Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Ressources - Déclaration - Indu
 

Dossier n° 081244

M. X...
Séance du 21 octobre 2009

Décision lue en séance publique le 3 novembre 2010

    Vu la requête du 14 août 2008, présentée par M. X..., qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1) D’annuler la décision en date du 3 juin 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Saône-et-Loire a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision par laquelle le président du conseil général de Saône-et-Loire lui a notifié la décision de mise en recouvrement d’une dette de 9 899,92 euros mise à sa charge à raison de montants d’allocation de revenu minimum d’insertion indûment perçus sur la période du 1er juin 2005 au 31 janvier 2007 au motif qu’il avait exploité illégalement un fonds de commerce et n’avait pas déclaré les revenus de ce travail dissimulé ;
    2) De faire droit à ses conclusions présentées à cet effet devant la commission départementale d’aide sociale de Saône-et-Loire ;
    Le requérant soutient que l’indu n’est pas fondé, dès lors que ses revenus n’ont pas été correctement évalués par l’URSSAF, d’une part, pour la période antérieure au 31 décembre 2006, au motif que l’exploitation était alors dirigée par son frère, M. Y..., et non par lui-même, et, d’autre part, à compter du 1er janvier 2007, au motif que, s’il était devenu le gérant de la SARL B..., la rémunération de 2 000 euros brut mensuels qui lui avait été attribuée à partir du 1er mai 2007 ne lui a jamais été versée ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, en date du 25 novembre 2008, présenté par le président du conseil général de Saône-et-Loire, qui conclut, d’une part, à ce qu’il soit sursis à statuer sur la requête de M. X... dans l’attente du jugement du tribunal correctionnel saisi par le département pour fraude au revenu minimum d’insertion et, d’autre part, au rejet de la requête ; il soutient que le requérant ne conteste pas valablement l’évaluation de ses revenus par l’URSSAF, dès lors qu’il a, à plusieurs reprises, reconnu que le fonds de commerce avait continué de fonctionner après sa liquidation judiciaire ; que M. X... a été nommé gérant de la SARL B... le 29 janvier 2007 avec une rémunération provisoire fixée à 150 euros, portée à partir de mai 2007 à 2 000 euros brut mensuels ; qu’il a été condamné pour travail dissimulé par le tribunal correctionnel de C... comme il l’a lui-même reconnu lors de l’audience devant la commission départementale d’aide sociale le 3 juin 2008 et que par conséquent il ne peut plus contester les revenus évalués par l’URSSAF, s’agissant de faits établis par un jugement pénal et pour lesquels il a été condamné ;
    Vu le mémoire en réplique, en date du 20 novembre 2008, présenté par M. X..., qui reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ; il soutient qu’il a continué d’exploiter illégalement le fonds de commerce en raison des difficultés d’immatriculation de la SARL B... et du retard pris dans le dépôt des statuts de cette nouvelle société, dont il n’est pas responsable ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, en date du 3 décembre 2008, présenté par le président du conseil général de Saône-et-Loire, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ; il soutient en outre que M. X... ne peut contester l’évaluation de ses revenus par l’URSSAF s’agissant de faits qui ont fait l’objet d’un jugement pénal devenu définitif, le requérant n’ayant pas fait appel de ce jugement ;
    Vu le nouveau mémoire, en date du 20 mars 2009, présenté par M. X..., qui reprend les mêmes conclusions par les mêmes moyens ; il soutient en outre que le jugement auquel il est fait référence dénonce certes un défaut d’immatriculation au répertoire des métiers et un défaut de déclaration à l’URSSAF, mais ne fait pas état dans son dispositif des ressources qu’il aurait perçues, dont l’évaluation ne lui est, par suite, pas opposable ; que ces ressources ont été évaluées à tort par référence à la décision de l’assemblée générale ordinaire de lui accorder un salaire mensuel de 2 000 euros qu’il n’a pas perçu ; que ce salaire de 2 000 euros mensuels aurait en tout état de cause été perçu à compter de mai 2007, soit postérieurement à la période pour laquelle un indu de revenu minimum d’insertion a été mis à sa charge ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, en date du 27 mai 2009, présenté par le président du conseil général de Saône-et-Loire, qui reprend les conclusions de ses précédents mémoires et les mêmes moyens ; il soutient en outre que si l’ordonnance d’homologation le condamnant sur reconnaissance préalable de culpabilité ne vise pas expressément les ressources perçues, la perception de revenus était implicite, le requérant admettant avoir commis une fraude à l’URSSAF à l’occasion d’une activité exercée à but lucratif, pour un travail dissimulé dont le salaire a été fixé à 2 000 euros brut mensuels le 1er juillet 2007 ; que si M. X... conteste avoir perçu ces salaires, il lui appartenait d’effectuer les démarches nécessaires pour obtenir le versement des revenus auxquels il pouvait prétendre avant de demander à percevoir le revenu minimum d’insertion ;
    Vu le nouveau mémoire, en date du 26 juin 2009, présenté par M. X..., qui reprend les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la lettre en date du 22 octobre 2008 invitant les parties à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 21 octobre 2009 Mme DE BARMON, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 262-39 du code de l’action sociale et des familles : « Un recours contentieux contre les décisions relatives à l’allocation de revenu minimum (...) peut être formé par toute personne qui y a intérêt devant la commission départementale d’aide sociale, mentionnée à l’article L. 134-6, dans le ressort de laquelle a été prise la décision. La décision de la commission départementale est susceptible d’appel devant la commission centrale d’aide sociale instituée par l’article L. 134-2 (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations (...) est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient aux juridictions de l’aide sociale de se prononcer non seulement sur la légalité des décisions mettant un indu à la charge d’un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion mais aussi sur l’étendue des droits de ce dernier et notamment, à cette fin, d’apprécier le bien-fondé de l’indu mis à sa charge à la lumière des éléments qui leur sont soumis, le cas échéant après avoir ordonné toutes mesures d’instruction qu’elles jugent utiles ; que cette appréciation n’est pas liée, dans le cas où des faits invoqués par l’administration comme motif de sa décision sont par ailleurs susceptibles de recevoir la qualification d’infraction pénale, à la décision du juge compétent pour se prononcer sur cette qualification ;
    Considérant que le président du conseil général de Saône-et-Loire a porté plainte le 10 juin 2008 contre M. X... pour suspicion de fraude au revenu minimum d’insertion pour la période de juin 2005 à janvier 2007 ; qu’il demande à la commission centrale d’aide sociale de surseoir à statuer sur la requête de M. X... dans l’attente du jugement correctionnel à venir à la suite de cette plainte ; qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus il appartient au juge de l’aide sociale de statuer sur la requête dont il a été saisi, sans subordonner l’intervention de sa décision au fond à celle que prendront les juridictions saisies de cette plainte ; que, par suite, la demande de sursis à statuer présentée par le président du conseil général de Saône-et-Loire ne peut qu’être rejetée ;
    Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte de l’instruction que, par une ordonnance d’homologation en date du 20 septembre 2007, le tribunal de grande instance de C... a condamné M. X... pour l’exercice non déclaré d’une activité commerciale à but lucratif constitutif d’une fraude à l’URSSAF ; que ces constatations de fait, qui sont le support nécessaire de la condamnation prononcée par le juge pénal par une ordonnance devenue définitive, ont l’autorité absolue de la chose jugée ; que si le requérant a reconnu à plusieurs reprises, notamment devant la commission départementale d’aide sociale, qu’il avait continué à exploiter le commerce de boucherie détenu par son frère postérieurement à la liquidation de cette société prononcée avec effet au 1er mars 2005, il conteste l’évaluation des ressources qu’il a tirées de cette activité ; que l’ordonnance du juge pénal mentionnée ci-dessus ne précise pas le montant des revenus perçus par M. X... de mai 2005 à janvier 2007 ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le président du conseil général de Saône-et-Loire, l’ordonnance du juge pénal ne saurait faire obstacle à ce que M. X... conteste l’évaluation de ses ressources ;
    Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations (...) est récupéré par retenue sur le montant des allocations (...) à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale (...). La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article L. 262-10 du même code : « L’ensemble des ressources retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article  1er ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient au bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion de faire connaître à l’autorité administrative l’ensemble des ressources dont il dispose ainsi que sa situation familiale et tout changement en la matière ; que s’il est établi que le bénéficiaire a procédé à des déclarations inexactes ou incomplètes et qu’il n’est, en outre, pas possible, faute de connaître le montant exact des ressources des personnes composant le foyer, de déterminer s’il pouvait ou non bénéficier de cette allocation pour la période en cause, l’autorité administrative est en droit, sous réserve des délais de prescription, de procéder à la répétition de l’ensemble des sommes qui ont été versées à l’intéressé ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, notamment de la lettre de l’inspecteur de l’URSSAF au directeur de la caisse d’allocations familiales de Saône-et-Loire en date du 16 janvier 2007, du rapport d’enquête de la caisse d’allocations familiales de Saône-et-Loire en date du 12 février 2007 et des déclarations de revenus de M. X... pour les années 2005 et 2006 qu’il disposait entre les mois de juin 2005 et janvier 2007, période au cours de laquelle il a bénéficié du revenu minimum d’insertion, de salaires et de revenus tirés de son activité commerciale ; qu’il n’a pas déclaré ces éléments à la caisse d’allocations familiales de Saône-et-Loire ; que la circonstance qu’il n’était pas propriétaire de l’établissement qu’il exploitait illégalement et qu’il ait rencontré des difficultés à faire immatriculer une nouvelle société à la suite de la liquidation judiciaire du fonds de commerce de son frère sont sans incidence sur les obligations déclaratives qui lui incombaient ; qu’en outre la circonstance qu’il n’ait pas perçu la rémunération de 2 000 euros brut mensuels qui lui avait été attribuée à partir du 1er mai 2007 pour son activité de gérant de la SARL B... est sans incidence sur l’évaluation de ses ressources pour la période litigieuse, dès lors que ces revenus auraient en tout état de cause été perçus postérieurement au mois de janvier 2007 ; que, dès lors, la caisse d’allocations familiales de Saône-et-Loire était en droit, faute de connaître le montant des ressources dont il disposait réellement, de procéder à la récupération des sommes qu’elle avait versées au titre du revenu minimum d’insertion ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X... n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale de Saône-et-Loire a rejeté sa demande,

Décide

    Art. 1er.  -  La demande de sursis à statuer présentée par le président du conseil général de Saône-et-Loire est rejetée.
    Art. 2.  -  La requête de M. X... est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 21 octobre 2009 où siégeaient Mme ROUGE, présidente, M. MONY, assesseur, Mme DE BARMON, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 3 novembre 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer