Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Placement - Ressources - Participation financière
 

Dossier no 091077

Mme X...
Séance du 1er octobre 2010

Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 27 juillet 2009, la requête présentée pour Mme X... demeurant à la maison de retraite de M..., par l’ATI Aquitaine, son tuteur, tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 26 juin 2009 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de la Gironde du 26 mai 2008 rejetant sa demande de prise en charge des frais d’hébergement à la maison de retraite dite par l’aide sociale pour la période du 1er février 2008 au 30 novembre 2009 par les moyens que ses ressources se composent de la pension de retraite d’un montant mensuel de 821 euros, alors que le coût mensuel moyen de son hébergement à la maison de retraite de M... est de 1 630 euros ; que s’agissant de son épargne déclarée 3 966,42 euros pour une garantie décès, 29 262,42 euros pour une assurance vie, 1 573,05 euros sur un LEP et 346,49 euros sur un livret A, seuls les revenus que produisent les capitaux placés peuvent être pris en compte en application de l’article L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles ; qu’ainsi les avoirs bancaires dont s’agit ne peuvent être retenus comme tels mais doivent seulement l’être à hauteur des revenus procurés ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 21 janvier 2010, le mémoire en défense du président du conseil général de la Gironde tendant au rejet de la requête par les motifs que les frais de séjour ont pu être financés jusqu’au 30 novembre 2009 par Mme X... et qu’une prise en charge a été accordée à compter du 1er décembre 2009 par décision du 28 décembre 2009 ; que Mme X... disposait de ressources complémentaires ; que l’aide sociale répond à un état de besoin du demandeur et est un droit subsidiaire ; qu’elle disposait de plusieurs comptes dont certains souscrits après la demande d’aide sociale ; que la nature des comptes et les montants des placements déclarés étaient anormalement différents entre la première demande ou la demande de renouvellement et le recours devant la commission départementale ; que les attestations relatives aux différents comptes bancaires n’étaient pas fournies ou incomplètes ; que l’ATI ne fournit jamais spontanément et régulièrement la nature et les montants des intérêts des divers placements et ne peut donc démontrer l’état de besoin de ses protégés ; qu’aucun des établissements concernés n’a contesté ses décisions devant la commission départementale d’aide sociale ; que les frais d’hébergement ont pu être avancés par les personnes âgées ce qui prouve bien leur absence de besoin ; que les autorisations spécifiques du juge des tutelles ont été données ; que l’intéressée bénéficie désormais d’une prise en charge ; que dans le cas où la commission annulerait les décisions de rejet, il serait dans l’incapacité d’instruire les dossiers et de calculer la part des frais des intéressés et celle du département pour les périodes considérées faute de justificatifs complets des ressources ; qu’il y a lieu d’impartir aux associations de tutelle de fournir la totalité des documents bancaires nécessaires à l’instruction ;
    Vu enregistré le 22 février 2010, le mémoire en réplique présenté pour Mme X..., par l’ATI Aquitaine persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens qu’elle ne s’est acquittée d’une partie de ses frais d’hébergement, avec l’autorisation du juge des tutelles, que pour éviter de faire supporter une dette conséquente à la maison de retraite et ce afin de conserver de bonnes relations avec celle-ci et dans l’attente de son admission à l’aide sociale ; qu’elle a ouvert un compte épargne logement sur lequel sont payées au département les sommes correspondant aux revenus des capitaux placés ; que le tuteur fournis des relevés bancaires mentionnant les intérêts ; que la production d’attestations est coûteuse et la réception de celles-ci prend énormément de temps ;
    Vu enregistré le 22 mars 2010, le mémoire en réplique du président du conseil général de la Gironde persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes motifs et les motifs que l’ATI reconnaît que les intérêts des placements doivent être affectés au paiement des frais d’hébergement ; que ceux-ci ont bien été réglés avec l’accord du juge des tutelles qui ainsi a bien tenu compte du caractère subsidiaire de l’aide sociale ; que l’ATI ne précise pas le montant des intérêts acquis du compte épargne logement qu’elle aurait ouvert qui entraîne des frais supplémentaires de gestion et a été souscrit après le rejet de l’aide sociale ; que le manque de transparence sur la totalité et la diversité des placements ainsi que sur leur nature et leurs montants et les intérêts produits ne permet pas de déterminer la part des frais à imputer à la collectivité d’aide sociale ; que l’ATI ne mentionne pas les assurances vie, lesquelles ont fait l’objet de prélèvements réguliers depuis leur ouverture, ce qui est contraire à la demande d’aide formulée à la collectivité ; que les relevés bancaires produits sont des documents internes à l’ATI qui n’ont pas force probatoire ; que dans une lettre du 23 janvier 2009 l’ATI indique qu’à sa connaissance sa protégée ne possède plus de biens mobiliers ; que certaines dates d’ouverture des comptes varient sans justification, notamment pour un des contrats d’assurance-vie ;
    Vu enregistré le 28 mai 2010, le mémoire en duplique de l’ATI Aquitaine, pour Mme X..., persistant dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et les moyens que le juge des tutelles n’a donné son autorisation que sous réserve de l’admission à l’aide sociale pour l’avance de frais ; que les intérêts qui seront produits sur le CEL seront comptabilisés et reversés en 2011 ; que concernant les produits d’assurances-vie, l’ATI déclare l’intégralité des placements dont elle a connaissance dans les dossiers de demande d’admission ; que le conseil général s’est basé sur l’existence de ces placements pour refuser l’admission et qu’il en avait donc connaissance ; que les retraits effectués l’ont été pour régler la maison de retraite ; que les attestations qu’elle a produites mentionnent l’intégralité des mouvements financiers ; que toutes ses opérations sont contrôlées par le juge des tutelles et le commissaire aux comptes ; que la lettre du 23 janvier 2009 mentionne bien que Mme X... ne possède pas de biens mobiliers en plus de ceux préalablement déclarés ; que ledit courrier mentionne ensuite l’existence des produits d’assurances vie et joint une copie des contrats ; qu’elle n’a pu fournir la date d’ouverture de ceux-ci car elle n’en avait pas connaissance au moment du dépôt de la demande d’aide sociale ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er octobre 2010, Mlle Erdmann, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’en relevant que « lors de la demande l’intéressée disposait de ressources suffisantes pour régler ses frais d’hébergement » les premiers juges ont nécessairement (et délibérément ?) pris en comptes les ressources en capital de Mme X... pour refuser l’admission à l’aide sociale en méconnaissance des dispositions des articles L. 132-1, L. 132-3 et R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles ; que la circonstance, par ailleurs, que la demanderesse ait ouvert des comptes épargnes et versé des primes au titre de contrats d’assurance vie alors qu’elle « bénéficiait de l’aide sociale » (ce qui est d’ailleurs inexact ou inopérant puisqu’elle n’en a bénéficié qu’à compter du 1er décembre 2009) demeure sans incidence par elle-même sur l’existence de revenus supérieurs au montant du tarif, seule de nature à permettre le rejet de la demande d’aide sociale ; que de même demeure sans incidence la circonstance qu’elle ait désigné des bénéficiaires des contrats d’assurance vie et qu’ainsi elle se « démunit volontairement » alors que de telles circonstances ne peuvent être prises en compte, le cas échéant, que pour l’exercice des recours prévus au 2o de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ; qu’ainsi la décision attaquée manque de base légale ; qu’il y a lieu, toutefois, pour la commission centrale d’aide sociale saisie par l’effet dévolutif de l’appel d’examiner les moyens des parties en première instance et en appel ;
    Considérant que la circonstance que la requérante s’est acquittée des frais d’hébergement pour la période litigieuse avec l’autorisation du juge des tutelles qui n’a pu être donnée que sous réserve de la suite des instances contentieuses en cours concernant la demande d’admission à l’aide sociale demeure sans incidence sur le droit de Mme X... à cette dernière ;
    Considérant que le CEL dont fait état l’ATI Aquitaine a été constitué pour le paiement au département de la participation de l’assistée sur ses ressources et donnera lieu dès lors que l’admission était en l’état à compter du 1er décembre 2009 au premier versement fin 2011 en ce qui concerne les intérêts des placements ; que l’existence de ce compte demeure par suite sans incidence sur la suite à réserver à la présente requête ;
    Considérant que la circonstance que l’ATI dans sa lettre du 23 janvier 2009 indique à tort qu’abstraction faite des contrats d’assurance vie qu’elle produit Mme X... ne disposerait pas d’autres biens mobiliers demeure par elle-même pour regrettable qu’elle puisse être sans incidence sur la suite à réserver à la présente requête dès lors que l’instruction établira le montant exact des participations à assigner et que d’ores et déjà il est constant que les revenus de la demanderesse étaient insuffisants pour permettre un refus d’admission total à l’aide sociale ;
    Considérant que les justifications fournies en duplique sur les conditions et la temporalité de la souscription des contrats d’assurance-vie ne sont plus contestées ;
    Considérant, toutefois, que l’état du dossier dans la présente instance ne permet pas de déterminer avec une précision suffisante fût-ce en bases et non en montants en valeur absolue les participations de l’assistée et de la collectivité d’aide sociale (la demande d’aide sociale n’est pas jointe, les intitulés des placements et leurs montants figurant dans la requête et en défense ne sont pas identiques, les relevés produits ne permettent pas à la commission d’autant qu’ils sont contestés par le défendeur de fixer en bases avec une précision suffisante les montants des participations) ; qu’il y a lieu avant dire droit d’ordonner à l’ATI Aquitaine de fournir à la commission centrale d’aide sociale pour 2008 et 2009 (le litige porte à la date de la présente décision sur les périodes 1er février - 31 décembre 2008 et 1er janvier - 30 novembre 2009) deux tableaux faisant précisément apparaître d’une part, les montants en capital des placements détenus par Mme X... durant chacune de ces deux années, d’autre part, le montant des intérêts afférents aux deux périodes de onze mois durant chacune de ces deux années qu’il y a lieu de prendre en compte à la date de la présente décision étant dès à présent rappelé d’une part, que les contrats d’assurance vie donnent lieu à prise en compte, non des intérêts produits et capitalisés, mais du pourcentage forfaitaire de 3 % prévu par les dispositions précitées, d’autre part, que le dossier, s’il ne permet pas de fixer avec une précision suffisante le montant des participations au centime d’euros près, établit d’ores et déjà qu’il y a bien lieu, sous réserve de la détermination du montant de la participation, à l’admission à l’aide sociale de Mme X... qui n’est pas susceptible de payer avec ses revenus, quels que puissent être ceux des capitaux mobiliers, l’ensemble de ses frais de placement durant la période litigieuse et a dû d’ailleurs aliéner son capital pour ce faire dans l’attente de la décision définitive des juges,

Décide

    Art. 1er.  -  Les décisions de la commission départementale d’aide sociale de la Gironde en date du 26 juin 2009 et du président du conseil général de la Gironde en date du 26 mai 2008 sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme X... est admise à l’aide sociale à l’hébergement des personnes âgées pour la prise en charge de ses frais de placement à la maison de retraite de M... du 1er février 2008 au 30 novembre 2009, sous réserve de produire les justifications prévues à l’article 3 ci après.
    Art. 3.  -  Dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision, l’ATI Aquitaine justifiera d’une part, pour la période du 1er février 2008 au 31 décembre 2008, d’autre part, pour celle du 1er janvier 2009 au 30 novembre 2009, d’une part, du montant de chacun des placements dont Mme X... a disposé durant ces périodes, d’autre part du montant des intérêts versés au titre des mêmes périodes pour les placements autres que l’assurance vie.
    Art. 4.  -  Tous droits et moyens des parties sont et demeurent réservés pour autant qu’il n’y est pas statué par la présente décision.
    Art. 5.  -  La présente décision sera transmise au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er octobre 2010 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, et Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 5 novembre 2010.
    La République mande et ordonne au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer