Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Hébergement - Ressources - Participation financière
 

Dossier no 081590

Mme X...
Séance du 1er octobre 2010

Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010

    Vu enregistrée à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Gironde le 8 décembre 2008, la requête présentée pour Mme X... demeurant EHPAD « M... », par son tuteur l’association A..., tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision en date du 26 septembre 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Gironde a rejeté sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de la Gironde du 5 août 2008 rejetant sa demande d’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour la prise en charge des frais d’hébergement et d’entretien à l’EHPAD de C... par les moyens que les pièces fournies dans le dossier permettaient d’apporter les preuves de ses ressources et de démontrer leur insuffisance pour le règlement de ses frais d’hébergement ; que la décision attaquée viole les dispositions combinées des articles L. 132-1, L. 132-3 et R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles dont ils résultent selon une jurisprudence constante que le demandeur n’est pas tenu d’aliéner son patrimoine lorsque ses revenus sont insuffisants pour supporter les frais ; que tel est le cas en l’espèce ; que le détail de ses revenus et comptes est joint ; que s’il fallait considérer les sommes dont elle dispose comme des capitaux non placés, elles seraient évaluées productives de revenus mensuels à hauteur de 8,75 euros ; que le contrat d’assurance-vie décès dont elle est titulaire ne donne pas lieu à intégration dans ses ressources et fait l’objet d’une rémunération annuelle variable 0,5 à 0,7 % ; qu’ainsi l’ensemble de ses ressources s’élèvent à 896,03 euros ou à 904,78 euros si l’on tient compte des sommes pourtant destinées à ses dépenses personnelles sur les comptes à vue ; qu’il y a lieu de retenir sur ses revenus la somme nécessaire à l’acquittement de ses cotisations mutuelle, soit 75,93 euros et que la somme demeurant à sa charge est de 736,15 euros ; qu’il y a lieu de prendre en charge ses frais à compter de la date d’entrée dans l’établissement ;
    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 21 janvier 2010, le mémoire du président du conseil général de la Gironde tendant au rejet de la requête par les motifs qu’une prise en charge a été accordée à compter du 1er novembre 2009 ; que pour la période du 2 avril 2008 au 31 octobre 2009 une prise en charge est en cours d’instruction ; que les éléments fournis lors de la constitution de la demande de prise en charge, bien qu’incomplets, démontraient que Mme X... disposait de ressources complémentaires procurées par des placements mais ne permettaient pas d’en définir les montants exacts ; qu’en tout état de cause ils ne permettaient pas de suivre l’évolution des placements bancaires, d’apprécier les intérêts ou les bénéfices sur les divers comptes ; que l’aide sociale est un droit subsidiaire ; que Mme X... disposait de plusieurs comptes dont certains avaient été souscrits auprès de différentes sociétés bancaires après avoir sollicité l’aide sociale ; que la nature de ces comptes et les montants déclarés des placements étaient anormalement différents entre les premières demandes ou les demandes de renouvellement ; que l’ATI ne fournit jamais spontanément et régulièrement la nature et les montants des intérêts des divers placements ; qu’elle ne peut donc pas démontrer l’état de besoin de Mme X... ; qu’aucun des établissements concernés n’a contesté les décisions du président du conseil général ; que les frais d’hébergement ont pu être, soit financés par les personnes âgées, ce qui prouve l’absence de besoin, soit régularisés par le département ; que des autorisations spécifiques du juge des tutelles ont été données aux représentants légaux pout utiliser les placements des majeurs protégés aux fins d’acquitter les frais de séjour ; que désormais une prise en charge est accordée ; que si la commission annulait les décisions de rejet, il serait dans l’incapacité d’instruire les dossiers et de calculer la part des frais des intéressés et celle du département pour la période considérée ;
    Vu enregistré le 27 avril 2010, le nouveau mémoire du président du conseil général de la Gironde persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs que les articles L. 231-2 et L. 231-4 du code de l’action sociale et des familles déterminent le plafond de ressources ne devant pas être dépassé pour prétendre à une prise en charge au titre de l’aide sociale ; que dans le mémoire d’appel devant la commission centrale d’aide sociale le plan d’épargne populaire (B...) n’est plus indiqué ; que les cotisations mensuelles continuent à être prélevées sur le compte bancaire détenu au C... pour alimenter une assurance-vie dont l’existence n’avait été précisée lors de la demande alors que parallèlement Mme X... sollicite la prise en charge de ses frais d’hébergement par l’aide sociale ; que le 15 juillet 2009 la totalité des éléments nécessaires à l’instruction de la demande a bien été fournie ; qu’il y a lieu si les décisions attaquées sont annulées de demander à A... de fournir la totalité des documents bancaires nécessaires à l’instruction ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er octobre 2010, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que quelle que puisse être l’ambiguïté (délibérée ?) de sa rédaction, la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde attaquée oppose bien à Mme X... la démonstration insuffisante de « ressources » insuffisantes pour régler les frais d’hébergement et d’entretien alors que la décision du président du conseil général opposait que les « divers revenus » de l’intéressée lui permettaient de régler ses frais et qu’elle devait démontrer leur insuffisance ; qu’il résulte des dispositions des articles L. 132-1, R. 132-1 et L. 132-3 tels qu’interprétés par une jurisprudence constante que les « ressources » visées à l’article L. 231-2 dont se prévaut le président du conseil général sont en réalité les revenus à l’exclusion des ressources en capital ainsi qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 132-1 et R. 132-1 ; que les ressources en capital ne pouvaient ainsi être prises en compte pour statuer sur la demande d’aide sociale en sus des revenus ; que la commission départementale d’aide sociale ayant, comme il a été dit, (délibérément ?) méconnu le sens et la portée des dispositions appliquées, il y a lieu de statuer sur les moyens des parties dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel et de préciser les revenus qu’il y a lieu de prendre en compte dont dorénavant le président du conseil général se borne à opposer le caractère incomplet des éléments produits pour ce faire (et non comme dans la décision attaquée devant la commission départementale d’aide sociale le montant suffisant des revenus pour financer les frais) ;
    Considérant qu’à cette étape du litige des parties, il appartient au juge de plein contentieux de l’aide sociale de fixer avec une précision suffisante les droits de l’assistée et le montant de la participation à régler par la collectivité d’aide sociale et non seulement de se borner à renvoyer à l’administration, après avoir annulé la décision de la commission départementale d’aide sociale, pour qu’elle fasse application de la règle légale « des 90 % » de revenus affectés à la prise en charge des frais litigieux ; que, toutefois, il lui est loisible de fixer en bases avec une précision suffisante les revenus à prendre en compte pour déterminer les participations des demandeurs et de l’aide sociale, dès lors que le dossier ne permet pas de calculer avec précision le montant de ces participations et que le président du conseil général ne saurait, comme il le fait en défense, demander de rejeter la demande en l’état si les éléments fournis ne permettent pas à la commission elle-même de calculer le montant des participations ; que faute pour l’assistée à la suite de la présente décision de fournir pour la liquidation du montant procédant des bases qu’elle fixe les éléments suffisants, il y aura lieu pour le président du conseil général, soit de sursoir à statuer, soit d’opposer à nouveau une décision de rejet... sous le contrôle à nouveau du juge... mais qu’en l’état des moyens « dont elle dispose » il ne saurait être question pour la commission centrale d’aide sociale de se substituer à l’administration dès lors que les éléments du dossier lui permettent seulement de calculer en bases les participations et non en montants ;
    Considérant par ailleurs que si pour répondre aux moyens dont il est saisi par le demandeur et sans pour autant soulever un moyen d’ordre public il appartient au juge de se prononcer sur l’ensemble de ces moyens compte tenu de l’argumentation du demandeur si même telle ou telle condition légale d’application des dispositions dont le moyen sollicite l’application n’est pas contestée par le défendeur, il ne lui appartient pas pour autant d’aller au-delà en examinant, si pour des revenus dont la prise en compte selon les modalités sollicitées par le demandeur n’est plus en litige, il y a lieu de retenir un montant différent de revenus procédant de l’application des dispositions légales qui seraient méconnues par les parties ;
    Considérant que dans ses mémoires en défense le président du conseil général de la Gironde s’estime hors d’état de déterminer les participations et demande donc à la commission centrale d’aide sociale de rejeter la requête faute que soient fournis les éléments suffisants pour un réexamen de celle-ci ; qu’il conclut à la prise en compte des intérêts d’un contrat d’assurance-vie décès capitalisés à hauteur de leur montant capitalisé et soulève divers moyens d’ordre général ; qu’il y a lieu de traiter le litige sur ces trois points ;
    Considérant en premier lieu, que s’agissant des revenus du livret « plan d’épargne populaire » dont les demandes antérieures à la requête d’appel se bornaient à indiquer que le montant était de 9 147,08 euros, ce livret n’est plus repris par l’appelant parmi les placements productifs de revenus de Mme X... pour la période litigieuse ; que la requérante n’a formulée aucune observation en réponse au mémoire en défense, dont il résulterait qu’à la date de la demande et pour la période dite Mme X... n’était pas en réalité en possession dudit livret ; que pour l’application de la présente décision le tuteur fournira à l’administration, qui peut les obtenir d’ailleurs directement auprès de l’établissement bancaire, le ou les taux des intérêts applicables qui seront nécessairement pris en compte, la présente décision tenant comme acquis que le livret dont s’agit était en possession de l’assistée pour la période dite ;
    Considérant en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient la requérante, les intérêts capitalisés des contrats d’assurance-vie décès doivent être pris en compte mais compte tenu des modalités de ces placements selon la jurisprudence du conseil d’Etat dans son dernier état et contrairement à ce qu’avait jugé la présente juridiction, non en fonction du taux des intérêts capitalisés effectivement pratiqué, mais en application de l’article R. 132-1 à hauteur de 3 % du montant du capital placé ; que c’est ainsi à tort que le tuteur soutient que les intérêts dont s’agit n’ont pas lieu d’être pris en compte et qu’alors même que l’administration peut à tout le moins difficilement être regardée comme contestant cette position du demandeur pour l’application des dispositions de l’article R. 132-1, voire doive être regardée comme ne le contestant pas, il y a lieu de retenir la prise en compte des produits du livret dont s’agit pour la période dite à hauteur de 3 % ;
    Considérant en troisième lieu, que la circonstance que les frais d’hébergement pour la période litigieuse du 2 avril 2008 au 31 octobre 2009 ont été réglés à l’établissement par Mme X... et qu’ainsi, bien évidemment, celui-ci n’a rien sollicité de l’aide sociale du département est sans aucune incidence sur le droit de Mme X..., qui faute de pratiquer ainsi n’aurait pu demeurer dans l’établissement, à bénéficier de son admission à l’aide sociale, la situation devant bien évidemment être régularisée rétroactivement par l’administration pour l’application de la présente décision et en conséquence comporter les remboursements qui s’en déduisent à l’assistée à hauteur du montant de la participation de l’aide sociale ;
    Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance pour l’utilisation des ressources restant disponibles après fixation de sa participation Mme X... serait en mesure de s’acquitter après avoir obtenu l’aide sociale de cotisations d’assurance-vie au titre du contrat susévoqué n’est pas de nature à réduire en quelques mesures la participation de l’aide sociale dès lors qu’en toute hypothèse elle est en état de le faire avec son capital ou avec l’utilisation de celui-ci sur deux de ses comptes servant en fait de compte courant mais dont elle ne conteste pas en définitive la prise en considération ; qu’en effet de même que sous réserve des dispositions prévues par la décision du 15 novembre 2007, département de la Charente-Maritime, les dépenses exposées n’ont pas lieu d’être déduites des revenus de l’assisté pour la fixation de ses droits à l’aide sociale, de même l’utilisation qu’il fait des revenus qui lui sont laissés et du capital dont il dispose pour supporter de telles charges n’est pas par elle-même et à elle seule de nature à interdire l’admission à l’aide sociale et influer sur la détermination des participations respectives du demandeur et de la collectivité conformément aux dispositions précitées ;
    Considérant, en cinquième lieu, qu’à supposer qu’en faisant état des « ressources insuffisantes » dont il n’est pas justifié par le demandeur de l’aide sociale, le président du conseil général entende reprendre l’argumentation ci-dessus censurée de la commission départementale d’aide sociale celle-ci devrait être rejetée par les motifs mêmes ci-dessus énoncés ;
    Considérant enfin, que la circonstance que l’aide sociale soit intervenue au vu des éléments fournis par le tuteur pour la période d’hébergement suivant celle en litige est sans incidence sur la suite à réserver aux conclusions de Mme X... relatives à cette dernière période ;
    Considérant qu’il appartient au tuteur de Mme X... de fournir en les justifiant pour l’exécution de la présente décision le montant exact des intérêts du livret d’épargne populaire de sa protégée dont il n’est pas justifié en l’état pour la période litigieuse et à défaut au président du conseil général de la Gironde de solliciter de l’établissement bancaire l’indication du montant contractuellement stipulé dont il s’agit et d’en faire application ; que si ces éléments ne peuvent être fournis nonobstant les diligences de l’administration qui viennent d’être invoquées ou s’il n’est pas justifié qu’en réalité durant la période litigieuse la requérante ne possédait pas le livret dont s’agit, le président du conseil général sera alors, mais alors seulement, effectivement en droit de rejeter la demande en l’état, faute que ne soient fournis les éléments suffisants pour la détermination exacte de la participation de l’aide sociale, mais qu’en l’état du dossier il y a lieu de présumer que pour l’application de la présente décision et la liquidation des droits de Mme X... le tuteur fournira bien les éléments dont il s’agit conformément aux motifs de la présente décision...,

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde et du président du conseil général de la Gironde en date des 26 septembre 2008 et 5 août 2008 sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est admise à l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement et d’entretien à l’EHPAD de C... pour la période du 2 avril 2008 au 31 décembre 2009.
    Art. 3.  -  Mme X... est renvoyée devant le président du conseil général de la Gironde afin que la participation de l’aide sociale à ses frais d’hébergement et d’entretien soit déterminée après fixation de sa propre participation conformément aux motifs de la présente décision et pour le surplus par application des éléments non contestés pris en compte par l’administration.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er octobre 2010 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, et Mlle  ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer