Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3420
 
  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Placement - Foyer - Participation
 

Dossier no 081104

Mlle X...
Séance du 20 mars 2009

Décision lue en séance publique le 30 juin 2010

    Vu la décision du 23 janvier 2008 par laquelle le Conseil d’Etat statuant au contentieux a annulé la décision de la commission centrale d’aide sociale du 29 novembre 2004 en tant qu’elle porte sur l’admission de Mlle X... à l’aide sociale au titre de la période allant de novembre 1999 mars 2001 ;
    Vu la requête, enregistrée le 14 août 2002, présentée par Mme Y..., agissant en qualité de tutrice de Mlle X..., tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Drôme du 26 avril 2002 rejetant sa demande d’annulation de la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de N... du 5 avril 2001 rejetant la demande d’aide sociale à l’hébergement des adultes handicapés pour le placement en foyer d’hébergement de Mlle X... à compter du 1er novembre 1999, d’autre part, à l’examen des droits de Mlle X... au titre des années 2002 et suivantes ;
    La requérante soutient que la commission d’admission à l’aide sociale de N... ne l’a pas entendue, ainsi que sa tutrice, préalablement à sa décision ; que sa décision n’est pas motivée et ne précise pas les ressources prises en cause, qui ne correspondent pas à celles indiquées dans le dossier et ne prennent pas en compte certaines de ses charges ; qu’aucune justification n’est donnée concernant la rétroactivité de la décision ; que cette rétroactivité est irrégulière ; que dans l’hypothèse où les procédures de récupération engagées, relatives à l’année 1999, auraient pour elle une issue défavorable, la conséquence en serait la diminution de son patrimoine, ce qui lui ferait perdre le bénéfice des revenus du capital, voire également des loyers, qu’elle perçoit ; qu’en raison du rappel de pension d’orphelin dont elle a bénéficié, elle a dû faire face à une augmentation de ses charges en raison d’une imposition très importante, et utilise donc son capital pour y faire face ; que ses ressources sont instables, en raison de la variabilité du montant des pensions d’orphelin, de même que ces ressources, les loyers n’étant pas garantis et n’étant à l’heure actuelle pas tous servis ; que ses revenus bruts pour 2000 et 2001 ne lui permettent pas de faire face aux frais de placement ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2002, présenté par le président du conseil général de la Drôme, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les ressources propres de l’intéressée lui permettaient, à la date de l’examen du renouvellement de ses droits, d’assurer ses frais d’hébergement tout en conservant une somme d’argent de poche supérieure au minimum réglementaire ; que si la situation financière de l’intéressée s’est dégradée depuis lors, il lui appartient d’engager une nouvelle procédure de demande de prise en charge ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 26 août 2004, présenté par Mme Y...qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ;
    Vu les nouveaux mémoires en défense, enregistrés les 21 septembre 2004 et 11 décembre 2008, présentés par le président du conseil général de la Drôme, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 février 2009, présenté par Mme Y..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; elle soutient en outre que les ressources de l’intéressée s’élevaient, pour l’année 1999, à 6 525,73 euros de salaires, 43 217,31 euros de pension et 3 045,02 euros de revenus locatifs ; que pour l’année 2000, ces revenus étaient respectivement d’un montant de 6 623,91 euros, 17 599,32 euros et 2 278,05 euros ; qu’en 2001, ils s’élevaient respectivement à 6 851,50, 17 359 et 2 938 euros ; que les frais de séjours s’élevaient respectivement à 20 860 euros au titre de l’année 1999, 20 228,76 euros au titre de l’année 2000 et 7 229,63 euros au titre des mois de janvier à avril 2001 ; qu’il en résulte que Mlle X... ne pouvait régler ses frais et conserver le minimum de ressources dont elle devait pouvoir disposer librement ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les lettres du 15 décembre 2008 informant les parties de la date et du lieu de l’audience et les invitant à faire connaître au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale si elles souhaitent être entendues à l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 20 mars 2009 Mlle BRETONNEAU, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mlle X... est hébergée en foyer-logement pour personnes handicapées depuis 1979 ; que le département de la Drôme, où est situé son domicile de secours, a pris en place dès l’origine, à compter du 1er juillet 1979, les frais d’hébergement de l’intéressée au titre de l’aide sociale ; qu’à la suite d’héritages perçus par l’intéressée en 1993 et en 1996, le département de la Drôme a, en 1999, engagé une action en récupération de l’aide sociale sur le fondement de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, alors en vigueur, qui permettait la récupération de l’aide versée en cas de retour à une meilleure fortune du bénéficiaire ; que par une décision du 5 avril 2001, la commission d’admission à l’aide sociale de N... a rejeté la demande de l’intéressée de renouvellement de la prise en charge des frais d’hébergement à compter du 1er novembre 1999 ; que, par une décision du 26 avril 2002, la commission départementale d’aide sociale de la Drôme a rejeté la demande formée par Mme Y..., tutrice de l’intéressée, tendant à l’annulation de la décision du 5 avril 2001 ; que par une décision du 29 novembre 2004, la commission centrale d’aide sociale a, d’une part, rejeté l’appel de Mme Y... dirigé contre la décision du 26 avril 2002 et, d’autre part, rejeté ses conclusions tendant à l’examen des droits de Mlle X... au titre des années 2001 et suivantes ; que par une décision du 23 janvier 2008, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a annulé la décision de la commission centrale d’aide sociale en tant qu’elle porte sur l’admission de Mlle X... à l’aide sociale au titre de la période de novembre 1999 mars 2001 ; que la décision de la commission centrale d’aide sociale du 29 novembre 2004 est, en revanche, devenue définitive en ce qu’elle rejette les conclusions de l’intéressée tendant à la prise en charge de ses frais d’hébergement au titre de la période postérieure au 5 avril 2001 ;
    Considérant qu’à la date à laquelle elle a statué sur la demande de Mme Y..., la commission d’admission à l’aide sociale était tenue, en vertu de l’article L. 131-5 du code de l’action sociale et des familles, d’entendre cette dernière si elle le souhaitait ; qu’il résulte de l’instruction que celle-ci, faute d’avoir été convoquée à l’audience du 5 avril 2001 ou d’avoir été informée de cette date, n’a pas été mise en mesure d’être entendue ; qu’ainsi et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, Mme Y... est fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale n’a pas fait droit au moyen tiré de l’irrégularité de la décision de la commission d’admission à l’aide sociale et à demander, pour ce motif, l’annulation de ces deux décisions ;
    Considérant toutefois qu’il appartient à la commission centrale d’aide sociale, eu égard tant à la finalité de son intervention qu’à sa qualité de juge de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité de la décision prise par l’administration, mais encore de se prononcer sur le bien-fondé de la demande de l’intéressée ;
    Considérant qu’aux termes de l’article 168 du code de la famille et de l’aide sociale alors en vigueur, devenu l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles : « Les frais d’hébergement et d’entretien des personnes handicapées dans les établissements de rééducation professionnelle et d’aide par le travail ainsi que dans les foyers et foyers-logements sont à la charge : 1o A titre principal, de l’intéressé lui-même sans toutefois que la contribution qui lui est réclamée puisse faire descendre ses ressources au-dessous d’un minimum fixé par décret (...) 2o Et, pour le surplus éventuel, de l’aide sociale sans qu’il soit tenu compte de la participation pouvant être demandée aux personnes tenues à l’obligation alimentaire à l’égard de l’intéressé (...) » ; qu’aux termes de l’article 2 du décret du 31 décembre 1977, dont les dispositions sont désormais codifiées à l’article D. 344-35 du code de l’action sociale et des familles : « Lorsque l’établissement assure un hébergement et un entretien complet, y compris la totalité des repas, le pensionnaire doit pouvoir disposer librement chaque mois : 1o S’il ne travaille pas, de 10 % de l’ensemble de ses ressources mensuelles et, au minimum de 1 % du montant annuel de l’allocation aux adultes handicapés / 2o S’il travaille, s’il bénéficie d’une aide aux travailleurs privés d’emploi, s’il effectue un stage de formation professionnelle ou de rééducation professionnelle, du tiers des ressources garanties résultant de sa situation ainsi que de 10 % de ses autres ressources, sans que ce minimum puisse être inférieur à 50 % du montant mensuel de l’allocation aux adultes handicapés » ;
    Considérant qu’ainsi qu’en a jugé le Conseil d’Etat dans sa décision citée ci-dessus, il résulte de la combinaison de ces dispositions que, pour déterminer si et dans quelle mesure les frais d’hébergement et d’entretien d’une personne handicapée doivent être pris en charge par l’aide sociale, il appartient à la commission d’admission - et désormais, au président du conseil général - de tenir compte du minimum de ressources dont l’intéressé doit pouvoir disposer librement ; qu’il y a donc lieu, dans un premier temps, de définir au vu de la situation de l’intéressé le montant de ce minimum de ressources, dans un deuxième temps, de déduire le montant ainsi calculé des ressources de l’intéressé et enfin, dans un troisième temps, d’examiner si ce dernier montant permet de couvrir le prix de journée, faute de quoi le solde devra être pris en charge au titre de l’aide sociale ;
    Considérant, en premier lieu, d’une part, qu’il résulte de l’instruction, et notamment des avis d’imposition produits au dossier, qu’au titre de l’année 1999, date de la demande de renouvellement de la prise en charge au titre de l’aide sociale, Mlle X... exerçait une activité professionnelle, pour laquelle elle percevait un salaire mensuel de 3 567 francs (543,78 euros), et disposait par ailleurs d’autres ressources mensuelles de 23 624 francs (3 601,45 euros) ; que dès lors, en application des dispositions rappelées ci-dessus, devait rester à sa disposition la somme mensuelle de 3 432,50 francs (523,20 euros), dont 1 070,10 francs (163,12 euros) correspondant à un tiers des revenus de son activité professionnelle et 2 362,40 francs (360,08 euros) correspondant à 10 % de ses autres ressources ;
    Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction que ses frais d’hébergement s’élevaient, à cette date, à 14 000 francs (2 134,28 euros) par mois ; que le solde résultant de la différence entre ses ressources mensuelles, qui s’élevaient à 27 200 francs (4 146,61 euros), et la somme minimale de 3 432,50 francs (523,20 euros) devant rester à sa disposition s’élevait donc à 23 767,50 francs (3 623,25 euros) ; qu’après déduction du montant acquitté au titre du paiement de l’impôt, soit 5 779,33 francs (881,05 euros) mensuels, ce montant s’élevait à 17 988,17 francs (2 742,25 euros) ; qu’il était donc supérieur aux frais d’hébergement en cause, dont il résulte de l’instruction qu’ils étaient d’un montant mensuel de 14 000 francs (2 134,28 euros) ; que la demande d’admission à l’aide sociale de Mme Y... au titre de ses frais d’hébergement du 1er novembre au 31 décembre 1999 doit donc être rejetée ;
    Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte des mêmes avis d’imposition qu’au titre de l’année 2000, Mme Y... a perçu 27 873,87 euros, dont 6 623,91 euros de salaires et 21 249,96 euros d’autres ressources, correspondant au montant d’une pension, de revenus fonciers et de revenus de capitaux mobiliers ; qu’ainsi, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, devait rester à sa disposition la somme minimale de 4 112,70 euros ; que si la différence entre le montant total de ses ressources et cette somme, qui s’élève à 23 761,17 euros, est supérieur à ses frais d’hébergement pour la même année, dont il résulte de l’instruction qu’ils s’élevaient à 20 228,76 euros, il n’en va pas de même après déduction des ressources du montant dont Mme Y... a dû s’acquitter au titre de l’impôt, à savoir 10 572,64 euros ; qu’il en résulte que Mme Y... doit être, au titre de l’année 2000, voir ses frais d’hébergement pris en charge au titre de l’aide sociale à hauteur d’un montant de 7 040,23 euros ;
    Considérant, enfin, qu’il résulte des mêmes avis d’imposition qu’au titre des trois premiers mois de l’année 2001, Mme Y... a perçu des ressources qui peuvent être évaluées à 7 159,37 euros, dont 1 712,87 euros de salaires et 5 446,50 euros d’autres ressources, correspondant au montant d’une pension, de revenus fonciers et de revenus de capitaux mobiliers ; qu’ainsi, en vertu des dispositions de l’article D. 344-35 du code de l’action sociale et des familles, devait rester à sa disposition une somme minimale de 1 058,51 euros ; que si la différence entre le montant total de ses ressources et cette somme, qui s’élève à 6 100,86 euros, est supérieur à ses frais d’hébergement pour la même période, dont il résulte de l’instruction qu’ils s’élevaient à 5 783,31 euros, il n’en va pas de même après déduction des ressources du montant dont Mme Y... a dû s’acquitter au titre de l’impôt, à savoir 4 092,5 euros ; qu’il en résulte que Mme Y... doit, au titre du 1er janvier au 31 mars 2001, voir ses frais d’hébergement pris en charge au titre de l’aide sociale à hauteur d’un montant de 2 716,44 euros ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que les frais d’hébergement et d’entretien de Mlle X... doivent être pris en charge par l’aide sociale pour un montant totale de 9 756,67 Euros pour la période compris entre 1999 et le 5 avril 2001, date de la décision de la commission d’admission à l’aide sociale,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Drôme du 26 avril 2002 et la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de N... du 5 avril 2001 sont annulées en tant qu’elles portent sur la demande d’aide sociale à l’hébergement des adultes handicapés pour le placement en foyer d’hébergement de Mlle X... à compter du 1er novembre 1999.
    Art. 2.  -  Les frais d’hébergement et d’entretien de Mlle X... doivent être pris en charge par l’aide sociale pour un montant totale de 9 756,67 Euros pour la période comprise entre le 1er novembre 1999 et le 5 avril 2001.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 mars 2009 où siégeaient M. MARY, président, M. VIEU, assesseur, Mlle BRETONNEAU, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 30 juin 2009.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au ministre du logement, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le president La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer