Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Fraude
 

Dossier no 081488

Mme X...
Séance du 15 janvier 2010

Décision lue en séance publique le 5 mars 2010

    Vu le recours formé par le président du conseil général du Morbihan, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 5 décembre 2008, qui demande l’annulation de la décision en date du 19 septembre 2008 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Morbihan a accordé à Mme X... une remise totale de l’indu de 9 223,22 Euro, résultant d’un trop-perçu d’allocations du revenu minimum d’insertion pour la période de février 2004 janvier 2006 ;
    Le président du conseil général du Morbihan conteste la décision ; il soutient que la commission départementale d’aide sociale, bien qu’affirmant « qu’elle n’a pas été tout à fait convaincue de l’absence totale d’intérêts » a considéré que Mme X... « se trouve dans une situation de grande précarité (...) qu’il y a lieu à titre tout à fait exceptionnel de remettre en totalité l’indu contesté » qu’ainsi la commission départementale d’aide sociale a commis une erreur de droit dans la mesure où l’indu constaté a été généré par une fausse déclaration et que l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles fait obstacle, dans ce cas, à toute remise ; il fait valoir que le caractère frauduleux du comportement de Mme X... a fait l’objet d’un dépôt de plainte auprès du procureur de la République ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée à Mme X... qui n’a pas produit d’observations en défense ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 15 janvier 2010, M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments » ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262-39 et L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux commissions départementales d’aide sociale puis, le cas échéant, à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration, et ne peut pas, par suite, faire l’objet d’une remise gracieuse ; que la fraude constatée dans ce cadre par les juridictions de l’aide sociale n’est pas une qualification pénale devant être appréciée par le juge pénal ; que, dès lors, les juridictions de l’aide sociale sont compétentes pour examiner les moyens de la fraude ou de la fausse déclaration, dès lors que ceux-ci sont évoqués ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction, que Mme X... a bénéficié du droit au revenu minimum d’insertion en août 2000 au titre d’une personne isolée ; que suite à un premier contrôle en date du 3 janvier 2006 de la caisse d’allocations familiales, elle a d’abord déclaré être hébergé par M. Y..., et avoir effectué des démarches auprès de l’office HLM pour obtenir un logement, sans fournir des justificatifs, puis a ensuite admis vivre avec M. Y... depuis janvier 2004 ; que toutefois, elle n’a pas signé de déclaration de vie commune ; qu’il s’ensuit qu’elle a été radiée du droit au revenu minimum d’insertion avec effet au 1er février 2006 ;
    Considérant que Mme X... a été admise de nouveau au droit du revenu minimum d’insertion en décembre 2006 au titre d’une personne isolée après avoir élu domicile au centre communal d’action sociale du Morbihan ; qu’un deuxième contrôle a été diligenté le 17 avril 2007 qui a conclu à la poursuite du concubinage entre Mme X... et M. Y... ; que le 27 juin 2007 un troisième contrôle a été effectué au domicile de M. Y... ; que le contrôleur a été reçu sur le palier par Mme X... qui a refusé de communiquer toute information relative aux ressources de M. Y... ; que par suite, après un contact avec l’union départementale des associations familiales, curateur de M. Y..., l’organisme payeur a notifié, par décision en date du 2 octobre 2007, un indu de 9 223,22 Euro, résultant d’un trop-perçu d’allocations du revenu minimum d’insertion pour la période de février 2004 janvier 2006 motivé par l’existence d’une vie maritale impliquant la prise en compte des ressources du foyer ;
    Considérant que Mme X..., par courrier en date du 18 octobre 2007 a sollicité une remise gracieuse en contestant le bien-fondé de l’indu qui lui a été assigné ; que la caisse d’allocations familiales agissant par délégation du président du conseil général, par décision en date du 2 novembre 2007 a rejeté la demande ; que saisie d’un recours, la commission départementale d’aide sociale du Morbihan a accordé à Mme X... une remise totale de l’indu de 9 223,22 Euro ;
    Considérant que, pour l’application des dispositions législatives et réglementaires pertinentes relatives à l’allocation du revenu minimum d’insertion, la situation de vie de couple ne se présume pas et saurait être déduite de la vie sous un même toit ; qu’en pareils cas, il revient aux autorités compétentes de rapporter la preuve que, par-delà une communauté partielle d’intérêts que justifient des liens de solidarité et d’amitié, existent des liens d’intimité tels qu’ils résultent nécessairement dans la constitution d’un foyer présentant des caractères de continuité et de stabilité ; qu’en l’espèce, Mme X... a toujours nié tout lien affectif entre elle-même et M. Y... ; qu’il ressort des pièces versées au dossier qu’elle a signé une attestation sur laquelle elle indique que M. Y... l’héberge à titre gratuit ; que cette attestation est établie sur l’honneur, ce qui lui confère une valeur solennelle ; qu’aucune pièce du dossier émanant du curateur de M. Y..., majeur protégé, ne confirme l’existence d’une vie maritale ; que les rapports de contrôle qui se contentent d’affirmer l’existence de la vie commune, uniquement fondée sur le partage d’un toit commun, sans étayer cette affirmation par le moindre élément matériel, à l’exception du comportement inapproprié de Mme X..., sont dénués de valeur probante ; qu’il en résulte que la réalité de la vie maritale n’est pas établie de manière certaine ; que par voie de conséquence, l’indu mis à la charge de Mme X... n’est pas fondé en droit ;
    Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le président du conseil général du Morbihan n’est pas fondé à invoquer une fraude et à se plaindre de ce que la commission départementale d’aide sociale du Morbihan a, par décision en date du 19 septembre 2008, déchargé Mme X... de l’indu de 9 223,22 Euro qui lui avait été assigné,

Décide

    Art. 1er.  -  Le recours du président du conseil général du Morbihan est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise au président du conseil général, au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 15 janvier 2010 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. CULAUD, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 5 mars 2010.
    La République mande et ordonne au au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            La présidente Le rapporteur            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer