Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Fraude - Recours gracieux
 

Dossier no 090493

Mme X...
Séance du 21 septembre 2010

Décision lue en séance publique le 5 octobre 2010

    Vu la requête, enregistrée le 22 février 2009, présentée par Mme X..., qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
    1o D’annuler la décision du 27 novembre 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Var a rejeté sa demande tendant à l’annulation du titre exécutoire du 1er février 2008, qui lui a été notifié le 15 février suivant, mettant à sa charge un indu de 9 83,37 euros au titre de montants d’allocation de revenu minimum d’insertion perçus entre le 1er janvier 2001 et le 28 février 2003 ;
    2o D’annuler ce titre exécutoire ;
    La requérante soutient qu’elle a déclaré ses revenus de travailleur indépendant ainsi que leur origine sur ses déclarations trimestrielles de ressources, du moins lorsqu’elle en percevait effectivement ; qu’elle n’était ni présente ni représentée lors de l’audience du tribunal correctionnel de Draguignan ayant précédé le jugement du 12 octobre 2006 ; que son reste à vivre mensuel s’élève à 154 euros ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2009, présenté par le président du conseil général du Var, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que Mme X... n’a pas déclaré son activité d’artiste-peintre et n’a déclaré qu’épisodiquement les revenus que celle-ci générait ; que le titre exécutoire est fondé sur le jugement du tribunal correctionnel de Draguignan du 12 octobre 2006 ayant reconnu l’intéressée coupable de fraude en vue de l’obtention du revenu minimum d’insertion ; que son appel est tardif ;
    Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 avril 2009, présenté par Mme X..., qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ; elle soutient qu’elle n’a pas commis de fraude ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 27 mai 2009, présenté par le président du conseil général du Var, qui reprend ses précédentes conclusions et les mêmes moyens ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 juin 2009, présenté par Mme X..., qui tend aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 15 avril 2010, présenté par Mme X..., qui reprend ses précédentes conclusions et les mêmes moyens ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 21 septembre 2010, M. Jean LESSI, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant, d’une part, que l’article L. 262-12 du code de l’action sociale et des familles alors en vigueur prévoit que : « Pour les personnes qui exercent une activité non salariée, les modalités particulières de détermination des ressources provenant de l’exercice de cette activité, adaptées à la spécificité des différentes professions, sont fixées par voie réglementaire » ; qu’aux termes de l’article R. 262-15 du même code : « Les personnes relevant de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux peuvent prétendre à l’allocation de revenu minimum d’insertion lorsqu’au cours de l’année de la demande et depuis l’année correspondant au dernier bénéfice connu elles n’ont employé aucun salarié et ont été soumises aux régimes d’imposition prévus aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts et qu’en outre le dernier chiffre d’affaires annuel connu actualisé, le cas échéant, n’excède pas, selon la nature de l’activité exercée, les montants fixés auxdits articles » ; que l’article R. 262-16 de ce code prévoit que les personnes qui ne remplissent pas les conditions posées à l’article R. 262-15 pour bénéficier de plein droit du revenu minimum d’insertion peuvent y prétendre à titre dérogatoire si elles se trouvent dans une situation exceptionnelle ; qu’il résulte de l’article R. 262-44 du même code que le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives, notamment, à aux activités, aux ressources et aux biens des membres de son foyer ;
    Considérant d’autre part qu’il résulte de l’article L. 262-40 du code de l’action sociale et des familles que, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement de sommes indûment payées au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion ou de la prime forfaitaire mentionnée à l’article L. 262-11 se prescrit par deux ans ;
    Considérant enfin que l’article L. 262-46 du même code, dans ses rédactions successives applicables au présent litige, punit le fait de bénéficier frauduleusement ou de bénéficier frauduleusement de l’allocation de revenu minimum d’insertion ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que par une décision du 29 août 2003, la caisse d’allocations familiales du Var, agissant par délégation du préfet, alors compétent, a notifié à Mme X... un indu d’allocation de revenu minimum d’insertion de 9 383,37 euros correspondant aux montants perçus du 1er janvier 2001 au 28 février 2003, au motif que l’allocataire n’aurait pas fait état de l’activité de travailleur indépendant qu’elle exerçait en tant qu’artiste peintre, et dont les revenus étaient imposés au titre des bénéfices non commerciaux non soumis aux régimes prévus aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts ; qu’une demande de remise gracieuse, présentée au préfet, est demeurée sans réponse ; qu’à la suite de poursuites déclenchées par le procureur de la République en relation avec ces mêmes faits, le tribunal correctionnel de Draguignan, par un jugement du 12 octobre 2006, a reconnu Mme X... coupable de l’infraction prévue à l’article L. 262-46 et l’a condamnée à une amende de 1 000 euros avec sursis ; que le trésorier payeur général du Var a notifié à Mme X..., le 15 février 2008, un titre exécutoire portant avis des sommes à payer, pour un montant de 9 383,37 euros ; que, sur renvoi du tribunal administratif de Nice incompétemment saisi d’une demande d’annulation de ce titre, la commission départementale d’aide sociale du Var a, par la décision attaquée, rejeté la demande de Mme X... ;
    Considérant que l’autorité de la chose jugée au pénal s’impose aux autorités et juridictions administratives en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions ; que le jugement du 12 octobre 2006 du tribunal correctionnel de Draguignan devenu définitif, après avoir relevé que Mme X... était prévenue d’avoir « frauduleusement bénéficié ou tenté de bénéficier de l’allocation du revenu minimum d’insertion, et ce pour un montant de 9 383,37 euros », a énoncé par un motif constituant le soutien nécessaire de son dispositif qu’« il ressort des éléments du dossier que Mme X... a réellement commis les faits qui lui sont reprochés ; Qu’il convient en conséquence de le retenir dans les liens de la prévention (...) » ; qu’il ressort de ces énonciations que l’indu mis à la charge de Mme X... ne saurait être contesté, sauf à méconnaître l’autorité de chose jugée au pénal, ni dans son principe ni dans son étendue ;
    Considérant en deuxième lieu que l’autorité de chose jugée au pénal ne s’étend pas à la qualification juridique donnée aux faits par le juge pénal, à l’exception des cas où la légalité d’une décision administrative est subordonnée à la condition que les faits qui servent de fondement à cette décision constituent une infraction pénale ; qu’ainsi, la qualification retenue par le juge pénal, faisant application des dispositions de l’article L. 262-46 du code de l’action sociale et des familles, n’est pas de nature à contraindre l’appréciation qu’il appartient à l’autorité administrative puis, le cas échéant, au juge de l’aide sociale, dans le cadre d’un litige relatif au recouvrement de sommes indûment perçues par un allocataire, de porter de manière autonome sur l’existence d’une fausse déclaration ou d’une fraude faisant obstacle à l’application de la prescription biennale prévue à l’article L. 262-40 du même code ; qu’il suit de là que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Var, sans se prononcer par des motifs propres, a estimé que ce jugement pénal autorisait, par lui-même, le département du Var à recouvrer des sommes au-delà d’une période de deux ans ;
    Considérant qu’il y a lieu pour la commission centrale d’aide sociale, saisie dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel, de statuer sur les autres moyens soulevés en première instance et en appel par Mme X... ;
    Sur la fin de non-recevoir opposée par le président du conseil général du Var :
    Considérant qu’il est constant que la date du 27 novembre 2008 mentionnée sur la décision de la commission départementale d’aide sociale du Var ne correspond pas à la date de notification de cette décision à Mme X... ; qu’il ne ressort d’aucune pièce du dossier que l’appel de cette dernière, enregistré le 26 février 2009 à la direction départementale des affaires sociales du Var, serait tardif ; que la fin de non recevoir du président du conseil général du Var doit, par suite, être écartée ;
    Sur la légalité de la décision attaquée :
    Considérant en premier lieu que l’absence de mention du nom ou de la qualité de l’auteur d’une décision n’ayant pas par elle-même pour effet d’entacher celle-ci d’incompétence, un tel moyen, soulevé à l’encontre du titre exécutoire du 1er février 2008, est, en tout état de cause, inopérant ;
    Considérant en deuxième lieu que, dès lors que le titre exécutoire se réfère à la décision de répétition de l’indu précédemment notifiée à Mme X..., dont il n’est pas utilement soutenu qu’elle ne comporterait pas elle-même l’énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision attaquée, le moyen d’insuffisance de motivation ne peut qu’être écarté ;
    Considérant en troisième lieu que, si Mme X... a, il est vrai, reporté certains revenus sur ses déclarations trimestrielles de ressources, elle a omis de déclarer à l’organisme payeur son activité de travailleur indépendant ; que les revenus tirés de cette activité étant soumis, en tant que bénéfices non commerciaux, au régime réel d’imposition, les dispositions de l’article R. 262-15 du code de l’action sociale et des familles faisaient obstacle à ce que Mme X... bénéficiât du revenu minimum d’insertion, sauf à solliciter de la part du préfet, alors compétent, la dérogation prévue par l’article R. 262-16 du même code ;
    Mais considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X..., qui a reporté ses revenus sur certaines déclarations trimestrielles de ressources en en précisant l’origine, ne saurait être regardée comme ayant délibérément failli à ses obligations déclaratives ; qu’elle est dès lors fondée à soutenir qu’elle n’a pas commis de fraude au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles ; que si la notification du 29 août 2003 a interrompu le cours de la prescription biennale, sans que le délai ait, par la suite, de nouveau couru pendant une période ininterrompue de deux ans, il s’ensuit que l’organisme payeur n’était pas fondé à procéder à la récupération des sommes versées avant le 1er août 2001 ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que Mme X... est fondée à soutenir que c’est à tort que la commission départementale d’aide sociale du Var a rejeté sa demande ; que sa décision doit, par suite, être annulée ; qu’il y a lieu de décharger Mme X... des montants correspondants à l’allocation perçue du 1er janvier au 31 juillet 2001, soit 2 449,09 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Var du 27 novembre 2008 est annulée.
    Art. 2.  -  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à la charge de Mme X... est ramené à 6 934,28 euros.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 21 septembre 2010 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LESSI, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 octobre 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer