Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Placement - Prise en charge - Conditions de ressources
 

Dossier n° 081102

M. X...
Séance du 3 avril 2009

Décision lue en séance publique le 14 mai 2009

    Vu enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 30 juin 2008, la requête présentée par M. R..., directeur de l’ATDI, association tutélaire de l’Aude tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Aude du 11 décembre 2007 de rejet de prise en charge des frais d’hébergement de M. X... au foyer « Y... » par les moyens que cette décision ne leur parait pas conforme aux nouveaux dispositifs de la loi du 11 février 2005 et de ses décrets d’application concernant la prise en compte du statut des personnes handicapées ; que par ailleurs les motifs de refus ne leur paraissent pas conformes à l’article L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles ; que l’état financier ci-joint démontre son incapacité financière à faire face au coût de son hébergement ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 30 juin 2008 le mémoire en défense du président du conseil général de l’Aude qui conclut au rejet de la requête par les motifs que M. X..., célibataire, âgé de 62 ans, est pris en charge depuis de nombreuses années au foyer Y... ; que lors du renouvellement de sa demande, la commission d’admission à l’aide sociale en date du 24 juillet 2007 a émis un avis défavorable au maintien de la prise en charge à compter du 1er juillet 2007 estimant que l’intéressé avait les ressources suffisantes pour s’acquitter de sa dépense ; que par sa décision du 11 décembre 2007 la commission départementale confirmait la précédente décision ; que le refus repose sur le fait que le demandeur dispose d’une épargne égale à 46 931 euros qui doit lui permettre de financer ses frais d’hébergement plusieurs années puisque après le calcul de ses ressources et des sommes laissées à sa disposition il lui reste une dépense de 350 euros par mois à couvrir ; qu’ainsi sans ignorer les articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles et considérant que l’aide sociale n’intervient qu’à titre subsidiaire quand l’état de besoin est établi ; qu’il s’agit d’un principe directeur ; que cet état n’est pas avéré en l’espèce ;
    Vu enregistré le 23 octobre 2008 le mémoire de M. R..., directeur de l’ATDI de l’Aude persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’il lui parait important que son protégé puisse d’une part continuer à bénéficier de son statut de personne adulte handicapée et que d’autre part ses capitaux (lesquels ont été constitués sa vie durant à partir de son minimum à disposition) ne soient pas pris en compte dans sa situation au regard de l’aide sociale ; qu’en effet l’interprétation des articles L. 132-1 et R. 132-1 par les différentes commissions ne leur parait pas recevable sur le plan juridique ; que ces articles précisent que seuls les revenus (financiers y compris) du demandeur qu’ils soient réels ou calculés doivent être pris en compte et non les capitaux en tant que tels sachant que M. X... n’a aucun capital non productif de revenus ; que M. X... a travaillé en ESAT puis fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er août 2005 ; qu’il a toutefois continué à résider au foyer d’hébergement « Y... » puisqu’il y était hébergé depuis de nombreuses années (depuis 1969) ; que selon les dispositions de l’article 18 de la loi de février 2005, M. X... est bien accueilli dans un établissement ou service visé à l’article L. 312-1-7 du code de l’action sociale et des familles et relève donc du statut de personne handicapée ; qu’il est encore à noter que les capitaux sont le fruit de son épargne sur son « reste à vivre » ce qui renforce d’autant leur position qui, au-delà de son fondement juridique, repose sur une dimension éthique ; qu’il lui parait inadmissible que lui soit repris ce qui lui a été laissé ; qu’il est encore à noter que ses revenus ne permettent en aucun cas de prendre en charge le prix de journée de l’établissement ainsi qu’en atteste le tableau récapitulatif ci-joint ; qu’en raison de la nature des éléments fournis, il leur semble que leur requête paraît recevable étant à l’image de celle présentée lors de l’examen de votre commission centrale en date du 26 octobre 2007 de la situation de M. D... ; qu’il joint copie des statuts permettant au directeur de l’établissement à représenter les majeurs pour les actes de la vie civile ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 18 décembre 2008 invitant les parties à se présenter à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 3 avril 2009, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 344-5-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne handicapée qui a été accueillie dans un des établissements ou services mentionnés au 7 de l’article L. 312-1 bénéficie des dispositions de l’article L. 344-5 lorsqu’elle est hébergée dans un des établissements ou services mentionnés au 6o du I de l’article L. 312-1 du présent code et au 2o de l’article L. 6111-2 du code de la santé publique » ;
    Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. X... aujourd’hui âgé de 64 ans, a été admis au foyer d’hébergement « Y... » de Pennautier en 1969 ; qu’il y réside toujours ; que par décision du 12 mai 2005 la COTOREP de l’Aude a préconisé le placement en foyer d’hébergement dans l’attente d’un placement dans une structure plus adaptée pour la période du 11 juillet 2005 au 11 juillet 2010 ;
    Considérant que la circonstance que le président du conseil général de l’Aude ait pris ses décisions, après avis de « la commission d’admission à l’aide sociale » supprimée depuis le 1er janvier 2007, n’est pas de nature à entacher d’illégalité la décision prise après un tel avis d’une instance « maintenue en vie après son décès législatif », dès lors qu’il ne ressort pas du dossier que le président du conseil général s’est estimé lié par un tel avis et alors même que la composition et la dénomination de l’instance ainsi consultée correspondaient, ainsi qu’il vient d’être dit, à celles d’une instance qui n’avait plus d’existence légale ;
    Considérant que le principe de subsidiarité de l’aide sociale invoqué par le président du conseil général de l’Aude ne saurait faire obstacle à l’application de dispositions de l’article L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles et des dispositions réglementaires prises pour son application d’où il ressort ainsi d’ailleurs que, confirmé par une jurisprudence constante dont le premier juge a refusé de faire application, seuls les revenus des capitaux placés et non ces capitaux eux-mêmes doivent être pris en compte pour la détermination de la participation de l’aide sociale aux frais de placement ;
    Considérant que par décision du 10 juillet 2007 le président du conseil général de l’Aude a prononcé l’admission à l’aide sociale de M. X... « du 1er juillet 2007 au 31 juillet 2010 sous réserve de l’application du minimum de ressources qui doit être laissé à disposition, la contribution de l’intéressé à ses frais d’hébergement et d’entretien s’élève à 90 % de ses ressources » ; qu’ainsi qu’en témoigne la pratique de l’ensemble des décisions de prise en charge antérieurement intervenues l’administration entendait par « ressources » les « revenus » de l’assisté tels qu’ils sont sans contestation établis dans la fiche récapitulative jointe à la requête de son tuteur ; que par décision du 26 juillet 2007, qui ne peut qu’être considérée comme un retrait de la décision du 10 juillet 2007, le président du conseil général a décidé le rejet de la demande sur laquelle il venait de statuer au motif « l’intéressé peut dans l’immédiat faire face à ses frais de séjour », par l’utilisation de ses capitaux ; qu’il résulte de ce qui précède que cette décision est illégale, doit être annulée et que M. X... est admis à l’aide sociale à l’hébergement des personnes handicapées adultes dans les conditions mêmes prévues par la décision du 10 juillet 2007 ; que toutefois c’est à tort que celle-ci avait considéré que la participation de l’intéressé était égale à 90 % de ses « ressources », alors que M. X..., qui ne travaille pas, a droit à conserver en application de l’article D. 344-35 le minimum de 30 % de l’allocation aux adultes handicapés mensuelle, qui était et demeure supérieur à 10 % de ses revenus de 923,71 euros par mois ;
        Considérant il est vrai que le président du conseil général tout en mentionnant « ne pas ignorer » les dispositions législatives et réglementaires applicables prétend en écarter l’application en raison du principe auquel il reconnait valeur supérieure de subsidiarité de l’aide sociale ; qu’en toute hypothèse, comme il a été dit, un tel principe ne saurait aller à l’encontre des dispositions de nature législative, telles qu’interprétées par le juge, des articles L. 132-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles qui bornent au moment de l’admission à l’aide sociale la prise en compte des ressources à celle des revenus interdisant ainsi celle des capitaux possédés par l’intéressé et, par ailleurs, productifs de revenus fussent ils capitalisés, ce qui est le cas de l’espèce au vu de la « fiche récapitulative » jointe par le tuteur à la requête ; qu’en toute hypothèse, ce qui n’est d’ailleurs pas allégué, le règlement départemental d’aide sociale n’aurait pu aller à l’encontre des dispositions législatives et réglementaires légalement prises sus rappelées,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Aude du 11 décembre 2007, ensemble la décision du président du conseil général de l’Aude du 26 juillet 2007 sont annulées.
    Art.  2.  -  Le directeur de l’ATDI de l’Aude est renvoyé devant le président du conseil général de l’Aude afin que la participation de M. X... à ses frais d’hébergement et d’entretien au foyer Y... soit déterminée conformément aux motifs de la présente décision, l’intéressé conservant en toute hypothèse au minimum 30 % du montant mensuel de l’allocation aux adultes handicapés si ce montant demeure supérieur durant l’ensemble de la prise en charge à 10 % de ses revenus.
    Art.  3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 3 avril 2009 où siégeaient M. Lévy, président, Mlle Balsera, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 14 mai 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer