Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Donation - Assurance-vie
 

Dossier n° 080475 et 080475 bis

Mme X...
Séance du 3 avril 2009

Décision lue en séance publique le 14 mai 2009

    Vu 1o enregistrée à la direction des affaires sanitaires et sociale de Saône-et-Loire le 4 février 2008 et le 19 mai 2008 au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale et 2o enregistrée à la direction des affaires sanitaires et sociales de Saône-et-Loire le 10 mars 2008, les requêtes de Mmes V... et G... tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision du 8 janvier 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Saône-et-Loire a rejeté leurs demandes dirigées contre la décision du 28 septembre 2007 du président du conseil général de Saône-et-Loire récupérant à leur encontre contre le donataire les prestations avancées à Mme X... au titre de l’aide sociale aux personnes âgées pour un montant de 4 637,98 euros par les moyens, en ce qui concerne Mme V..., que Mme X... a entendu la faire bénéficier du contrat assurance-vie décès que l’on entend récupérer à son encontre ; qu’elle autorise l’administration à récupérer sur d’autres comptes ; que toutefois, selon les derniers renseignements qu’elle a obtenu celle-ci doit lui verser des intérêts même en ce qui concerne la récupération au titre de l’assurance-vie ; que Mme G... et elle-même étaient les seules à s’occuper de leur mère à l’exclusion des trois autres enfants ; en ce qui concerne Mme G..., qu’une assurance-vie étant aux termes de l’article L. 132-14 du code des assurances versée au bénéficiaire au décès de l’assuré, ne fait plus partie de la succession et qu’il en résulte que la somme versée est réputée appartenir au bénéficiaire depuis l’origine du contrat d’assurance ;
    Vu enregistré le 13 mai 2008 le nouveau mémoire présenté pour Mme G..., par Me Pierre Roussot, avocat, persistant dans les conclusions de la requête par le même moyen ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 23 mai 2008 le mémoire en défense du président du conseil général de Saône-et-Loire tendant au rejet des requêtes par les motifs que l’article L. 132-14 du code des assurances ne fait en rien obstacle à l’exercice du recours contre le donataire ; que dans sa lettre du 2 mai 2007 le Crédit agricole Centre-Est a indiqué que les créanciers du souscripteur ont droit au remboursement des primes si celles-ci sont manifestement exagérées eu égard à leurs facultés ; que la jurisprudence du conseil d’Etat et de la commission centrale d’aide sociale autorise l’administration de l’aide sociale à rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier l’engagement d’une action en récupération et à requalifier le contrat d’assurance-vie décès en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles il a été souscrit, il se révèle une intention libérale du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire ; que Mme X... a souscrit les contrats d’assurance-vie à 78 ans ; que la récupération s’effectue au maximum à concurrence du montant de l’aide attribuée sur le capital placé en assurance-vie ; que la prime était de 4 637,98 euros alors qu’en 2002 Mme X... ne possédait que 2 426,95 euros de liquidités dont 1 828,34 euros en capitaux placés ; que l’actif net successoral s’élève à 2 704,19 euros ; qu’ainsi le montant des primes versées était manifestement excessif au regard des possibilités du souscripteur et compte tenu de l’âge de Mme X... à la date de la souscription et de la durée des contrats (8 ans) qui font apparaître l’absence d’un aléa véritable, les primes constituent en réalité une donation ; que l’aide sociale a le caractère d’une avance ; que s’agissant de la demande d’intérêts de Mme V... en ce qui concerne les intérêts du capital placé autre que celui provenant de l’assurance-vie, elle n’a pas contesté le recours en récupération contre la succession et ne peut soulever ce moyen nouveau en appel ; que de plus elle affirme accepter la récupération des sommes placées sur le compte-chèques, le livret LEP, le CODEVI et l’argent de poche, sommes qui constitue l’actif net successoral ; que par ailleurs aucun texte ne prévoit que l’actif net successoral est constitué des sommes placées diminuées des intérêts qui seraient destinées aux héritiers ; qu’en ce qui concerne les intérêts du capital placé en assurance-vie, seul le capital peut faire l’objet d’une requalification en donation permettant ainsi le recours en récupération contre le donataire et que le département demande la récupération du capital placé soit 4 637,98 euros et non du capital perçu par les bénéficiaires qui comprend les intérêts ;
    Vu enregistré le 13 juin 2008 le mémoire en réplique présenté pour Mme G..., par Me Pierre Roussot, avocat, persistant dans les conclusions de la requête par le même moyen et les moyens qu’à la date où elle a souscrit l’assurance-vie Mme X... ne pouvait pas « deviner » qu’elle serait admise trois ans plus tard à l’aide sociale, ce qui exclut toute intention frauduleuse ; que les pièces produites en ce qui concerne les montants des capitaux possédés par Mme X... lors de la souscription du contrat d’assurance-vie n’ont pas de caractère probant et ne permettent pas de tenir pour acquis que le montant des primes versées était manifestement excessif au regard des possibilités de souscripteur ;
    Vu enregistré le 11 juillet 2008 le mémoire en réplique du président du conseil général de Saône-et-Loire persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que l’intention frauduleuse n’a nullement été alléguée par l’administration ; que les pièces justificatives de ressource produites par celle-ci ont été transmises par Mme X... elle-même et que la pièce no 7 permet de justifier de ce que seul le capital placé en assurance-vie a été appréhendé, justification répondant par ailleurs à un moyen soulevé par Mme V... ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 21 janvier 2009 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 avril 2009, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il y a lieu de joindre les deux requêtes susvisées introduites par deux bénéficiaires d’un même contrat d’assurance-vie décès et présentant à juger des questions liées entre elles ;
    Sans qu’il soit besoin de régulariser la requête de Mme V... quant à la représentation par Me Pierre Roussot qui déclare seulement représenter Mme G... ;
    En ce qui concerne les moyens articulés par Mme V... ;
    Considérant que si Mme V... fait valoir que lorsque Mme V..., mère, a souscrit le contrat d’assurance-vie décès litigieux trois ans avant son admission à l’aide sociale à l’hébergement aux personnes âgées, elle entendait ainsi reconnaître que sa sœur Mme G... et elle-même étaient les seuls de ses cinq enfants dont elle pouvait attendre l’assistance en cas de dépendance, ce qui a été ultérieurement confirmé, cette circonstance, qui conduit d’ailleurs à corroborer l’intention libérale de la souscriptrice, ne saurait conférer, à supposer que ceci soit allégué, le caractère rémunératoire à la dotation indirecte à la date à laquelle est intervenue la souscription du contrat ;
    Considérant que le département de Saône-et Loire ne pouvant récupérer que les capitaux souscrits et non les intérêts perçus par les bénéficiaires après le décès de la souscriptrice, le moyen tiré de ce que les intérêts devraient être restitués à Mme V... ne peut qu’être, en toute hypothèse, écarté ; qu’en tant qu’il tendrait à faire valoir que les capitaux souscrits faisaient partie de l’actif successoral de Mme V..., mère, il serait, en toute hypothèse, inopérant dès lors que la récupération contre la succession n’a pas été contestée par la requérante ;
    En ce qui concerne les moyens articulés par Mme G... ;
    Considérant que l’action du département étant fondée sur le 2o de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles le moyen tiré de ce que les sommes versées aux bénéficiaires au décès de l’assurée ne feraient plus parties de la succession aux termes de l’article L. 132-14 du code des assurances est inopérant ; qu’à supposer qu’en faisant valoir qu’il « en résulte que cette somme est réputée appartenir au bénéficiaire depuis l’origine » Mme G... entend se prévaloir de son acceptation de sa désignation comme bénéficiaire antérieurement au décès de la souscriptrice, cette circonstance, si elle était de nature à interdire au stipulant de révoquer de son vivant la désignation de Mme G... comme bénéficiaire, est inopposable dans la présente instance au département de Saône-et-Loire ;
    Considérant que pour contester dans son mémoire en réplique que le contrat litigieux puisse être requalifié en donation indirecte Mme G... se prévaut de ce que la stipulante ne pouvait pas envisager au moment de la souscription du contrat qu’elle serait trois ans plus tard admise à l’aide sociale, ce qui exclut toute intention frauduleuse de sa part ; qu’une telle intention n’est ni invoquée pas le département de Saône-et-Loire ni nécessaire pour que l’acte puisse être le cas échéant requalifié en donation indirecte ; que ce moyen inopérant ne peut en conséquence qu’être écarté ;
    Considérant que contrairement à ce que soutient Mme G... il résulte bien des pièces versées au dossier que le montant de la prime souscrite était de l’ordre du double de l’ensemble des liquidités que par ailleurs possédait la stipulante au moment de la souscription ; qu’en cet état, s’agissant d’un contrat souscrit à 78 ans (âge à propos duquel aucun moyen n’est soulevé) pour un montant de prime de l’ordre du double de celui des autres capitaux alors possédés au moment de la souscription par la stipulante, Mme G... n’établit pas que la commission départementale d’aide sociale de Saône-et-Loire ait fait une inexacte appréciation quant à l’apport par l’administration de la preuve des circonstances justifiant la requalification du contrat en donation indirecte ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que tant les moyens de Mme V... que ceux de Mme G... ne peuvent être qu’écartés et leurs requêtes, en conséquence, ne peuvent être que rejetées,

Décide

    Art. 1er.  -  Les requêtes de Mme V... et de Mme G...sont rejetées.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 avril 2009 où siégeaient M. Lévy, président, Mlle Balsera, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 14 mai 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer