Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Fin de versement - Ressources - Déclaration
 

Dossier no 080983

Mme X...
Séance du 28 octobre 2010

Décision lue en séance publique le 12 janvier 2010

    Vu la requête présentée le 11 juillet 2008 par Mme X... tendant à l’annulation des décisions des 1er avril et 3 juin 2008 par lesquelles la commission départementale d’aide sociale de La Réunion a refusé d’annuler la décision de l’agence d’insertion de La Réunion du 6 novembre 2007 refusant de lui accorder une remise gracieuse de l’indu de 15858,68 euros qui lui a été assigné en raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment servies pour la période de juillet 2005 juillet 2007 et confirmant la radiation de son droit au revenu minimum d’insertion à compter de juillet 2007 au motif « d’un train de vie apparent aisé » ;
    La requérante conteste l’indu et la suppression de son droit au revenu minimum d’insertion ; elle fait valoir que son mari a hérité en 2005 d’une petite parcelle de terrain agricole ; qu’il n’existait à cette époque sur le terrain qu’une petite maison en bois sous tôle insalubre, un hangar agricole et un abri de jardin ; que ledit terrain n’est ni cultivé ni loué ; que cet héritage n’a pas modifié leur train de vie ; qu’ils ont également deux voitures dont l’une lui appartient et l’autre est celle de son fils ; qu’ils ne possèdent pas de 4 × 4 Nissan ; qu’elle et son mari sont sans emploi ; qu’ils n’ont jamais eu d’autres ressources que le revenu minimum d’insertion ; qu’ils ne vont percevoir à compter du 1er août 2008 que 444,55 euros d’allocations familiales par mois ; qu’ils sont dans l’incapacité financière de rembourser la dette mise à leur charge ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 28 octobre 2009, Mme DIALLO-TOURE, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;     Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources (...) n’atteignent pas le montant du revenu minimum d’insertion défini à l’article L. 262-2 (...) a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262-2 du même code : « Le revenu minimum d’insertion varie dans des conditions fixées par voie réglementaire selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge(...) » ; que l’article R. 262-1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire (...) est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes (...) à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’article R. 132-1 du même code : « Pour l’appréciation des ressources (...) les biens non productifs de revenu, (...) sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s’il s’agit d’immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s’il s’agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ; qu’aux termes de l’alinéa 1er de l’article L. 262-10 du code de l’action sociale et des familles : « L’ensemble des ressources retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; qu’aux termes de l’article L. 262-10-1 du même code : « Lorsqu’il est constaté (...) à l’occasion de l’instruction d’une demande ou lors d’un contrôle, une disproportion marquée entre, d’une part, le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire et, d’autre part, les ressources qu’il déclare, une évaluation forfaitaire des éléments du train de vie est effectuée. Cette évaluation forfaitaire est prise en compte pour la détermination du droit à la prestation » ; qu’aux termes de l’article R. 262-22-1 du décret 2008-88 du 28 janvier 2008 relatif aux modalités d’évaluation des biens et des éléments de train de vie pour le bénéfice de certaines prestations sociales sous condition de ressources : « I. L’évaluation forfaitaire du train de vie prévue à l’article L. 262-10-1 prend en compte les éléments et barèmes suivants : 1) Propriétés bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; 2) Propriétés non bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : un quart de la valeur locative annuelle définie aux articles 1509 à 1518 A du code général des impôts. Pour les propriétés situées sur un territoire dans lequel aucune valeur locative n’est applicable ou ne peut être connue, la valeur locative est celle du logement occupé par le demandeur ou le bénéficiaire ; (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-22-4 du même décret : » Lorsqu’il est envisagé de faire usage de la procédure prévue à l’article L. 262-10-1, le président du conseil général, sur demande ou après consultation de l’organisme payeur, en informe le demandeur ou le bénéficiaire de la prestation, par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette lettre a pour objet : de l’informer de l’objet de la procédure engagée, de son déroulement, de ses conséquences, de sa possibilité de demander à être entendu et à être assisté, lors de cet entretien, du conseil de son choix, des sanctions applicables en cas de déclarations fausses ou incomplètes et de ce que le résultat de cette évaluation sera transmis aux autres organismes de sécurité sociale qui lui attribuent, les cas échéant, des prestations sous conditions de ressources ; de l’inviter à renvoyer, dans un délai de trente jours, le questionnaire adressé par l’organisme visant à évaluer les différents éléments de son train de vie accompagné de toutes les pièces justificatives, en précisant qu’à défaut de réponse complète dans ce délai les dispositions du troisième alinéa de l’article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale seront appliquées » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes les informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer... » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 du même code : « Tout paiement d’indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction, que Mme X... a sollicité le bénéfice du revenu minimum d’insertion pour son couple avec deux enfants à charge le 1er février 1989 ; que le droit a été accordé en février 1990 ; que comme suite à une dénonciation en date du 22 mars 2007, les services de la caisse d’allocations familiales ont diligenté une enquête ; que dans le rapport établi le 8 juin 2007 à l’issue de ce contrôle, il est indiqué que le couple est propriétaire de son logement ; que M. Y... a hérité de son père en octobre 2005 d’un terrain d’une superficie de 2 653 m2 sur lequel se trouvent trois logements : deux en dur, dont un est inachevé, et un en bois ; que M. Y... aurait déclaré qu’un des logements est habité par sa fille ; qu’il aurait également déclaré qu’il a un projet de création d’une association du troisième âge, et qu’un des logements lui servira de local ; que M. Y... est aussi propriétaire de deux véhicules dont une Peugeot de neuf places qu’il a acquis pour 3 000 euros ; qu’il y a également sur les lieux un 4 × 4 Nissan qui appartenait à son père ; que l’auteur de la dénonciation a été rencontré ; qu’il a confirmé ce qu’il a indiqué dans son courrier qu’un des logements est loué pour 5000 euros par mois et que le véhicule de neuf places est utilisé pour le transport à titre payant de personnes âgées le dimanche ; que la sous-préfecture a confirmé que les deux véhicules de marques Citroën et Peugeot sont au nom de M. Y... et que la 4 × 4 Nissan est au nom d’une société de crédit sans préciser laquelle ; que M. Y... est inconnu du régime des bailleurs et du registre des métiers et chambres de commerce ; qu’au vu de ce rapport l’agence d’insertion de La Réunion a conclu le 9 juillet 2007 à la récupération de l’allocation de revenu minimum d’insertion et à la constitution d’un dossier de fraude ; que deux décisions en date du 19 juillet 2007 ont d’une part supprimé le droit de Mme X... au revenu minimum d’insertion et d’autre part déterminé un indu de 15 858,68 euros pour la période de juillet 2005 juillet 2007 ; que par décision du 6 novembre 2007, l’agence d’insertion de La Réunion a refusé d’accorder à Mme X... toute remise gracieuse aux motifs suivants : « M. Y... a omis de déclarer ses ressources locatives aux logements (...) D’après le contrôle de la caisse d’allocations familiales, votre train de vie apparent paraît aisé ce qui ne vous permet pas de prétendre à un maintien des droits au revenu minimum d’insertion » ; que par une décision en date du 1er avril 2008, la commission départementale d’aide sociale de La Réunion a confirmé la suppression du droit de Mme X...au revenu minimum d’insertion aux motifs suivants : « (...) Considérant que M. Y... a hérité de son père depuis le 5 octobre 2005, d’un terrain référencé d’une superficie de 2 653 m2 sur lequel se trouvent les trois logements suivants : no 327, construction en dur sous tôle d’une superficie de 90 m2 (qui servirait de local pour accueillir des personnes âgées) ; no 327 bis, construction en dur sous tôle d’une superficie de 60 m2 inoccupée ; no 329 bis construction de type en dur sous tôle non achevée et habitée par sa fille ; Considérant que selon le même rapport, M. Y... est propriétaire d’un véhicule Peugeot de 9 places ainsi que d’une Citroën Xsara et que la 4 × 4 Nissan est au nom d’une société de crédit ; Considérant en conséquence que les ressources du foyer sont incontrôlables et qu’il y a lieu de considérer que M. et Mme X... disposent d’un train de vie et des ressources supérieures au montant théorique du RMI pour deux personnes soit 555,49 euros forfait logement déduit ; Qu’il découle de ce qui précède que les éléments du train de vie ne correspondent pas aux déclarations faites ; Qu’il s’ensuit que les moyens invoqués pour contester la décision ne sont pas justifiés en droit » ;
    Considérant que par une autre décision en date du 3 juin 2008, la même commission a rejeté sa demande de remise gracieuse aux motifs suivants : « Considérant que M. Y... a hérité de son père depuis en octobre 2005, d’un terrain référencé AW681 W d’une superficie de 2 653 m2 sur lequel se trouvent les trois logements suivants : no 327, construction en dur sous tôle d’une superficie de 90 m2 (qui servirait de local pour accueillir des personnes âgées) ; no 327 bis, construction en dur sous tôle d’une superficie de 60 m2 inoccupée ; no 329 bis construction de type en dur sous tôle non achevée et habitée par sa fille ; Considérant que selon le même rapport, M. Y... est propriétaire d’un véhicule Peugeot de 9 places ainsi que d’une Citroën Xsara et que la 4 × 4 Nissan est au nom d’une société de crédit ; Considérant en conséquence que les ressources du foyer sont incontrôlables et qu’il y a lieu de considérer que M. et Mme X... disposent d’un train de vie et des ressources supérieures au montant théorique du RMI pour deux personnes soit 555,49 euros forfait logement déduit ; Qu’il résulte de ce qui précède que Mme X... ne se trouve pas dans une situation de précarité » ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions précitées, que lorsqu’il est constaté à l’occasion d’une demande ou lors d’un contrôle, une disproportion marquée entre les ressources déclarées et le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire, il est procédé à une évaluation forfaitaire des éléments du train de vie qui est prise en compte pour la détermination du droit à la prestation ; que cela n’a pas été le cas en l’espèce ; qu’aucun élément figurant au dossier ne fait apparaître qu’il ait été procédé ni d’ailleurs qu’il ait été satisfait à la procédure contradictoire ; qu’au lieu de chercher si la décision de l’agence d’insertion a été prise dans le respect de la loi, la commission départementale d’aide sociale de La Réunion s’est bornée à évoquer des ressources incontrôlables et a fait état du niveau du revenu minimum d’insertion quand il semble que le nombre des membre du ménage, dont il ressort du dossier qu’il percevrait encore à la date de la requête des prestations familiales, soit supérieur à deux personnes ; qu’il y a lieu d’annuler les décisions de la commission départementale d’aide sociale, ensemble la décision de l’agence d’insertion de La Réunion et de rétablir Mme X... dans ses droits ; qu’il appartiendra à l’agence d’insertion de La Réunion, si elle s’y croit fondée, de mettre en œuvre les procédures légalement applicables en vertu des dispositions précitées,

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions la commission départementale d’aide sociale de La Réunion des 1er avril et 3 juin 2008, ensemble la décision de l’Agence d’insertion de La Réunion en date du 6 novembre 2007, sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est rétablie dans ses droits au revenu minimum d’insertion.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 octobre 2009 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, Mme DIALLO-TOURE, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 12 janvier 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer