Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Récupération sur succession - Frais
 

Dossier no 090573

M. X...
Séance du 6 novembre 2009

Décision lue en séance publique le 27 novembre 2009

    Vu enregistré à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Rhône le 17 mars 2008, la requête présentée par le président du conseil général du Rhône tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale réformer la décision du 18 décembre 2007 de la commission départementale d’aide sociale du Rhône réformant la décision de la commission d’admission à l’aide sociale du Rhône du 26 janvier 2006 en fixant à 47 845,97 euros la récupération à l’encontre de la succession de M. X... par les moyens que les frais funéraires de M. X... qui s’élèvent à 6 012,07 euros dont 3 050 euros ont été prélevés sur les comptes bancaires et 687 euros ont été réglés par la mutuelle laissent 2 275,07 euros à la charge des héritiers ; que néanmoins la commission départementale d’aide sociale a admis la déduction de 6 012,07 euros ; qu’il se pourvoit en appel afin d’assurer une équité entre les bénéficiaires de l’aide sociale ;
    Vu enregistré le 25 mars 2009 le mémoire présenté pour le département du Rhône tendant à ce que soit reconnu le caractère excessif des frais funéraires de M. X... au-delà de 3 050 euros et que soit maintenue la décision de récupération de la créance départementale soit 14 512,74 euros qui s’exercera uniquement sur l’actif net successoral calculé sur la base de 3 050 euros de frais funéraires ; Le président du conseil général du Rhône expose que le montant récupérable dont fait état la commission départementale d’aide sociale à hauteur de 47 845,97 euros est erroné ; que, d’une part une facture SFRB de 102,84 euros n’a pas été déduite de l’actif, d’autre part que l’intégralité des frais funéraires a été soustraite dudit actif alors que le plafond de 3 050 euros avait déjà été retenu sur les comptes du défunt, seul le dépassement de 2 275,07 euros étant à déduire ; que la somme exacte à récupérer est de 49 980,13 euros ; que le financement des frais funéraires ne relève pas de la compétence du département ; que toutefois l’article 18 du règlement départemental d’aide sociale autorisait le prélèvement de ces frais sur la succession dans la limite de 3 050 euros sur la base d’instructions ministérielles des 31 mars 1972 et 9 juin 1992 permettant le retrait des frais funéraires par les comptables publics sur les comptes de dépôt à hauteur de 3 049 euros ; que cette disposition n’a pas pour effet de plafonner le montant des frais funéraires du bénéficiaire de l’aide sociale laissé à la discrétion de la famille mais a pour objet de déduire du passif successoral la somme maximale de 3 050 euros, le surplus étant à la charge des héritiers en vertu de leur qualité d’obligés alimentaires ; que par un arrêt du 5 novembre 2004 le Conseil d’Etat a précisé que les frais funéraires à moins qu’ils n’aient un caractère excessif doivent être déduits de l’actif net successoral dès lors qu’ils sont réels et vérifiés ; que le seuil de 3 050 euros est justement apprécié dans le contexte de personnes bénéficiant de l’aide sociale ; que pour le surplus les frais exposés présentent un caractère excessif ; que la Mutuelle Intégrance au titre des frais funéraires a versé 687 euros laissant 2 275,07 euros à la charge des héritiers ; que les frais de notaire s’élèveraient à 400 euros en cas de renonciation ou à 1 000 euros en cas d’acceptation par Mme S... qui devra payer les droits au service des impôts sur les sommes perçues ; que l’acceptation engendrera des frais de notaire et des droits d’enregistrement réduisant ainsi la récupération du département du Rhône ; que celui-ci a revalorisé le montant plafonné par le RDAS à 3 500 euros à compter d’août 2008 ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 16 juillet 2009 le mémoire de Mme Y... exposant qu’il est regrettable de « chipoter » sur des frais d’obsèques au coût assez élevé du fait que la famille a dû procéder à un regroupement de corps ; que la créance de son frère à son égard est impalpable et inquantifiable mais qu’elle ne souhaite plus avoir à payer pour lui ; qu’en conséquence elle conclut au rejet de la requête ;
    Vu enregistré le 20 juillet 2009 le mémoire de Mme S... exposant qu’à partir du moment où deux créances de la CRAM et de l’aide sociale absorbaient la totalité de l’actif connu de la succession le notaire a conseillé à chacun des neuf frères et sœurs d’y renoncer purement et simplement qu’elle est la seule à ne pas l’avoir fait ; que par ailleurs aucun des organismes titulaires des créances ne peut se retourner contre les cohéritiers pour réclamer le solde des frais engagés préalablement pour leur frère ; qu’elle a sollicité de la commission départementale d’aide sociale du Rhône la prise en charge et le remboursement des frais d’obsèques payés par la famille soit 2 962,07 euros ; que la commission leur a certes donné raison mais a commis une erreur de calcul en ramenant à 47 845,97 euros le montant de l’actif net de la succession récupérable par le département et la CRAM après déduction de l’intégralité des frais funéraires alors qu’il va de soi que seuls les 2 962,07 euros restant en charge de la famille devaient être déduits puisque 3 050 euros avait déjà été prélevé sur le compte du défunt au moment de son décès ; que le notaire chargé de la succession a commis une erreur en faisant apparaître l’allocation obsèques versée par la Mutuelle Intégrance d’un montant de 687 euros sur l’actif successoral alors que ladite allocation n’entre pas dans la succession du défunt ; que les frères et sœurs de M. X... ont veillé à gérer le plus honnêtement possible la fortune de leur frère ; que c’est du fait en grande partie de cette bonne gestion que la récupération est possible par le département ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 6 novembre 2009, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la portée de la présente décision ratione personarum ;
    Considérant que seules Mmes Y... et S..., deux des neuf frères et sœurs de M. X..., l’assisté, ont formulé une demande à la commission départementale d’aide sociale du Rhône ; que si celle-ci a jugé que « le département du Rhône est fondé à récupérer la somme de 47 845,97 euros à l’encontre de la succession de M. Y... » et si le recours prévu au a) de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles s’exerce à l’encontre de la succession et non des héritiers pris personnellement, il n’en demeure pas moins que les sept autres héritiers n’ont pas déféré la décision administrative de récupération au juge de première instance de l’aide sociale, aucun mandat n’étant, en tout état de cause, donné à l’une des deux demanderesses, et que le montant de la créance demeure en ce qui les concerne, à due concurrence de leurs droits dans la succession, celui établi par la commission d’admission à l’aide sociale, la présente décision n’étant opposable que par Mmes Y... et S... ;
        Sur le montant de l’actif net de la succession et le montant des frais d’obsèques à déduire pour déterminer la récupération que peut rechercher la collectivité d’aide sociale ;
        Considérant d’une part, que la commission départementale d’aide sociale du Rhône a omis de déduire du montant de l’actif net une somme de 102,84 euros correspondant à une facture à charge de la succession ; que dans ces conditions le montant de l’actif net déterminé pour l’application de loi fiscale s’établit à 53 858,04 euros moins (1 500 euros forfait fiscal de frais d’obsèques + 102,84 euros = 1 602,84 euros) soit 52 255,20 euros), pour autant la récupération que peut rechercher l’aide sociale s’établit déduction faite des frais obsèques ne présentant pas un caractère excessif pour leur montant réel et non forfaitairement plafonné ;
        Considérant d’autre part, que c’est bien dans cette limite que devait être fixée la récupération qui pouvait être recherchée sur l’actif net successoral ; que le montant retenu par Mme S... qui est en toute hypothèse sans intérêt à contester le montant fixé, supérieur à celui qu’elle retient, par le premier juge ne peut être pris en compte ; que la circonstance que le département ait perçu une partie de cette créance directement sur les comptes du défunt entrant dans la détermination de l’actif successoral est sans incidence sur la fixation par le juge de l’aide sociale de la créance récupérable ;
        Considérant encore que la commission départementale d’aide sociale a considéré qu’un montant global de 6 012,07 euros de frais d’obsèques n’était en l’espèce pas excessif et pouvait être déduit dans son intégralité et non seulement à hauteur du forfait fiscal ou d’un plafond fixé par le règlement départemental d’aide sociale ; que compte tenu, notamment, de la nécessité de regroupement de corps dans le cadre de l’aménagement du caveau de famille après le décès de M. X... le montant des frais exposés et dont le président du conseil général appelant ne conteste pas la quotité globale ne présente pas un caractère excessif ; que le président du conseil général n’est pas fondé à opposer un plafond de déduction de 3 050 euros fixé par le règlement départemental d’aide sociale conformément à des instructions ministérielles qui ne sont pas opposables aux assistés et à leurs héritiers ni dans la présente instance au juge de l’aide sociale auquel il appartient seulement de rechercher si le montant des frais déduits dans les circonstances particulières de chaque espèce présente ou non un caractère excessif ou est au contraire justifié ;
        Considérant ensuite que le président du conseil général appelant invoque une jurisprudence de la cour de cassation selon laquelle les frais qui ne peuvent être supportés par l’actif net successoral sont à la charge des débiteurs de l’obligation alimentaire même s’ils ont renoncé à la succession à proportion de leurs ressources (Civile 1re 21 septembre 2005 voir aussi 14 mai 1992 Société des pompes funèbres générales contre Mme F... et 28 janvier 2009, pourvoi no 0714272) mais que cette jurisprudence n’est en toute hypothèse pas invocable, alors d’une part que l’action de l’aide sociale ne peut porter que sur l’actif net successoral, d’autre part et en toute hypothèse que les présents héritiers qui sont des collatéraux de l’assisté ne sont pas tenus à l’obligation alimentaire et qu’il n’est ni établi ni même allégué qu’ils puissent l’être d’une obligation naturelle ou d’un engagement unilatéral ; qu’il résulte de tout ce qui précède que l’appel du président du conseil général du Rhône ne peut qu’être rejeté ;
        Considérant que, comme il a été dit, Mme S... est en toute hypothèse sans intérêt à contester les modalités de détermination de la créance récupérable par l’aide sociale par le premier juge alors d’ailleurs que, comme il a été également dit, celui-ci n’avait pas à tenir compte des modalités selon lesquelles l’administration avait déjà prélevé une partie de la créance qu’il fixait mais seulement à fixer la quotité globale de la créance récupérable ; que l’erreur alléguée du notaire quant à la prise en compte d’une prime versée par la Mutuelle Intégrance est en toute hypothèse sans incidence sur le montant de la créance récupérable retenu par le premier juge ;
        Considérant que Mme Y... se borne à conclure à la confirmation de la décision de la commission départementale d’aide sociale ; qu’elle obtient à ce titre satisfaction compte tenu de ce qui précède sans qu’il soit besoin ni qu’il y ait lieu pour le juge de l’aide sociale de se prononcer sur le surplus des circonstances qu’elle invoque relatives aux rapports entre son frère et elle-même du vivant de M. X... ;
        Considérant qu’il n’appartient pas dans la présente instance compte tenu des conclusions dont elle est saisie en toute hypothèse à la commission centrale d’aide sociale de fixer les modalités du concours des créances respectives du département du Rhône et de la CRAM Rhône-Alpes pour la récupération de celle-ci sur la succession de M. X... ;
        Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu après rectification de l’omission de déduction de 102,84 euros même si à la vérité seul le département du Rhône la soulève clairement, mais alors que l’argument peut être regardé comme repris par les intimées, de rejeter le surplus des conclusions de la requête d’appel du département du Rhône et les conclusions de Mmes S... et Y...,

Décide

    Art. 1er.  -  Le département du Rhône est autorisé à récupérer à l’encontre de Mme S... et de Mme Y... respectivement 1/9e et 1/9e de la somme de 47 743,13 euros.
    Art. 2.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Rhône du 18 décembre 2007 en tant qu’elle fixe à 47 845,97 euros la créance récupérable et en tant qu’elle ne limite pas la récupération pour le montant qu’elle fixe aux seuls héritiers ayant formulé devant elle une demande dirigée contre la décision de la commission d’admission à l’aide sociale du Rhône est réformée en ce qu’elle a de contraire à l’article 1er et aux motifs de la présente décision.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
        Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 novembre 2009 où siégeaient M. LEVY, président, M. JOURDIN, assesseur, et Mlle ERDMANN, rapporteure.
        Décision lue en séance publique le 27 novembre 2009.
        La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer