Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu
 

Dossier no 081208

Mme X...
Séance du 12 février 2010

Décision lue en séance publique le 11 mars 2010

    Vu la requête présentée devant la commission centrale d’aide sociale par Mme X... en date du 6 septembre 2008, tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord du 7 mai 2008 rejetant son recours dirigé contre les décisions de la caisse d’allocations familiales de M... agissant par délégation du président du conseil général du Nord en date des 5 juillet et 23 octobre 2007, refusant de lui accorder une remise de sa dette d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 38 113,05 euros pour la période du 1er avril 1995 au 30 septembre 2004, et refusant de lui accorder une remise pour la dette de 6 604 euros pour la période du 1er octobre 2004 au 30 novembre 2006, ensemble les décisions de répétition de l’indu prises par le président du conseil général du Nord le 28 mars 2007 ;
    La requérante soutient qu’elle n’a pas perçu régulièrement de prestations de la part de son ex-mari et conteste le montant des créances mises à sa charge ; que le montant de la prestation qu’elle a touché ponctuellement de la part de son ex-mari était inférieur à celui retenu par la caisse d’allocations familiales ; qu’elle pensait ne pas devoir déclarer ces sommes, dans la mesure où elles ne lui étaient pas versées régulièrement et que l’administration fiscale ne les prenaient pas en compte, son ex-époux lui-même ne les déduisant pas de ses propres revenus ; que la caisse d’allocations familiales ne peut lui demander le remboursement d’un indu depuis 1995 ; que la prescription s’oppose à cette récupération ; que la caisse d’allocations familiales procède illégalement à la retenue d’une partie de ses prestations, alors même qu’elle a formé recours devant la commission centrale d’aide sociale ; qu’elle est dans une situation de très grande précarité ; qu’elle est surendettée et vit en dessous du seuil de pauvreté ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense présenté par le président du conseil général du Nord qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que Mme X... a sciemment omis de déclarer la rente versée par son mari ; que Mme X... a donc présenté des déclarations trimestrielles de ressources incomplètes avec une intention de fraude ; que dès lors, la récupération de l’indu était possible et n’était pas limitée par un délai de prescription ; que les agissements de la requérante pourrait recevoir une qualification pénale ;
    Vu les nouveaux mémoires présentés par Mme X... qui concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 12 février 2010, M. Aurélien ROUSSEAU, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 115-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l’économie et de l’emploi, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. A cet effet, un revenu minimum d’insertion est mis en œuvre (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-l du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources (...) n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-3 du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire du revenu minimum d’insertion a droit à une allocation égale à la différence entre le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2 et les ressources définies selon les modalités fixées aux articles L. 262-10 et L. 262-12 » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-40 même code dans sa rédaction alors en vigueur : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou s’il n’est plus éligible au revenu minimum d’insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite sur décision prise selon des modalités fixées par voie réglementaire » ; qu’aux termes de l’article 1er-I du décret no 2004-230 du 16 mars 2004 : « Le président du conseil général se prononce sur les demandes de remise ou de réduction de créances présentées par les intéressés. Il notifie sa décision à l’autorité chargée du recouvrement » ; qu’aux termes de l’article L. 262-42 du même code dans ses dispositions alors en vigueur : « Le recours mentionné à l’article L. 262-41 et l’appel contre cette décision devant la commission centrale d’aide sociale ont un caractère suspensif. Ont également un caractère suspensif : le dépôt d’une demande de remise ou de réduction de créance ; la contestation de la décision prise sur cette demande, devant la commission départementale et la commission centrale d’aide sociale » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, que Mme X... est bénéficiaire du revenu minimum d’insertion depuis le mois d’avril 1995 ; qu’à la suite d’une enquêté effectuée par un agent assermenté de la caisse d’allocations familiales de M... le 7 mars 2007,il a été constaté que Mme X... pouvait bénéficier depuis son divorce d’une prestation compensatoire servie par son ex-mari ; que Mme X... n’avait jamais déclaré ces ressources dans les déclarations trimestrielles qu’elle a adressées à la caisse d’allocations familiales depuis l’ouverture de ses droits au revenu minimum d’insertion ; que l’organisme payeur a alors procédé à une révision du dossier de l’allocataire et lui a notifié le 28 mars 2007 sa décision de recouvrer un indu de 38 113,05 euros pour la période du 1er avril 1995 au 30 septembre 2004 et de 6 604 euros pour la période du 1er octobre 2004 au 30 novembre 2006 ; que Mme X... a contesté cette décision et sollicité une remise gracieuse de cette dette ; que le président du conseil général a rejeté ces demandes par deux décisions des 5 juillet et 23 octobre 2007 ; que Mme X... a présenté une requête le 18 janvier 2008 devant la commission départementale d’aide sociale du Nord tendant à l’annulation de ces décisions ; que la commission a rejeté cette requête ; que Mme X... sollicite l’annulation de cette décision par la commission centrale d’aide sociale ;
    Considérant d’une part que, malgré les informations complémentaires demandées par le greffe de la commission centrale d’aide sociale, les éléments du dossier transmis par le conseil général du Nord, de par leur caractère lacunaire, ne permettent pas d’apprécier avec exactitude la réalité de la totalité de l’indu réclamé à Mme X... ; que celle-ci soutient, sans être contredite, que depuis son divorce elle n’a pas perçu régulièrement la prestation compensatrice que son mari aurait du lui servir ; que la somme de 250 euros environ dont elle est censée bénéficier à la date de la décision attaquée n’a été fixée à ce montant que postérieurement à 1995 ; qu’en tout état de cause, et à supposer même que cette prestation ait été servi mensuellement avec régularité, les montants mentionnés sont inférieurs au plafond annuel du revenu minimum d’insertion pour toutes les années en litige ;
    Considérant qu’il suit de là, d’une part, que si le président du conseil général du Nord estime que l’absence de déclaration par Mme X... de cette ressource était constitutive d’un agissement frauduleux, en égard au caractère irrégulier tant dans le montant que dans la périodicité de la prestation versée par son ex-époux à la requérante, cette omission ne saurait être regardée comme constitutive d’une fraude ; que dès lors les dispositions de l’article L. 262-40 précitées du code l’action sociale et des familles, interdisent que soient procédée à la répétition d’un indu au-delà du délai de prescription biennale ;
    Considérant que, d’autre part et en tout état de cause, dès lors qu’il n’établit pas qu’il était dans l’impossibilité d’évaluer le niveau de revenus dont disposait Mme X..., le président du conseil général ne pouvait procéder à la récupération de la totalité des allocations dont a bénéficié la requérante au cours de la période en litige sans vérifier que les ressources de Mme X..., ainsi reconstituées étaient bien supérieures au plafond de ressource pour l’octroi du revenu minimum d’insertion ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que la requérante est fondée à soutenir que c’est à tort que le président du conseil général du Nord a mis à sa charge un indu de 44 717,04 euros, soit la totalité des sommes versées depuis 1995 à Mme X... au titre du revenu minimum d’insertion ; que ces décisions doivent être annulées ; qu’il y a lieu, dès lors, dans les circonstances de l’espèce, de renvoyer au président du conseil général du Nord, suivant les motifs de la présente décision, le calcul du montant de l’indu qui sera, le cas échéant, mis à la charge de Mme X... pour la période non couverte par le délai de la prescription biennale ;
    Considérant enfin que la caisse d’allocations familiales a, au mépris du caractère suspensif du recours formé par la requérante, prévu à l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles, prélevé à tort des sommes sur son allocation de revenu minimum d’insertion, comme sur son allocation de revenu de solidarité active en récupération de l’indu mis à sa charge ;
    Considérant dès lors qu’il y a lieu d’enjoindre à la caisse d’allocations familiales de M... de cesser, à la date de notification de la présente décision, de procéder à des retenues sur les prestations servies à Mme X... ; que l’organisme payeur devra en outre rembourser à Mme X... les sommes retenues illégalement sur ses allocations, alors même qu’une instance, ayant un caractère suspensif aux termes des dispositions précitées de l’article L. 262-42 du code l’action sociale et des familles, était pendante devant la commission centrale d’aide sociale ; que c’est seulement à l’issue du nouvel examen de la situation de Mme X... qu’une procédure de répétition de l’indu pourra être à nouveau engagée à l’encontre de la requérante,

Décide

    Art. 1er  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord du 7 mai 2008, ensemble les décisions du président du conseil général du Nord des 28 mars, 5 juillet et 23 octobre 2007, sont annulées.
    Art. 2  -  L’examen de la situation de Mme X..., suivant les motifs de la présente décision, est renvoyé devant le président du conseil général du Nord.
    Art.3  -  Il est enjoint au président du conseil général du Nord et à la caisse d’allocations familiales de M... de cesser de procéder à des retenues sur les prestations versées à Mme X... et de rembourser les prélèvements illégalement opérés depuis le début de la procédure engagée par Mme X... devant les juridictions de l’aide sociale.
    Art. 4  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 12 février 2010 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. ROUSSEAU, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 11 mars 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer