Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2200
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Résidence
 

Dossier n° 080832

Mme X...
Séance du 3 avril 2009

Décision lue en séance publique le 14 mai 2009

    Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 16 avril 2008, la requête présentée par le préfet de Paris tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale reconnaître la compétence du département de Paris pour la prise en charge du dossier d’aide sociale personnes âgées de Mme X... par les moyens qu’au vu des éléments figurant dans le rapport social établi par l’assistante sociale du centre Y..., il est apparu que Mme X... réside de manière notoire dans les parties communes d’un immeuble à Paris où vit sa mère et où elle dispose d’une adresse fixe ; qu’ainsi le dossier de Mme X... a été transféré pour instruction le 13 mars 2008 au président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général ; que par lettre du 19 mars 2008, celui-ci a réfuté sa compétence financière pour l’instruction de ce dossier au motif que « même » si l’intéressée vit bien à Paris, la précarité de ses conditions de vie ne permet pas de considérer qu’elle acquiert un domicile de secours à Paris ; que la décision du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général n’est pas conforme aux articles L. 122-1 et L. 122-2 du code de l’action sociale et des familles qui disposent, d’une part, qu’à défaut de domicile de secours, les dépenses d’aide sociale incombent au département où réside l’intéressé au moment de la demande d’admission à l’aide sociale et d’autre part, que le domicile de secours s’acquiert par une résidence habituelle de trois mois dans un département ; que dans ces conditions il est demandé à la commission centrale d’aide sociale de prononcer la compétence du département de Paris pour la prise en charge du dossier d’aide sociale pour personnes âgées de Mme X... en application des dispositions de l’article R. 131-8 nouveau du code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 27 novembre 2008 le mémoire en défense du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général tendant à ce qu’il soit jugé que les frais d’hébergement en établissement pour personnes âgées de Mme X... soient mis à la charge de l’Etat par les motifs que le travailleur social chargé du suivi de l’intéressée rapporte effectivement que Mme X... s’est installée depuis 2002 dans la cage d’escalier de l’immeuble parisien où habite sa mère ; qu’il précise que l’exiguïté de l’appartement dont cette dernière est propriétaire ne lui permet pas d’héberger sa fille ; qu’un courrier adressé par le syndic de la copropriété de l’immeuble en octobre 2006 à la fois au maire et au service social de l’arrondissement de Paris révèle que son installation s’étend au parking et aux sanitaires communs de l’immeuble depuis plus de 6 mois ; que le contenu de ces informations ne saurait être mis en doute par le département de Paris ; que le préfet de Paris laisse toutefois entendre que le fait qu’il soit notoirement établi que l’intéressée occupe les parties communes de l’immeuble en question, nonobstant la précarité de ses conditions de vie, ne fait pas obstacle à l’établissement d’une résidence voire à l’acquisition d’un domicile de secours ; que le département de Paris réplique à cet égard que les parties communes d’un immeuble ne sont pas destinées par définition, à un usage d’habitation ; que leur occupation illégale ne saurait fournir au contrevenant matière à justification d’une résidence, voire d’un domicile ; qu’à fortiori, aucun document justificatif ne peut être produit ; qu’il s’avère qu’en voulant reconnaître à la postulante une résidence à l’adresse le préfet de Paris passe outre cette disposition ; que le département de Paris soutient que Mme X... doit être considérée comme sans domicile fixe au jour de l’instruction de sa demande d’aide sociale à l’hébergement et que cette circonstance justifie, qu’en application des dispositions de l’article L. 121-7 du code de l’action sociale et des familles, ses frais d’hébergement relèvent de l’Etat ;
    Vu enregistré le 15 octobre 2008 le nouveau mémoire du préfet de Paris qui persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 18 décembre 2008 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 avril 2009, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 122-1 du code de l’action sociale et des familles : « Les charges d’aide sociale légale incombent au département où le bénéficiaire a son domicile de secours. A défaut de domicile de secours, ces dépenses incombent au département où réside l’intéressé au moment de la demande d’admission à l’aide sociale ou à l’Etat lorsque le bénéficiaire est sans domicile reconnu » ; qu’aux termes de l’article L. 122-2 du même code celui-ci s’acquiert : « (...) par une résidence habituelle de trois mois dans le département à compter de la majorité ou l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux, ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou à titre de l’aide sociale au domicile d’un particulier agréé ou faisant l’objet d’un placement familial (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 122-3 du même code : « Le domicile se perd : 1o Par une absence ininterrompue de trois mois postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf si celle-ci est motivée par un séjour en établissement sanitaire ou social ou au domicile d’un particulier agréé ou dans un placement familial (...) 2o Par l’acquisition d’un autre domicile de secours » ; qu’aux termes de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles : « les personnes pour lesquelles un domicile fixe ne peut être déterminé ont droit aux prestations d’aide sociale sur décision de la commission mentionnée à l’article L. 131-5 » et qu’à ceux de l’article L. 131-1 du même code « sont à charge de l’Etat premièrement les dépenses d’aide sociale engagées en faveur des personnes mentionnées à l’article L. 111-3 » ;
    Considérant qu’il y a lieu de rechercher si une personne ne justifie d’aucun domicile fixe au sens de l’article L. 111-3 précité du code de l’action sociale et des familles que si aucun domicile de secours ne peut être établi en ce qui la concerne ; que les dispositions de l’article L. 122-2 exigent pour ce faire une résidence « habituelle » de plus de trois mois dans un département ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que la permanence sociale du centre d’action sociale de la ville de Paris a introduit le 16 janvier 2008 une demande d’aide sociale à l’hébergement pour Mme X... ; qu’il ressort des pièces versées au dossier et notamment du rapport social établi par l’assistante sociale du service hospitalo-universitaire de santé mentale et de thérapeutique de Paris que depuis 1973, Mme X... a toujours résidé à Paris soit dans un appartement, soit à l’hôtel, soit en cohabitation avec un membre de sa famille ; que de 1973 à 1977 elle demeurait dans le ne arrondissement, de 1977 à 1980 dans le énième arrondissement, de 1980 à 1995 dans Paris ; qu’à partir de 1995 jusqu’en 2002 Mme X...a été logée « par les services sociaux dans des structures d’hébergement d’urgence » dont le dossier ne permet pas de déterminer si elles avaient la nature d’établissements sociaux, cette circonstance demeurant en tout état de cause sans incidence sur la solution du présent litige puisque, qu’elle ait été admise ou non en établissement social, Mme X... continuait de résider à Paris ; que depuis 2002 à ce jour, elle vivrait dans l’immeuble où sa mère, âgée de 85 ans, dispose d’un studio dans lequel, compte tenu de l’exigüité de celui-ci, elle ne peut la recevoir ; que Mme X... « squatte » les parties communes de cet immeuble ; qu’un courrier de M. Dominique Baud, conseiller de Paris, décrit avec précision des conditions de vie plus que précaires dans les escaliers entre le 7e et le 8e étage et dans le parking au 1er sous-sol où elle cuisine, stocke ses réserves alimentaires et ses médicaments ; que nonobstant cette précarité extrême Mme X... doit être regardée comme ayant une résidence depuis plus de trois mois dans le département de Paris, laquelle est une notion de fait indépendante de la notion de domicile civil voire des exigences minimales d’une existence préservant les exigences matérielles de sa dignité ; qu’il serait d’ailleurs en opportunité paradoxal que les services sociaux compétents du département de Paris n’aient pu pourvoir à la préservation de celle-ci durant de nombreuses années et que la conséquence en soit que lorsqu’une solution institutionnelle intervient elle ne soit plus à la charge dudit département,

Décide

    Art. 1er.  -  Pour la prise en charge des frais d’hébergement de Mme X... le domicile de secours acquis et non perdu par celle-ci est dans le département de Paris.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 avril 2009 où siégeaient M. Lévy, président, Mlle Balsera, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 14 mai 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer