Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Hébergement - Aide sociale - Versement
 

Dossier no 110168

Mlle X...
Séance du 1er juillet 2011

Décision lue en séance publique le 19 juillet 2011

    Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 31 janvier 2011, la requête présentée par Mlle X... demeurant foyer F... dans la Mayenne tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Mayenne en date du 3 décembre 2010 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de la Mayenne du 7 juillet 2010 lui accordant la prestation de compensation du handicap en établissement mais n’appliquant pas ladite décision puisque les versements du montant minimum de la prestation de compensation du handicap au titre de l’élément « aides humaines » n’interviennent pas par les moyens qu’elle a exercé un recours gracieux le 24 août 2010 contre la non application de la décision du conseil général du 7 juillet 2010 prorogeant ainsi le délai de recours contentieux ; que la présence de trois conseillers généraux lors de la séance de la commission départementale d’aide sociale est contraire aux exigences d’impartialité posées par l’article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l’homme ; que dans la décision du 7 juillet 2010 le conseil général de la Mayenne a octroyé la prestation de compensation du handicap en établissement et les versements de cette prestation « ne viennent pas » ; que l’article R. 245-61 du code de l’action sociale et des familles affirme clairement que les montants de la PCH ont vocation à être versés à la personne et qu’ainsi, à la lecture de cet article, les montants attribués par la décision du conseil général doivent lui être versés ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu, enregistré le 24 mars 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de la Mayenne tendant au rejet de la requête par les motifs que depuis son entrée en établissement Mlle X... est entièrement prise en charge par le foyer de vie qui pourvoit à la totalité de ses besoins ; qu’elle ne rentre jamais à son domicile ou dans sa famille et que l’aide humaine ne peut par conséquent dans l’immédiat lui être versée ; que la condition prévue à l’article R. 245-61 s’applique à l’ensemble de l’élément 1 y compris au montant réduit qui pourrait être versé à l’intéressée pour les périodes d’hébergement en établissement ; que la prestation doit être utilisée pour la compensation des charges pour lesquelles elle a été attribuée au regard de l’article D. 245-57 et ne peut en aucun cas être regardée comme étant un complément de revenus alors que Mlle X... ne peut utiliser le montant réduit de l’élément 1 de la prestation pour les dépenses en lien avec ses sorties puisqu’elle ne s’absente pas de l’établissement ; que l’équipe pluridisciplinaire de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées n’a pu réaliser de visites au domicile au moment de l’instruction de la demande et que la décision ne peut être appliquée à l’intéressée dans l’état actuel de la situation ; qu’il appartient au conseil général d’exercer le contrôle d’effectivité mais que bien qu’aucun justificatif ne puisse être produit pour les périodes d’hébergement une réduction peut cependant être appliquée selon l’article L. 245-11 à hauteur de 10 % ; que compte tenu des dispositions de l’article D. 245-74 2e alinéa si Mlle X... bénéficiait de l’élément 1 pour les périodes où elle n’est pas hébergée en établissement, une réduction pourrait être appliquée sans justificatifs correspondant à 10 % du montant journalier fixé versé pour les périodes hors établissement dans les limites du montant maximum sans que cela constitue une obligation pour le conseil général mais que l’article 211 du Règlement départemental d’aide sociale applicable dans le département de la Mayenne dispose que la prestation de compensation du handicap est versée aux bénéficiaires qui en font la demande sous réserve qu’ils justifient de son utilisation pour les périodes hors établissement ; que la « requête » devant la commission départementale d’aide sociale n’était pas signée par l’intéressée et qu’aucune décision de rejet de versement de la prestation n’a été prise par le conseil général, Mlle X... n’ayant pas formulé de demande expresse ; qu’ainsi la demande était irrecevable, Mlle X... ne pouvant « exercer de recours » ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er juillet 2011, Mlle ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la régularité de la décision attaquée ;
    Considérant qu’il résulte des mentions de cette décision que siégeaient, lors de l’audience et du délibéré de la commission départementale d’aide sociale de la Mayenne, trois conseillers généraux en méconnaissance du principe d’impartialité partie des exigences du procès équitable garanti par les stipulations de l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’il y a lieu par suite d’annuler cette décision et d’évoquer la demande ;
    Sur la recevabilité de la demande à la commission départementale d’aide sociale ;
    Considérant, d’une part, que la commission départementale d’aide sociale de la Mayenne n’a pas régularisé l’absence de signature de la demande et que le président du conseil général de la Mayenne n’est pas fondé à opposer celle-ci pour la première fois en appel ;
    Considérant, d’autre part, que la requérante a demandé le 24 août 2010 le versement de la prestation de compensation du handicap depuis septembre 2009, date de son hébergement en établissement conformément selon elle à l’article 4 de la décision du président du conseil général de la Mayenne du 7 juillet 2010 ; que le président du conseil général n’a pas répondu à cette demande ; que dès le 21 septembre 2010 la requérante a saisi la commission départementale d’aide sociale ; qu’en cours d’instance est née une décision implicite de rejet qui est regardée comme déférée à la juridiction ; qu’il résulte de tout ce qui précède que la requête est recevable ;
    Au fond ;
    Considérant que l’article L. 245-11 du code de l’action sociale et des familles prévoit l’attribution de la prestation de compensation du handicap à toutes les personnes handicapées notamment hébergées en établissements social ou médico social ; qu’il renvoie à un décret le soin de « fixer les conditions de son attribution et préciser, le cas échéant, en fonction de la situation de l’intéressé, la réduction qui peut lui être appliquée pendant la durée (...) de l’hébergement ou les modalités de sa suspension » ; que l’article D. 245-74 prévoit à son 2e alinéa que « lorsque la personne handicapée est (...) hébergée dans un établissement social ou médico-social au moment de la demande de la prestation de compensation, la commission (...) décide de l’attribution de l’élément de la prestation de compensation mentionné au 1o de l’article L. 245-3 pour les périodes d’interruption (...) de l’hébergement et fixe le montant journalier correspondant. Le montant journalier réduit servi pendant les périodes (...) d’hébergement est fixé à 10 % de ce montant dans les limites d’un montant journalier minimum et d’un montant journalier maximum fixés par arrêté du ministre chargé des personnes handicapées. » ; que ces dispositions réglementaires n’ont pas eu pour objet et ne pouvaient en toute hypothèse avoir légalement pour effet de prévoir l’absence de versement de la prestation lorsque la personne handicapée est hébergée de façon permanente dans un établissement ; que, dans ce cas, la prestation n’est pas suspendue mais réduite, la dernière phrase précitée du 2e alinéa s’applique directement ; que si l’article L. 245-11 prévoit que « un décret (...) précise, le cas échéant, en fonction de la situation de l’intéressé la réduction qui peut lui être appliquée pendant la durée (...) d’hébergement, (...) » l’emploi du terme « peut » n’a nullement pour objet et pour effet de permettre au président du conseil général de ne pas réduire la prestation au minimum fixé par les dispositions réglementaires et de ne rien verser du tout ; que les dispositions du Règlement départemental d’aide sociale de la Mayenne dont se prévaut le président du conseil général ne pouvaient légalement ajouter aux dispositions législatives et réglementaires précitées dont il résulte que quant à l’hébergement permanent la réduction de la prestation au montant de 10 % de celui qui serait attribué en cas de maintien à domicile est de droit ; que compte tenu du caractère forfaitaire du pourcentage de 10 % du montant de ce que serait la prestation de compensation en cas de sortie de l’établissement applicable du fait de l’absence de sortie durant l’ensemble de jours de présence dans l’établissement, la circonstance que l’assistée ne serait pas en mesure de justifier de l’utilisation de la prestation - en nature - pour le montant qui lui est laissé à des frais de la nature de ceux compensés par ladite prestation assumés en dehors de l’intervention du personnel de l’établissement d’hébergement financé par le tarif demeure sans incidence sur le droit de l’assistée à ce minimum ; qu’ainsi les dispositions du Règlement départemental d’aide sociale de la Mayenne n’ont pu avoir légalement pour objet et pour effet d’ajouter aux dispositions législatives et réglementaires dont la portée a été ci-dessus précisée des dispositions plus restrictives et que le président du conseil général de la Mayenne ne saurait donc utilement s’en prévaloir ; que la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de la Mayenne ayant fixé le montant - en l’espèce « théorique » - de l’élément « aides humaines » de la prestation le président du conseil général était tenu dans le cas où aucun jour de présence hors établissement n’était constaté de verser le minimum de 10 % dans les limites résultant des arrêtés du 28 décembre 2005 pour l’ensemble de la période litigieuse ; que la circonstance que l’équipe technique n’aurait pu visiter un domicile de l’assisté pour l’établissement d’un plan d’aide demeure sans incidence dès lors qu’une décision définitive de la commission fixant le montant de la prestation pour des jours passés hors établissement était intervenue et que le président du conseil général était tenu de l’appliquer pour la fixation du montant minimum réduit de la prestation de 10 % dudit montant « hors établissement » ;
    Considérant que quelle que puisse en être la pertinence les considérations d’opportunité dont se prévaut le président du conseil général au motif que Mlle X... n’assume pas d’autres frais afférents aux aides humaines que ceux correspondant aux interventions du personnel de l’établissement qui sont financées par le tarif ne sauraient être prises en compte, dès lors que, comme il a été dit, le législateur lui-même a clairement prévu l’octroi de la prestation de compensation en établissement sans faire exception pour le cas de séjour permanent dans celui-ci et a renvoyé au pouvoir réglementaire qui a exercé cette compétence le soin de fixer le montant minimum correspondant à la réduction ainsi prévue dans son principe par la loi ;
    Considérant que l’ensemble des moyens de défense tirés d’autres dispositions que celles des articles L. 245-11 et D. 245-74 et notamment de celles de l’article R. 245-42 selon lesquelles « les montants attribués au titre des divers éléments de la prestation de compensation sont déterminés dans la limite des frais supportés par la personne handicapée » sont inopérants dès lors que les dispositions de l’article D. 245-74 prévoyant la fixation à 10 % du montant de la prestation qui serait versée fixé par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées afférent à des jours de présence hors établissement intervenues sur le fondement légal de l’article L. 245-11 qui prévoit pour l’ensemble des personnes hébergées le droit à la prestation de compensation sont des dispositions spéciales qui ne sont d’ailleurs pas contraires aux dispositions réglementaires suscitées et à l’ensemble de celles dont se prévaut le président du conseil général de la Mayenne intervenues dans l’hypothèse où la personne handicapée perçoit la prestation à domicile ; qu’il apparait en réalité que tout en instituant une prestation en nature différente dans sa logique de l’allocation compensatrice pour tierce personne, prestation en espèces, le législateur a néanmoins entendu y compris pour les personnes hébergées en internat pour lesquelles l’aide humaine était de fait dispensée par le personnel de l’établissement financé par le tarif, maintenir à ces personnes un minimum de prestation pour éviter une solution de continuité trop brutale avec le régime antérieur, nonobstant le changement des caractéristiques de l’allocation et le droit d’option ouvert à ceux qui bénéficiaient déjà antérieurement de l’allocation compensatrice pour tierce personne ; que s’il entendait subordonner le versement du minimum en cas de réduction durant une période de présence permanente dans un établissement à la justification de l’effectivité des dépenses correspondant au plan d’aide prévu en fait dans le cas de maintien à domicile il lui appartiendrait de le préciser clairement mais qu’en l’état ce n’est pas le cas,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de la Mayenne en date du 3 décembre 2010, ensemble la décision implicite de rejet opposée à la demande de Mlle X... en date du 24 août 2010 par le président du conseil général de la Mayenne sont annulées.
    Art. 2.  -  Mlle X... est renvoyée devant le président du conseil général de la Mayenne aux fins de liquidation de ses droits à la prestation de compensation du handicap pour le montant réduit de 10 % du montant fixé par la décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de la Mayenne du 19 janvier 2010 à 19 Euro par jour dans la limite du taux maximum fixé par les arrêtés du 28 décembre 2005.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er juillet 2011 où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, Mlle ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 19 juillet 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
            Le président La rapporteure            

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer