Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2200
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Résidence
 

Dossier no 100846

M. X...
Séance du 11 février 2011

Décision lue en séance publique le 1er mars 2011

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 14 juin 2010, la requête présentée par le préfet de Paris tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale fixer le domicile de secours de M. X... dans le département de Paris par les moyens que d’après les éléments d’information concernant le parcours d’hébergement de M. X... contenus dans le rapport social du 3 mars 2010 par Mme T..., travailleuse sociale au CHRS U... à P..., il ressort qu’il a habité de 2004 à 2008 à l’hôtel M... à P... ; qu’en 2008 il s’est fait à nouveau héberger pendant six mois chez un ami M. S... à P... ; qu’au terme de cette période, M. X... a dû quitter cet hébergement ; qu’il a essayé de retrouver une place dans un hôtel meublé mais que les prix pratiqués ne lui permettaient pas de pouvoir y accéder ; qu’il a alterné alors des nuits à la rue dans le square des Abbesses et des nuits au CHU « F... » à P... ; qu’il est admis au sein du CHRS « U... » depuis le 13 août 2009 ; que suite à des demandes de pièces justificatives et de l’attestation sur l’honneur établie par M. X..., il est apparu que la situation de l’intéressé relevait de fait d’une prise en charge financière par la collectivité territoriale parisienne ; qu’en effet, M. X... n’avait pas perdu, par une résidence de trois mois dans les rues de P..., le domicile de secours qu’il y avait acquis à savoir : hôtel M... à P... du 1er mars 2004 au 31 juillet 2008, chez M. S... du 1er août 2008 au 15 juillet 2009, puis du 16 juillet 2009 au 6 août 2009 M. X... résidait au CHU « F... » à Paris et enfin au CHRS « U... » à P... à compter du 13 août 2009 ; que, par lettre du 20 mai 2010, le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général réfute sa compétence au motif qu’il ressort des pièces du dossier une contradiction flagrante entre les termes du rapport social établi le 3 mars 2010 par le CHRS « U » et l’attestation sur l’honneur signée le 7 mai 2010 par M. X... ; que le rapport social du 3 mars 2010, établi par l’assistante sociale, mentionnait le fait que l’intéressé s’était fait héberger en 2008 6 mois chez un ami à P... puis avait dû quitter cet hébergement au terme de cette période, date à compter de laquelle il avait alors alterné des nuits à la rue dans un square et des nuits en CHU avant d’être admis en CHRS à compter du 13 août 2009 ; que l’attestation sur l’honneur signée ultérieurement par l’intéressé fait état d’un hébergement chez un ami dans le 18e arrondissement du 1er août 2008 au 15 juillet 2009, attestation en contradiction avec les termes du rapport social préétabli ; qu’il convient d’ajouter que les dires de l’intéressé n’ont été attestés par aucun justificatif produit par son ami ; que devant la contradiction entre le rapport social d’une part et les dires de l’intéressé produits a posteriori d’autre part, le département de Paris estime qu’il y a sans doute lieu d’ajouter davantage foi au rapport social étayé établi par l’assistante sociale du CHRS « U... » duquel il ressort que l’intéressé a perdu un domicile de secours parisien et a été dans un état d’errance pendant plus de 6 mois avant d’être admis en CHRS ; qu’il fait cependant observer que l’attestation sur l’honneur signée par M. X... le 7 mai 2010 vient préciser au niveau des dates les faits insuffisamment précis, quant aux différents modes d’hébergement, annoncés dans le rapport social établi le 3 mars 2010 par Mme T... à qui il a été demandé dès le 19 mars 2010 d’apporter des éléments d’informations supplémentaires, dans le cadre de l’instruction du dossier, afin de pouvoir faire une juste appréciation de la situation de l’intéressé ; que les informations complémentaires (attestation sur l’honneur de M. X..., justificatifs d’hébergement à l’hôtel M... et au CHU « F... ») ont été recueillies et transmises par l’intermédiaire de Mme T... qui en a eu connaissance et ne les a pas mises en cause ; qu’enfin et contrairement à ce qu’allègue le département de Paris, M. X... n’a pas perdu le domicile de secours acquis par une résidence de 6 mois dans les rues de Paris ; que dans ces conditions il est demandé de prononcer la compétence du département de Paris pour la prise en charge du dossier d’aide sociale ;
    Vu enregistré le 29 septembre 2010, le mémoire en défense du président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général qui conclut au rejet de la requête par les motifs qu’aucun des documents réunis au dossier d’aide sociale ne permet d’établir que l’intéressé disposait d’un domicile de secours dans le département de Paris faute notamment de justificatifs des séjours supposés de M. X... dans différents hôtels parisiens et d’une quelconque attestation de l’ami domicilié à P... 18e censé l’avoir accueilli entre 2008 et 2009 ; qu’il subsiste en outre une contradiction flagrante entre les termes du rapport établi par le travailleur social du CHRS « U... » établi le 3 mars 2010 et l’attestation produite ultérieurement par l’intéressé le 7 mai 2010 concernant notamment l’hébergement du postulant chez son ami dans le 18e  ; que le département de Paris observera à cette occasion que les décisions rendues par la commission centrale d’aide sociale dans des affaires similaires sur la question de la détermination du domicile de secours soulignent régulièrement que la valeur des informations apportées par les travailleurs sociaux fait foi et ne peut être mis en doute ; que les allégations du préfet requérant fondées à partir des seules déclarations de l’intéressé ne pourraient par conséquent valablement être retenues pour déterminer la compétence du conseil général de Paris dans le règlement de la dépense exposée ; que le département de Paris considère en conséquence que M. X... doit être considéré comme une personne dépourvue de domicile fixe à Paris au sens de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles dont la prise en charge des frais d’hébergement en établissement pour personnes âgées relève par conséquent de l’Etat en application de l’article L. 121-7 dudit code ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 11 février 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’en application de l’article L. 122-1 du code de l’action sociale et des familles les dépenses d’aide sociale légale incombent au département dans lequel les bénéficiaires ont leur domicile de secours ou à défaut, dans lequel ils résident au moment du dépôt de la demande ; qu’aux termes de l’article L. 122-2 du même code celui-ci s’acquiert « (...) par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou gratuit, au domicile d’un particulier agréé (...) » ; qu’à ceux de l’article L. 122-3, il se perd soit « 1o par une absence ininterrompue de trois mois postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf si celle-ci est motivée par un séjour dans un établissement sanitaire ou social ou au domicile d’un particulier agréé (...) », soit « 2o par l’acquisition d’un nouveau domicile de secours (...) » ;
    Considérant, en revanche, qu’en application de l’article L. 121-7 « Sont à la charge de l’Etat au titre de l’aide sociale : 1o Les dépenses d’aide sociale engagées en faveur des personnes mentionnées aux articles L. 111-3 et L. 232-6 », c’est-à-dire notamment celles pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé ;
    Considérant que les pièces du dossier sont contradictoires en ce qui concerne les conditions de résidence de M. X... à P... après son départ en 2008 de l’hôtel M... où il résidait jusqu’au 31 juillet 2008 ; que l’attestation de l’intéressé du 3 mars 2010 au vu de laquelle est intervenu le rapport d’un travailleur social du CHRS « U... » de même date fait état de ce que courant 2008 « je me suis fait héberger six mois chez M. S... (...) à P... (...). En 2009 j’ai été au centre d’hébergement d’urgence “F...” à P... et j’ai également dormi au square des A... dans le 18e à P... pendant quelques mois puis admis au CHRS « U... » » ; que le rapport du travailleur social de même date indique « en 2008 il se fait à nouveau héberger pendant six mois chez M. S... (...) P.... Au terme de cette période (il) doit quitter cet hébergement (...) il alterne alors entre les nuits à la rue dans le square des A... à P... et des nuits au CHU « F... » (...) est admis au sein du CHRS « U... » depuis le 13 août 2009 » ; que l’attestation ultérieure de M. X... du 7 mai 2010 indique « je suis resté dormir dans le square des A... durant une semaine (sic) consécutive du 7 août 2009 au 8 août 2009 (...). J’atteste sur l’honneur avoir bien été hébergé chez (M. S...) du 1er août 2008 au 15 juillet 2009 », M. S... étant dorénavant introuvable pour confirmer ces dires ;
    Considérant que dans l’argumentation des parties la solution du litige dépend uniquement de la question de savoir si M. X... a continué à résider à P... ailleurs que dans la rue durant la période qui a suivi son départ de l’hôtel M... le 31 juillet 2008, date à laquelle il ressort du dossier qu’il avait bien acquis et non perdu un domicile de secours à P... ; que s’agissant de la période du 1er août 2008 au 13 août 2009 où il est admis au CHRS « U... » les attestations qu’il produit le 3 mars 2010 (corroborées par le rapport de même date d’un travailleur social du CHRS de « U... ») et le 7 mai 2010 sont, ainsi qu’il vient d’être précisé, contradictoires en ce qui concerne la durée d’un séjour chez un ami (un an selon la seconde, six mois selon la première) à l’issue duquel il aurait vécu « plusieurs mois » dans la rue au square des A..., selon les premières en date des attestations dont il s’agit ;
    Mais considérant que si le séjour dans la rue n’est pas de nature, à la différence d’une résidence fût-elle précaire dans un département pendant plus de trois mois, à faire acquérir un domicile de secours les dispositions de l’article L. 122-3 qui priment sur l’application de celles de l’article L. 121-7 ne prévoient la perte du domicile de secours antérieurement acquis que dans le cas d’absence ininterrompue de trois mois du département où le domicile de secours a été acquis ou d’acquisition d’un autre domicile de secours ; qu’il y a lieu, en précisant si besoin la jurisprudence antérieure de la commission, de considérer qu’en toute hypothèse si une personne qui a acquis un domicile de secours ne s’absente pas d’un département pendant plus de trois mois ou n’acquiert pas un autre domicile de secours, la circonstance qu’elle vive « dans la rue » pendant plus de trois mois dans ce département n’est pas de nature à permettre de considérer qu’elle n’ait pas conservé au regard des dispositions législatives précitées le domicile de secours antérieurement acquis ; qu’ainsi le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général qui a la charge de la preuve n’établit pas que les conditions de fait de la continuation du séjour de M. X... à P... d’août 2008 à août 2009 ont été telles qu’il y ait perdu le domicile de secours antérieurement acquis ;
    Considérant, d’ailleurs, en l’espèce et en toute hypothèse, que le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général n’établit pas davantage que M. X... ait séjourné durant trois mois consécutifs « dans la rue » fût-ce à P... et que dans ces conditions au regard de la charge initiale de la preuve qui lui incombe et des éléments apportés par chacune des parties dans l’administration de la preuve celle-ci n’aurait pas été apportée par le président du conseil de Paris siégeant en formation de conseil général eut il même été admis qu’en séjournant plus de trois mois « dans la rue » dans le département d’acquisition du domicile de secours, l’assisté y aurait perdu ce domicile, ce que la présente décision précise comme ci-dessus qu’il n’y a pas lieu d’admettre,

Décide

    Art. 1er.  -  Le domicile de secours de M. X... est fixé dans le département de Paris auquel il incombe la charge financière des frais d’hébergement en établissement pour personnes âgées de M. X....
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, au ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 11 février 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 1er mars 2011.
    La République mande et ordonne au ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, au ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer