Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Hébergement - Ressources - Participation financière
 

Dossier no 081042

Mme X...
Séance du 1er octobre 2010

Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010

    Vu enregistrée à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Gironde le 23 juin 2008, la requête présentée pour Mme X... demeurant à la maison de retraite « M... » à S..., par l’ATI Aquitaine son tuteur, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 23 mai 2008 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de la Gironde du 11 mai 2007 refusant son admission à l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour le renouvellement de la prise en charge de ses frais d’hébergement à l’établissement précité à compter du 1er juin 2007 par les moyens qu’elle perçoit des prestations de retraite d’un montant annuel de 11 699 euros alors que le coût mensuel moyen de son hébergement à la maison de retraite « M... » est de 1 450 euros ; qu’ainsi la preuve de l’état de besoin est établie ; que si elle n’a pu apporter des éléments nécessaires à la commission départementale, cela est dû uniquement au fait que le courrier la convoquant à l’audience n’a été porté à sa connaissance que le jour même de celle-ci et qu’elle n’a pu matériellement y participer tout en se « signalant » auprès de la commission ; que seuls les revenus des capitaux placés doivent être pris en compte en vertu de l’article 141 du code de la famille et de l’aide sociale et de l’article 1er du décret du 2 septembre 1954 et qu’il n’appartient qu’au législateur de modifier la loi ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 28 décembre 2009, le mémoire en défense du président du conseil général de la Gironde tendant au rejet de la requête par les motifs qu’il reste à régler à l’établissement un solde mensuel de 557,64 euros ; que toutefois les éléments incomplets fournis démontraient que Mme X... disposait de ressources complémentaires procurées par des placements mais ne permettant pas d’en déduire le montant exact ; que la nature de ces comptes et les montants déclarés des placements sont anormalement différents entre la première demande, la demande de renouvellement et le recours devant la commission départementale ; que pendant la période de prise en charge du 28 juin 2002 au 31 mai 2007 le montant du LEP a augmenté d’environ 4.100 euros, celui de l’assurance-vie de 7.200 euros et un Livret A a été souscrit pour plus de 14 000 euros, soit une augmentation d’environ 25 000 euros et des ressources supplémentaires équivalentes à 422 euros par mois ; qu’en tout état de cause Mme X... s’est enrichie alors qu’elle bénéficiait d’une prise en charge de ses frais d’hébergement au titre de l’aide sociale ; que les éléments fournis ne permettent pas de suivre l’évolution des placements bancaires, d’apprécier les intérêts ou les bénéfices sur les divers comptes ; que l’aide sociale est un droit subsidiaire ; que malgré un versement mensuel régulier de 1 000 euros effectué par l’ATI auprès de l’établissement d’accueil les avoirs détenus par Mme X... semblent augmenter régulièrement ; que l’ATI se borne à établir que les seules ressources de sa protégée sont constituées par les pensions de retraite et ne fournit jamais spontanément et régulièrement la nature et les montants des intérêts des divers placements ; qu’en cas d’annulation de la décision de rejet, il serait dans l’incapacité d’instruire le dossier et de calculer la part des frais de l’intéressée et celle du département faute de justificatifs complets des ressources ; que l’ATI doit être tenue de fournir la totalité des documents bancaires nécessaires à l’instruction ;
    Vu enregistré le 15 février 2010, le mémoire en réplique présenté, pour Mme X..., par l’ATI Aquitaine persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’elle fournit les éléments explicatifs relatifs au LEP C..., au LDD C..., à l’épargne d’assurance-vie N..., aux actions obligations N..., au PEA N..., au compte courant P..., au compte courant N... et au compte obsèques épargne A... ; qu’entre 2002 et 2007 les intérêts produits s’élèvent à 1 500 euros par an environ ; que le montant des ressources est donc de 13 199 euros par an pour un coût moyen annuel d’hébergement de 17 400 euros
Vu enregistré le 8 mars 2010, le mémoire en réplique du président du conseil général de la Gironde persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs que l’ATI reconnaît que Mme X... dispose de plusieurs placements dont 90 % des revenus sont affectables à l’hébergement ; que ni le président du conseil général, ni la commission départementale n’ont motivé leur refus d’admission compte tenu des capitaux ; que seules les ressources et la capacité contributive ont été prises en considération dans les décisions attaquées et non les capitaux eux-mêmes ; qu’il est permis de s’interroger sur la nécessité ou l’avantage pour la personne âgée bénéficiaire de l’aide sociale d’une diversité de produits bancaires telle que celle ménagée par la gestion de l’ATI ; que les mouvements entrainent des frais supplémentaires de gestion à la charge d’une personne dite démunie ; que les montants apparaissant sur les divers placements d’affectation des produits confirment une augmentation volontaire des dépenses de gestion et « interpelle » sur l’opportunité d’une telle multiplicité de comptes ; qu’il y a lieu de déplorer l’absence ou la communication sporadique au département des éléments d’information nécessaires ; qu’en ne transmettant lesdits éléments que devant la commission centrale d’aide sociale, l’ATI entrave la prise d’une décision initiale en toute connaissance du dossier dès l’entrée dans la structure ; que l’absence d’information sur la gestion des biens n’a pas permis au département d’établir clairement le besoin d’aide, le dossier laissant supposer des revenus permettant de financer les frais sans aide de la collectivité ; qu’en tout état de cause le montant des intérêts acquis sur la période pendant laquelle Mme X... n’a disposé que du minimum de revenus laissé à l’hébergé prouve que les revenus complets de l’intéressée n’étaient ni déclarés ni reversés réglementairement au département et que les revenus indiqués ont bien été anormalement augmentés pendant cette prise en charge ; que l’enrichissement pendant l’admission à l’aide sociale est démontré et le besoin d’aide non établi à la date de la demande de renouvellement ; que les éléments permettant d’étudier et de justifier le bien-fondé de la demande de renouvellement depuis la date de son dépôt ne sont pas précisés ;
    Vu enregistré le 12 avril 2010, le mémoire en duplique de l’ATI Aquitaine, pour Mme X..., persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que les modifications dans les comptes ouverts s’expliquent par la mise sous protection de Mme X... auprès de l’ATI qui entraine également une mise sous protection des comptes bancaires, matière en laquelle l’ATI entretient un partenariat avec la banque B... sans frais de gestion supplémentaires ; que le compte courant conservé à P... est un compte de fonctionnement à partir duquel Mme X... peut effectuer des retraits hebdomadaires et dont la préservation se justifie pour des raisons de proximité pour Mme X... qui réside à S... où il n’existe pas de guichet B... ; que la situation financière a très peu changé depuis le 1er juin 2007 ; qu’en 2009 les frais de séjour étaient de 18 440 euros annuels soit 1 040 euros de plus qu’en 2008 ; qu’ainsi en 2008, les ressources s’élevaient à 15 910 euros qui ne permettaient pas de régler les frais d’hébergement de 17 400 euros ; que le solde du compte courant de P... et celui de la B... ont très peu varié en 2  années ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er octobre 2010, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que si la requérante relève que le délai écoulé entre la réception de la convocation à l’audience de la commission départementale d’aide sociale et celle-ci l’a empêchée de s’y rendre, elle ne soulève pas le moyen tiré de l’insuffisance de ce délai lequel n’est pas d’ordre public ;
    Considérant qu’après avoir rappelé le moyen de la demande dont elle était saisie selon lequel les capitaux ne pouvaient être pris en compte mais seulement les revenus pour l’appréciation du droit à l’aide sociale, la commission départementale d’aide sociale de la Gironde relève que « le tuteur n’a pas souhaité apporter des éléments permettant à la juridiction (...) d’apprécier si la requérante s’est volontairement démunie de ses biens au profit de tiers notamment en contractant une assurance-vie » ; qu’eu égard à la règle rappelée par le moyen soulevé par la requête, ce motif qui n’aurait pu être pris en compte que pour la mise en œuvre éventuelle d’un recours prévu à l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles n’était pas de nature à fonder en droit et en fait le dispositif de rejet de la décision attaquée ; qu’il y a lieu, toutefois, pour la commission centrale d’aide sociale saisie dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel d’examiner les moyens des parties en première instance et en appel ;
    Considérant que la décision attaquée refuse le renouvellement de l’admission à l’aide sociale faute que n’aient été fournis les éléments justificatifs des revenus des capitaux mobiliers à prendre en compte ; que l’ATI n’était dans sa demande pas tenue de justifier les revenus pour la période postérieure à la date d’admission sollicitée ; que d’ailleurs elle a fourni en cours d’instruction les justificatifs non contestés des revenus de la sorte de l’assistée en 2008 ; qu’il lui appartiendra de fournir les mêmes éléments au titre de 2009 et de 2010 pour l’exécution de la présente décision ;
    Considérant que dans le dernier état de l’instruction le président du conseil général de la Gironde ne conteste pas sérieusement que le montant des revenus des capitaux placés à prendre en compte pour l’examen de la demande d’admission à l’aide sociale à compter de la date d’effet de celle-ci était de 1 500 euros par an ; que, toutefois, les sommes afférentes au contrat d’assurance-vie décès souscrit par Mme X... doivent être retenues non pour leurs taux effectifs mais pour le taux forfaitaire de 3 % qu’il y a lieu d’appliquer aux intérêts capitalisés et indisponibles dont il s’agit ;
    Considérant que si le président du conseil général est fondé à regretter que les éléments précis relatifs à la gestion des comptes de Mme X... par le tuteur, notamment le montant des intérêts des différents comptes à retenir pour la détermination des droits à l’aide sociale, n’aient pas été fournis au moment de la demande d’aide sociale, le juge de plein contentieux de l’aide sociale statue en fonction des éléments de droit à la date de la décision attaquée et des éléments de fait à la date à laquelle il statue ; que l’ATI a pu ainsi justifier les montants des intérêts à prendre en compte par les éléments fournis en cours d’instruction ; que d’ailleurs les difficultés rencontrées lors de l’examen des demandes initiales d’aide sociale s’expliquent au vu de la série de dossiers jugés ce jour par le caractère conflictuel des relations entre le service et les agents de l’association tutélaire conduisant à une insuffisante précision et transparence des éléments fournis lors des demandes ; qu’un effort réciproque d’aménagement pratique des relations entre les parties serait susceptible de surmonter dans leur intérêt réciproque et préalablement dans celui des assistés sans recourir à de lourdes procédures juridictionnelles et exiger de la présente juridiction des diligences relevant normalement des gestionnaires et qu’il n’est d’ailleurs pas dans ses moyens d’accomplir en réalité de manière entièrement satisfaisante... ; que cette situation est d’autant plus préjudiciable qu’elle s’explique également en réalité par l’illégalité des décisions rendues par les premiers juges lesquels ne procèdent pas en conséquence de l’illégalité dont s’agit à l’instruction approfondie du dossier qu’il leur reviendrait et qui relève dès lors du juge d’appel et par la difficulté en réalité de l’administration à admettre que les capitaux placés ne puissent être pris en compte pour leur totalité comme en témoigne dans plusieurs dossiers de la présente audience sa prétention à voir rejeter la demande au motif inopérant et non fondé que l’assisté aurait dans l’attente de la décision du juge fait l’avance des frais ;
    Considérant que dès lors que le président du conseil général de la Gironde ne le conteste pas et que l’ATI a devant la présente juridiction fourni les éléments de nature à présumer qu’effectivement les intérêts à prendre en compte pour l’examen de la demande étaient de 1 500 euros par an, déduction faite de ceux produits par le contrat d’assurance-vie décès qui devaient être pris en compte à hauteur du montant forfaitaire de 3 %, il n’appartient pas à l’administration d’apprécier la pertinence de la gestion patrimoniale du tuteur, appréciation qui relève de la responsabilité du juge des tutelles ;
    Considérant que les variations dans le capital de l’assistée, après admission à l’aide sociale, ne sont pas en elles mêmes de nature à interdire le renouvellement de celle-ci ; que s’il apparaissait ce qui n’est d’ailleurs nullement établi que ces variations procèdent de revenus non déclarés durant la période initiale d’admission, il appartiendrait seulement à l’administration de rechercher la répétition de l’indu au titre des participations de l’aide sociale durant cette période ;
    Considérant qu’aucune disposition ni aucun principe n’interdisent à une personne bénéficiaire de l’aide sociale à l’hébergement aux personnes âgées qui est accordée en fonction des seuls revenus de gérer son capital et éventuellement de l’accroitre sous réserve d’usage des voies de droit ouvertes par l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ;
    Considérant que si le président du conseil général de la Gironde persistait à considérer qu’à la date du renouvellement sollicité les produits des capitaux possédés durant la période d’admission antérieure n’avaient pas donné lieu à reversement intégral de leur part revenant à l’aide sociale, il lui appartiendrait d’en assurer la répétition et le recouvrement par telle voie que de droit, mais que cette circonstance serait également par elle-même sans incidence sur le droit de l’assistée au renouvellement de l’aide sociale ;
        Considérant en définitive que Mme X... doit être admise à compter de la date du 1er juin 2007 au renouvellement de l’aide sociale à l’hébergement aux personnes âgées et que pour la période courant de cette date les participations de l’assistée et de l’aide sociale doivent être déterminées ainsi qu’il suit du 1er juin au 31 décembre 2007 :
    Pensions 7/12e de 11.699 euros :
        -  + produits du contrat d’assurance-vie décès 7/12e de 3 % de 38 359 euros ;
        -  + intérêts des autres comptes de placement 7/12e de 1 500 euros ;
        -  - frais de tutelle et de mutuelle (non contestés).
    que la participation de l’assistée s’établira à 90 % du montant de la somme déterminée conformément aux indications qui précèdent ;
    Considérant que la participation de l’aide sociale s’établira par déduction de cette dernière somme du montant du tarif d’hébergement (45,28 euros par jour selon l’administration) ; que l’administration ne conteste pas que l’aide sociale doive également participer au tarif dépendance qui est de 4,25 euros par jour et que d’ailleurs en l’absence de versement de l’APA s’agissant d’une centenaire néanmoins « girée » 5-6, il y aura lieu à prise en charge par l’aide sociale de l’ensemble des deux tarifs dans la mesure où Mme X... ne peut en financer la totalité, soit du 1er juin au 31 décembre 2007 (1 511,78 euros × 7) = 10 582,46 euros ; qu’ainsi la participation en 2007 de l’aide sociale s’établit par déduction de ce montant de 10 582,46 euros du montant de la participation de Mme X... à ses frais d’hébergement déterminée conformément aux indications qui précèdent ;
    Considérant que pour 2008, 2009 et 2010 il y aura lieu de procéder aux mêmes modalités de détermination que celles qui viennent d’être précisées pour 2007 ; que d’ailleurs l’ATI Aquitaine a fourni le montant des intérêts également non contesté au titre de 2008 et qu’il lui appartiendra de fournir pour l’exécution de la présente décision au service pour 2009 et 2010, la présente juridiction étant néanmoins en droit sans procéder à un supplément d’instruction de fixer en bases le montant de la participation de l’assistée pour l’ensemble des motifs qui précèdent dès lors que ces bases sont déterminées avec une précision suffisante même si la nature des relations entre le service et l’association tutélaire n’interdit pas d’envisager de nouveaux contentieux et que si la juridiction disposait de moyens plus conséquents que ceux dont elle dispose il lui serait loisible également de fixer elle-même pour éviter de tels contentieux les montant en valeur absolue des participations respectives,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 23 mai 2008 et la décision du président du conseil général de la Gironde du 11 mai 2007 sont annulées.
    Art. 2.  -  La prise en charge des frais d’hébergement à la maison de retraite de M... de Mme X... par l’aide sociale est accordée à compter du 1er juin 2007.
    Art. 3.  -  L’ATI Aquitaine est renvoyée devant le président du conseil général de la Gironde afin que les montants de la participation de Mme X... et de celle de l’aide sociale aux frais d’hébergement de Mme X... mentionnés à l’article 2 soient déterminés conformément aux motifs de la présente décision.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er octobre 2010 où siégeaient M. Levy, président, Mme Aouar, assesseure, et Mlle Erdmann, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer