Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2220
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Conditions
 

Dossier no 110170

Mme X...
Séance du 1er juillet 2011

Décision lue en séance publique le 19 juillet 2011

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 9 février 2011, la requête présentée par le préfet de l’Ain tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale déterminer le domicile de secours de Mme X... pour la prise en charge de l’allocation personnalisée d’autonomie en établissement par les moyens que le dossier d’aide sociale indique en page 2 au titre de « résidence du demandeur » l’adresse de Mme Y..., sœur de l’intéressée, dans l’Ain (01) et précise comme date d’arrivée le 5 octobre 2010 ; que le bulletin de situation délivré par l’EHPAD E... fait état d’une admission le 31 mai 2010 ; que ces éléments sont en contradiction avec les informations transmises par le conseil général de l’Ain qui indique dans le bordereau d’envoi de la demande d’aide sociale que « cette personne a vécu au Québec puis est arrivée chez sa sœur dans l’Ain pendant 3 semaines ; qu’elle a ensuite été hébergée à la maison de retraite M... puis transférée à l’EHPAD E... (38) ; que le relevé bancaire joint au dossier indique comme adresse « chez Mme Y... dans l’Ain » ; que le certificat de souscription d’un contrat d’assurance vie à effet du 6 mai 2010 a été adressé à Mme X... le 2 juin 2010 à l’adresse de sa sœur dans l’Ain ; qu’il en est de même des relevés de comptes bancaires adressés par la CIC Banque et par la Caisse populaire DESJ qui ont été expédiés à l’adresse de Mme Y... dans l’Ain ; que l’article L. 232-12 du code de l’action sociale et des familles dispose que toute personne résidant en France qui se trouve dans l’impossibilité d’assumer les conséquences du manque ou perte d’’autonomie liée à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins ; que cette allocation définie dans des conditions identiques sur l’ensemble du territoire national est destinée aux personnes qui, nonobstant les soins qu’elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d’une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l’état nécessite une surveillance régulière ; que si le bénéfice de l’APA pour Mme X... classée en GIR. 2 lors de son admission à l’EHPAD E... n’est pas remis en cause, la compétence de l’Etat en tant qu’autorisé débitrice de cette allocation est aujourd’hui contestée pour le motif suivant : que si l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles prévoit que « pour les personnes dont la présence sur le territoire métropolitain résulte de circonstances exceptionnelles et qui n’ont pas pu choisir librement leur lieu de résidence, ou les personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé ont droit aux prestations d’aide sociale », l’article L. 232-12 du même code prévoit dans son alinéa 1er que « l’allocation personnalisée d’autonomie est accordée par décision du président du conseil général ou son représentant » ; qu’in fine l’article L. 232-12 précise que « l’allocation personnalisée d’autonomie est servie aux personnes sans domicile stable dans les conditions prévues au chapitre IV du titre VI du livre II entrée en vigueur le 1er juillet 2007 » ; qu’ainsi s’agissant des personnes sans résidence stable, il résulte des dispositions combinées des articles L. 232-2 et L. 232-12 et L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles que l’allocation personnalisée d’autonomie leur est servie par le département dans lequel se situe l’organisme agréé à cette fin conjointement par le représentant de l’Etat dans le département et par le président du conseil général auprès duquel elles ont élu domicile ; que l’article L. 264-1 du même code qui impose pour les personnes « sans résidence stable » une élection de domicile pour pouvoir prétendre au service des prestations sociales légales réglementaires et conventionnelles précise in fine que « le département débiteur de l’allocation personnalisée d’autonomie, de la prestation de compensation du handicap et du revenu de solidarité active mentionnées respectivement aux articles L. 232-1, L. 245-1 et L. 262-1 est celui dans le ressort duquel l’intéressé a élu domicile » ; que, nonobstant le fait qu’à l’étude des pièces transmises, Mme X... semble avoir élu domicile chez sa sœur dans l’Ain depuis une période au moins antérieure à juin 2010, sur les moyens de droit, il découle de la réglementation en vigueur que le conseil général ne peut être que seul débiteur de l’APA ;
    Vu le bordereau d’envoi, en date du 11 janvier 2011, du dossier d’APA de Mme X... du conseil général de l’Ain à la Direction départementale de la cohésion sociale de l’Ain, précisant que « cette personne n’a pas acquis de domicile de secours en France » ;     Vu, enregistré le 24 février 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de l’Ain qui conclut au rejet de la requête par les motifs qu’aux termes de l’article L. 232-12 du code de l’action sociale et des familles, « l’allocation personnalisée d’autonomie est accordée par décision du président du conseil général et servie par le département sur proposition d’une commission présidée par le président du conseil général ou son représentant. Un décret précise les modalités de fonctionnement et la composition de cette commission qui réunit notamment des représentants du département et des organismes de sécurité sociale » ; que de plus une jurisprudence du Conseil d’Etat du 27 juillet 2005 précise que « l’APA est, dans les cas de figure, à la charge non pas de l’Etat mais du département dans lequel le demandeur est domicilié ; le séjour même prolongé dans un établissement sanitaire et sociale n’est pas de nature à faire acquérir aux personnes qui en sont dépourvues un domicile stable » ; que l’APA relève ainsi de la compétence exclusive du département ; que comme le précise la direction départementale de la cohésion sociale de l’Ain dans son mémoire, il résulte des dispositions de l’article L. 264-1 que pour « prétendre au service des prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles (...) mentionné à l’article L. 251-1 (...) les personne sans domicile stable doivent élire domicile soit auprès d’un centre communal d’action sociale, soit auprès d’un organisme agréé à cet effet. L’organisme compétent pour attribuer une prestation sociale légale, réglementaire ou conventionnelle est celui dans le ressort duquel la personne a élu domicile » ; « le département débiteur de l’allocation personnalisée d’autonomie (...) est celui dans le ressort duquel l’intéressé a élu domicile » ; qu’une jurisprudence de la commission centrale d’aide sociale du 10 juin 2008 précise que « si l’article L. 264-1 impose pour les personnes sans résidence stable une élection de domicile à compter de son entrée en application pour l’ensemble des prestations légales d’aide sociale, cette condition n’a en tout état de cause d’incidence que sur les droits de l’assisté dépourvu d’une telle résidence et non sur la détermination du domicile de secours ; qu’au vu des justificatifs transmis par Mme Y..., elle n’a élu domicile auprès d’aucun organisme agréé à cet effet pour pouvoir prétendre à l’APA dans le département de l’Ain ; que l’article L. 232-1 du même code précise que « toute personne âgée résidant en France qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins. Cette allocation, définie dans des conditions identiques sur l’ensemble du territoire national est destinée aux personnes, qui, nonobstant les soins qu’elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d’une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l’état nécessite une surveillance régulière » ; que l’article L. 232-2 du code précité dispose que l’allocation personnalisée d’autonomie, qui a le caractère d’une prestation en nature, est accordée sur sa demande dans les limites de tarifs fixés par voie réglementaire à toute personne attestant d’une résidence stable et régulière et remplissant les conditions d’âge et de perte d’autonomie évaluées à l’aide d’une grille nationale, également définie par voie réglementaire » ; qu’une décision de la commission centrale d’aide sociale du 4 février 2005 précise que les dispositions de l’article L. 232-2 subordonnant l’attribution de l’APA à la justification d’une résidence stable et régulière n’ont ni pour objet, ni pour effet, de rendre inapplicables celles relatives au domicile de secours ; que l’article L. 122-2 du code de l’action sociale et des familles précise que « nonobstant les dispositions des articles 102 à 111 du code civil, le domicile de secours s’acquiert par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux, ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou au titre de l’aide sociale au domicile d’un particulier agréé ou faisant l’objet d’un placement familial en application des articles L. 441-1, L. 442-1 et L. 442-3 qui conservent le domicile de secours qu’elles avaient acquis avant leur entrée en établissement et avant le début de leur séjour chez un particulier. Le séjour dans ces établissements ou au domicile d’un particulier agréé ou dans un placement familial est sans effet sur le domicile de secours » ; que de plus une décision de la commission centrale du 27 août 2010 précise que « les frais relatifs à la dépendance d’une personne âgée hébergée en maison de retraite et venant d’un pays étranger sans avoir pu acquérir un domicile de secours dans un département français, incombent à l’Etat » ; qu’en l’espèce, Mme X... ne remplit pas les conditions d’acquisition d’un domicile de secours par une résidence habituelle de trois mois dans le département de l’Ain et se trouve ainsi dépourvue de domicile de secours ; qu’elle est en effet, arrivée en France chez sa sœur le 5 octobre 2009 et entrée en maison de retraite le 17 octobre 2009, soit 12 jours après son arrivée puis a été transférée à la maison de retraite dans l’Isère le 31 mai 2010 où elle réside toujours ; que, par conséquent et au regard de la législation en vigueur et de la jurisprudence de la commission centrale d’aide sociale citée ci dessus, le département de l’Ain ne reconnaît pas sa compétence quant à la prise en charge de Mme X... au titre de l’APA en établissement ; qu’en tout état de cause, cette personne n’ayant pu acquérir de domicile de secours dans le département de l’Ain, du fait de sa résidence de seulement 12 jours chez sa sœur dans l’Ain, à son arrivée en France pour intégrer ensuite une maison de retraite dans l’Ain puis dans l’Isère, elle ne saurait relever d’une prise en charge financière du département de l’Ain ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
        Après avoir entendu à l’audience publique du 1er juillet 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’en application de l’article L. 122-1 du code de l’action sociale et des familles, les dépenses d’aide sociale légale incombent au département dans lequel les bénéficiaires ont leur domicile de secours ou à défaut, dans lequel ils résident au moment du dépôt de la demande ; qu’aux termes de l’article L. 122-2 du même code celui-ci s’acquiert « (...) par une résidence habituelle de trois mois dans un département postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf pour les personnes admises dans des établissements sanitaires ou sociaux ou accueillies habituellement, à titre onéreux ou gratuit, au domicile d’un particulier agréé (...) » ; qu’à ceux de l’article L. 122-3, il se perd soit « (...) par une absence ininterrompue de trois mois postérieurement à la majorité ou à l’émancipation, sauf si celle-ci est motivée par un séjour dans un établissement sanitaire ou social ou au domicile d’un particulier agréé (...) », soit par l’acquisition d’un nouveau domicile de secours ;
    Considérant, en revanche, qu’en application de l’article L. 121-7, « sont à la charge de l’Etat au titre de l’aide sociale : 1o les dépenses d’aide sociale engagées en faveur des personnes mentionnées aux articles L. 111-3 et L. 232-6 », c’est-à-dire notamment celles pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé ;
    Considérant, toutefois, que s’agissant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) l’article L. 264-1 dispose que le département « débiteur est celui dans le ressort duquel l’intéressé a élu domicile » ; qu’il résulte de ces dispositions éclairées par les travaux préparatoires ayant précédé leur édiction que, postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007, l’imputation de la dépense à l’Etat pour des personnes sans domicile fixe n’a plus lieu d’être en ce qui concerne l’APA ;
    Considérant qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir que Mme X... avait acquis un domicile de secours dans le département de l’Ain ou y résidait au moment du dépôt de la demande d’aide sociale à la Maison départementale de la solidarité de l’Ain ; qu’il ressort des pièces du dossier que Mme X... qui était domiciliée au Canada est arrivée en France le 5 octobre 2009 et non comme il est précisé de façon erronée sur le dossier d’allocation personnalisée d’autonomie le 5 octobre 2010 et qu’elle a été hébergée par sa sœur Mme Y... dans l’Ain (01) ; qu’en date du 17 octobre 2009 Mme X... a été admise à la maison de retraite M... ; qu’elle a été transférée le 31 mai 2010 à l’EHPAD E... (38) ; qu’elle n’a donc résidé au domicile de sa sœur dans le département de l’Ain que durant 12 jours ; qu’elle ne peut donc être regardée comme ayant acquis un domicile de secours au jour du dépôt de la demande d’aide sociale ; que sa situation est ainsi assimilable à celle d’une personne sans domicile fixe ;
    Considérant que si, comme il a été dit, les conclusions dirigées au titre de cette dernière situation contre l’Etat auquel le département a transmis le dossier, mais sans, d’ailleurs, les reprendre expressément dans son mémoire en défense, ne sont pas susceptibles d’être accueillies celles dirigées contre le département de l’Ain sont recevables ; que, comme il a été dit, la charge de l’allocation personnalisée d’autonomie incombe, en l’absence de domicile de secours ou de résidence à la date de la demande d’aide sociale, au département dans lequel il a été fait élection de domicile en application de l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles ; qu’il n’appartient pas au juge saisi pour la détermination de l’imputation financière de la dépense de statuer sur les modalités et les incidences de ladite élection telles qu’elles sont déterminées aux articles L. 264-1 sq. du code précité ; qu’il lui appartient seulement dans le cadre incertain résultant des dispositions applicables depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 de constater que le département tenu de la dépense est celui dans lequel une élection de domicile a été effectuée, observation faite qu’il reviendra aux autorités saisies postérieurement à la présente décision de statuer sous le contrôle du juge compétent sur la question de savoir si dans les circonstances de l’espèce, qui se rencontrent fréquemment, il est loisible au demandeur d’assistance de régulariser sa demande en procédant postérieurement à celle-ci à l’élection de domicile dont il s’agit ; qu’en statuant autrement et en se bornant à constater qu’à la date à laquelle il statue aucune élection de domicile n’est effectuée le juge de premier et dernier ressort de l’imputation financière de la dépense d’aide sociale serait en effet conduit à priver de tout droit à l’allocation personnalisée d’autonomie en établissement pour la période écoulée le bénéficiaire et en conséquence l’établissement auquel elle est reversée par celui-ci, solution qui ne paraît pas devoir être raisonnablement admise,

Décide

    Art. 1er.  -  Les conclusions de la requête susvisée du préfet de l’Ain sont rejetées.
    Art. 2.  -  Le département en charge des arrérages de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) versée à Mme X..., est, sous réserve de l’appréciation par l’administration et les juridictions compétentes pour statuer sur la demande d’aide sociale de celle-ci, quant au principe et à la date d’effet découlant de ses modalités, de la condition d’élection de domicile prévue à l’article L. 264-1 du code de l’action sociale et des familles après notification de la présente décision celui dans lequel Mme X... a élu domicile.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er juillet 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 19 juillet 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer