Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Vie maritale - Preuve
 

Dossier no 081434

Mme X...
Séance du 4 décembre 2010

Décision lue en séance publique le 29 janvier 2010

    Vu la requête, présentée le 26 septembre 2008 par Mme X... tendant à l’annulation de la décision du 9 juin 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Charente a rejeté son recours dirigé contre une décision du président du conseil général de la Charente (ne figurant pas au dossier) refusant de lui accorder une remise gracieuse de l’indu de 2 314,54 euros qui lui a été assigné en raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment servies pour la période d’avril 2003 mai 2004, du fait de la non-déclaration de sa vie maritale et des ressources de son concubin, supérieures au plafond d’attribution du revenu minimum d’insertion pour un couple ;
    La requérante conteste toute vie maritale ; elle fait valoir qu’elle a été hébergée à titre gratuit car elle était dans une situation précaire ; qu’elle ne payait pas de loyer et ne bénéficiait pas d’aide au logement ; qu’il n’y avait pas de déclaration commune d’impôt ; qu’elle a contesté l’indu à plusieurs reprises auprès de la caisse d’allocations familiales et du conseil général ; que la caisse lui avait notifié un premier indu de 1 086,90 euros ; que par courrier du 4 mai 2004, ladite caisse lui a accordé une remise totale de cette somme ; que le 28 mai 2004 la même caisse lui a notifié un autre indu de 2 314,54 euros sans aucune précision ; qu’elle ignore si la remise précédente y est incluse ou pas ; qu’elle a demandé en vain des explications à l’administration et à la commission départementale d’aide sociale ; qu’en réponse une mise en demeure augmentant de 140 euros l’indu lui a été adressée ; que la commission départementale d’aide sociale n’a pas fourni d’explications sur la remise gracieuse ; qu’il lui paraît légitime dès lors qu’elle a bénéficié d’une remise de dette le 4 mai 2004, de bénéficier de la même remise pour la période suivante car les circonstances sont identiques ; qu’elle remplissait les critères pour bénéficier de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que cette allocation l’a aidée dans sa recherche d’emploi ; qu’elle travaille depuis l’année 2006 ;
    Vu le mémoire en défense présenté le 9 juillet 2009 par le président du conseil général de la Charente qui conclut au rejet de la requête aux motifs que Mme X... a bénéficié de l’allocation de janvier 2003 à janvier 2004 ; que trois créances d’un montant total de 3 737,11 euros ont été émises à son encontre ; que le premier de 1 086,90 euros a fait l’objet d’une remise gracieuse qui lui a été notifié le 4 mai 2004 ; qu’un rapport de contrôle du 18 mai 2004 a fait état d’une vie maritale non déclarée et de ressources de son concubin faisant obstacle au versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que l’indu a été notifié le 28 mai 2004 ; que comme suite au refus du président du conseil général d’accorder une remise de dette à la requérante, un titre de perception a été émis ; que l’intéressée a reconnu devant la commission départementale d’aide sociale vivre en concubinage ; qu’elle vit chez M. Y... bien avant sa demande de revenu minimum d’insertion ; qu’elle n’a pas l’intention de chercher un logement personnel ; que le rapport de contrôle indique également que selon son entourage, la vie maritale de Mme X... est notoire ; qu’elle a donc fait de fausses déclarations sur les déclarations trimestrielles de revenus ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que le mémoire a été communiqué à Mme X... qui n’a pas produit d’observations ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 4 décembre 2009, Mme DIALLO-TOURE, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources (... ) n’atteignent pas le montant du revenu minimum d’insertion défini à l’article L. 262-2 (... ) a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-2 du même code : « le revenu minimum d’insertion varie dans des conditions fixées par voie réglementaire selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge (... ) » ; que l’article R. 262-1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire (... ) est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes (... ) à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé (... ) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (... ) l’ensemble des ressources, de quelle que nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (... ), notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’alinéa 1er de l’article L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles : « L’ensemble des ressources retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes les informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (... ) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement d’indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, que Mme X... a bénéficié du droit au revenu minimum d’insertion de janvier 2003 janvier à 2004 comme personne seule ; que dans le cadre de cette attribution la caisse d’allocations familiales a déterminé trois indus : de 1 086,90 euros pour la période de janvier à mars 2003 ; de 335,67 euros pour la période du 1er au 31 décembre 2003 ; de 2 314,54 euros pour la période d’avril 2003 mai 2004 soit un total de 3 737,11 euros ; que le premier indu a fait l’objet d’une remise totale par décision du 4 mai 2004 ; que les services de la caisse d’allocations familiales ont diligenté une enquête ; qu’un rapport d’enquête établi le 17 mai 2004 a fait apparaître que la requérante élude la question de sa vie maritale ; que Mme X... n’est pas hébergée par des amis comme elle l’a déclaré lors de sa demande de revenu minimum d’insertion, mais par M. Y...  ; qu’elle était domiciliée à cette adresse bien avant sa demande ; qu’elle a sollicité l’allocation de revenu minimum d’insertion du fait de problèmes de santé ; que selon l’entourage de l’intéressée, sa vie maritale avec M. Y... , qui est chef d’entreprise, est de notoriété publique ; qu’elle n’a pas l’intention de chercher un domicile personnel ; que le rapport a donc conclu à une vie maritale depuis la demande d’allocation ; qu’ainsi un indu de 2 314,54 euros a été notifié à la requérante par une décision du 28 mai 2004 qui ne figure pas au dossier ; que le président du conseil général a refusé de lui accorder une remise gracieuse par une décision qui ne figure pas non plus au dossier ; que la commission départementale d’aide sociale de la Charente a, par décision du 9 juin 2008, rejeté son recours aux motifs suivants : « Considérant que l’intéressée a bénéficié du revenu minimum d’insertion jusqu’au 31 janvier 2004, Considérant qu’un indu de 2 314,54 euros a été constaté par la caisse d’allocations familiales pour vie maritale non déclarée, Considérant que l’intéressée a reconnu, lors de l’audience, vivre en concubinage » ;
    Considérant que la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Charente, qui se présente sous forme d’un procès-verbal et ne revêt pas les caractéristiques élémentaires d’une décision de justice, doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que, pour l’application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l’allocation de revenu minimum d’insertion, il appartient à l’administration de produire les éléments probants de nature à étayer le bien fondé de sa décision ;
    Considérant que ni la décision initiale de l’organisme instructeur notifiant l’indu, ni la décision du président du conseil général de la Charente refusant d’accorder une remise gracieuse ne figurent au dossier ;
    Considérant que la commission centrale d’aide sociale a, les 30 décembre 2008 et 10 juin 2009, en vue de l’examen du dossier, demandé au préfet de la Charente de lui faire parvenir le dossier complet de l’intéressée et « notamment la période, le mode de calcul de l’indu détecté de 2 314,54 euros, les justificatifs établissant la vie maritale (enquête CAF, déclaration signée... ), la nature et le montant des ressources effectivement perçues par le concubin présumé durant toute la période couverte par l’indu, les déclarations trimestrielles de revenus signées par l’allocataire durant toute la période litigieuse ainsi que la décision du président du conseil général de la Charente contestée devant la commission départementale d’aide sociale » ; que par courrier en date du 2 juillet 2009, l’administration a indiqué « qu’il lui est impossible de faire parvenir à la commission centrale les documents relatifs à la nature et au montant des ressources effectivement perçues par le concubin présumé de Mme X... pendant toute la période couverte par l’indu » ; que l’administration n’a communiqué que les déclarations trimestrielles de revenus de janvier 2003 mars 2004 ;
    Considérant qu’en application des dispositions précitées, ne peuvent être réputées mener une vie commune que les personnes entretenant des relations stables et continues ; que pour estimer que Mme X... et M. Y... composaient un foyer au sens de l’article R. 262-1 susvisé, la commission départementale d’aide sociale de la Charente affirme que l’intéressée a reconnu vivre en concubinage sans, au demeurant, préciser depuis quand, et si cela vaut pour la période en litige ; que devant la commission centrale d’aide sociale l’intéressée persiste, comme elle l’a fait antérieurement dans ses productions écrites, à contester toute vie maritale avec M. Y...  ; qu’il n’existe pas de déclaration commune d’impôt ; que le rapport d’enquête de la caisse d’allocations familiales est rédigé dans un style tout particulièrement subjectif et imprécis, qui fonde essentiellement ses conclusions sur l’agressivité de Mme X...  ; qu’ainsi l’administration n’apporte aucun élément probant de nature à établir la vie maritale ; que dès lors l’indu n’est pas fondé en droit ; qu’il convient de décharger Mme X... de l’intégralité de la somme portée à son débit,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Charente en date du 9 juin 2008, ensemble la décision du président du conseil général, sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est déchargée de l’intégralité de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui a été assigné.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 décembre 2009 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, Mme DIALLO-TOURE, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 29 janvier 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer