M. Belorgey, président, Mme Perez-Vieu, assesseure, Mlle Ngo Moussi, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 9 décembre 2008.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, au ministre du logement et de la ville, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer