Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2400
 
  OBLIGATION ALIMENTAIRE  
 

Mots clés : Obligation alimentaire - Personnes âgées - Placement
 

Dossier no 100895

Mme X...
Séance du 15 avril 2011

Décision lue en séance publique le 20 mai 2011

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 29 juillet 2010, la requête présentée par le président du conseil général des Alpes-Maritimes tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes en date du 17 mars 2010, maintenir sa décision du 25 novembre 2009 de rejet par les moyens que la décision contestée a été reçue le 31 mai 2010, le conseil général forme donc son recours dans le délai de deux mois ; que le montant mensuel des ressources de Mme X... est de 1 413 euros par mois ; que la participation familiale des obligés alimentaires susceptibles d’être mise en œuvre est de 308 euros ; que la décision d’admission à l’aide sociale doit être appréciée en tenant compte de l’aide pouvant être apportée par les membres de la famille ; que Mme X... peut donc disposer de 1 413 euros + 308 euros = 1 721 euros ; que les frais de séjour à l’EHPAD « La E... » s’élevant à 1 515 euros par mois, le montant de l’aide sociale à consentir par la collectivité est en conséquence de 0 euro, c’est pourquoi un rejet a été prononcé ; que la participation familiale a été évaluée au vu des enquêtes effectuées sur la situation des obligés alimentaires et se compose uniquement de celle de M. Y... évaluée à 308 euros au regard du barème départemental selon le calcul suivant : ressources mensuelles 3 579 euros, marié, déductions : pas de loyer, 150 euros pour personne à charge, taxe d’habitation 202 euros et pension alimentaire 145 euros ; que les revenus nets sont donc de 3.082 euros d’où une participation de 10 % selon le règlement départemental = 308 euros ; qu’il n’appartient pas au conseil général de rechercher l’accord individuel des obligés alimentaires car Mme X... ne relève pas de l’aide sociale ; que le département n’est donc pas en mesure de se substituer à elle pour saisir le Juge aux affaires familiales, comme le prévoit la décision de la commission départementale d’aide sociale ; que la décision de la commission départementale d’aide sociale qui a décidé de l’admission à l’aide pour la prise en charge du placement de Mme X... à consentir par la collectivité est de 0 euro ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré le 23 mars 2011, le mémoire de Mme Z... exposant qu’elle vit seule, en dessous du seuil de pauvreté ; qu’elle n’a, pour seule aide, que « l’allocation familiale » ; elle informe la commission qu’elle est à sa disposition pour fournir tous les éléments relatifs à sa situation pénible si besoin ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu le code civil ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 15 avril 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant d’une part, que la motivation de la décision attaquée doit être regardée - nonobstant certains éléments de cette motivation - comme évaluant et non fixant les participations de chaque obligé alimentaire de Mme X..., en l’espèce le seul M. Y... à l’exclusion des autres obligés ; qu’il n’y a pas lieu, par suite, de l’annuler pour incompétence ;
    Considérant d’autre part, qu’il ressort des visas de la décision attaquée (la demande à la commission départementale d’aide sociale n’est pas au dossier) que le seul moyen soulevé par Mme Z..., ce en quoi d’ailleurs elle persiste en appel, tendait à contester sa propre possibilité de participation aux frais d’hébergement et d’entretien en EHPAD de sa mère, Mme X... ; que, toutefois, la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes n’a pas statué sur ce moyen ; qu’en admettant que les moyens qu’elle a retenus ne fussent pas d’ordre public, le moyen tiré de ce que le premier juge a soulevé d’office un moyen qui n’était pas d’ordre public n’est pas lui-même un moyen d’ordre public à soulever d’office par le juge d’appel ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu pour la commission centrale d’aide sociale de statuer dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel ;
    Considérant que, nonobstant la citation in limine avant la partie de la motivation proprement dite de la décision attaquée et même dans le corps de celle-ci de divers autres articles, ladite décision apparait motivée à tout le moins pour l’essentiel sur le fondement des dispositions des articles L. 132-6, R. 132-9 et L. 132-7 ; que s’agissant, notamment, de l’action à intenter, le cas échéant, par le président du conseil général devant le juge judiciaire, seule est envisagée l’action prévue à l’article L. 132-7 dans l’intérêt du demandeur d’aide et non celle de caractère subrogatoire prévue sans fondement textuel spécifique dans l’intérêt de la collectivité d’aide sociale pour faire fixer par l’autorité judiciaire le montant de la dette alimentaire de chaque obligé au titre de la participation globale évaluée par l’administration et/ou le juge de l’aide sociale, l’administration ayant alors dans le cas d’admission à l’aide sociale avancé la totalité du montant correspondant à la différence entre le tarif de l’établissement et le montant des ressources personnelles de l’assisté affecté à la prise en charges de ses frais d’hébergement et d’entretien ;
    Considérant qu’aux termes des articles :
    L. 132-6 : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. » (...) « La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. La décision fait également l’objet d’une révision lorsque les débiteurs d’aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu’elle avait prévus. ». ;
    R. 132-9 : « Pour l’application de l’article L. 132-6, le postulant fournit, au moment du dépôt de sa demande, la liste nominative des personnes tenues envers lui à l’obligation alimentaire (...), lorsqu’il sollicite l’attribution d’une prestation accordée en tenant de la participation de ses obligés alimentaires. Ces personnes sont invitées à fixer leur participation éventuelle aux dépenses susceptibles d’être engagées en faveur du postulant ou à l’entretien de ce dernier. La décision (...) est notifiée à l’intéressé (...) aux personnes tenues à l’obligation alimentaire en avisant ces dernières qu’elles sont tenues conjointement au remboursement de la somme non prise en charge (...). A défaut d’entente entre elles ou avec l’intéressé, le montant des obligations alimentaires respectives est fixé par l’autorité judiciaire (...). » ;
    et L. 132-7 : « En cas de carence de l’intéressé, le représentant de l’Etat ou le président du conseil général peut demander en son lieu et place à l’autorité judiciaire la fixation de la dette alimentaire et le versement de son montant (...) à l’Etat ou au département qui le reverse au bénéficiaire augmenté (...) de la quote-part de l’aide sociale. » ;
    Considérant que la commission départementale d’aide sociale a estimé que l’évaluation des possibilités de participation des obligés alimentaires faite par le président du conseil général pour prendre la décision de rejet attaquée dont il résultait que seul M. Y... pouvait prendre en charge la partie - de 308 euros - du tarif de l’établissement demeurant à prendre en charge après imputation des ressources de Mme X... affectables à ses frais d’hébergement et d’entretien ne faisant « aucune mention d’un quelconque engagement de M. Y... à y pourvoir et » également « à renoncer à la demande d’aide sociale » ( ? !) l’administration pouvait « fixer elle-même la participation familiale au titre de l’obligation alimentaire et faire une proposition de répartition entre obligés voire en cas de désaccord de saisir l’autorité judiciaire » ; qu’il résulte de ce qui précède que la voie de droit devant l’autorité judiciaire ainsi envisagée est celle prévue dans l’intérêt du demandeur d’aide sociale à l’article L. 132-7 et non celle, ménagée à titre subrogatoire sans fondement textuel exprès, prévue dans l’intérêt de la collectivité d’aide sociale pour recouvrer après admission à l’aide sociale la part de la somme avancée par la collectivité d’aide sociale correspondant au quantum du tarif de l’établissement mis globalement par l’instance d’admission à charge des obligés alimentaires ; que le président du conseil général des Alpes-Maritimes - dont l’appréciation erronée dans son appel - mais non dans son mémoire en défense de première instance - du montant des ressources personnelles de Mme X... affectable à ses frais d’hébergement et d’entretien demeure sans incidence sur la solution du présent litige par le juge du plein contentieux de l’aide sociale soutient qu’ « il n’appartient pas au conseil général de rechercher l’accord individuel des obligés alimentaires car Mme X... ne relève pas de l’aide sociale. Le département n’est donc pas en mesure de se substituer à elle pour saisir le juge des affaires familiales comme le prévoit la décision de la commission départementale d’aide sociale » ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions des articles L. 132-6 et R. 132-9 que le formulaire de demande de renseignements adressé aux obligés alimentaires du demandeur d’aide sociale, lors de l’instruction de la demande d’aide sociale, présente un caractère informatif et qu’à ce stade, aucun engagement n’a lieu d’être requis par l’administration ; qu’une proposition de répartition de la dette globalement évaluée par l’instance d’admission aux débiteurs d’aliments n’a lieu d’être adressée, le cas échéant, qu’après admission à l’aide sociale pour permettre, en cas de refus de la répartition dont il s’agit par tout ou partie desdits obligés, à l’administration de saisir l’autorité judiciaire pour le recouvrement de la partie du tarif acquitté correspondant à l’évaluation globale de la participation des obligés effectuée dans la décision d’admission ; qu’au demeurant l’administration et/ou le juge de l’aide sociale ne sauraient être liés par les montants envisagés par chacun des débiteurs d’aliments dans la souscription de tels « engagements » et qu’il leur appartient de déterminer dans l’exercice de leurs propres pouvoirs d’appréciation la participation globale qu’il leur revient d’évaluer ; qu’en l’espèce, le président du conseil général des Alpes-Maritimes a, quelles que puissent être la pertinence et la suffisance de sa motivation, laquelle n’a pas été contestée, limitée à l’indication « aide possible des obligés alimentaires », entendu ainsi qu’il résulte clairement du dossier prendre en compte pour rejeter la demande, outre le montant des ressources personnelles de Mme X..., une participation globale des obligés alimentaires de 308 euros et a en conséquence, cette participation étant supérieure au solde de 244 euros demeurant à affecter au tarif après imputation des ressources personnelles de la demanderesse, rejeté la demande ; qu’il pouvait, d’ailleurs, procéder à ce rejet sans indiquer explicitement le montant de la participation des débiteurs d’aliments qu’il avait retenu, dont il avait justifié devant la commission départementale d’aide sociale ; que s’il est loisible, par ailleurs, au président du conseil général d’intenter l’action prévue à l’article L. 132-7 dans l’intérêt de l’assisté en cas même, comme en l’espèce, de rejet de la demande d’aide sociale, il n’y est, toutefois, dans cette hypothèse, pas tenu et que s’il ne le fait pas c’est au demandeur d’aide et aux obligés alimentaires eux-mêmes qu’il revient de faire fixer par l’autorité judiciaire les montants respectifs des obligations alimentaires à l’égard du créancier d’aliments ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, d’une part, l’administration n’était pas tenue de faire mention dans la décision attaquée d’un « engagement de l’obligé alimentaire » - M. Y... - « à... pourvoir » à « la prise en charge résiduelle des frais d’hébergement de sa mère » et, en toute hypothèse d’ailleurs... « à renoncer à la demande d’aide sociale » ; qu’un tel engagement n’aurait eu lieu d’être qu’après admission à l’aide sociale dans les conditions et selon les modalités ci-dessus rappelées antérieurement à l’exercice, le cas échéant, de l’action subrogatoire dans l’intérêt de la collectivité d’aide sociale pour recouvrer la part du tarif avancée par ladite collectivité pour le compte des obligés alimentaires ; qu’ainsi et même si c’est à tort qu’à l’appui de son moyen d’appel le président du conseil général des Alpes-Maritimes indique que « le département n’est pas en mesure de se substituer à » Mme X... pour « saisir le juge aux affaires familiales » dès lors que l’action prévue à l’article L. 132-7 du code de l’action sociale et des familles dans l’intérêt des demandeurs d’aide et des assistés peut être intentée par le président du conseil général dans ledit intérêt même en cas de rejet de la demande d’aide sociale, alors, toutefois, qu’il n’y est pas tenu, l’appelant est néanmoins fondé à soutenir que, compte tenu de ce que la décision qu’il a prise était une décision de rejet d’admission à l’aide sociale, il ne lui appartenait pas de rechercher l’accord individuel des obligés alimentaires et qu’en fondant sa décision sur les dispositions combinées précitées des articles L. 132-6, R. 132-9 et L. 132-7 la commission départementale d’aide sociale a méconnu le sens et la portée desdites dispositions, alors d’ailleurs, qu’à supposer même, que contrairement à l’interprétation qui précède, il y ait lieu de considérer que sa motivation entend également implicitement mais nécessairement se fonder sur l’éventualité de l’action à caractère subrogatoire ouverte au président du conseil général pour recouvrer, après admission à l’aide sociale, la part du tarif correspondant à la participation globale des obligés alimentaires retenue par l’administration et avancée par celle-ci, l’application de ce principe n’a lieu d’être, en l’espèce, s’agissant comme le relève à raison l’appelant d’une décision de rejet d’admission à l’aide sociale, n’impliquant dès lors aucune participation de la collectivité d’aide sociale qu’il y ait lieu de recouvrer soit à l’amiable par accord des débiteurs d’aliments après la décision d’admission, soit par la contrainte par la saisine de l’autorité judiciaire pour faire valoir les droits de la collectivité d’aide sociale à recouvrer les sommes avancées au titre de la participation des obligés alimentaires ;
    Considérant, par ailleurs, qu’il n’est ni établi ni même allégué qu’en retenant de fait une possibilité de participation de 308 euros des obligés alimentaires supérieure au montant résiduel de 244 euros de la part du tarif qu’il leur appartenait de prendre en charge, le président du conseil général des Alpes-Maritimes, dont l’insuffisance de motivation n’est pas, comme il a été rappelé ci-dessus, en toute hypothèse soulevée et qui pouvait ne pas évaluer explicitement le montant de la participation qu’il retenait et qu’il a justifié devant le juge, n’a pas fait une inexacte appréciation de la participation globale des obligés alimentaires ce qui n’est d’ailleurs nullement soutenu par Mme Z... ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la motivation retenue d’office par la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes pour fonder l’annulation de la décision attaquée n’est pas de nature à fonder légalement sa propre décision ;
    Considérant qu’il appartient à la commission centrale d’aide sociale saisie, comme il a été dit, par l’effet dévolutif de l’appel de statuer sur l’unique moyen formulé devant la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes et en défense d’appel par Mme Z... ;
    Considérant que Mme Z... se borne à faire valoir qu’il ne lui est pas possible de contribuer à la participation familiale sur laquelle s’était fondée le président du conseil général des Alpes-Maritimes pour rejeter la demande d’aide sociale ; que, comme il a été dit, il n’appartient pas au juge de l’aide sociale de fixer la participation de chaque obligé alimentaire dans la répartition de la participation globale des débiteurs d’aliments évaluée par l’administration et/ou le juge de l’aide sociale pour rejeter ou n’admettre que partiellement une demande d’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la demande formulée par Mme Z... devant la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes ne peut être que rejetée,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes en date du 17 mars 2010 est annulée.
    Art. 2.  -  La demande présentée par Mme Z... devant la commission départementale d’aide sociale des Alpes-Maritimes est rejetée.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 15 Avril 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 20 mai 2011
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer