Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Domicile de secours - Résidence
 

Dossier no 090013

Mme X...
Séance du 27 novembre 2009

Décision lue en séance publique le 18 décembre 2009

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 27 octobre 2008, le recours par lequel le président du conseil général de la Sarthe demande au juge de l’aide sociale de dire que Mme X... n’a pas acquis de domicile de secours dans le département de la Sarthe et se trouverait dépourvue de domicile fixe en sorte que la charge de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) qui lui a été accordée et ses frais d’hébergement à la maison de retraite R... située à V... (Sarthe) incomberaient au département de l’Orne où l’intéressée a des attaches familiales ou, à défaut, à l’Etat ;
    Vu la lettre en date du 19 décembre 2008 par laquelle le président du conseil général de l’Orne a transmis à celui de la Sarthe la demande d’aide sociale de Mme X..., réputée appartenir « à la communauté des gens du voyage », et décliné sa compétence ;
    Vu enregistré comme ci-dessus, le 2 février 2009, le mémoire en réponse par lequel président du conseil général de l’Orne conclut au rejet des conclusions du recours susvisé par les motifs qu’il n’est aucunement établi que Mme X... aurait acquis un domicile de secours dans le département de l’Orne à raison d’une résidence habituelle de plus de trois mois dans cette collectivité, le maire de la commune de M... (Orne), où l’intéressée disposait d’une boîte aux lettres chez M. Y..., indiquant, en effet, que « Mme X... n’a jamais habité la commune » ;
    Vu enregistré comme ci-dessus, le 23 mars 2009, le mémoire en réplique par lequel le président du conseil général de la Sarthe persiste à demander de mettre à la charge de celui de l’Orne, ou à défaut à celle de l’Etat, l’allocation personnalisée d’autonomie et les frais d’hébergement de l’intéressée à la maison de retraite R... de V... au motif que l’assistée aurait résidé de manière habituelle dans le département de l’Orne sans être recensée par le « pôle gens du voyage » de la Sarthe ;
    Vu enregistré comme ci-dessus, le 11 mai 2009, le mémoire en duplique par lequel le président du conseil général de l’Orne persiste à soutenir que Mme X... n’a pas acquis de domicile de secours dans le département de l’Orne ;
    Vu enregistré comme ci-dessus, le 18 juin 2009, le mémoire par lequel le président du conseil général de la Sarthe persiste dans ses conclusions ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 27 novembre 2009, M. GOUSSOT, rapporteur, Mme Annie DUCA pour le département de la Sarthe, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur les conclusions du président du conseil général de la Sarthe dirigées contre l’Etat (préfet de l’Orne) en ce qui concerne les frais d’hébergement ;
    Considérant que saisie de la demande d’aide sociale de Mme X... par le président du conseil général de l’Orne, le président du conseil général de la Sarthe a considéré que l’imputation financière de la dépense revenait soit au département de l’Orne, soit à l’Etat, si Mme X... était considérée comme sans domicile fixe ; qu’il a saisi la commission centrale d’aide sociale de conclusions alternatives dirigées contre le département de l’Orne ou l’Etat ; que le greffe a communiqué la requête aux deux collectivités intimées ; que le préfet de l’Orne n’a pas produit de mémoire en défense ;
    Considérant qu’en tant que le président du conseil général de la Sarthe saisi par un autre président de conseil général entendait que soit retenue la compétence du département saisissant il lui appartenait bien, comme il l’a fait, de saisir la commission centrale d’aide sociale en application du 1er alinéa de l’article L. 122-4 du code de l’action sociale et des familles ; que par contre, en application du I de l’article R. 131-8 et alors qu’il avait initialement été saisi par un autre président de conseil général, il appartenait au président du conseil général de la Sarthe de saisir le préfet dans les conditions prévues audit I lequel doit être regardé comme ayant rappelé l’obligation d’une prise de position préalable de l’autorité de l’Etat assimilable à une décision préalable et faute de laquelle la requête directement présentée à la commission centrale d’aide sociale, juridiction administrative, en tant qu’elle comporte des conclusions dirigées contre l’Etat est dans cette mesure irrecevable, le juge administratif ne pouvant être saisi que contre une décision préalable ou en l’espèce une prise de position préalable assimilable à une décision ; que n’ayant, comme il a été dit, pas produit en défense le préfet de l’Orne ne peut être regardé comme ayant lié le contentieux ; que le juge administratif n’est pas tenu de régulariser la demande en tant que celle-ci est entachée d’irrecevabilité tenant à l’absence de décision préalable ou position préalable régulièrement sollicitée de la collectivité concernée ; que les exigences ci-dessus rappelées s’appliquent indifféremment aux requêtes des personnes privées et aux requêtes des personnes publiques dirigées contre une autre personne publique ; qu’en conséquence les conclusions du président du conseil général de la Sarthe sont irrecevables quelle que puisse être l’imputation financière de la dépense qu’il y aurait eu lieu de déterminer si la juridiction avait pu examiner des conclusions dirigées contre l’Etat, les frais d’aide sociale au titre de l’hébergement demeurant à charge du département de la Sarthe faute pour celui-ci d’avoir saisi comme il lui appartenait de le faire le préfet de l’Orne ou d’ailleurs celui de la Sarthe ; que par contre, en ce qui concerne l’allocation personnalisée d’autonomie qui en application de l’article L. 264-1 applicable depuis le 1er juillet 2007 est à charge du département où la personne sans domicile fixe a constitué élection de domicile, les conclusions du président du conseil général de la Sarthe dirigées contre le président du conseil général de l’Orne sont bien recevables en ce qu’il soutient explicitement que l’assistée n’a pas de domicile de secours dans l’Orne et doit être regardé fut ce avec une certaine bienveillance interprétative comme soutenant implicitement mais nécessairement que dans ces conditions les dépenses exposées relèvent, s’agissant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), de l’imputation au même département de l’Orne dans lequel Mme X... aurait dû élire domicile ;
    Sur les conclusions dirigées contre le département de l’Orne en ce qui concerne les frais d’hébergement et l’allocation personnalisé d’autonomie (APA) ;
    Considérant qu’en application de l’article L. 122-1 du code de l’action sociale et des familles les dépenses d’aide sociale légale incombent au « département dans lequel les bénéficiaires ont leur domicile de secours » ou, à défaut, dans lequel ils résident au moment du dépôt de la demande ; qu’aux termes de l’article L. 122-2 du même code celui-ci s’acquiert « (...) par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou gratuit, au domicile d’un particulier agréé (...) » ; qu’à ceux de l’article L. 122-3 il se perd soit « (...) par une absence ininterrompue de trois mois postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf si celle-ci est motivée par un séjour dans un établissement sanitaire ou social ou au domicile d’un particulier agréé (...) », soit par l’acquisition d’un nouveau domicile de secours ;
    Considérant en revanche, qu’en application de l’article L. 121-7 du code précité « Sont à la charge de l’Etat au titre de l’aide sociale : 1o - les dépenses d’aide sociale engagées en faveur des personnes mentionnées aux articles L. 111-3 et L. 232-6 », c’est-à-dire notamment celles pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé ;
    Considérant que toutefois comme il a été ci-dessus rappelé s’agissant de l’APA l’article L. 264-1 dorénavant applicable dispose que le département « débiteur » est « celui dans le ressort duquel l’intéressé a élu domicile » ; qu’il résulte de ces dispositions éclairées par les travaux préparatoires ayant précédé leur édiction que postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 l’imputation de la dépense à l’Etat pour des personnes sans domicile fixe n’a pu lieu d’être en ce qui concerne l’APA ;
    Considérant qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir que Mme X... avait acquis un domicile de secours dans le département de la Sarthe ou y résidait au moment du dépôt de la demande d’aide sociale ; que l’intéressée l’a remise en effet aux services du département de l’Orne le 31 mars 2008, s’agissant de l’allocation personnalisée d’autonomie, et l’a déposée le jour de son admission à la maison de retraite R... de V... (Sarthe), soit le 4 avril 2008, s’agissant des frais d’hébergement ; qu’à défaut de tout commencement de preuve allant dans ce sens, elle ne peut être regardée comme ayant demeuré dans le département de la Sarthe du 1er au 3 avril 2008 ; qu’ainsi aucun domicile de secours non plus qu’aucune résidence au jour du dépôt des demandes d’aide sociale ne peut être déterminé ;
    Considérant par ailleurs que, dans une lettre du 15 juillet 2008, le maire de la commune de M... (Orne) affirme que, contrairement à ce qu’elle soutient, Mme X... n’a jamais résidé dans cette commune de manière habituelle chez M. Y..., son ancien gendre, qui se bornait en réalité à conserver ses courriers entre ses passages ; qu’il n’est pas davantage établi que Mme X..., dont l’appartenance à la communauté des gens du voyage n’est pas contestée, se serait sédentarisée dans le département de l’Orne, même par l’occupation de sa caravane stationnée de manière stable sur un terrain prévu à cet effet ; que Mme X... ne peut donc être regardée comme ayant acquis un domicile de secours dans l’Orne ni même comme y ayant résidé de façon stable au moins trois mois avant le dépôt de la demande d’aide sociale et qu’étant sans domicile fixe l’imputation financière des frais d’aide sociale s’établit en fonction de cette situation ;
    Considérant que si, comme il a été dit, les conclusions dirigées au titre de cette dernière situation contre l’Etat sont irrecevables celles dirigées contre le département de l’Orne doivent être regardées comme recevables ; que, comme il a été dit, la charge de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) incombe au département dans lequel il a été fait élection de domicile en application de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles ; qu’il n’appartient pas au juge de l’aide sociale saisi dans le cadre de la détermination du l’imputation financière de la dépense de statuer sur l’existence (à l’évidence non avérée à la date de la présente décision !), les modalités et les incidences de ladite élection telles qu’elles sont déterminées aux articles L. 264-1 sq. du code précité ; qu’il lui appartient seulement dans le cadre incertain résultant des dispositions applicables depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 de constater que le département tenu de la dépense est celui dans lequel une élection de domicile a été effectuée, observation faite qu’il reviendra aux autorités saisies postérieurement à la présente décision de statuer sous le contrôle du juge compétent sur la question de savoir si dans les circonstances de l’espèce, qui se rencontreront fréquemment, il est loisible au demandeur d’assistance de régulariser sa demande en procédant postérieurement à celle-ci à l’élection de domicile dont il s’agit,

Décide

    Art. 1er.  -  Les conclusions du président du conseil général de la Sarthe dirigées contre le président du conseil général de l’Orne au titre des frais d’hébergement et contre l’Etat au titre desdits frais et de l’allocation personnalisée d’autonomie sont rejetées.
    Art. 2.  -  En ce qui concerne l’allocation personnalisée d’autonomie la charge des frais incombe au département désigné au dernier alinéa de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles sous réserve de l’appréciation par le président du conseil général de l’Orne, auquel le dossier est retransmis, des incidences de la situation de Mme X... au regard de ses diligences pour pourvoir à une élection de domicile en statuant sur les droits de celle-ci à l’allocation.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée par les soins du secrétariat de la commission centrale d’aide sociale au président du conseil général de la Sarthe, au président du conseil général de l’Orne et aux préfets de la Sarthe et de l’Orne.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 27 novembre 2009 où siégeaient M. LEVY, président, M. PERONNET, assesseur, et M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 18 décembre 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer